1697

Mercure galant, septembre 1697 [tome 9].

2017
Source : Mercure galant, septembre 1697 [tome 9].
Ont participé à cette édition électronique : Nathalie Berton-Blivet (Responsable éditorial), Anne Piéjus (Responsable éditorial), Frédéric Glorieux (Informatique éditoriale) et Vincent Jolivet (Informatique éditoriale).

Mercure galant, septembre 1697 [tome 9]. §

Sonnet sur la prise de Barcelone §

Mercure galant, septembre 1697 [tome 9], p. 7-16.

Il y a long-temps qu’il ne se fait plus de Discours publics, où l’on ne fasse entrer l’Eloge du Roy ; mais si toutes sortes de sujets fournissent l’occasion de parler de ce Monarque, elle ne s’offre jamais plus naturellement que lors qu’on doit prononcer le Panegyrique de S. Loüis. Ainsi, l’on ne doit pas s’étonner si Mr l’Abbé de Beaujeu, dont l’éloquence répond à la profonde érudition, s’est distingué sur cette matiere dans celuy qu’il fit de ce grand Saint le 25. du mois passé, à la priere de Mrs de l’Academie Françoise, qui en solemnisoient la Fête, à leur ordinaire dans, la Chapelle du Louvre. La Messe y fut d’abord celebrée par Mr le Mercier, ancien Curé de S. Germain l’Auxerrois, & pendant ce temps, un fort grand Chœur de Musique chanta le Pseaume, Deus noster refugium & virtus, qui fut écouté avec une entiere satisfaction de l’Assemblée. Ensuite, Mr l’Abbé de Beaujeu monta en Chaire, & prit pour son texte, Neque altitudo, neque profundum nos poterit separare à charitate. Ces paroles luy donnerent lieu de diviser son discours en deux parties. Il fit voir dans la premiere que la haute élevation où la naissance avoit placé S. Loüis, ne l’avoit point empêché de pratiquer les plus étroites maximes des Saints. & dans la seconde, que le malheureux état ou l’avoient réduit les disgraces qui luy arriverent dans la Terre Sainte, n’avoit pû affoiblir en luy le caractere de grandeur & de Majesté, que luy donnoit sa Couronne. Vous jugez bien que toutes les actions de S. Louis ayant un fort grand raport à celles du Roy, un si habile Orateur ne manqua pas de les mettre dans leur jour par des traits vifs & sensibles. Il parla avec force de cette bonté de Pere qui porte depuis si long temps Sa Majesté, à sacrifier son propre repos pour procurer celui de ses Peuples, sans se rebuter des longs refus que ses Ennemis ont fait de la paix, & qui n’ont servi qu’à luy acquerir de nouveaux triomphes par des Conquestes, qui ajoûteroient un éclat nouveau à sa gloire, si elle en pouvoit encore recevoir. Avec combien de délicatesse peignit-il les avantages que reçoit la France de la prise de Barcelone, & de l’expedition de Cartagene, sans avoir mêlé dans son discours le nom de ces Places ? Tout le monde en témoigna une satisfaction extraordinaire, & ceux dont son Auditoire avoit esté composé, ayant fait place aux Religieux Carmes du grand Convent, ils vinrent en procession dans cette même Chapelle, ainsi qu’ils font tous les ans, accompagnez de Mr Bosc, Prevost des Marchands, des Echevins, & autres Officiers de Ville. La Messe de Saint Roch y fut chantée solemnellement, pour demander à Dieu par l’intercession de ce Saint, selon le vœu qui en a esté fait par la Ville, la conservation de la santé du Roy, & de toute la Famille Royale. S.A. Monsieur le Duc du Maine y rendit les Pains benits avec beaucoup de magnificence au son des Tambours, des Tymbales, des Trompettes & des Hautbois, & l’on distribua par son ordre une grande somme d’argent à tous les Pauvres qui s’y rencontrerent.

L’aprés dînée, l’Academie Françoise s’étant assemblée extraordinairement, on leut les piéces de Prose & de Vers, qui avoient remporté les prix au jugement de la Compagnie. Le premier fut donné à Mr l’Abbé Mongin, Bachelier en Theologie, & celuy de Poësie à Mademoiselle Bernard, qui l’avoit déja remporté deux fois. Cette seance finit par la lecture d’un Sonnet de Mr Boyer, qui fut extrêmement applaudy. Je vous l’envoye.

SUR LA PRISE
DE BARCELONE.

Sur le hardy projet d’un Siege si vanté,
Une jalouse erreur en vain s’est répanduë,
Fiers Ennemis, voyez vôtre témerité
Par un succés heureux pleinement confonduë.
***
Le nombre & la valeur ont longtemps résisté ;
Nulle Place, jamais ne fut mieux deffenduë,
VENDOSME a convaincu vôtre incredulité,
Faux Prophetes, enfin la Place s’est renduë.
***
Du Monarque François respectez l’Ascendant.
Des regles & de l’art son sort indépendant
Force tous les Remparts, rompt toutes les Barrieres.
***
Vous qui jugez si mal de ses faits inoüis,
Ne mesurez jamais sur vos courtes Lumieres.
Jusques où peut aller le destin de LOUIS.

[Chapitre des Recolets de Guyenne, tenu à Perigueux] §

Mercure galant, septembre 1697 [tome 9], p. 26-40.

Le 4. du mois passé les Recolets de Guyenne tinrent leur Chapitre dans leur Convent de Perigueux avec toute la magnificence qui pouvoit s’accommoder avec leur estat. Les élections se firent le jour précedent avec tant de connoissance, & une si parfaite uniformité, que tous les Vocaux, sans en excepter un seul, allerent du premier scrutin à tous les Sujets sur qui le sort tomba. Le Pere Bruno Ranoüil, tres-distingué par son esprit, par sa doctrine, par sa pieté, & par sa douceur, fut élû Provincial. Il n'eut pas seulement les suffrages de tous les Capitulaires, il eut encore les vœux de toute la Ville, & de tout le Perigord, qui donna mille marques de joye à la nouvelle de la promotion de cet excellent Religieux qu'il estime & qu'il cherit. Le Pere Innocent Micault, de la Province de Paris, Commissaire General sur celle de Guyenne, homme d'une prudence & d'une exprerience consommée, & qui a exercé la même Charge avec beaucoup d'honneur & d'approbation en diverses Provinces de Recolets du Royaume, presida à l'Assemblée. Le lendemain des élections, on ouvrit la ceremonie par une procession solenelle que les Vocaux firent à l’Eglise Catherine de Saint Front. Huit d'entr'eux, revétus d'Aubes & de Dalmatiques, portoient le corps de sainte Fauste, Vierge & Martire, tiré depuis peu du Cimetiere de Callipode, & donné par Mr le Cardinal d'Estrées au P. Jerôme Ranoüil, Deffiniteur General de l'Ordre de Saint François, pour les Recolets, & ci-devant Agent general du même Ordre pour les Religieux de France à la Cour de Rome. Mr l'Evêque de Perigueux, qui les attendoit avec son Chapître, accompagné de Mr l'Evêque de Nantes l'ancien,celebra la Messe, pendant quoy Mrs du Presidial & de la Maison de Ville, les Communautez Religieuses & les Compagnies de Penitens se rendirent auprés de luy. La Messe finie, une excellente Musique invita tous ces Corps Ecclesiastiques & Seculiers, à continuër la Procession. On leva au carillon toutes les Cloches, la Relique de la Sainte, qui fut conduite au travers d’une foule extraordinaire de peuple de la Ville & de la campagne, que la Fête avoit attirée, par les principales ruës qu'on avoit eu soin de tapisser & de Joncher de fleurs & de verdure, aux Eglises les plus considerables.

[Suit la description de la procession et du repas offert aux membres du clergé par Mr de Perigueux.]

[Epitaphes de feu Mr de Santeul, avec la Traduction de son dernier Ouvrage] §

Mercure galant, septembre 1697 [tome 9], p. 40-58.

Feu Mr de Santeul, Chanoine Regulier de S. Victor, avoit rendu son nom si fameux par son beau genie, & par ce feu d’esprit qu’il faisoit paroistre dans toutes les choses qu’il disoit, que je crois vous faire plaisir en vous envoyant les Vers que Mr Moreau, Avocat General de la Chambre des Comptes de Dijon, a faits sur sa mort. Il avoit fait un Poëme, intitulé Sanctolius Burgundus, par lequel il reconnoissoit en quelque façon la Bourgogne pour sa patrie. C’est ce qui est marqué dans cette premiere Epigramme.

Santeul est mort, & par tout regretté,
 Santeul en tous lieux si vanté,
A qui fut la Bourgogne & si bonne & si chere.
Il s’estoit avoüé pour son fils en effet,
Helas ! n’est-il point mort au sein de cette mere,
 Pour avoir trop pris de son fait ?

En voici une autre adressée à Mrs de S. Victor, sur le transport du corps de Mr de Santeul qu’ils veulent revendiquer.

Vous demandez Santeul avec impatience.
 Sans craindre aucune résistance.
Vous pouvez l’emporter ; il nous importe peu
Que son corps nous demeure ou qu’on le vienne prendre.
 Il nous a laissé tout son feu,
 Et nous vous en laissons la cendre.

L’Epigramme qui suit a été faite sur ce que Mr de Santeul est mort, dans le temps que la Province luy faisoit un present de Vin.

Quoi Santeul parmi nous expire,
Dans le temps qu’il nous charme, & que chacun l’admire.
 Faut-il par un cruel destin,
Qu’il change en un moment nos plaisirs en allarmes,
 Et que nous lui versions des larmes,
 Au lieu de lui verser du Vin ?

EPITAPHE.

Santeul, dont le genie & si rare & si beau,
A toûjours fait l’honneur des Filles de Memoire,
Santeul qui par ses Vers s’est acquis tant de gloire,
N’est plus qu’un peu de poudre en ce triste tombeau.
 A la Cour d’un Auguste Prince,
Que son esprit charmoit & qui l’aima toûjours,
Et comblé des honneurs d’une grande Province,
 Un prompt trépas finit ses jours.
Si le dehors en lui fit voir quelque foiblesse.
 Tandis qu’il vécut icy bas,
 Le fond du cœur n’en étoit pas,
Et qui sçût le connoitre, en connut la sagesse.
Mais ces Hymnes si beaux & par tout admirez,
Qu’à la gloire des Saints sa Plume a consacrez,
Les remords si touchans d’une ame repentante,
 Que dans sa douleur violente,
 Il a fait paroistre à nos yeux,
Doivent estre pour nous une marque assurée.
 Que par là son ame épurée,
 A repris son vol vers les Cieux.

Mr de Santeul à tellement excellé dans les Vers Latins, que quoy que je vous en envoye rarement en cette Langue, à moins qu’ils ne soient en tres-petit nombre, je ne puis m’empêcher de vous faire part des deux Epitaphes qui suivent. L’une a esté faite par Mr de la Monnoye, dont la réputation vous est si connuë, & l’autre par Mr Mauny de Percey, Conseiller à Langres.

SANTOLII EPITAPHIUM.

Sydereas, ævi nundom maturus, ad aras,
 Cælo Sanctolides hospite dignus abit,
Olli certatim properant occurrere Divi,
 Præconique ferunt oscula mille suo.
Aligeri pulsant cytharas, & carmina quærunt,
 Vatis in adventu quæ meliora canant.
Parcite, cælestes, nova quærere carmina, dixit
 Rex Superûm, decet hic Santoliana cani.
Audiat æthereos qui condidit, audiat Hymnos ;
 Hæc aliis numquam personet aula modis.

ALIUD.

Santolium mater Lutetia jactat alumnum,
 Atque suo vatem Sequana jure petit.
Divio Burgundum, fuerit quamquam extera tellus,
 Sponte suum, jam tunc vindicat alma parens.
Inter Reginas Urbes hoc jurgium, Homero
 Vatem æquans, hujus tollit ad astra decus,
Ut litem solvat Superum Pater, aspice Cœlum,
 Santoli, ait, patriam quæris, at ista tua est.
Candidus insuetum sic scandit limen olympi,
 Sub pedibusque simul nubila & Astra videt.
Sublimem sedes animam servate beatæ,
 Divio, habes cineres, Sequana, carmen habes.
Tu, pia mater, habes Hymnos, Ecclesia, cultos,
Queis divum laudes, sanctaque gesta canis.

Le dernier ouvrage de Mr de Santeul, a été Pluto moriens. En voicy la traduction en vers François. Elle est de Mr du Castelet, Gentilhomme de Languedoc, tres habile Mathematicien.

LA DESTINÉE DU
petit Chien Pluton & ses dernieres paroles, adressées à son Altesse Serenissime Mademoiselle de Condé.

Ma Lettre n’a donc pu fléchir vôtre rigueur,
Et je n’ay pas sçu l’Art de toucher vôtre cœur ?
Cruelle, l’amitié que vous m’aviez jurée,
S’est donc entierement loin de vous retirée ?
De vôtre petit Chien vous n’avez plus de soin,
Et vous m’abandonnez dans mon plus grand besoin ;
Moy, vôtre cher, l’objet de vos tendresses,
A qui vos belles mains faisoient tant de carresses,
Par un fatal revers je languis aujourd’huy,
Absent de vostre Cour, pauvre, nud, sans appuy.
La plainte à mes pareils est toujours mal-seante,
Nous sentons à la joye une invincible pente,
Et prests à badiner en tout temps, en tous lieux,
Nous ne sommes jamais à personne ennuyeux.
La nature nous porte à folâtrer sans cesse,
Nous sçavons prodiguer caresse sur caresse ;
Nous varions toujours les divertissemens,
Et si nous paroissons pendant quelques momens
Saisis d’un fier dépit, transportez de colere,
Ces coleres ne sont que feintes pour mieux plaire,
Et même ces transports qui ne durent que peu,
Se terminent toujours par un aimable jeu.
J’avois sçu m’acquerir, adorable Princesse,
Par de si doux moyens toute vostre tendresse.
De vous baiser jamais vous ne m’aviez veu las,
Et de me rebaiser, vous ne vous lassiez pas.
Couché sur vostre sein, je faisois vos délices,
Pour vous plaire, j’usois de tous mes artifices.
Lors que pour mieux avoir des passe-temps si doux,
Vous vouliez me tenir long-temps auprés de vous,
Il ne vous faloit pas prendre la moindre peine,
Vous n’aviez pas besoin du secours d’une chaîne,
Et vostre aimable voix estoit le seul attrait,
Qui m’entraînoit vers vous par un charme secret.
Quelquefois je feignois d’aller prendre la fuite,
Mais sur vostre beau sein je revenois bien vite,
Et pour lors plus serré dans vos embrassemens,
Je sentois redoubler vos doux empressemens.
Ces retours amoureux, ces petites malices,
Me rendant plus aimable, augmentoient vos délices.
Rien n’égaloit alors vostre tendre amitié.
De vos plaisirs, souvent je goûtois la moitié.
Couché dans vostre lit, mangeant à vostre table,
Vous vouliez que de vous je fusse inseparable.
Que n’avez-vous toujours le même sentiment,
Et quel est le motif de vostre changement ?
Ce n’est pas, je l’avoüe, une faute legere,
D’avoir eu le malheur de pouvoir vous déplaire,
C’est-là tout mon forfait, mais il surpasse aussi,
Tous ceux que l’on a pu commettre jusqu’icy,
J’espere toutefois que contre cette offense
Vous laisserez, Princesse, agir vôtre clemence.
Aussi chacun ne voit qu’agrémens, que douceurs,
Sur vostre beau visage, ainsi que dans vos mœurs.
Ces douceurs dans mon ame ont détruit la rudesse,
Et la ferocité de ceux de mon espece,
Et depuis l’heureux temps que je suis prés de vous,
J’ay pris un naturel sensible, tendre & doux.
C’est par là que j’ay sçu dans le monde me faire
Avec tant de succés l’art singulier de plaire,
Condé m’aimoit, Condé de mes maux a pitié,
On ne peut priser trop une telle amitié.
Ce destin en bon-heur me fait passer sans doute,
Le sort du Chien qui luit dans la celeste route.
On m’a de plus appris que Galatée en pleurs,
Paroist dans vostre Cour sensible à mes malheurs.
Elle que j’ay toujours si tendrement cherie,
Ne peut qu’en gemissant, voir tant de barbarie.
Vostre seul cœur pour moy, n’est qu’un cœur de rocher,
Et mes maux accablans ne sçauroient vous toucher ?
Je suis entre des chiens affamez, dont la rage
Ne respire que sang, qu’horreur & que carnage.
Je ne puis soustenir leurs regards furieux.
Contr’eux que puis-je seul dans ces sauvages lieux ?
C’en est fait, & je vais être leur nourriture,
Ma tendre chair leur sert de vivante pâture,
Et mes membres déja déchirez par morceaux,
Craquettent sous les dents de ces cruels bourreaux.
Ma peau restera seule aprés ce sort funeste.
Princesse, en expirant, je vous offre ce reste.
Acceptez cette peau du malheureux Pluton,
Elle vous servira d’un commode manchon.
Par lui contre le froid vos mains en assûrance
Braveront de l’Hiver toute la violence,
Et dans cette dépoüille elles rencontreront
Les feux de mon amour qui sans cesse vivront.
Puis que vous toucherez souvent un si cher gage,
Le sort me rend heureux, loin de me faire outrage.
Cet objet rappellant vostre premier amour,
Vous forcera sans doute à dire quelque jour,
Mon cher Pluton, qui m’as si souvent divertie,
Toy que j’ay tant aimé, toy qui m’as tant cherie,
Tu n’es pas tout-à-fait separé d’avec moy,
Et je porte en mes bras ce qui reste de toy.
De grace, faites donc qu’un tel present, Princesse,
Dans vostre souvenir, me conserve sans cesse.
Ainsi parla Pluton au moment de sa mort ;
Il estoit digne helas ! d’un moins tragique sort.

[Epistre en Vers] §

Mercure galant, septembre 1697 [tome 9], p. 109-116.

L’Epistre qui suit est de Mr de Vin, dont je vous ay déja envoyé divers Ouvrages.

A MADEMOISELLE T***.
Sur son Voyage du Chaudret.

 Du vieux Medecin de Chaudret
Vous consultez en vain l’étonnante doctrine :
Pour guerir vostre teint il n’a point de secret,
 Ne vous y trompez pas, Corinne.
Ses remedes sur vous se verront impuissans.
Pour guerir vostre mal il faudroit en connoistre
La cause radicale, & c’est ce qui, peut-estre,
Echaperoit toujours aux yeux les plus perçans.
 Selon ce qu’on vient de me dire,
Comme vous l’ignorez, je veux vous en instruire,
 Et par là de vostre soucy
Faire cesser le cours, écoutez, la voicy.
Un Dieu, Corinne, un Dieu, je l’ay sceu de luy-même,
Un Dieu, dis-je, jaloux de son pouvoir suprême,
J’entens l’Amour, de Venus le cher Fils,
 Choqué des insultans mépris
Que dans vos premiers ans vous faisiez de ses armes,
De vostre cœur enfin sourd aux tendres alarmes
 Voulut se vanger sur vos lis.
Vous n’excitiez pour lors que soupirs & que larmes,
 Et mille Amans brûloient pour vous :
Mais qui l’auroit pensé ? Trop fiere de vos charmes,
 Vous les laissiez languir à vos genoux.
Ce Dieu donc irrité de cette humeur cruelle,
Quoy, dit-il, son orgueil repousse tous mes traits ?
 Quoy, je verray cette Rebelle
Seule icy de son coeur me refuser l’accés ?
 Moy par qui Jupiter soupire,
Moy craint, moy respecté par le vaste Univers,
 Moy qui jusqu’au fond des Enfers
Ay vû mesme Pluton soumis à mon Empire,
 Et se faire honneur de mes fers ?
 Non, non, il y va de ma gloire,
Je ne souffriray point qu’on m’ose resister,
 Ny qu’à mes yeux on aille se vanter
De m’avoir un moment disputé la victoire,
Destiné que je suis à toujours l’emporter,
Il faut de cet affront effacer la memoire,
 Et l’on sçaura peut-estre un jour
Que l’on n’offense pas impunément l’Amour.
De toutes ses froideurs punissons l’inhumaine.
Otons-luy la beauté dont je la vois si vaine,
 Et puis qu’à ma confusion,
Quel que soit contre luy le trait que je décoche,
 Je ne puis sur son cœur de roche
 Faire la moindre impression,
 Attaquons-la, s’il est possible,
Par un autre costé qui luy soit plus sensible.
 Alors vous voyant au miroir
Applaudir à vos yeux, & vous plaire à vous voir,
 Il couvrit tout vostre visage
De ces tristes rougeurs, qui d’une autre moins sage
 Auroient causé de desespoir.
 Mais en Fille spirituelle,
Si son dépit, ou plutost sa fureur,
De vostre teint charmant a puni la blancheur,
 Consolez-vous d’estre moins belle.
Quand on a de l’esprit, c’est un foible malheur.
Il nous donne un plaisir & solide & durable,
Mais pour un temps si court la beauté rend aimable,
 Qu’elle passe comme une fleur,
 Que dans moins d’une matinée
L’Astre brillant du jour voit naissante & fanée.
 Ainsi la perdre sans douleur
 Est l’effet d’une ame bien faite,
Qui, bien loin de s’en faire un suprême bonheur,
De sa droite raison doit estre satisfaite.
 Pour peu, Corinne, cependant
 Que vous en regrettiez la perte,
Vous pourrez, puis qu’enfin sa cause est découverte,
 La reparer eu un moment.
De revoir tous vos lis vous estes la maistresse,
Il ne faut pour cela qu’un peu moins de rigueur.
Aimez donc au plus viste, & par vostre tendresse
Appaisez de vos maux l’impetueux Auteur,
Tout irrité qu’il est, il n’est pas implacable,
Je le sçay par moy-mesme ; ainsi dépêchez-vous
 De calmer le juste couroux
De ce Dieu que vos voeux trouveront exorable,
Et l’encens à la main courant à ses Autels,
 Honorez-en des Immortels
Le plus vindicatif & le plus redoutable.

[Ce qui s’est passé au sujet de l’établissement de l’Hopital de la Ville de Clamecy] §

Mercure galant, septembre 1697 [tome 9], p. 116-129.

[L’evêque de d’Auxerre fit réunir, le 31 août, les Maladeries des environs de Clamecy pour parvenir à l’établissement d’un Hôpital suivant les lettres patentes de Louis XIV d’avril 1697 [tome 4], et en vertu de l’Edit de mars 1693.]

[...] Le lendemain [de son arrivée], qui estoit le Dimanche Ir. jour de ce mois, ce Prelat alla dire la Messe sur les 8. heures, & fut complimenté à la porte de l’Eglise par Mr de l’Isle, Chantre & Curé de Clamecy. Il donna le sacrement de Confirmation jusqu’à midy, & à une heure il assista à la Prédication du méme Pere Durand, & ensuite à Vêpres, à l’issuë desquelles il fit chanter le Te Deum en action de graces de la Prise de Barcelone. [...]

[Suit la description des cérémonies marquant la visite de l’évêque dans la ville de Clamecy et ses environs (feux de Joie, processions, célébrations religieuses).]

[Promenade des Tuileries] §

Mercure galant, septembre 1697 [tome 9], p. 211-213.

Vous me demandez ce que c'est que La Promenade des Tuileries, qui fait bruit dans vôtre Province. Elle fait partie de l’agreable Livre dont je vous parlay le mois passé, sous le titre de Avantures & Lettres Galantes. Vous avez interest à soûtenir la reputation qu’il s’est acquise, puisqu’il vous est dédié. L’Epître estant adressée au beau Sexe, ce ne peut estre qu’à celles qui vous ressemblent. Le Medecin de Chaudrais, les Vandanges de Suténes, la Foire de Bezons, le Bois de Boulogne, les Bains de la Porte S. Bernard, le Palais, le Bal, l’Opera, la Comedie, & divers autres lieux, ont fait naistre les Avantures qui y sont rapportées. Je vous ay déja dit que tout cela est accompagné de Lettres & de Réponses fort tendres & fort passionnées. Outre la Promenade des Tuileries, dont j’avois oublié de vous parler, on voit dans ce même Livre le fameux démêlé du Poëte Latinus, & quantité d’autres particularitez tres-agreables, & tres-bien écrites. Il se vend au Palais chez le Sr Guillaume de Luynes, & la Veuve Gabriel Quinet, & chez l’Auteur, ruë des Sept-Voyes, Mont S. Hilaire, vis-à-vis le College de la Mercy, dans la maison de Mr Thibault.

[Lettre de Monsieur de Poissi à Monsieur Bosquillon]* §

Mercure galant, septembre 1697 [tome 9], p. 213-221.

Il y a deux ou trois mois que je vous parlay de quatre Discours de la Componction par Saint Ephrem Moine Syrien, que Mr Bosquillon, de l’Academie de Soissons a traduits en nôtre langue. Cette traduction est fort estimée, & a donné lieu à la Lettre dont je vous envoye une copie. Elle est de Mr de Poissi.

A Mr BOSQUILLON.

Votre Saint Ephrem, Monsieur, a bien fait du chemin depuis que vous m’avez donné sa connoissance. On a beau me dire que l’habit ne fait pas le Moine. Ce nouveau venu n’a pas esté plûtost habillé à la Françoise, qu’il a eu entrée chez les Grands. On ne voit que luy à la Cour. Il se fourre par tour, jusqu’à la toilette des Dames. La Belle * * ayant lû vôtre incomparable Ouvrage, le donne à Madame sa Mere, qui est d’un âge & d’un caractere à trouver que les plaisirs sont fades. Il me retombe entre les mains. Je le fais voir à mes illustres amies. Je l’envoye à Mademoiselle de la S * * avec qui j’estois un peu broüillé pour certaines raisons, raisons qui demandent de la Componction. Comme cette charmante Demoiselle ne cherche que les moyens de se vanger à quelque prix que ce soit ; J’ay lû avec un plaisir extrême, m’a-t-elle dit tantôt, le beau Livre dont l’on vous a fait present ; le don est trop considerable pour ne pas tirer de vôtre cervelle quelque chose à la loüange & de l’ouvrage & de l’Auteur. Les Bouts rimez sont vôtre fort, & je ne trouve personne en France qui l’emporte sur vous pour l’Impromptu.

En vain j’ay voulu l’asseurer du contraire. Point d’excuse avec moy, a-t-elle continué, Je suis vive, il faut me contenter. Laquais, vite une écritoire. Aussitost dit, aussitost fait. Bibus, omnibus, rem, quamobrem se sont presentez d’abord a mes yeux ; jugez de ma Surprise. J’ay esté fort étonné de me rencontrer avec ces gens inconnus. Ephrem qui les suivoit en queuë m’a rassuré. Ma peur cessée, j’ay mis les armes à la main. Ma Muse jusqu’icy Pucelle pour vous, Monsieur, vient d’accoucher d’un petit Impromptu, qui ne vaut pas grand argent. Que dis-je ? Il vaudra toûjours beaucoup si vous regardez de bon œil celuy qui est plus parfaitement que personne du monde, Monsieur, Vôtre, &c.

Voicy l’Impromptu de Mr
de Poissy.

Tu n’es pas, Bosquillon, un Auteur de bibus.
Par tes divins Ecrits tu sçais plaire omnibus
A toy, pour le bon goust, personne ne se frote.
Mais pourquoy ce discours ? ça, qu’on réponde ad rem.
Rare & charmant Esprit, apprens moy quamobrem,
Le beau Sexe & la Cour, Nation peu devote,
Lisent aujourd’huy S. Ephreim.

Réponse de Monsieur Bosquillon.

Il faut avoir autant d’esprit que vous en avez, Monsieur, pour unir les choses du monde les plus opposées, sans que cet assemblage ait rien de choquant, & de maniere qu’il fasse même un effet tres-agreable. Cet art de badiner ingenieusement & avec politesse, que si peu de personnes sçavent, paroît vous estre naturel. Le billet que je reçeus hier de vôtre part, Monsieur, est plein d’un enjoüement délicat, & d’un sel fin qui ne peut manquer d’estre du goust de tous les bons connoisseurs. Je souhaite que mon Livre touche, autant que ce billet plaît. Si cela arrive, je ne le croiray pas indigne de vos loüanges dont je connois tout le prix. Je suis, Monsieur, plus que personne, Vôtre, &c.

Sur la prise de Barcelonne §

Mercure galant, septembre 1697 [tome 9], p. 221-228.

Voicy deux Sonnets que fit l’illustre Mademoiselle l’Heritier, si-tost qu’on eut appris à Paris la derniere conqueste des armes du Roy.

SUR LA PRISE
de Barcelonne.

Aprés cent glorieux exploits,
La conqueste de Barcelonne
Par un nouveau Laurier couronne
Le front du plus puissant des Rois.
 Sans cesse guidé par la gloire
Il attache à ses pas la rapide Victoire.
 Ses Ennemis audacieux,
Qui refusoient la Paix que sa main bien-faisante
A voulu redonner à l’Europe tremblante,
Le verront mille fois triompher à leurs yeux.
De leur Ligue aux abois toujours victorieux,
On verra ce Heros, le plus grand de la terre,
En leur faisant sentir les terribles effets
 De la plus foudroyante guerre,
Les forcer d’accepter les douceurs de la Paix.

A Mr LE DUC
DE VENDOSME.

Prince, quelle gloire pour vous
 Malgré sa puissante barriere,
Malgré sa résistance fiere,
Barcelonne aujourd’huy succombe sous vos coups.
Vostre valeur, vostre conduite
Ont éclaté cent fois sur ces fameux ramparts.
 Parmy les plus affreux hazards
Vous gardez toujours l’air qu’ont les Heros d’élite.
On ne doit point s’en étonner.
L’exemple merveilleux que Loüis sçait donner,
 Vous fit toujours chercher la gloire.
 Vous sortez d’un illustre Sang
Qui répondit sans cesse à l’éclat de son rang,
Et fut dans tous les temps cheri de la Victoire.
Brillant au champ de Mars, brillant au Cabinet,
Comme avec un goust fin vous décidez d’Horace,
Aussi tranquillement vous prenez une Place
Que vous chassez un Cerf dans la forest d’Anet.

Le Sonnet qui suit sur les Conquestes de cette derniere Campagne, est de Mr Maugard le jeune.

Faire éclater son nom par mille exploits divers,
Combattre en même temps & la Flandre & l’Espagne,
Prendre Ath & Barcelone en moins d’une Campagne,
Estre vainqueur encor jusqu’au delà des mers.
***
Des Peuples attentifs voir tous les yeux ouverts
Contempler un bonheur que le Ciel accompagne,
Rendre vains les efforts de la fiere Allemagne,
Et vouloir redonner le calme à l’Univers.
***
Ce sont-là ces hauts faits d’une immortelle gloire
Que Louis destinoit au Temple de memoire ;
Son grand cœur n’a plus rien qu’il veüille surmonter.
***
Faut-il donc s’étonner si sa bonté n’aspire
Qu’à donner un repos que l’Europe desire ?
La Paix est le seul bien qui le puisse flater.

Cet autre Sonnet est du même Mr Maugard. Il suppose que le Gouverneur de Barcelone parle au Viceroy de Catalogne.

D’où provient ce grand bruit, & d’où part tant d’éclat ?
Viceroy, les François sont devant Barcelonne.
J’apperçois leurs Drapeaux, déja leur Canon tonne,
Pour les bien recevoir mettons-nous en estat.
***
Viens icy ; ne va pas essuyer un combat,
Ny t’approcher d’un Camp où Vendosme en personne
Commande en la Tranchée, agit, dispose, ordonne,
Et fait les fonctions de Chef & de Soldat.
***
Dussay-je estre poltron, & passer pour un traistre,
Je sçay quel est Vendosme, & je connois son Maistre.
Quel puissant nom m’impose une severe loy ?
***
Je fremis, mon cœur sent de secretes alarmes,
Qui me disent tout bas, Corsana, rens les armes,
C’est un Roy qui t’attaque, & Louis est ce Roy.

[Divertissement donné à Son Altesse Monsieur le Duc de Chartres] §

Mercure galant, septembre 1697 [tome 9], p. 228-234.

Le divertissement dont vous allez lire les paroles, a fait partie d’une Fête que Mr le Duc de Sully donna il y a quelques temps à S.A.R. Monsieur le Duc de Chartres. Il a esté composé par l’Auteur de l’Europe Galante, qui est un Balet que l’on propose pour cet hiver, & dont on dit beaucoup de bien dans le monde. Vous jugerez par cette pièce des esperances que l’on doit concevoir de l’Auteur.

LA NUIT.

Sommeil, qui me suivez sans cesse,
Eloignez de ces lieux vos languissans pavots.
J’y veux voir regner l’allegresse ;
Il faut offrir aux voeux d’un auguste Heros
D’autres charmes que le repos.
***
Que près de luy les Jeux viennent se rendre ;
Qu’Apollon avec eux s’empresse de descendre,
Que ses Accords les plus harmonieux
Répandent dans les airs un brame aimable & tendre.
Pour servir un Heros, & pour plaire à ses yeux,
Tout doit suivre l’ardeur du Maistre de ces lieux.

APOLLON.

Près d’un Prince charmant le zele icy m’attire,
Il se plaist à me voir accompagner ses pas.
Tâchons encore que ma Lire
Ait pour luy de nouveaux appas,
Que pour quelques momens il perde la memoire
De ses heroïques desirs.
Le jour est le temps de la gloire,
La nuît est celuy des plaisirs.

LA NUIT & APOLLON.

Que pour quelques momens il perde la memoire
De ses heroïques desirs.
Le jour est le temps de la gloire,
La nuit est celuy des plaisirs.

MARS.

C’est vainement qu’en ces lieux on s’empresse
De flatter les desirs d’un aimable vainqueur.
Est-ce par des chants de tendresse
Qu’on pretend charmer son grand coeur ?
Ses jeux sont les combats, les perils, les alarmes ;
Il prodigue son Sang, tout auguste qu’il est.
Le bruit & le fracas de armes
Sont le seul concert qui luy plaist.

APOLLON.

Quittez l’erreur où vostre esprit s’engage.
Il est vray que souvent les Favoris de Mars
N’ont pour toute vertu qu’un superbe courage,
Et qu’un fier mépris des beaux Arts.
Mais ce heros regle mieux son audace ;
Il ne méprise point ma voix,
Et c’est sur le Parnasse
Qu’il vient se délasser de ses nobles exploits.
Que pour le couronner chacun de nous s’apreste.
Quels jours sont plus beaux que les siens ?
Unissons sur sa teste
Vos lauriers & les miens.

MARS & APOLLON ensemble.

Que pour le couronner chacun de nous s’apreste.
Quels jours sont plus beaux que les siens ?
Unissons sur sa teste
Vos lauriers & les miens.

APOLLON.

Jeux, accourez dans ces retraites,
Chassez en les tristes langueurs,
Que les ris & les chansonettes,
Portent le plaisir dans les coeurs.

LA NUIT.

Les plaisirs sont icy, que chacun en profite,
Un Prince en ces beaux lieux les amene aujourd’huy.
Ils y sont entrez à la suite,
Ils en sortiront avec luy.

MARS, APOLLON, ET LA NUIT.

Que pour quelques momens il perde de la memoire
De ses heroïques desirs.
Le jour est le temps de la gloire,
La nuit est celuy des plaisirs.

[Divertissement donné à Thoulouse] §

Mercure galant, septembre 1697 [tome 9], p. 234-237.

Le 20. du mois passé les Peres de la Congregation de la Doctrine Chrêtrienne du premier College de Ville de Toulouse, dit Lesquille, firent representer une Tragedie precedée d’un Prologue, & accompagnée de Chants & de Ballets pour la distribution des Prix, que Messieurs les Maires & Capitoules ont accoutûmé de donner tous les ans aux Ecoliers de Rhetorique, Ceremonie d’autant plus singuliere à Toulouse qu’elle se fait dans ce seul College. Il y eut un grand concours de dames & de personnes qualifiées de la Ville. Mr Daspe, Conseiller au parlement & Maire s’y rendit en Robe rouge, accompagné des huits Capitoules revêtus leurs Chaperons, Habits, & Robes de Ceremonie, estant tous partis de l’Hôtel de Ville, au son des Haut-bois & fanfares des Trompettes, escortez de cent hommes d’armes, garde ordinaire de la Maison de Ville, & qui faisoient dans leur marche des salves & des décharges de leur Mousqueterie, & à leur tête estoient les Officiers qui les commandent. Mr le Maire qui n'a pas moins à cœur l'exercice des belles Lettres que les affaires du Gouvernement de la Ville & de la Police, aprés s'estre donné la peine d'examiner luy même les pieces de Prose & de Poësie, dont il avoit fait donner les sujets, voulut encore distribuer les Prix. Mr de Boyer, Fils de Mr de Boyer, Syndic General, de la Province de Languedoc, qui eut le premier de l'Eloquence, consistant à un bonnet & à quelques Livres choisis, se signala par la bonne grace avec laquelle il fit le compliment à Ms les Maire & Capitouls. La Tragedie fut representée avec tout l’ordre que l’on pouvoit souhaiter, & receut de grands applaudissemens de l’Assemblée.

[Réjoüissances faites à Laulnay] §

Mercure galant, septembre 1697 [tome 9], p. 257-261.

Mr Bertrand, Receveur general de la Commanderie de Laulnay, appartenant à Mr le Grand-Prieur de France, n’eut pas plûtost sceu la défaite du Viceroy de Catalogne, par l’Armée du Roy que commandoit Mr le Duc de Vendôme, qu’il fit charger trois petites pieces de campagne, qui sont au Chasteau de cette Commanderie, & en fit faire plusieurs décharges toute la nuit, avec de grandes Illuminations au Chasteau. Ce ne fut là que le prélude de ce qu’il fit pour la prise de Barcelone. Il fit avertir tous les Habitans des Villages dépendans de la Commanderie de Laulnay, de se mettre sous les armes, pour assister au Te Deum qu’il vouloit faire chanter ; & le Dimanche 15. de ce mois, il envoya deux Tambours à chaque village, & fit distribuer de la poudre à toute la Milice, conduite par les officiers du lieu, qui se rendirent en bon ordre à l’Eglise de S. Martin, Paroisse de Laulnay. Toutes les Compagnies rangées autour de l’Eglise, firent leurs déchargent & le Te Deum ayant esté chanté, Mr le Chevalier de Fleurigny, monté à l’avantage, marcha à la teste de toute cette Milice, qui fut suivie de plusieurs mulets chargez de provision de bouche pour la regaler.

Air nouveau §

Mercure galant, septembre 1697 [tome 9], p. 278.

Vous estes tres-bonne Connoisseuse ; ainsi je ne vous dis rien de l'Air que je vous envoye.

AIR NOUVEAU.

L’Air doit regarder la page 278.
C'est en vain que je suis fidelle,
Et que je languis nuit & jour,
Celle que j'aime est jeune & belle,
Et pour l'engager à mon tour,
Il faudroit que le Dieu d'Amour
Me rendist jeune & beau comme elle.
C'est en vain que je suis fidelle,
Et que je languis nuit & jour.
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