Claude-Joseph Drioux

1850

Précis élémentaire de mythologie

2017
Drioux, Claude-Joseph (1820-1898), Précis élémentaire de mythologie grecque, romaine, indienne, persane, égyptienne, gauloise et scandinave, à l’usage des institutions, des pensions de demoiselles, et des autres établissements d’instruction publique, par M. l’abbé Drioux, professeur au petit séminaire de Langres, membre de la Société littéraire de l’Université catholique de Louvain, auteur du Cours complet d’Histoire, Tournai, Typ. de J. Casterman et fils, 1850, 219 p. Source : Googlehttps://books.google.fr/books?id=6_xAAAAAcAAJ livres.
Ont participé à cette édition électronique : Nejla Midassi (OCR, Stylage sémantique ) et Diego Pellizzari (Encodage TEI).

Avertissement de la première édition. §

La mythologie n’est plus mise entre les mains des enfants dans un certain nombre de maisons d’éducation. Nous en connaissons les raisons. Assurément elles sont assez graves pour qu’on ne juge pas trop sévèrement cette mesure.

Cependant il nous semble qu’une pareille suppression est regrettable, parce qu’elle laisse dans l’ensemble des études une véritable lacune. Puisque la littérature des Grecs et des Romains défraye presque entièrement nos études classiques, il est très-important que les jeunes gens sachent la religion de ces peuples, pour comprendre leurs poëtes et saisir une foule d’allusions qu’ils rencontrent dans leurs orateurs et leurs historiens.

Au lieu de supprimer la mythologie, il eût été mieux d en retrancher tout ce qui pouvait être dangereux pour ne conserver que ce qui devait être utile. Quelques personnes ont jugé cette tâche impossible. Si nous avions partagé leur avis, nous n’aurions jamais consenti à rédiger ce Précis, parce que nous ne voudrions pas prendre sur nous la responsabilité d’une seule parole qui fût répréhensible

Celui qui parcourra notre travail n’y rencontrera rien de bien nouveau, ni de bien extraordinaire. Nous nous sommes borné à reproduire des notions élémentaires qui sont partout les mêmes, et nous nous sommes interdit toute considération d’un ordre plus élevé, afin de ne pas cesser de parler aux enfants leur langage. Le seul mérite que nous ambitionnions, c’est de n’avoir rien dit qui pût blesser la délicatesse et l’innocence de leur âge, et nous espérons y avoir réussi.

De la mythologie en général.
Notions préliminaires. §

1. La mythologie est l’histoire fabuleuse des divinités que les païens adoraient. Elle tire son nom de deux mots grecs mythos et logos, qui signifient discours fabuleux.

2. Tous les hommes reçurent d’abord la connaissance du vrai Dieu et n’adorèrent que lui seul. Les saintes Ecritures nous apprennent que nos premiers parents, Adam et Eve, vécurent dans le paradis terrestre dans un état d’innocence et de justice qui leur permettait d’être en relation directe avec Dieu. Après leur chute, leur intelligence ne fut pas tellement obscurcie qu’ils ne connussent plus celui qui les avait créés. Nous les voyons au contraire lui offrir des sacrifices et s’efforcer par le culte de la prière d’apaiser son courroux. Pendant plusieurs siècles, la tradition perpétua de génération en génération ces connaissances primitives dans toute leur pureté.

3. Du temps d’Abraham et peu après, dit Bossuet, la connaissance du vrai Dieu paraissait encore subsister dans la Palestine et dans l’Egypte. Melchisédech, roi de Salem, était le pontife du Dieu Très-Haut qui a fait le ciel et la terre. Abimélech, roi de Gérare et son successeur qui portait le même nom, craignaient Dieu, juraient en son nom et admiraient sa puissance. Les menaces de ce grand Dieu étaient redoutées par Pharaon, roi d’Egypte ; mais dans le temps de Moïse les nations étaient perverties ; le vrai Dieu n’était plus connu en Egypte comme le Dieu de l’univers, mais seulement comme le Dieu des Hébreux ; on adorait jusqu’aux animaux, jusqu’aux reptiles : tout était Dieu excepté Dieu même !

4. Les passions des hommes et leur ignorance furent les grandes causes de toutes ces erreurs. En quittant le pied de la tour de Babel pour se disperser sur la surface de la terre, les enfants de Noé oublièrent le vrai Dieu pour ne s’occuper que des objets qui frappaient le plus vivement leurs sens. Le soleil, la lune et les étoiles attirèrent d’abord leurs regards, et reçurent leurs adorations. Le feu, est-il dit au livre de la Sagesse, le vent, l’air subtil, la multitude des étoiles, l’abîme des eaux, le soleil, la lune : voilà les dieux que les hommes ont cru les arbitres du monde.

De la déification des éléments et des grandes merveilles de la nature, l’homme en vint à se déifier lui-même. Un père, plongé dans une douleur profonde, continuent les saintes Ecritures, fit faire l’image de son fils qui lui avait été trop tôt ravi ; il commença à adorer comme dieu Celui qui, comme homme, était mort auparavant, et il établit parmi ses serviteurs son culte et des sacrifices. Par la suite, cette coutume impie prévalut, l’erreur fut observée comme une loi, et les idoles furent adorées par l’ordre des tyrans.

Enfin on alla jusqu’à adorer les plus vils animaux et les êtres sans raison. L’homme adora ceux qui lui étaient utiles pour mériter de plus en plus leurs faveurs, et il adora ceux qui étaient nuisibles pour détourner leur influence funeste. C’est dans ce sens qu’on a pu dire que la crainte multiplia les dieux.

5. L’imagination des poëtes revêtit toutes ces erreurs des couleurs les plus séduisantes et les obscurcit encore, en mêlant à cette déification de la nature leurs propres fictions. Ils marièrent ensemble tous ces dieux divers, en formèrent des familles semblables aux nôtres, leur prêtèrent nos vices et nos passions, mêlèrent notre histoire à la leur, et les distribuèrent en plusieurs classes. On bien encore, sous le voile de l’allégorie, ils prêtèrent la vie et le mouvement à toutes les parties de la création, rattachèrent l’existence des fleurs et des plantes aux touchantes aventures d’une nymphe, changèrent les bergères en naïades, les musiciens en Apollon, les médecins en Esculape, les poëtes en Muses, et dans un autre ordre de choses, les oranges en pommes d’or, l’or en une pluie de ce même métal, et les flèches en foudres. C’est ce qui a fait dire à Boileau :

Là pour nous enchanter tout est mis en usage :
Tout prend un corps, une âme, un esprit, un visage.
Chaque vertu devient une divinité,
Minerve est la prudence et Vénus la beauté.
Ce n’est plus la vapeur qui produit le tonnerre,
C’est Jupiter armé pour effrayer la terre.
Un orage terrible aux yeux des matelots,
C’est Neptune en courroux qui gourmande les flots.
Echo n’est plus un son qui dans l’air retentisse,
C’est une nymphe en pleurs qui se plaint de Narcisse.
Ainsi, dans cet amas de nobles fictions,
Le poëte s’égare en mille inventions,
Orne, élève, embellit, agrandit toutes choses,
Et trouve sous sa main des fleurs toujours écloses.

6. L’étude de la mythologie est très-importante, parce qu’elle nous fait connaître toutes les erreurs dans lesquelles les hommes sont tombés en suivant leurs passions, et nous montre par là les bienfaits du christianisme qui a dissipé toutes ces ténèbres. Ensuite elle nous rend plus facile l’étude des auteurs anciens, des poëtes tout spécialement et nous donne également l’intelligence de toutes les œuvres de sculpture et de peinture inspirées par le paganisme et ses fictions.

7. Pour suivre avec méthode cette étude, nous partagerons ce petit traité en deux sections. Dans la première, nous traiterons de la mythologie grecque et romaine, et dans la seconde, de la mythologie des Indiens, des Egyptiens, des Perses, des Gaulois et des Scandinaves. Nous diviserons la mythologie grecque et romaine en quatre parties. Nous parlerons dans la première des dieux du premier ordre ; dans la seconde, des dieux d’un ordre inférieur ; dans la troisième, des divinités allégoriques, et dans la quatrième, des héros ou demi-dieux. Cette division est basée sur la manière dont les anciens classent eux-mêmes leurs dieux.

Questionnaire. §

1. Qu’est-ce que la mythologie ? 2. Quelle était la croyance des premiers hommes ? 3. A quelle époque cette croyance s’est-elle altérée ? 4. Quelles ont été les causes de cette altération ? Quelles sont les créatures que l’homme a d’abord adorées ? Comment s’est-il déifié lui-même ? 5. Quelle part ont eu les poëtes dans l’altération des croyances primitives ? Comment formèrent-ils leurs ingénieuses fictions ? 6. Est-il important d’étudier la mythologie ? Pour quelles raisons ? 7. Comment peut-on diviser la mythologie en général ? Comment divise-t-on en particulier la mythologie grecque et romaine ?

Première section.
De la mythologie grecque et romaine. §

Première partie.
Des dieux du premier ordre. §

Chapitre I.
Du Destin et de la génération des dieux. §

1. Au-dessus de tous les dieux les païens plaçaient le Destin. Ils supposaient qu’il commandait à toutes les divinités et que ses décrets étaient irrévocables. On le représentait sous la figure d’un vieillard aveugle tenant dans ses mains une urne où était renfermé le sort de tous les humains. On lui donnait aussi un livre d’airain que les dieux allaient consulter pour y lire l’avenir, qui s’y trouvait écrit en lettres ineffaçables. Il portait encore une couronne surmontée d’étoiles et tenait quelquefois un sceptre de fer, comme emblème de sa toute-puissance et de son inflexibilité.

2. Ce Destin est un travestissement de la croyance primitive en un Dieu qui gouverne tout et qui tient tout sous ses lois. Seulement, au lieu d’admettre une Providence éclairée et sage, libre dans ses actions, respectant la liberté de toutes les créatures intelligentes et raisonnables, les païens croyaient en un Dieu aveugle dont la force irrésistible enchaîne et subjugue le monde entier.

3. Le Destin avait pour père le Chaos, le plus ancien des dieux. On appelait Chaos cette masse informe dans laquelle le ciel, la terre, la mer et tous les éléments fuient confondus pendant la première époque de la création. C’est ce que Rousseau a exprimé dans ces beaux vers :

Avant que l’air, les eaux et la lumière,
Ensevelis dans la masse première,
Fussent éclos, par un ordre immortel,
Des vastes flancs de l’abîme éternel,
Tout n’était rien. La nature enchaînée,
Oisive et morte, avant que d’être née,
Sans mouvements, sans forme et sans vigueur,
N’était qu’un corps abattu de langueur,
Un sombre amas de principes stériles,
De l’existence éléments immobiles.
Dans ce chaos (ainsi par nos aïeux
Fut appelé ce désordre odieux)
En pleine paix sur son trône affermie,
Régna longtemps la Discorde ennemie,
Jusques au jour pompeux et florissant,
Qui donna l’être à l’univers naissant ;
Quand l’harmonie, architecte du monde,
Développant dans cette nuit profonde
Les éléments pêle-mêle diffus,
Vint débrouiller ce mélange confus,
Et variant leurs formes assorties,
De ce grand tout animer les parties,
Le ciel reçut, en son vaste contour,
Les feux brillants de la nuit et du jour.

4. L’Ecriture sainte nous raconte comment en six jours Dieu fit sortir du chaos informe l’univers et toutes ses merveilles. Mais les Grecs ont défiguré par leurs fables ce simple et sublime récit. Le Chaos, disent-ils, enfanta la Nuit, et la Nuit épousa l’Achéron, le fleuve des enfers. On regardait la Nuit comme la mère des dieux et des hommes. On lui rendait un culte solennel, et l’on immolait sur ses autels des brebis noires, pour signifier que cette déesse était la reine des ténèbres, et un coq, parce que cet oiseau annonce pendant la nuit le retour du jour. On représentait la Nuit avec un flambeau à la main, des ailes de chauve-souris et un manteau parsemé d’étoiles.

5. La Terre parut ensuite. Elle enfanta le Ciel, Uranus, avec sa voûte étoilée dont les poëtes ont fait le palais des dieux, les montagnes dont les vallées devaient être peuplées de nymphes, et la mer avec ses abîmes immenses. Elle donna aussi naissance aux fameux Cyclopes Bronté, Stérope et Argé qui devaient forger les foudres de Jupiter. Ce qui signifie sans doute que ce sont les vapeurs sorties de la terre qui produisent le tonnerre et les éclairs.

6. Enfin la Terre épousa Uranus et de cette monstrueuse alliance naquirent Titan et Saturne ou le Temps.

Questionnaire. §

1. Quel est le premier de tous les dieux ? Qu’est-ce que le Destin ? Comment était-il représenté ? 2. Quel dogme primitif le Destin rappelle-t-il ? 3. Qu’est-ce que le Chaos ? 4. Quelle divinité est née du Chaos ? Qu’est-ce que la Nuit ? Quel culte lui rendait-on ? Comment était-elle représentée ? 5. Quels furent les enfants de la Terre ? Pourquoi dit-on qu’elle donna le jour aux Cyclopes ? 6. Quels furent les enfants d’Uranus et de la Terre ?

Chapitre II.
Saturne ou le Temps. §

1. Uranus dérobait tous ses enfants à la lumière et les précipitait, à mesure qu’ils naissaient, dans les sombres abîmes. La Terre son épouse, indignée de cette barbarie, produisit le fer jusqu’alors caché dans son sein, en arma ses enfants et les excita à la vengeance. Tous reculèrent devant cet effroyable attentat. Saturne seul eut le triste courage de saisir une faux tranchante, et d’en frapper perfidement l’auteur de ses jours. Titan, son frère aîné, le laissa jouir du trône qu’il avait ainsi usurpé, mais à condition qu’il n’élèverait aucun enfant mâle, et que le souverain pouvoir retournerait à sa mort aux Titans. C’est pourquoi Saturne dévorait ses fils, aussitôt que Cybèle son épouse et sa sœur leur avait donné le jour.

2. Cette mère infortunée, ayant mis au monde Jupiter et Junon, usa de stratagème pour tromper la barbarie de son époux. Au lieu de ses enfants elle lui donna une pierre à dévorer. Elle eut recours à de semblables moyens pour sauver les jours de Neptune et de Pluton ses autres fils. Titan découvrit cette supercherie et déclara la guerre à Saturne et à Cybèle pour les punir de leur déloyauté. Il parvint à les enfermer dans une étroite prison, mais Jupiter les en tira et rétablit son père sur le trône.

3. Saturne oublia promptement ce bienfait. Il avait lu dans le livre du destin que son fils le détrônerait, et, pour prévenir ce malheur, il résolut de le faire périr. La guerre recommença dans le ciel entre le père et les enfants. Jupiter victorieux chassa du ciel Saturne et régna à sa place.

4. Le vieil exilé se retira en Italie où régnait le roi Janus et partagea avec lui le souverain pouvoir. La contrée qui lui servit de refuge prit le nom de Latium, du mot latin latere, qui signifie cacher. Le temps de son règne fut cette époque d’innocence et de bonheur qu’on a appelé l’âge d’or. Après cet âge fortuné vînt l’âge d’argent, puis l’âge d’airain et l’âge de fer. Sous cette allégorie, les poëtes ont voulu représenter la décadence du genre humain qui se corrompit à mesure qu’il s’éloigna de son berceau. Boileau peint ainsi le bonheur des hommes dans l’âge d’or :

Tous les plaisirs couraient au-devant de leurs vœux ;
La faim aux animaux ne faisait point la guerre,
Le blé, pour se donner, sans peine ouvrant la terre,
N’attendait pas qu’un bœuf pressé par l’aiguillon
Traçât d’un pas tardif un pénible sillon.
La vigne offrait partout des grappes toujours pleines,
Et des ruisseaux de lait serpentaient dans les plaines.

5. En reconnaissance de l’hospitalité que lui avait donnée Janus, Saturne fit connaître à ce prince le passé et l’avenir, et le rendit le plus sage de tous les monarques. C’est par allusion à celle double science que les Romains ont représenté Janus avec un double visage, l’un tourné vers le passé et l’autre vers l’avenir. On lui mettait aussi une baguette à la main, parce qu’il présidait aux chemins publics, et une clef, parce qu’il ouvrait l’année. Sous Numa, on lui bâtit un temple qui était ouvert pendant la guerre et fermé pendant la paix. Ce temple ne fut fermé que trois fois, pendant la durée de l’empire romain : la première sous Numa, son fondateur ; la seconde, après la deuxième guerre punique ; et la troisième sous Auguste. Le premier mois de l’année lui était consacré.

6. Les Romains instituèrent aussi des fêtes en l’honneur de Saturne. Ces fêtes, appelées Saturnales, avaient lieu tous les ans au mois de décembre et duraient plusieurs jours. Pendant ce temps tous les rangs étaient intervertis. Les esclaves étaient servis par leurs maîtres. On s’envoyait mutuellement des présents, et l’on ne pouvait ni déclarer la guerre, ni exécuter les coupables. C’eût été un beau souvenir de cet âge d’or, où la liberté régnait avec l’égalité sur toute la terre, si des désordres affreux et d’épouvantables excès n’avaient souillé ces réjouissances licencieuses.

7. Saturne est une divinité allégorique qui représente le Temps. On le dit fils du Ciel et de la Terre, parce que le temps n’a commencé qu’avec la création ; on a supposé qu’il dévorait ses enfants, parce que le temps voit périr tout ce qu’il a engendré. On l’a exilé du ciel où l’éternité seule réside, et on l’a fait l’allié d’un roi auquel il apprend la sagesse pour signifier que le temps est le meilleur conseiller, et que la sagesse dans le présent dépend de la science au passé et de la prévoyance de l’avenir.

8. Les peintres et les poëtes l’ont représenté sous la figure d’un vieillard ailé armé d’une faux. Sa vieillesse est le symbole de la durée, sa faux indique sa puissance de destruction qui moissonne tout, et ses ailes sont l’emblème de sa rapidité. Rousseau a exprimé ainsi quelques-unes de ces pensées :

Ce vieillard qui, d’un vol agile,
Fuit sans jamais être arrêté,
Le Temps, cette image mobile
De l’immobile éternité,
A peine du sein des ténèbres
Fait éclore les faits célèbres,
Qu’il les replonge dans la nuit.
Auteur de tout ce qui doit être,
Il détruit tout ce qu’il fait naître,
A mesure qu’il le produit.
Questionnaire. §

1. Comment Uranus traitait-il ses enfants ? Quel fut le succès de la rébellion de Saturne ? A quelle condition Titan le laissa-t-il régner ? 2. Comment Cybèle déroba-t-elle Jupiter et ses autres enfants à la cruauté de Saturne ? Quel fut le succès de la révolte des Titans ? 3. Pourquoi Saturne fut-il exilé du ciel par Jupiter ? 4. Où se réfugia Saturne ? Comment appelle-t-on l’âge où il régna dans le Latium ? Comment les poëtes nommèrent-ils les autres âges qui vinrent après l’âge d’or ? 5. Quels dons fit Saturne à Janus en récompense de son hospitalité ? Comment était représenté Janus ? Qui lui éleva un temple ? En quel temps ce temple était-il fermé ? 6. Quelles étaient les fêtes de Saturne ? Que faisait-on pendant ces fêtes ? 7. Quelle explication peut-on donner de la fable de Saturne ? 8. De quelle manière les peintres et les poëtes l’ont-ils représenté ?

Chapitre III.
Cybèle. §

1. Cybèle, sœur et femme de Saturne, donna naissance à plusieurs dieux. On l’appela pour ce motif la grande mère (alma mater). On lui donnait aussi les noms de Bérécynthie, de Dindymène et d’Idée, tirés des montagnes de Phrygie où elle était plus particulièrement honorée. On la nommait encors Ops ou Tellus ; Ops ou secours, parce qu’on croyait qu’elle procurait toutes sortes d’avantages aux mortels, et Tellus parce qu’elle présidait à la terre, comme Saturne au ciel. Enfin on la surnommait Rhéa, d’un mot grec qui signifie couler, parce que c’est de la terre que tous les biens découlent.

2. On représentait cette déesse sous les traits d’une femme robuste avec une couronne de chêne, pour rappeler que les hommes s’étaient autrefois nourris du fruit de cet arbre. Sa tête était ceinte de tours énormes, emblèmes des villes placées sous sa protection ; elle tenait des clefs dans ses mains pour marquer les trésors que la terre renferme dans son sein ; elle portait un tambour, symbole des vents et des tempêtes ; ses vêtements étaient verts par allusion à la parure de la terre au printemps, et le char où elle était montée était traîné par des lions, pour figurer le mouvement de la terre balancée dans les airs par son propre poids.

3. Les fêtes, de Cybèle s’appelaient Mégalésies ou jeux mégalésiens, d’un mot grec qui signifie grand, parce qu’on l’appelait elle-même la grande déesse. On les célébrait au bruit des tambours, avec des hurlements et des cris extraordinaires. A Rome on faisait ces fêtes dans un temple secret (opertum). Les hommes ne pouvaient jamais y entrer. Il y avait encore dans celle ville la cérémonie de la lavation. L’anniversaire du jour où la statue de la grande déesse avait été transportée de Phrygie à Rome (25 mars), on conduisait cette même statue sur un char à l’endroit où l’Achéron se jette dans le Tibre, et on la lavait.

4. Les prêtres de Cybèle portaient le nom de galli, parce que le fleuve Gallus en Phrygie servait à leurs folles superstitions. Après avoir bu de l’eau de ce fleuve, ils entraient en fureur, se déchiraient à coups de fouet et à coups de couteau, et se heurtaient de la tête comme des béliers. Ces actes de démence les firent aussi surnommer corybantes, d’un mot qui signifie frapper. On les a encore appelés curètes, parce qu’ils élevèrent Jupiter dans île de Crète, et dactyles (daktyles), parce qu’ils étaient dix comme les doigts des deux mains. Dans les fêtes de leur déesse, ils frappaient leurs boucliers avec des lances, et s’agitaient en faisant des contorsions frénétiques et en poussant des cris horribles. Ils offraient dans leurs sacrifices des taureaux, des chèvres ou des truies, et consacraient à leur déesse le buis et le pin ; le buis, parce que c’était de ce bois qu’étaient faites leurs flûtes sacrées ; le pin, parce que le jeune Atys avait été métamorphosé en cet arbre par Cybèle, qui l’avait tendrement aimé.

5. Cybèle eut pour fille Vesta, la déesse du feu. On distingua trois divinités de ce nom, la Terre, femme d’Uranus ou du Ciel et mère de Saturne, Cybèle, la femme de Saturne dont nous venons de décrire les attributs, et la jeune Vesta, fille de Cybèle. C’est à cette dernière que Numa éleva un temple, après avoir institué un collège de vestales. Ces prêtresses n’étaient d’abord qu’au nombre de quatre, mais dans la suite il y en eut jusqu’à sept. On les choisissait parmi les enfants de six à dix ans. Leurs fonctions duraient trente années. Pendant les dix premières, elles s’instruisaient de leurs devoirs, pendant les dix suivantes elles les remplissaient, et pendant les dix dernières elles formaient les novices. Elles devaient entretenir le feu sacré et garder la virginité. Si elles manquaient à l’un de ces deux devoirs, elles étaient condamnées aux peines les plus sévères. On interrompait toutes les affaires civiles et religieuses quand on apprenait que le feu sacré était éteint, et l’on sévissait contre les prêtresses coupables. La vestale qui avait transgressé ses vœux était enterrée toute vive.

Questionnaire. §

1. Qu’est-ce que Cybèle ? Quels noms lui a-t-on donnés ? Pour quel motif lui donnait-on tous ces noms divers ? 2. Comment était-elle représentée ? Que figuraient tous ces symboles ? 3. Comment s’appelaient les fêtes célébrées en son honneur ? Quelles étaient celles qu’on célébrait à Rome ? 4. Comment s’appelaient ses prêtres ? D’où leur venaient ces noms ? Quels sacrifices offraient-ils ? Quels arbres consacraient-ils à leur déesse ? 5. Quelle fut la fille de Cybèle ? Combien distingue-t-on de divinités qui portèrent le nom de Vesta ? Qu’est-ce que les vestales ? Quelles étaient leurs fonctions ? Quels étaient leurs devoirs ? De quelles peines les punissait-on quand elles étaient infidèles ?

Chapitre IV.
Jupiter. §

1. Jupiter, que les Grecs regardaient comme l’arbitre souverain des dieux et des hommes, était, comme nous l’avons déjà dit, fils de Cybèle et de Saturne. Cybèle lui avait sauvé la vie en trompant l’avidité cruelle de son époux. Au lieu de son fils elle lui avait donné une pierre à dévorer. La fable dit qu’il fut nourri dans l’île de Crète par la chèvre Amalthée et par deux nymphes, Adrastée et Ida qu’on a aussi appelées Mélisses (abeilles). Par reconnaissance, le souverain des dieux plaça la chèvre Amalthée dans le ciel, et donna aux nymphes une de ses cornes. Ce fut la corne d’abondance. En la secouant, elles en faisaient sortir toute sorte de biens.

2. Devenu maître de l’univers par l’expulsion de son père Saturne, Jupiter partagea son empire avec Neptune et Pluton ses frères. A Neptune il donna l’empire de la mer, à Pluton celui des enfers, et garda pour lui le ciel. Il admit dans son conseil Junon, Neptune, Cérès, Vesta la jeune, Mercure, Minerve, Apollon, Diane, Mars, Vulcain et Vénus, Chacune de ces douze divinités avait ses attributs particuliers. Jupiter les présidait et les dominait.

3. Pendant qu’il jouissait en paix de son souverain pouvoir, les géants, fils de la Terre, l’attaquèrent avec une force et une vigueur extraordinaires. Ils entassèrent montagnes sur montagnes et menacèrent d’escalader le ciel. Jupiter appela tous les dieux à son secours. Déjà les géants étaient vaincus ; Porphyrion et Ephialte avaient succombé ainsi que Briaré aux cent bras, et Encelade, frappé de la foudre, venait d’être enseveli pour des siècles sous l’Etna, lorsque Tiphon, le géant aux cent têtes, accourut plus redoutable que tous les autres.

Il était moitié homme et moitié serpent, et sa tête atteignait le ciel. Tous les dieux s’enfuirent à son aspect et se réfugièrent en Egypte. Bacchus seul combattit sous la forme d’un lion à côté du maître des dieux, et contribua par son courage à la défaite du monstre qui fut enseveli sous l’île d’Ischya.

4. Jupiter était maître de l’univers, lorsque Prométhée, fils de Japet, un des Titans, s’avisa de faire des statues d’hommes avec du limon, et de dérober au char du soleil une étincelle pour les animer. Le souverain du ciel et de la terre, irrité de tant d’audace, chargea Vulcain d’attacher le téméraire usurpateur sur le mont Caucase, et de faire dévorer par un vautour son foie toujours renaissant. Les autres dieux virent avec douleur Prométhée si sévèrement puni. Ils firent à leur tour une femme qu’ils enrichirent chacun d’un don particulier. Pallas lui donna la sagesse, Vénus la beauté, Apollon la connaissance de la musique, Mercure l’éloquence, etc. On l’appela Pandore, de deux mots grecs qui signifient tout don.

5. Jupiter voulut aussi faire à Pandore un présent. Il la fit venir, lui remit une boîte magnifique bien fermée, et lui ordonna de la donner à Prométhée. L’illustre coupable se défia du présent et de la femme que Jupiter lui envoyait ; mais son frère Epiméthée fut moins prudent, il ouvrit la boîte, et tous les maux de la nature qui y étaient renfermés se répandirent sur la terre. L’espérance seule resta au fond. C’est ce que Rousseau a exprimé dans ces vers :

D’où peut venir ce mélange adultère
D’adversité dont l’influence altère
Les plus beaux dons de la terre et des cieux ?
L’antiquité nous met devant les yeux
De ce torrent la source emblématique,
En nous peignant cette femme mystique,
Fille des dieux, chef-d’œuvre de Vulcain,
A qui le ciel, prodiguant par leur main
Tous les présents dont l’Olympe s’honore,
Fit mériter le beau nom de Pandore.
L’urne fatale, où les afflictions.
Les durs travaux, les malédictions,
Jusqu’à ce temps des humains ignorées,
Avaient été par les dieux resserrées,
Pour le malheur des mortels douloureux,
Fut confiée à des soins dangereux.
Fatal désir de voir et de connaître !
Elle l’ouvrit, et la terre en vit naître,
Dans un instant, tous les fléaux divers
Qui depuis lors inondent l’univers.
Quelle que soit, vraie ou aventurée,
De ce revers l’histoire figurée,
N’en doutons point, la curiosité
Fut le canal de notre adversité.

6. Les poëtes ont multiplié à l’infini les alliances de Jupiter. Ainsi, d’après leurs fictions, Junon sa sœur aurait été sa huitième épouse. Mais rien n’empêche de voir dans tous ces mariages des allégories. Par exemple ils disent que Jupiter fit alliance avec Métis (la réflexion) et qu’il la renferma en lui-même. Il éprouva ensuite un violent mal de tête, et Minerve, la déesse des arts, sortit de son cerveau armée de pied en cap, ce qui signifie sans doute que la pensée de l’écrivain et de l’artiste ne doit se produire au jour qu’après avoir été longtemps mûrie par le travail intérieur de la réflexion. Ils ajoutent qu’il épousa Thémis (la loi) et que de cette alliance naquirent la paix, la justice, l’eunomie ou la bonne législation. De son union avec Mnémosyne (la mémoire) ils font naître les neuf Muses qui représentent les sciences et les arts. Toutes ces fictions se comprennent d’elles-mêmes.

7. Mais, indépendamment de toutes ces alliances allégoriques, les poëtes racontent encore du souverain des dieux une foule de métamorphoses qu’ils ont sans doute imaginées pour ajouter à sa célébrité et à sa grandeur. Nous ne rapporterons pas ici ces actions infâmes qui supposent dans le maître du ciel et de la terre les passions les plus viles et les plus odieuses. C’est assez d’en rappeler l’existence pour faire connaître jusqu’à quel point le monde était dégradé.

8. Dans les voyages que les poëtes lui font faire sur la terre pour éprouver la vertu des hommes, Jupiter ne manifeste guère sa puissance que par des œuvres de sévère justice et de cruauté. Un jour qu’il passait en Arcadie, les bergers le reconnurent à la majesté de ses traits. Mais le roi Lycaon, le tyran de cette contrée, ne sachant s’il recevait dans sa maison un homme ou un dieu, résolut de l’éprouver. Il l’invita à sa table et lui servit les membres d’un enfant qu’il avait fait égorger. Le dieu reconnut sur-le-champ le crime du tyran, et le punit en le métamorphosant en loup.

9. En Phrygie, où il était accompagné par Mercure, ils s’étaient vus l’un et l’autre insultés et repoussés par tout le monde. Deux vieillards, Philémon et Baucis, qui avaient conservé dans leur cœur la crainte et l’amour des dieux, leur accordèrent seuls l’hospitalité. Leur demeure était pauvre, et le repas qu’ils offrirent aux immortels était simple et frugal. Jupiter et Mercure furent touchés des vertus de ce couple hospitalier. Ils sortirent du pays où ils avaient été si mal reçus et ordonnèrent à Philémon et Baucis de les suivre. Aussitôt un orage affreux éclata, entraînant arbres, animaux, maisons, vergers, pendant que la chaumière de Philémon et de Baucis se métamorphosait en un temple magnifique.

Nos deux époux, surpris, étonnés, confondus,
Se crurent par miracle en l’Olympe rendus.
Vous comblez, dirent-ils, vos moindres créatures :
Aurions-nous bien le cœur et les mains assez pures
Pour présider ici sur les honneurs divins,
Et prêtres vous offrir les vœux des pèlerins ?
Jupiter exauça leur prière innocente.
Hélas ! dit Philémon, si votre main puissante
Voulait favoriser jusqu’au bout deux mortels,
Ensemble nous mourrions en servant vos autels ;
Clothon ferait d’un coup ce double sacrifice ;
D’autres mains nous rendraient en vain ce triste office.
Je ne pleurerais point celle-ci, ni ses yeux
Ne troubleraient non plus de leurs larmes ces lieux.
Jupiter à ce vœu fut encor favorable.

Lorsque le moment de quitter la vie fut arrivé,

Même instant, même sort à leur fin les entraîne ;
Baucis devient tilleul, Philémon devient chêne.
La Fontaine.

10. En visitant d’autres contrées, Jupiter fut frappé de la corruption qui régnait sur la terre. Dans son courroux, il résolut la perte du genre humain, à l’exception de Deucalion et de Pyrrha, sages vieillards qui régnaient sur la Thessalie. A sa voix, tous les éléments de la nature se déchaînèrent sur la terre, le tonnerre se fît entendre, les vents mugirent, et la pluie tomba par torrents. Tous les habitants des plaines s’enfuirent sur les montagnes, mais l’eau les y poursuivit et ils périrent. Deucalion et Pyrrha, seuls montés dans une barque, échappèrent à un déluge universel, et leur navire s’arrêta sur le mont Parnasse en Béotie. L’oracle leur ayant commandé, pour repeupler la terre, de se couvrir la tête d’un voile et de jeter derrière eux les os de leur aïeule, ils crurent que cette aïeule était la terre, les os des pierres, et firent ce que le dieu leur avait ordonné. Aussitôt une nouvelle race d’hommes s’éleva derrière eux, et le genre humain fut renouvelé.

11. Cette fable est évidemment la tradition altérée du déluge, comme la boîte de Pandore et l’histoire de Prométhée nous rappellent la création de l’homme et de la femme et leur chute après avoir joui des délices du paradis terrestre. Le grand combat des géants contre Jupiter n’est peut-être aussi qu’un souvenir de ces anges rebelles qui s’armèrent contre Dieu et qui méritèrent d’être ensevelis dans les abîmes du Tartare, d’où ils font encore effort pour agiter et bouleverser le monde.

12. Ces explications sont d’autant plus vraisemblables que Jupiter a toujours été reconnu pour le souverain des dieux et qu’à ce titre on lui a donné toutes les espèces de surnoms. C’est le sage par excellence, le président des douze grands dieux qui ont voix délibérative au ciel, le père des dieux et des hommes, le créateur de l’humanité, le chef de toutes les nations, le grand bienfaiteur du monde, l’auteur de la fortune et de la santé, l’inventeur des arts, le suprême législateur, etc., etc. On ne pourrait énumérer tous les titres sous lesquels il fut adoré.

13. Son culte fut vraiment universel. Il avait des temples chez toutes les nations et des oracles dans toute la terre. On lui sacrifiait des chèvres, des brebis et de blanches génisses aux cornes dorées. Quelquefois on se contentait de lui offrir de la farine, du sel et de l’encens. Ses autels ne furent jamais souillés de sang humain. Le chêne lui était consacré, parce qu’on disait qu’il avait appris aux hommes à se nourrir de glands. Ses trois grands oracles étaient ceux de Dodone, de Libye et de Trophonius.

14. On le représente ordinairement sous la figure d’un homme majestueux assis sur un trône d’or ou d’ivoire, ayant une barbe touffue, des sourcils noirs et épais, portant dans sa main droite la foudre et dans la gauche une victoire. Les vertus siègent à ses côtés, et devant lui sont placées les deux coupes du bien et du mal qu’il répand à son gré sur le genre humain. Quelquefois l’aigle est à ses pieds les ailes déployées, enlevant son favori Ganymède au céleste séjour. Tous les grands poëtes et tous les grands sculpteurs, Homère et Phidias ont rivalisé d’efforts pour représenter dans toute sa grandeur et sa majesté le maître des dieux.

Questionnaire. §

1. Qu’est-ce que Jupiter ? Comment sa mère lui sauva-t-elle la vie à sa naissance ? Par qui fut-il élevé ? Qu’est-ce que la corne d’abondance ? 2. Avec qui Jupiter partagea-t-il son empire ? Quelles étaient les divinités admises dans son conseil ? 3. Qu’est-ce que la guerre des géants ? De quelle manière Jupiter écrasa-t-il ces terribles adversaires ? 4. Quel fut le crime de Prométhée ? Quel châtiment lui infligea Jupiter ? Comment fut formée Pandore ? 5. Quel présent lui fit Jupiter ? Qui ouvrit sa boîte mystérieuse ? 6. Quelles alliances contracta Jupiter ? En quel sens peut-on comprendre ces alliances ? 7. Que penser des métamorphoses de Jupiter ? 8. Quelles aventures eut-il dans ses voyages ? 9. Quelle est la fable de Philémon et de Baucis ? 10. Pour quel motif Jupiter inonda-t-il la terre ? Comment Deucalion et Pyrrha furent-ils sauvés ? Que tirent-ils pour repeupler la terre ? 11. Quels rapports y a-t-il entre ces fables et l’histoire sainte ? 12. Qu’est-ce qui légitime ces applications et ces rapprochements ? 13. Quel était le culte de Jupiter ? Quelles victimes lui offrait-on ? Où étaient ses principaux oracles ? 14. Comment était-il représenté ?

Chapitre V.
Junon. §

1. Junon était l’épouse et la sœur de Jupiter, et à ce titre elle était honorée comme la reine des dieux. Elle donnait, disait-on, les sceptres et les couronnes, et cette prérogative porta l’ambition à multiplier ses autels. Sous le nom de Lucine elle présidait aux unions conjugales, et cet attribut ne la rendit pas moins populaire que le premier.

2. On lui a supposé un orgueil extrême, une jalousie qui allait jusqu’à la fureur, et un esprit de vengeance qui dégénérait en cruauté. Elle imagina de faire surveiller toutes les démarches de son époux, par Argus. C’était un espion qui avait cent yeux, dont cinquante veillaient pendant que les autres se livraient au sommeil. Le puissant maître des dieux, ennuyé d’être retenu par un gardien aussi vigilant, ordonna à Mercure de l’en délivrer. Junon fut obligée de dévorer en silence son chagrin. Pour tout dédommagement, elle changea en paon le serviteur zélé qui avait été victime de sa fidélité. L’impuissante déesse plaça sur la queue de cet oiseau les yeux qui avaient servi ses intérêts avec tant de vigilance, et depuis ce moment le paon lui fut consacré.

3. Junon poursuivait, dans son implacable courroux, toutes les personnes de son sexe qui avaient pu l’offenser en lui disputant le prix de la beauté ou en méritant les faveurs de Jupiter. Ainsi Pygas, la reine des Pygmées, et les filles de Prœtus furent métamorphosées la première en grue et les secondes en génisses furieuses, pour avoir prétendu l’emporter par leurs charmes sur la reine des dieux. Pâris, fils de Priam, roi de Troie, fut constamment en butte à ses traits parce qu’il avait osé proclamer Vénus la plus belle des déesses. Ce ressentiment jaloux fut la cause de la ruine de Troie. Latone, mère d’Apollon, Sémélé, mère de Bacchus, Io, mère d’Epaphus, et Alcmène, mère d’Hercule furent autant de victimes de sa colère. La nymphe Echo, qui l’avait trompée, fut condamnée à ne plus répéter que la dernière syllabe des mots qu’elle entendrait. Enfin elle ravagea l’île d’Egine par une peste épouvantable et en fit périr tous les habitants pour se venger de l’injure que lui avait faite la fille d’Asope, reine du pays.

4. Elle n’eut d’attachement que pour Iris, sa messagère et sa confidente. Comme elle ne lui apportait que de bonnes nouvelles, elle la récompensa en la plaçant au ciel, après l’avoir métamorphosée en arc-en-ciel.

5. Cette terrible déesse, qui troublait tout l’Olympe par son humeur rancunière et vindicative, avait un culte très-répandu et très-solennel. Ses vengeances et ses cruautés l’avaient rendue si redoutable qu’on n’épargnait rien pour détourner son courroux et obtenir ses faveurs. Ses villes de prédilection étaient Samos, Argos et Carthage. Son temple à Samos portait le nom de Samia et à Rome Matuta. Parmi les oiseaux le paon, l’épervier et les oisons lui étaient consacrés, parmi les plantes le dictame et le pavot. On lui offrait ordinairement en sacrifice un agneau femelle.

6. On représente Junon assise sur un trône, un diadème sur la tête, un sceptre d’or dans une main et dans l’autre un fuseau ; à ses pieds un paon, son oiseau favori. Quelquefois elle traverse les airs sur un char traîné par des paons, ou bien encore on la peint avec un arc-en-ciel autour de la tête, emblème de sa chère Iris.

Questionnaire. §

1. Qu’était Junon ? Quels étaient ses attributs ? 2. Quel était son caractère ? Par qui faisait-elle surveiller Jupiter ? Qu’était Argus ? Quel fut le sort de ce vigilant gardien ? 3. Contre qui Junon sévit-elle particulièrement ? 4. A qui fut-elle attachée ? Que devint Iris ? 5. Dans quel lieu Junon fut-elle spécialement honorée ? Quelles plantes et quels oiseaux lui étaient consacrés ? Quelles victimes offrait-on sur ses autels ? 6. Comment était-elle représentée ?

Chapitre VI.
Cérès et Proserpine. §

1. Cérès était fille de Saturne et de Cybèle. Elle eut de Jupiter son frère une fille appelée Proserpine. Pluton, le dieu des enfers, qui ne pouvait trouver une épouse, parce qu’aucune déesse ne voulait habiter dans son ténébreux empire, vit un jour Proserpine cueillir des fleurs avec une de ses compagnes dans la plaine d’Enna en Sicile. Il l’enleva, frappa la terre de son trident et descendit avec elle aux enfers. La chaste Proserpine consentit alors à l’épouser.

2. Cérès, inconsolable de la perte de sa fille, monta sur un char attelé de dragons volants et se mit à la rechercher partout. La nymphe Aréthuse, qui avait été métamorphosée en une fontaine dont les eaux se perdaient sous terre, avait vu passer le dieu avec sa proie. Elle en avertit Cérès. La déesse adressa aussitôt ses plaintes à Jupiter, et en obtint que Proserpine sortirait chaque année du noir séjour et passerait six mois sur la terre.

3. Cérès donna aussi naissance à Plutus, le dieu des richesses, que nous retrouverons encore parmi les divinités infernales.

4. Dans ses voyages, la bonne déesse enseigna aux hommes l’art de cultiver la terre, et mérita d’être adorée comme la déesse de l’agriculture. Les Athéniens avaient pour elle un culte tout spécial. Ses fêtes furent appelées Eleusines, parce qu’elles se célébraient en Attique à Eleusis. On les appelait aussi les mystères par excellence, parce que c’était là que se faisaient ses grandes initiations qui, après avoir favorisé le développement de la civilisation ancienne, ont contribué si tristement à la corruption dégradante du paganisme. Le secret le plus absolu était ordonné aux initiés, et l’entrée du temple était sévèrement interdite à tous les profanes.

Le vin et les fleurs ne paraissaient jamais sur les autels de cette déesse. On lui sacrifiait des porcs, parce qu’ils détruisent les moissons, on bien des béliers.

5. Les Grecs ont beaucoup vanté les vertus de Cérès, mais la fable nous la montre avec une humeur fort vindicative. Ainsi elle rapporte de cruelles vengeances qu’elle exerça contre Ascalaphe, Stellio, et Erésichton. Elle jeta au premier de l’eau du Phlégéton au visage, et le changea en hibou, parce qu’il avait dit à Jupiter qu’elle avait sucé quelques grains de grenade aux enfers, contrairement à l’ordre de ce dieu qui lui avait défendu d’y rien prendre. Elle métamorphosa en lézard le jeune Stellio, parce qu’il s’était moqué de l’avidité avec laquelle la bonne déesse avait pris son repas chez la vieille Bécubo ; enfin elle envoya à Erésichton une faim insatiable qui le dévorait sans cesse, pour le punir d’avoir coupé plusieurs arbres dans une forêt qui lui était consacrée.

6. On représentait Cérès sous la figure d’une femme à la taille majestueuse et chargée d’embonpoint. Sa tête est couronnée d’épis ou de pavots, ses cheveux sont blonds ; elle tient une faucille d’une main ou une gerbe de blé, et de l’autre des pavots. On lui donne une torche ardente quand on veut la représenter cherchant sa fille Proserpine. Son char est traîné par des lions ou par des serpents. Quelquefois aussi on voit à ses côtés un lézard et un hibou, triste souvenir des métamorphoses d’Ascalaphe et de Stellio.

Questionnaire. §

1. Qu’est-ce que Cérès ? Comment Pluton lui enleva-t-il sa fille Proserpine ? 2. Qui enseigna à Cérès ce que Proserpine était devenue ? Quelle prière fit à Jupiter la bonne déesse ? Qu’en obtint-elle ? 3. Quel fut le fils de Cérès ? 4. Pourquoi la bonne déesse fut-elle honorée sur la terre ? Quelles sont les fêtes établies en son honneur ? Qu’étaient ses mystères ? Qu’offrait-on à Cérès ? 5. Quel était son caractère ? Par quelles vengeances s’est-elle signalée ? 6. Comment la représente-t-on ?

Chapitre VII.
Apollon et les Muses. §

1. Apollon était fils de Jupiter et de Latone, fille du Titan Cœus et de Phébé. Il vint au monde dans l’île de Délos. Sa mère s’y était cachée pour éviter le courroux de Junon. La reine des dieux avait suscité contre elle le serpent Python et la faisait poursuivre par ce monstre énorme de contrée en contrée. Apollon, devenu grand, délivra Latone de ce reptile affreux, en l’exterminant à coups de flèches. Cette belle victoire le couvrit de gloire et lui mérita le surnom de Pythien. On institua les jeux qui portent ce nom pour immortaliser cet exploit, et la peau du serpent Python servit à couvrir le trépied sur lequel la pythonisse rendait ses oracles.

2. La joie d’Apollon libérateur fut troublée par la mort d’Esculape. Ce fils chéri, auquel le dieu du jour avait appris la science de la médecine, eut l’audace de ressusciter Hippolyte, le fils de Thésée, roi d’Athènes, que des monstres marins avaient fait périr. Jupiter regarda cette témérité comme un attentat à ses droits et foudroya le coupable usurpateur. Apollon, ne pouvant se venger contre son père, le souverain des dieux, s’en prit aux Cyclopes qui forgeaient ses foudres et les tua à coups de èches. Jupiter irrité le chassa du ciel, et pendant plusieurs années le dieu exilé se vit contraint de voyager sur terre.

3. Il garda d’abord les troupeaux d’Admète, roi de Thessalie. Il errait sur les bords fortunés de l’Amphryse et du Pénée, dans les délicieuses vallées de Tempe, apprenant aux autres bergers à jouer de la flûte et trompant ainsi les ennuis de son exil. Il était étroitement uni au jeune Hyacinthe. Un jour qu’ils jouaient ensemble, Zéphyre détourna le palet qu’Apollon lançait et causa la mort de son rival. Le dieu changea son ami en la fleur qui porte son nom, mais il resta inconsolable de la perte qu’il avait faite.

4. Ses regrets et la poursuite des parents d’Hyacinthe l’obligèrent à quitter ces belles contrées ! Il passa la mer à l’endroit des Dardanelles et se réfugia en Phrygie. Il y rencontra Neptune que Jupiter avait aussi exilé du ciel avec plusieurs autres dieux, pour les punir d’une conspiration qu’ils avaient formée contre lui. Les deux illustres proscrits se retirèrent auprès de Laomédon qui construisait la ville de Troie, et s’engagèrent à entourer de murs cette cité naissante. Laomédon était convenu avec eux du salaire ; mais, lorsque l’ouvrage fut terminé, il refusa de tenir sa promesse. Alors Neptune appela les eaux de la mer, et détruisit par une inondation tout son travail. Apollon se vengea par une peste horrible qui menaça de détruire tous les sujets de Laomédon. Le monarque alarmé envoya consulter l’oracle qui lui répondit que, pour faire cesser ce fléau, il fallait envoyer chaque année une jeune Troyenne sur des rochers où elle serait dévorée par des monstres marins. Le sort avait désigné Hésione, la fille de Laomédon, et déjà la princesse tremblante attendait son trépas, lorsque Hercule la délivra en combattant le monstre, qu’il étendit mort à ses pieds.

5. Après toutes ces aventures, Neptune et Apollon rentrèrent en grâce avec Jupiter. Apollon fut chargé du soin de répandre la lumière dans l’univers et devint, le dieu du soleil. On lui donne pour exprimer ce ministère le surnom de Phœbus. Ce surnom vient des deux mots phos et bios, qui signifient lumière et vie. Quand la fable le considère comme le dieu du soleil, « elle dit qu’il va, tous les soirs, se coucher dans l’Océan, que le matin, les Heures attellent ses quatre chevaux d’élite, Pyrois, Œthon, Eoüs et Phlégon ; que l’Aurore sa fille ouvre les portes du ciel et annonce le retour de son père ; et qu’enfin ce dieu possède, dans la région des astres, douze maisons ou retraites qu’il occupe successivement durant les douze mois de l’année. On les nomme, en termes d’astronomie, signes du zodiaque. Ce sont autant de constellations que le soleil semble parcourir dans l’espace d’un an, et dans chacune desquelles il paraît demeurer pendant un mois environ. Ces douze constellations, le Bélier, le Taureau, les Gémeaux, le Cancer ou Ecrevisse, le Lion, la Vierge, la Balance, le Scorpion, le Sagittaire, le Capricorne, le Verseau et les Poissons, sont placées dans le cercle appelé zodiaque. Le soleil fait son entrée dans le premier vers la fin de mars1. »

6. Le dieu du soleil eut plusieurs enfants, parmi lesquels on distingue l’Aurore et Phaéton. Ce dernier, ayant entendu Epaphus contester la divinité de son origine, s’en vint un jour près de son père les yeux baignés de larmes, solliciter de lui une, grâce. Apollon, touché de son chagrin, jura par le Styx qu’il lui accorderait tout ce qu’il lui demanderait. Pour tous les dieux ce serment était irrévocable. Alors l’imprudent Phaéton le supplia de lui confier le char du soleil, pour qu’il pût prouver à ses envieux par sa dextérité qu’il était réellement son fils. Le malheureux père fit vainement tous ses efforts pour détourner son fils de ce dessein téméraire, son serment l’obligea à lui remettre son char et ses coursiers et à le laisser ainsi parcourir les airs. Le soleil ne tarda pas à s’écarter de sa route accoutumée, et Phaéton allait embraser la terre entière, lorsque Jupiter le frappa de sa foudre et le précipita dans l’Eridan, fleuve d’Italie. Cette fable n’est sans doute que le récit poétique d’une grande sécheresse qui désola cette contrée.

7. Apollon était aussi le dieu des sciences et des arts qui sont la lumière de l’esprit comme le soleil est la lumière du corps. Les Grecs le croyaient l’inventeur de la musique et de la poésie, et pensaient que ces arts avaient inspiré aux hommes les premières leçons de morale et répandu dans le sein de la société les premiers éléments de la civilisation. Boileau a rendu cette pensée en beaux vers :

Avant que la raison, s’expliquant par la voix,
Eût instruit les humains, eût enseigné les lois,
Tous les hommes suivaient la grossière nature,
Dispersés dans les bois, couraient à la pâture ;
La force tenait lieu de droit et d’équité :
Le meurtre s’exerçait avec impunité.
Mais du discours enfin l’harmonieuse adresse
De ces sauvages mœurs adoucit la rudesse ;
Rassembla les humains dans les forêts épars,
Enferma les cités de murs et de remparts :
De l’aspect du supplice effraya l’insolence,
Et sous l’appui des lois mit la faible innocence.
Cet ordre fut, dit-on, le fruit des premiers vers…
Art poét., ch. iv.

8. Les Grecs feignirent encore que sur les monts célèbres du Parnasse, de l’Hélicon et du Pinde Apollon donnait des leçons aux neuf Muses, filles de Jupiter et de Mnémosyne. Ces neuf sœurs avaient chacune une science particulière. Calliope présidait à l’éloquence et au poème héroïque ; Clio, à l’histoire ; Erato, aux poésies érotiques ; Melpomène, à la tragédie ; Thalie, à la comédie ; Terpsichore, à la danse ; Euterpe, aux instruments ; Polymnie, à l’ode ; Uranie, à l’astronomie. Perrault a exprimé en vers assez heureux les divers emplois des Muses :

La noble Calliope, en ses vers sérieux,
Célèbre les hauts faits des vaillants demi-dieux.
L’équitable Clio, qui prend soin de l’histoire,
Des illustres mortels éternise la gloire.
La légère Erato, d’un plus simple discours
Conte des jeunes gens les diverses amours.
La gaillarde Thalie incessamment folâtre
Et de propos bouffons réjouit le théâtre.
La grave Melpomène en la scène fait voir
Des rois qui de la mort éprouvent le pouvoir.
L’agile Terpsichore aime surtout la danse,
Et se plaît d’en régler le pas et la cadence.
Euterpe la rustique, à l’ombre des ormeaux,
Fait retentir les bois de ses doux chalumeaux.
La docte Polymnie, en l’ardeur qui l’inspire,
De cent sujets divers fait résonner sa lyre.
Et la sage Uranie élève dans les cieux
De ses pensers divers le vol audacieux.

9. Tous les lieux qui environnaient le séjour d’Apollon et des Muses étaient consacrés par des souvenirs poétiques. Ainsi on disait que les poëtes frisaient leurs inspirations dans les eaux du fleuve Permesse qui prend sa source au pied de l’Hélicon, dans la fontaine de Castalie qu’Apollon avait produite en métamorphosant une nymphe, et dans la source d’Hippocrène, qui était une autre fontaine que le pied de Pégase avait fait jaillir. Pégase était un cheval ailé que les bons poëtes seuls pouvaient monter.

10. Apollon, pour se venger du roi de Phrygie, remplaça subitement les oreilles humaines que la nature lui avait données par des oreilles d’âne. Midas couvrit sa tête d’une tiare de pourpre et dissimula ainsi pendant quelque temps son honteux châtiment, il avait mis son barbier dans le secret, mais il lui avait bien recommandé de ne le révéler à personne. Cette confidence était un fardeau trop lourd pour la discrétion du zélé serviteur. Il fit un trou en terre, se pencha dessus et prononça à voix basse les paroles qui l’oppressaient : Le roi Midas a des oreilles d’âne. Il se retira ensuite soulagé, mais à l’endroit même où il avait déposé son secret, des roseaux s’élevèrent, et quand le vent les agitait, ils répétaient sans cesse en s’inclinant et en se relevant : Midas, le roi Midas a des oreilles d’âne. Toute la Phrygie connut ainsi la vengeance d’Apollon.

Ce même monarque fut encore puni de sa cupidité. Bacchus lui avait offert un don à son choix. Midas demanda le pouvoir de changer en or tout ce qu’il toucherait. Ce triste privilège faillit le faire périr. S’il voulait manger ou se désaltérer, les aliments et les breuvages qu’on lui présentait se changeaient en or au seul contact de ses lèvres. Dévoré par les angoisses de la soif et de la faim, il appela Bacchus à son secours. Le dieu lui ordonna de se baigner dans les eaux du Pactole. Il y perdit heureusement son fatal privilège, mais depuis ce temps ce fleuve roule dans ses flots des paillettes d’or.

11. Marsyas fut encore plus cruellement traité que le roi de Phrygie par Apollon. Midas n’avait péché que par ignorance et n’était coupable que de sottise, mais Marsyas était un envieux. Apollon, après l’avoir vaincu en présence des hommes et des Muses, lui fit lier les mains derrière le dos, et l’écorcha tout vif, donnant un exemple barbare du châtiment que la jalousie mérite, toutes les fois qu’elle s’élève contre le vrai talent.

12. On représentait Apollon sous les traits d’un beau jeune homme sans barbe, le front couronné de lauriers et la tête ornée d’une longue chevelure blonde. A ses pieds étaient les emblèmes de tous les arts. Il tenait à la main sa lyre d’or dont les sons charmaient les dieux et les hommes. — Quand il est pris pour le dieu du soleil, il a un coq sur la main, il est couronné de rayons de lumière et parcourt le zodiaque sur un char traîné par quatre chevaux.

13. Parmi les animaux, on lui consacrait le coq, le corbeau, le cygne, la corneille, le loup, le vautour, la cigale et l’épervier ; parmi les plantes, le laurier, le tamarin, la jacinthe, le tournesol et le cyprès. Il avait beaucoup de temples, et on lui sacrifiait surtout des agneaux, des taureaux noirs, des brebis, des ânes et des chevaux.

Questionnaire. §

1. De qui Apollon était-il fils ? Où vint-il au monde ? Quelle vengeance Junon exerça-t-elle contre sa mère ? Comment Apollon tua-t-il le serpent Python ? Que fit-il de la peau de ce monstre ? 2. Qu’était Esculape ? Pourquoi Jupiter le foudroya-t-il ? De quelle manière Apollon se vengea-t-il de cette perte ? Quelles furent les suites de sa vengeance ? 3. Que fit Apollon en Thessalie ? Quelles furent ses aventures à propos du jeune Hyacinthe ? 4. Où se réfugia-t-il après avoir quitté la Thessalie ? Quelles furent ses aventures chez Laomédon ? 5. Quelles fonctions lui donna Jupiter quand il rentra dans l’Olympe ? Comment la fable le peint-elle quand elle le considère comme le dieu du jour ? 6. Quels furent ses enfants ? Pourquoi Phaéton demanda-t-il à conduire le char du soleil ? Qu’arriva-t-il ? Quel est le sens historique de cette fiction ? 7. Apollon n’était-il pas aussi le dieu des sciences et des arts ? Que disait de lui les Grecs sous ce rapport ? 8. Quelles étaient les fonctions des neuf Muses ? 9. Quels étaient les fleuves et les fontaines consacrés aux poëtes et aux Muses ? Qu’était Pégase ? 10. Quelles épreuves essuya le dieu des vers ? Quel fut le châtiment du roi Midas ? Quel don lui fit Bacchus ? Comment se délivra-t-il de ce triste privilège ? 11. Quel fut celui de l’envieux Marsyas ? 12. Comment représente-t-on Apollon comme dieu des arts et des sciences ? Comment le représentait-on comme dieu du jour ? 13. Quelles plantes et quels animaux lui étaient consacrés ? Quelles victimes lui offrait-on en sacrifice ?

Chapitre VIII.
Diane. §

1. Diane comme Apollon naquit de Jupiter et de Latone. Apollon était le dieu au soleil et Diane la déesse de la lune. Son frère présidait au jour et elle présidait à la nuit. C’est sans doute pour ce motif que la fable ajoute que Diane vint au monde en même temps qu’Apollon. Indépendamment de cette fonction, elle en avait d’autres qui lui firent donner des noms différents. Ainsi on la nommait Lune ou Phébé dans le ciel, Diane sur la terre, et Hécate dans les enfers. Au ciel elle conduisait le char de la lune, sur la terre elle présidait à la chasse, et aux enfers elle était quelquefois confondue avec l’épouse du terrible Pluton, la malheureuse Proserpine. Fontenelle a parfaitement caractérisé ce triple attribut dans ces vers :

Brillant astre des nuits, vous réparez l’absence
    Du dieu qui nous donne le jour :
    Votre char, lorsqu’il fait son tour,
Impose à l’univers un auguste silence,
Et tous les feux du ciel composent votre cour.
En descendant des cieux vous venez sur la terre
    Régner dans nos vastes forêts ;
Votre noble loisir sait imiter la guerre.
Les monstres, dans vos jeux, succombent sous vos traits.
Jusque dans les enfers votre pouvoir éclate,
Les mânes en tremblant écoutent votre voix.
    Au redoutable nom d’Hécate,
Le sévère Pluton rompt lui-même ses lois.

2. Les poëtes l’appellent la chaste Diane, parce qu’elle ne voulut jamais consentir à se marier. Elle exigea des nymphes qui l’accompagnaient le même serment, et punit des châtiments les plus terribles celles qui commirent les plus légères fautes. Ainsi elle chassa de sa cour Callisto qui avait oublié ses engagements sacrés, et changea en rocher la malheureuse Niobé, qui avait osé tirer vanité de la multitude de ses enfants. Elle fit aussi dévorer par ses chiens le chasseur Actéon, qui par mégarde avait jeté sur elle et sur ses nymphes des regards indiscrets.

3. Sur la terre on la vénérait comme la déesse de la chasse. La fable raconte qu’elle errait dans les forêts avec ses nymphes, qui étaient comme elle armées d’un arc et d’un carquois rempli de flèches. Ordinairement on la représente en habit de chasse, chaussée d’un cothurne, portant un carquois sur l’épaule, tenant un arc à la main et ayant un chien à ses côtés. On lui met un croissant sur le front quand on la prend pour la lune. Les poëtes disent encore qu’elle se promenait sur un char traîné par des biches et des cerfs blancs.

4. Le culte de cette déesse était cruel et farouche comme son caractère. Souvent on immolait sur ses autels des victimes humaines, spécialement sur les côtes de la Chersonèse Taurique, où l’on égorgeait tous les étrangers que la tempête avait jetés sur le rivage. Le plus fameux de tous les temples de Diane était celui d’Ephèse, qui passait pour une des sept merveilles de l’antiquité. Un fou nommé Erostrate y mit le feu pour faire passer son nom à la postérité. C’était le jour de la naissance d’Alexandre. On célébrait dans la Grèce beaucoup de fêtes en l’honneur de cette déesse : on les appelait Artémisies, parce que les Grecs donnaient à Diane le nom d’Artémis.

Questionnaire. §

1. De qui Diane était-elle fille ? Quelles étaient ses principales fonctions ? Quels noms lui donnait-on dans le ciel, sur la terre et dans les enfers ? 2. Comment les poëtes la surnommaient-ils ? Quelle fut sa conduite envers les nymphes qui n’imitèrent pas sa sagesse ? Quel supplice infligea-t-elle au chasseur Actéon ? 3. Sous quel titre la vénérait-on sur la terre ? Comment était-elle représentée ? 4. Quel était le caractère de son culte ? Où était le plus célèbre de ses temples ? Comment se nommaient les fêtes établies par les Grecs en son honneur ?

Chapitre IX.
Mercure. §

1. Mercure était fils de Jupiter et de Maïa, une des filles d’Atlas, astronome célèbre qui inventa la sphère et que les poëtes ont pour ce motif représenté avec le ciel sur les épaules. Ses attributs étaient très-variés. Il était le messager des dieux et traitait en leur nom des affaires les plus importantes. A ce titre, on lui donnait des ailes à la tête et aux pieds, pour qu’il pût exécuter leurs ordres plus promptement. Il réglait aussi la paix et la guerre, conduisait les âmes dans les enfers et avait pouvoir de les en retirer.

2. C’était par la merveille de son caducée qu’il opérait ce dernier prodige. Le caducée était une baguette entrelacée de deux serpents et surmontée de deux ailes. On raconte qu’un jour Mercure rencontra deux serpents qui se battaient et les sépara avec sa baguette. Les deux reptiles s’entrelacèrent autour de sa baguette, et formèrent cet instrument enchanté qui reçut le nom de caducée. Les poëtes supposent que l’âme né peut se séparer du corps que lorsque d’un coup de son caducée Mercure a rompu ses liens. Ils feignirent aussi que cette même baguette avait la puissance magique de commander au sommeil et aux songes.

3. Mercure était aussi le dieu des voleurs. Dès son enfance il avait mérité cet honneur, en déployant dans cet art funeste une étonnante habileté. Il prit à Neptune son trident, à Apollon ses flèches et son carquois, à Mars son épée, à Vénus sa ceinture, mais il laissa à Jupiter sa foudre. Cette fiction n’est peut-être qu’une allégorie gracieuse par laquelle les poëtes ont voulu nous taire entendre que l’éloquence avait besoin de s’entourer de toutes les espèces de mérites et de talents, pour suffire à tous les sujets qu’elle doit traiter.

4. Car Mercure était surtout honoré comme le dieu de l’éloquence. Il devait partout porter les ordres de Jupiter, faire en public des harangues toutes les fois que les circonstances l’exigeaient, répondre à celles qui lui étaient adressées par les dieux. C’est lui qui inventa la musique et la médecine et qui fut le maître d’Apollon, il imagina aussi les poids et mesures pour les ventes en détail, et fut regardé comme le dieu des marchands. Son nom de Mercure lui vient même de mercatura qui signifie commerce.

5. Ces fonctions variées l’ont fait représenter de bien des manières. Comme dieu de l’éloquence, on le voit avec une chaîne d’or qui lui sort de la bouche pour signifier la magie de ses paroles qui enchaînaient tous les esprits et tous les cœurs. Comme divinité tutélaire des marchands, il tient une bourse d’une main et de l’autre un rameau d’olivier et une massue. Le rameau marquait l’utilité de la paix pour le commerce, et la massue la force et le courage dont les navigateurs anciens avaient besoin pour parcourir les mers. Enfin, comme messager des dieux, il avait la figure d’un jeune homme, la taille svelte et dégagée, et tenait à la main le merveilleux caducée.

6. On lui donnait des noms divers comme ses fonctions. On l’appelait Cyllenicus du nom de la montagne qui l’avait vu naître, Nomius, parce qu’il était législateur, et Vialis parce qu’il présidait aux chemins. Ses statues, qui n’avaient ni pieds ni mains, s’appelaient hermès. On plaçait son image au-dessus des portes, pour détourner les voleurs, et on le nommait en cette qualité Stropheus : comme dieu du commerce, il s’appelait Empolius : dieu de la ruse, Dolius ; dieu conducteur, Hegemonius, etc., etc.

Questionnaire. §

1. Qu’était Mercure ? Quels étaient ses attributs ? 2. Par quel moyen opérait-il ses prodiges ? Qu’est-ce que le caducée ? Comment se forma cette baguette enchantée ? 3. Mercure n’est-il pas aussi le dieu des voleurs ? Qu’est-ce qui lui a mérité cet honneur ? Quel sens peut-on donner aux fictions imaginées par les poëtes à ce sujet ? 4. Quelles étaient les fonctions de Mercure comme dieu de l’éloquence ? Sous quel autre titre était-il encore honoré ? 5. De combien de manières le représentait-on ? Quelle était chacune de ces manières ? 6. Quels noms lui donnait-on ? D’où venaient ces noms ?

Chapitre X.
Minerve. §

4. Nous avons déjà dit2 comment Jupiter mit au monde Minerve, après avoir souffert d’un violent mal de tête. Aussitôt après sa naissance, cette déesse vint au secours de son père et l’aida de ses conseils et de son bras dans la guerre des géants. Elle terrassa elle-même la terrible Pallas dont elle prit le nom en souvenir de sa victoire. Elle alla encore sous les ordres de Jupiter combattre un monstre épouvantable, appelé Egide. Ce monstre vomissait le feu et la flamme et ravageait l’Egypte et la Libye. En mémoire de ce triomphe, elle couvrit son bouclier de la peau de cette bête sauvage, ce qui fit donner à cette espèce d’arme défensive le nom d’égide. Plus tard, elle y ajouta la tête de Méduse dont la vue pétrifiait tous ceux qui la regardaient. Méduse, une des Gorgones, habitait dans les îles Gorgades, non loin du Cap-Vert, avec ses sœurs Sthéno et Euryale. Elles étaient si étroitement unies ensemble que les poëtes ont dit qu’elles n’avaient qu’un œil et qu’une dent qu’elles se prêtaient tour à tour.

2. Minerve disputa à Neptune l’honneur de donner un nom à la cité nouvelle que Cécrops venait de fonder en Attique. Les dieux tinrent conseil à ce sujet. Ils décidèrent entre eux que la préférence serait accordée à celui des deux rivaux qui ferait le plus utile présent aux compagnons de Cécrops. Neptune frappa la terre de son trident, et il en sortit un coursier magnifique. C’était le symbole de la valeur. Tous les dieux furent dans l’admiration. Minerve de son côté ouvrit la terre avec sa lance, et l’on en vit soudain sortir un olivier chargé des plus beaux fruits. C’était le symbole de la paix et de l’abondance. Minerve l’emporta, et la cité de Cécrops reçut le nom d’Athènes. Peut-être celle fable n’est-elle que l’histoire allégorisée des anciennes luttes des colons et des pirates, luîtes qui se sont en effet terminées à l’avantage des colons, et qui ont abouti à la défaite des hommes de mer, représentés ici par Neptune.

3. Les Grecs n’ont pas expliqué d’une manière moins ingénieuse l’habileté de l’araignée à tisser sa toile. A les en croire, la jeune Arachné était devenue si habile dans l’art de manier l’aiguille qu’elle osa porter un défi à Minerve. La déesse, blessée de tant d’audace et d’orgueil, entra en fureur, déchira l’ouvrage de celle qui avait la présomption de se porter pour sa rivale, et la frappa de sa navette. Arachné au désespoir voulait se pendre, mais Minerve la métamorphosa en araignée.

4. Athènes, qui se trouvait placée sous la protection spéciale de cette divinité, lui éleva un temple magnifique, le Parthénon. Phidias, le plus habile de ses sculpteurs, en fit les ornements et lui éleva une statue d’or et d’ivoire. Ses fêtes étaient de deux sortes, les petites Panathénées qui se célébraient tous les ans, et les grandes Panathénées tous les cinq ans. On y disputait en présence de toute la Grèce les prix d’éloquence et de poésie. A Rome, on célébrait aussi les fêtes de Minerve. C’était dans le mois d’avril ; on les appelait Quinquatria. Les élèves offraient des présents à leurs maîtres (minervalia) pour signifier que la sagesse doit toujours présider aux travaux et aux leçons de la jeunesse.

5. Minerve était représentée avec une figure belle, simple et modeste, un air grave et majestueux. Elle avait un casque sur la tête, une égide sur la poitrine, et elle tenait d’une main sa lance et de l’autre son bouclier. Auprès d’elle, on voyait une chouette, son oiseau consacré, et divers instruments de musique et de mathématiques. Quelquefois aussi son casque est ombragé d’un panache flottant et surmonté d’une chouette.

Questionnaire. §

1. Comment naquit Minerve ? Quels services rendit-elle à son père après sa naissance ? Quels sont ses exploits belliqueux ? Qu’est-ce que Méduse et les Gorgones ? 2. A qui Minerve disputa-t-elle l’honneur de donner un nom à la cité de Cécrops ? De quelle manière remporta-t-elle sur son rival ? Quel est le sens probable de cette fiction ? 3. Comment les Grecs se sont-ils expliqué l’habileté de l’araignée à tisser sa toile ? 4. Quel fut le temple le plus célèbre de Minerve ? Quelles fêtes les Athéniens célébraient en son honneur ? Comment ces fêtes se passaient-elles à Rome ? 5. Comment Minerve était-elle représentée ?

Chapitre XI.
Mars. §

1. Mars est le dieu de la guerre. Ou n’est pas d’accord sur sa naissance. Les uns disent qu’il naquit de Jupiter et de Junon ; d’autres prétendent que Junon-seule lui donna le jour, comme Jupiter l’avait donné à Minerve. Rousseau peint le caractère de ce dieu en mettant ces vers dans la bouche de Jupiter :

Tigre à qui la pitié ne peut se faire entendre,
Tu n’aimes que le meurtre et les embrasements ;
Les remparts abattus, les palais mis en cendre,
Sont de ta cruauté les plus doux monuments.
La frayeur et la mort vont sans cesse à ta suite,
Monstre nourri de sang, cœur abreuvé de fiel,
Plus digne de régner sur les bords du Cocyte,
Que de tenir ta place entre les dieux du ciel.

2. Cette colère du souverain de l’Olympe avait ses motifs dans la lâcheté du dieu de la guerre. Car, si l’on en juge par ses exploits, cet immortel s’était montré peu digne du titre dont il était revêtu. Dans le combat des géants, il avait été fait prisonnier, et il avait fallu que Mercure vint à son aide pour lui rendre la liberté. Dans la guerre de Troie, il fut blessé par les flèches de Diomède. Dans sa douleur, il poussa des cris plus forts que la voix de dix mille guerriers, et c’est alors que Jupiter lui adressa les violents reproches que le poëte vient d’exprimer.

3. Aussi les Grecs, qui ont inventé ces fictions, avaient plus de confiance dans l’éloquence du dieu de la guerre que dans sa valeur. Car ils nous rapportent que, Mars ayant tué le fils de Neptune, Halirrothius, l’affaire fut évoquée au conseil des dieux qui se réunit à Athènes pour juger ce procès. Le fait était certain, Mars ne pouvait le nier. Néanmoins il plaida sa cause avec tant d’art qu’il fut absous. On bâtit un palais à l’endroit même où cette affaire avait été discutée, et on y établit un tribunal qui prit le nom d’Aréopage, parce que les Grecs appelaient Mars, Arès. Seulement, pour mettre les juges à l’abri des séductions du talent, on défendit à tous ceux qui comparaissaient devant ce tribunal d’avoir recours à l’éloquence et à ses prestiges.

4. Mars avait par là prouvé sa perfide habileté. Plus tard, il montra sa cruauté dans la conduite qu’il tint envers Alectryon, un de ses gardes. Il l’avait chargé de l’éveiller avant l’aurore pour que le soleil à son lever ne le surprit pas dans un lieu où il s’était retiré. Alectryon s’endormit et oublia l’ordre qui lui avait été donné. Mars fut surpris par les premiers feux du jour, c’est-à-dire, par Apollon. Pour se venger de l’infidélité de son gardien, il le métamorphosa en coq, et le condamna à prévenir toujours par ses chants le lever de l’aurore.

5. Les Romains et les peuples du Nord ont eu pour le dieu de la guerre un culte plus profond et plus éclatant que les Grecs et les Orientaux. Les Romains avaient rattaché à ce dieu l’existence de leur ville, en supposant que Romulus et Remus, leurs fondateurs, étaient ses fils. Ils se croyaient particulièrement l’objet de ses faveurs. Avant toutes leurs grandes entreprises, ils lui offraient des sacrifices. Les consuls qui devaient prendre le commandement des légions touchaient sa lance avant leur départ et lui disaient : Veille, Mars ! On lui éleva plusieurs temples à Rome ; le plus célèbre est celui de Mars vengeur. Les prêtres au service de ce temple portaient le nom de saliens. Numa Pompilius avait institué leur collège. Il leur avait donné de petits boucliers nommés ancilles, qu’on disait semblables à un bouclier sacré tombé du ciel. Chaque année, à un jour déterminé, ces prêtres faisaient le tour de Rome en |portant ces boucliers comme marque de leur dignité. En même temps ils couraient et chantaient des hymnes en l’honneur de leur dieu.

6. On représente Mars sous la figure d’un guerrier terrible armé de pied en cap. On place auprès de lui un coq, symbole de la vigilance militaire. Quelquefois il est sur un char traîné par des chevaux fougueux conduits par Bellone. Cette déesse était son épouse. Elle préparait ses armes, lorsqu’il devait aller au combat, et se mettait à ses côtés sur son char, le casque en tête, les cheveux épars, l’œil en feu et une torche ensanglantée à la main. On immolait sur ses autels des loups et quelquefois des victimes humaines.

Questionnaire. §

1. Qu’est-ce que Mars ? Quelle fat sa naissance ? Quel était son caractère ? 2. Pourquoi Jupiter était-il irrité contre lui ? Quelles sont ses lâchetés et ses défaites ? 3. N’était-il pas plus habile à manier la parole que les armes ? Quel procès gagna-t-il contre Neptune ? Quelle fut l’origine de l’Aréopage ? 4. En quelle circonstance Mars montra-t-il de la cruauté ? 5. En quel lieu était-il spécialement honoré ? Quel était le culte des Romains pour Mars ? Quel était le premier de ses temples à Rome ? Quel était le nom de ses prêtres ? Comment célébraient-ils sa fête ? 6. Comment Mars est-il représenté ? Qu’est-ce que Bellone ? Quelles sont les fonctions de cette déesse ? Quelles victimes offrait-on au dieu de la guerre ?

Chapitre XII.
Vulcain. §

1. Vulcain était fils de Jupiter et de Junon. Quand il vint au monde, son père le trouva si laid et si difforme qu’il lui donna un coup de pied et le précipita du ciel. Il alla tomber dans l’île de Lemnos et se cassa une jambe dans sa chute. Il en demeura toujours boiteux. Dans son exil, il se mit à forger le fer et à remployer avec art. L’île de Lemnos retentissait sans cesse des coups de marteau qu’il frappait sur son enclume avec les Cyclopes, les compagnons de ses travaux. Les Cyclopes étaient des géants robustes qui n’avaient qu’un œil au milieu du front et qui savaient travailler l’or, le fer et l’acier avec l’art le plus merveilleux. Non-seulement on supposait qu’ils habitaient les cavernes de Lemnos, mais la fable place encore leurs forges à Lipari, dans les maisons de l’Etna et généralement près de toutes les montagnes volcaniques. C’était pour les poëtes un moyen facile de s’expliquer les bruits souterrains oui précèdent les éruptions dont ces lieux étaient très-souvent le théâtre. Pour regagner les bonnes grâces du maître des dieux, le chef de ces terribles Cyclopes, Vulcain, lui fournit des armes contre ses ennemis. Il lui en envoya d’abord pour combattre les géants, et elles servirent si bien le courroux de Jupiter, qu’il rappela Vulcain au céleste séjour et lui donna pour épouse Vénus, la plus belle des déesses.

2. Le rôle de Vulcain au ciel était d’apaiser tous les troubles qui s’élevaient parmi les habitants de l’Olympe. Cependant il s’était déclaré un jour contre Junon sa mère, parce qu’il ne pouvait lui pardonner sa propre laideur dont il avait la folie de la rendre responsable. Il s’unit à Jupiter irrité, et forgea les chaînes qui la retinrent longtemps captive sur un trône entre le ciel et la terre. En vain les autres divinités cherchèrent-elles à délivrer la malheureuse Junon. Vulcain seul en fut capable, et il ne le fît qu’à la condition qu’on lui donnerait Vénus pour épouse. Dans ses forges, qu’il avait établies à Lipari, à Lemnos et dans les environs de l’Etna, le dieu du feu continuait à produire avec ses Cyclopes toutes sortes d’ouvrages ingénieux. Il y fabriqua pour Pluton le casque qui le rend invincible, pour Neptune le trident qui soulève les flots, et fit aux mortels les plus magnifiques présents. Les armes d’Achille, les armes d’Enée, le palais du Soleil, la couronne d’Ariane, le sceptre d’Agamemnon, et une foule d’autres merveilles sortirent des ateliers de ce dieu industrieux.

3. Les fêtes célébrées en son honneur portaient le nom de Lampadophories ou porte-flambeaux. On les avait ainsi appelées, parce que dans ces fêtes il y avait des jeux où les jouteurs couraient avec des flambeaux qu’ils se passaient de main en main, curieux et touchant symbole de la vie qui se transmet ainsi de génération en génération. Les temples les plus célèbres de Vulcain étaient à Rome et à Memphis. Le lion lui était consacré, parce que cet animal imite par ses rugissements le bruit d’un volcan embrasé.

4. Ce dieu n’a point été embelli par les fictions de la poésie. On le représente toujours sous une figure hideuse et difforme avec une longue barbe, une chevelure négligée, un bonnet rond et pointu, des jambes cagneuses, un marteau dans une main et dans l’autre des tenailles.

Questionnaire. §

1. Qu’est-ce que Vulcain ? Comment le traita Jupiter quand il vint au monde ? Où fut-il exilé ? Que fit-il dans son exil ? Qu’étaient les Cyclopes ? Quels lieux habitaient-ils ? Comment Vulcain regagna-t-il les bonnes grâces du maître des dieux ? Quelle récompense lui donna Jupiter ? 2. Quel était son rôle dans l’Olympe ? Pourquoi enchaîna-t-il Junon ? A quelle condition la délivra-t-il ? Quels furent ses exploits et ses travaux ? 3. Quelles fêtes se célébraient on son honneur ? Dans quels lieux lui bâtit-on les temples les plus fameux ? Quel animal lui était consacré ? 4.Comment représentait-on Vulcain ?

Chapitre XIII.
Bacchus. §

1. Bacchus était le dieu de la joie et des festins. La fable a environné sa naissance de grandes merveilles. Elle raconte qu’il était fils de Jupiter et de Sémélé, fille de Cadmus, roi de Thèbes. Sa mère ayant désiré que Jupiter lui apparût dans tout l’éclat de sa gloire, le souverain des dieux, qui avait juré par le Styx de lui accorder tout ce qu’elle lui demanderait, se vit contraint de satisfaire son imprudente curiosité. Il se montra donc à elle armé de son tonnerre et dans tout l’appareil de sa puissance. Sémélé ne put soutenir la majesté du maître du ciel et de la terre, et tomba frappée de mort. Jupiter sauva le jeune Bacchus.

2. A sa naissance, l’enfant dieu fut déposé dans file de Naxos, d’où Mercure le transporta près de la ville de Niza, pour le remettre aux filles d’Atlas, roi de Mauritanie. Bacchus devenu grand se ressouvint des soins que ces nymphes lui avaient prodigués, et par reconnaissance il les plaça dans le ciel. Ce sont les étoiles qui forment la constellation des Hyades.

3. Indépendamment de ces nymphes, les Muses et le vieux Silène avaient aussi contribué à l’éducation de Bacchus. Ce Silène était un buveur insatiable, un vieillard gros et gras, qu’on représente assis sur un tonneau, le visage couvert de lie et la tête couronnée de pampres de vigne. Il tient à la main une coupe qu’il vide sans cesse et qui se remplit toujours, et il a pour monture un âne sur lequel il se tient à peine et qui supporte le poids de son ventre. Bacchus eut les vices de son précepteur, mais il eut plus de courage.

4. Dans la guerre contre les Titans, lorsque tous les dieux s’étaient enfuis en Egypte sous la forme de vils et timides animaux, Bacchus resta seul à côté de Jupiter, et prit la figure d’un lion pour aider le souverain des dieux à remporter la victoire, en jetant la frayeur parmi ses ennemis. Après ce brillant exploit, le fils de Sémélé leva une armée composée de personnes de tout âge, de tout sexe et de toute condition, et résolut de parcourir l’univers en vainqueur. Il traversa la plus grande partie de l’Asie, fit la conquête de l’Inde et répandit partout les semences d’une brillante civilisation. Au lieu d’armes, il donnait à tous ceux qui raccompagnaient des thyrses et des tambours, et, partout où il passait, il enseignait aux hommes à labourer la terre et à cultiver la vigne. Ce dernier trait, sur lequel la fable appuie tout spécialement, nous donne le sens de cette allégorie, et nous fait comprendre que les conquêtes du dieu de la gaieté et des festins ne sont qu’une personnification du bien-être qui se répandit sur tous les peuples, à mesure que l’agriculture fut mieux connue et que les arts furent plus cultivés.

5. Après toutes ses expéditions, Bacchus revint à Naxos où il avait été élevé. Il y trouva l’infortunée Ariane que Thésée, le roi d’Athènes, avait abandonnée dans cette île, bien qu’elle l’eut aidé à sortir du labyrinthe de Crète après le meurtre du Minotaure. Ariane avait espéré s’asseoir sur le trône d’Athènes, et elle voyait toutes ses espérances trompées ! Bacchus la consola des perfidies de Thésée, la prit pour épouse et lui donna une couronne d’or qui, après la mort de cette princesse, devint une constellation. C’est cette constellation qu’on a nommé la Couronne d’or.

6. Les fêtes de Bacchus s’appelaient orgies ou Bacchanales. Les hommes et les femmes se barbouillaient de lie et insultaient sans retenue ceux qui ne s’associaient pas à leur fureur. Les prêtresses de ce dieu, appelées ménades ou bacchantes, couraient sur les montagnes, les cheveux épars, le corps vêtu de peaux de tigres ou de panthères, portant dans leurs mains des thyrses ou des flambeaux, et mettant en pièces tous ceux qu’elles rencontraient. Penthée, roi de Thèbes, avait voulu empêcher ses sujets de célébrer ces fêtes licencieuses. Bacchus s’en vengea en livrant ce prince à ses bacchantes qui le mirent en lambeaux.

7. Les filles de Minée, autre roi de Thèbes, avaient aussi refusé d’assister à ces fêtes. Le jour où on les célébrait, elles cherchèrent leur récréation et leur plaisir dans le travail. Habituellement occupées à broder et à faire des tapisseries, ce jour-là elles pressèrent leurs esclaves plus que de coutume, et, malgré les conseils et les exhortations de leurs parents, elles ne voulurent quitter ni leur navette, ni leur fuseau. Elles se moquaient même des bacchantes et de leur accoutrement. Soudain Bacchus entre avec son cortége.

« Où sont, dit-il, ces sœurs à la main sacrilége ?
Que Pallas les défende et vienne en leur faveur
Opposer son égide à ma juste fureur !
Rien ne m’empêchera de punir leur offense.
Voyez et qu’on se rie après de ma puissance ! »
Il n’eut pas dit, qu’on vit trois monstres au plancher,
Ailés, noirs et velus, en un coin s’attacher.
On cherche les trois sœurs ; on n’en voit nulle trace.
Leurs métiers sont brisés ; on élève en leur place
Une chapelle au dieu, père du vrai nectar.

La Fontaine conclut de cette fiction qu’il faut honorer les dieux dans les jours qui leur sont consacrés :

Chômons ; c’est faire assez qu’aller de temple en temple
Rendre à chaque immortel les vœux qui lui sont dus.
Les jours donnés aux dieux ne sont jamais perdus.

8. On représente Bacchus avec des cornes, symbole de sa force et de sa puissance. Il a la figure d’un beau jeune homme imberbe, au visage riant et à la chevelure flottante ; il est couronné de pampres ou de lierres, et tient d’une main des grappes de raisin ou une coupe, tandis que de l’autre il a un thyrse. Quelquefois il est assis sur un tonneau ou bien monté sur un char traîné par des tigres ou des panthères. Une peau de léopard couvre ses épaules. On lui immolait des pies parce que le vin rend indiscret, et des boucs parce que ces animaux déduisent les bourgeons de la vigne. On lui consacrait le lierre qui, disait-on, dissipe par sa fraîcheur les fumées du vin.

Questionnaire. §

1. Qu’était Bacchus ? De quelles merveilles la labié a-t-elle environné sa naissance ? 2. Dans quel lieu fut-il élevé ? Que devinrent les nymphes qui se chargèrent de son éducation ? 3. Qu’est-ce que le vieux Silène ? Comment le représentait-on ? Bacchus eut-il tous ses défauts ? 4. Quels sont les exploits de Bacchus ? Quel était le caractère de ses conquêtes ? Quels bienfaits répandit-il sur les contrées qu’il subjugua ? 5. Quelles furent les aventures d’Ariane ? Comment devint-elle l’épouse de Bacchus ? 6. Qu’est-ce que les Bacchanales ? De quel châtiment fut puni Penthée pour n’avoir pas voulu les célébrer ? 7. Quel fut le sort des filles de Minée ? Quelle avait été leur faute ? 8. Comment représente-t-on Bacchus ? Quelles victimes lui offrait-on ? Quelle plante lui était consacrée ?

Chapitre XIV.
Vénus. §

1. Vénus est la déesse de la beauté. Quelques-uns disent qu’elle était fille de Jupiter et de Dioné, une des nymphes de l’Océan. D’autres veulent qu’elle soit née de l’écume de la mer près de l’ile de Cypre. Elle aurait été tout à coup formée et aurait erré quelque temps après sa naissance, autour de l’île, mollement balancée par les vagues de la mer qui paraissait toute fière de porter un tel fardeau. Mais Zéphyre accourut et transporta la déesse dans l’île, qui devint aussitôt un séjour enchanteur. Des buis délicieux s’élevèrent dans les environs de Paphos et d’Amathonte ; la terre se couvrit de verdure, des ruisseaux limpides coulèrent avec un doux murmure, et l’air fut parfumé des odeurs les plus suaves et les plus exquises. Les Grâces et les Ris s’empressèrent autour de la déesse, et les Heures se chargèrent de l’instruire.

L’une lui disait :

Ne prétendez point à l’esprit,
Et surtout gardez-vous d’en faire.
Parlez peu, mais bien. Ce qu’on dit,
Quand la raison le dicte, est toujours sûr de plaire.
[Demoustier]

L’autre ajoutait :

    Quoique femme, soyez discrète.
Songez qu’il est cruel d’oser sacrifier
Un espoir, un bonheur, une peine secrète
    Que l’on a cru pouvoir nous confier.
[Demoustier]

Une troisième disait encore :

Il est partout des malheureux :
Ne dédaignez point l’indigence.
Le plus noble attribut des dieux,
Ma fille, c’est la bienfaisance.
Si vous saviez comme il est doux
De visiter, dans leur chaumière,
Les mortels que leur cœur jaloux
A condamnés à la misère,
De compatir à leurs malheurs,
De mêler nos soupirs aux leurs !
[Demoustier]

2. Lorsque Vénus eut été formée par ces sages leçons, Jupiter, touché des charmes de la déesse, résolut de l’introduire dans le ciel et de la faire paraître devant les immortels. Tous les dieux admirèrent sa beauté, et toutes les déesses en devinrent jalouses. Vénus n’obtint cependant pas pour époux celui qu’elle désirait. Jupiter la donna au difforme et hideux Vulcain, pour le récompenser de ce qu’il avait forgé dans ses ateliers souterrains son trône, son palais et ses foudres.

3. Les enfants de Vénus furent l’Hymen et Cupidon. L’Hymen était représenté sous la figure d’un jeune homme couronné de fleurs, tenant dans sa main droite un flambeau et dans sa gauche un voile nuptial. Il présidait aux unions conjugales, et les peintres qui le représentaient cherchaient pour ce motif à montrer dans ses traits quelque chose qui annonçait la prudence et la réflexion ou bien encore l’inquiétude et les soucis. Cupidon son frère était un enfant ailé, portant un arc et un carquois rempli de flèches. Il avait un bandeau sur les yeux et quelquefois un doigt sur la bouche en signe de discrétion. Jupiter voulait le faire périr parce qu’il prévoyait tous les maux que cet enfant devait faire aux dieux et aux hommes. Mais sa mère le cacha dans les forêts, où il se nourrit du lait des bêtes sauvages.

4. Vénus avait pour compagnes les trois Grâces, Aglaé, Thalie et Euphrosyne. Elles étaient filles de Jupiter et d’Eurynome, ou de Bacchus, comme le pensent quelques mythologues. On les représentait ornées de guirlandes de fleurs. La première tient ordinairement une rose, la seconde un dé, et la troisième un myrte. Sans avoir tous les charmes et tous les agréments de la déesse de la beauté, elles plaisaient par leur candeur et leur simplicité naturelle.

5. La fable dit que Vénus quittait souvent le séjour des dieux pour se promener sur la terre. Elle montait alors sur un char formé par des coquilles et traîné par des colombes. Elle traversait avec la légèreté d’une ombre ces prairies enchantées, et ces magiques bosquets de myrtes et d’arbres odoriférants qui l’avaient accueillie à sa naissance. Un jour dans une de ses courses terrestres, elle rencontra le jeune Adonis, le fils de Cyrinas, roi de Cypre. C’était un impétueux chasseur qui ne ces- sait de poursuivre dans les forêts les bêtes sauvages. La déesse lui accorda ses faveurs, mais elle n’a pu le délivrer de la fureur de Mars qui le prit dès lors en aversion. Un sanglier énorme suscité par Diane que Mars avait appelée à son secours dévora le jeune prince, et Vénus fut réduite à changer en anémone son favori.

6. Elle obtint pourtant de Proserpine, reine des enfers, qu’Adonis sortirait des sombres royaumes pendant six mois de l’année et qu’il reviendrait sur la terre. On fit de ce mortel privilégié une espèce de dieu. Il eut ses temples et ses autels en Cypre, en Phénicie et jusque dans la Judée. Dans ses fêtes on poussait d’abord de grandes plaintes, de profonds gémissements en mémoire du deuil et du chagrin de Vénus ; puis venaient les joies, les danses dissolues et tumultueuses qui rappelaient le retour d’Adonis à la vie.

7. Le culte de Vénus fut universel comme la corruption qu’il autorisait. Elle était principalement honorée à Amathonte, à Paphos, et à Cythère. La ville et les montagnes d’Idalie lui étaient consacrées. On ne parlait que des ombrages toujours verts, des retraites délicieuses et de tous les agréments dont la nature avait embelli ces lieux. A Cythère elle avait un temple magnifique dont les alentours étaient couverts de bocages enchanteurs, et de ruisseaux limpides coulant sur un sable d’or, entre des rives bordées de fleurs. Les poëtes lui donnent les surnoms de Cythérée et de Cypris par allusion aux îles où elle avait choisi sa demeure. La colombe, la rose et le myrte lui étaient consacrés.

8. Les femmes lui offraient leur chevelure. On raconte que Bérénice, l’épouse de Ptolémée, roi d’Egypte, ayant fait à Vénus un semblable sacrifice pour le bonheur des armes de son mari qui s’était mis en campagne contre le roi de Syrie, sa chevelure suspendue au temple disparut. Les flatteurs ne manquèrent pas de dire que la déesse de la beauté avait placé au ciel la chevelure de la reine, et il se trouva un astronome assez heureux et assez habile pour découvrir aussitôt dans le ciel une nouvelle constellation. On ne douta pas que ce ne fût la chevelure de Bérénice ; on l’appela ainsi, et ce nom lui est resté.

9. On présente ordinairement Vénus sur un char traîné par des colombes, des cygnes ou des moineaux Sa tête est couverte de myrtes et de roses ; son fils Cupidon est à ses côtés, et les trois Grâces l’environnent. Ou bien encore elle est portée sur une conque marine, la tête surmontée d’un voile enflé par le souffle des zéphirs. Les Tritons se jouent autour d’elle, une rame est à ses pieds et son fils Cupidon nage à ses côtés. Les poëtes ont souvent célébré cette déesse ; les peintres et les sculpteurs se sont efforcés de la représenter. La Vénus de Praxitèle passait pour le chef-d’œuvre de la sculpture grecque.

Questionnaire. §

1. Qu’est-ce que Vénus ? De qui était-elle fille ? Comment fut-elle transportée dans l’île de Cypre ? Quel changement sa présence opéra dans cette île ? Qui présida à son éducation ? Quelles leçons lui donnaient les Grâces ? 2. Qui l’introduisit dans le ciel ? A qui fut-elle mariée ? 3. Quels sont ses enfants ? Comment l’Hymen était-il représenté ? Quel était le caractère de Cupidon ? 4. Quelles étaient les compagnes de Vénus ? De qui étaient-elles filles ? Comment étaient-elles, représentées ? 5. Que dit la fable des voyages que Vénus faisait sur la terre ? Quelle fut la destinée d’Adonis ? 6. Quelle grâce Vénus obtint pour lui de Proserpine ? En quels lieux eut-il des temples ? Comment se célébraient ses fêtes ? 7. Le culte de Vénus était-il bien répandu ? Où était-elle particulièrement honorée ? Quel était le plus célèbre de ses temples ? Quels noms lui donnaient les poëtes ? 8 Quelle offrande lui faisaient les femmes ? Quelle fable inventa la flatterie à propos de la chevelure de Bérénice ? 9. Comment Vénus était-elle représentée ? Quel était le chef-d’œuvre de la sculpture grecque ?

Chapitre XV.
Neptune et les divinités maritimes. §

1. Avant Neptune existaient l’Océan et Téthys. Ces deux divinités représentaient les deux mers, l’Océan et la Méditerranée que les hommes divinisèrent et qu’ils dirent naître du Ciel (Uranus) et de la Terre (Titéa). L’Océan épousa Téthys, et de leur alliance naquirent les Océanides, les nymphes de la mer. Les fleuves passaient aussi pour leurs enfants. Les poëtes représentaient l’Océan sous la forme d’un vieillard, le front armé de deux pinces d’écrevisse, sans doute pour montrer qu’il ne lâche jamais sa proie. Il tenait une pique à la main, et avait un monstre à ses côtés. Téthys était portée sur un char formé d’une conque parfaitement belle, plus éclatante que l’ivoire et paraissant voler sur la surface des ondes. Aux fleuves on donnait la figure d’un vieillard, une barbe épaisse, une chevelure longue et traînante, une couronne de joncs. Ils s’appuyaient sur une urne penchante d’où sortait une eau limpide comme celle de toutes les sources auxquelles ils présidaient.

2. De l’Océan et de Téthys naquit encore Nérée, qui épousa Doris sa sœur et en eut un grand nombre de filles, connues sous le nom de nymphes. Ces nymphes portaient différents noms en raison de leurs différents emplois. Les Néréides étaient les nymphes de la mer. Elles faisaient l’ornement du cortége de Neptune, et séduisaient tous les voyageurs par l’éclat de leur beauté. Les Naïades étaient les nymphes des fleuves, des rivières et des fontaines ; les Dryades, celles des campagnes ; les Hamadryades, celles des forêts ; les Napées, celles des bocages et des prairies ; les Oréades, celles des montagnes.

3. Neptune était, comme Jupiter, fils de Cybèle et de Saturne. Quand il vint au monde, sa mère le déroba à l’avide férocité de son époux et le cacha dans une écurie. Lorsque Jupiter se fut rendu maître de l’univers, il donna l’empire des mers à Neptune son frère. Nous avons déjà dit comment, après avoir tramé une conspiration contre le souverain des dieux, Neptune avait été exilé sur la terre où il eut beaucoup à souffrir de la perfidie de Laomédon3. Nous avons aussi rappelé sa défaite dans la lutte qu’il soutint contre Minerve à l’occasion de la fondation d’Athènes4.

4. Le dieu des mers épousa une des filles de Nérée et de Doris, la vierge Amphitrite qui avait juré de ne se jamais marier. La fable dit que ce fut un dauphin qui persuada à Amphitrite de renoncer à son vœu, et qu’en récompense Neptune le mit au rang des constellations. De ce mariage Neptune eut beaucoup d’enfants. Les plus célèbres furent les Tritons et les Harpies.

3. Les Tritons étaient des monstres qui ressemblaient à l’homme par la partie supérieure de leur corps et pour le reste depuis la ceinture à un poisson. Ils précédaient le char de Neptune et sonnaient d’une conque marine qui leur servait de trompette. Leur char était trainé par des chevaux blancs, et les poëtes leur attribuent le pouvoir de câliner les flots.

6. Les Harpies étaient d’autres monstres qui avaient un visage de femme, des oreilles d’ours, des ailes de chauves-souris, un corps de vautour et des griffes aux pieds et aux mains. Elles étaient excessivement sales, et elles infectaient tout ce qu’elles touchaient. La plus fameuse était Céléno, et après elle Aëllo et Ocypète.

7. Parmi les autres dieux marins on distinguait encore Protée, les Sirènes, Eole et les Vents, Charybde et Scylla, Glaucus et Mélicerte.

8. Protée, fils de l’Océan et de Téthys selon les uns et fils de Neptune selon les autres, était le gardien des troupeaux de Neptune. Ces troupeaux étaient composés de phoques et de veaux marins. L’illustre pasteur qui les conduisait avait la connaissance du passé, du présent et de l’avenir. Mais il prenait toutes sortes de formes pour éluder les questions des mortels curieux qui le consultaient. Il se métamorphosait en lion, en loup, en léopard pour épouvanter tous ceux qui l’approchaient, ou bien il se changeait en eau, en feu, en fontaine, etc.

Tel que le vieux pasteur des troupeaux de Neptune,
Protée, à qui le ciel, père de la fortune,
        Ne cache aucuns secrets,
Sous diverse figure, arbres, flamme et fontaine,
S’efforce d’échapper à la vue incertaine
        Des mortels indiscrets.
Rousseau.

Pour le contraindre à parler, il fallait le surprendre endormi et le lier de manière à lui faire reprendre sa forme première. C’est ainsi que le berger Aristée lui ravit le secret de faire renaître les abeilles. Virgile a merveilleusement raconté cette fable dans ses Géorgiques.

9. Les Sirènes étaient encore des monstres moitié filles et moitié poissons comme les Harpies. Mais elles avaient pour elles la grâce et le charme de leurs accents mélodieux qui enchantaient tous les voyageurs. Elles habitaient les rochers de la Sicile, et séduisaient par la beauté de leurs voix tous ceux qui passaient dans ses parages. L’oracle avait annoncé que si elles laissaient passer un mortel sans le captiver par l’harmonie de leurs chants, elles périraient aussitôt. Ulysse, roi d’Ithaque, errant sur les mers après la ruine de Troie, vint à traverser la mer non loin de ces rochers tristement fameux. Circé, la magicienne, l’avait averti du danger, et, pour résister à la séduction, ils avaient bouché les oreilles de tous ses compagnons avec de la cire et s’était fait lui-même attacher au mât de son navire. Toutes ces précautions ne furent point inutiles. Ulysse séduit conjurait ceux qui l’entouraient de le délier ; mais personne n’eut la faiblesse de condescendre à ses imprudents désirs, et le vaisseau passa outre. Les Sirènes désespérées se jetèrent à la mer.

10. Eole, le dieu des vents, régnait dans les mêmes lieux. Il habitait dans les îles de la mer de Sicile, qui de son nom s’appelèrent Eolides. Ce sont aujourd’hui les îles de Lipari. Eole était fils de Jupiter, et commandait aux vents et aux tempêtes. Le maître des dieux lui avait donné cette puissance, et il en usait avec une entière liberté. Eole remit les vents à Ulysse, après les avoir enfermés dans une outre ; mais les compagnons du royal fugitif eurent la témérité d’ouvrir leur prison et d’exciter ainsi une tempête affreuse qui brisa leur navire. Les quatre vents principaux étaient Eurus, Auster, Zéphyre et Boréas. Zéphyre est le doux vent du printemps, et on le représente couronné de fleurs ; Boréas est le terrible vent du nord qui traîne après lui les tempêtes, la neige et les rimas. Auster, le vent brûlant du midi, était représenté comme un vieillard dont le front est chargé de nuages ; et Eurus, le vent du sud-est, comme un jeune homme agile qui fuit avec une incroyable rapidité.

11. Glaucus, antre dieu marin, naquit de Neptune et de la nymphe Naïs. C’était un célèbre pêcheur spécialement vénéré par les hommes de cet art. On le représentait avec une barbe touffue, d’épais sourcils et de longs cheveux flottants sur ses épaules. La fable rapporte qu’un jour, après avoir pris des poissons, il s’aperçut qu’ils mangeaient d’une certaine herbe, et se rejetaient ensuite à la mer pleins de vie. Il en mangea lui-même, et se précipita au milieu des flots, où l’Océan et Téthys le dépouillèrent de ce qu’il avait de mortel pour le placer au nombre des dieux marins. Peut-être Glaucus fut-il le premier pêcheur qui quitta les côtes et osa se lancer en pleine mer ; l’imagination du peuple aura ainsi divinisé ce courageux effort.

12. Mélicerte était fils d’Ino et d’Athamas, roi de Thèbes. Ino, pour éviter la fureur de son mari, se précipita dans la mer, et Neptune la reçut au rang des divinités avec son fils. Les Grecs adoraient Ino sous le nom de Leucothoé, et les Romains sous celui de Matuta. Son fils s’appelait Portumnus, et on le représentait avec une clef à la main parce qu’il était reconnu comme le protecteur des ports.

13. Charybde et Scylla eurent l’une et l’autre les mêmes destinées. Charybde était une femme cruelle qui avait volé des bœufs à Hercule. Jupiter la frappa e sa foudre et la métamorphosa en un gouffre affreux qui se trouve dans le détroit de Sicile. Scylla était une nymphe qui avait dédaigné les vœux de Glaucus. Circé, la magicienne, empoisonna par vengeance la fontaine où cette nymphe se baignait, et elle se trouva métamorphosée en un gouffre semblable à celui de Charybde. Ces deux gouffres creusés en face l’un de l’autre devinrent fameux par de fréquents naufrages ; ce qui fit dire aux poëtes qu’ils avalaient tout entiers les vaisseaux qui les traversaient.

14. Neptune, qui avait sous son empire tous ces dieux, était la grande divinité des Libyens. Il avait de nombreux temples dans la Grèce et Italie. On célébrait même des fêtes et des jeux en son honneur. Les plus célèbres étaient les jeux Isthmiques qui avaient lieu tous les trois ans. On les appelait ainsi parce qu’ils se tenaient dans l’isthme de Corinthe. La Grèce entière y accourait. On s’y exerçait de la même manière qu’aux jeux Olympiques, et il y avait en outre des prix pour la musique, la poésie et le pugilat. Thésée avait institué ces jeux en l’honneur de Neptune. Le cheval était spécialement consacré à ce dieu, parce qu’on dirait qu’il l’avait fait sortir de terre d’un coup de trident. On lui immolait aussi des taureaux, et les devins lui offraient le fiel de leurs victimes, parce qu’il est amer comme les eaux de l’Océan.

15. On représente Neptune un trident à la main, debout sur les flots de la mer ou monté sur un char en forme de conque traîné par des chevaux marins. Les roues de son char sont d’or et paraissent voler à la surface des ondes. Les Tritons, les Néréides et les Dauphins, recouverts de leurs écailles d’or et d’argent, lui font cortége.

Questionnaire. §

1. Quelles divinités maritimes existaient avant Neptune ? Quels furent les enfants de l’Océan et de Téthys ? Comment les poëtes représentaient-ils l’Océan, Téthys et les fleuves ? 2. Quelles furent les filles de Nérée et de Doris ? Comment se nommaient les nymphes ? 3. De qui Neptune était-il fils ? Qui lui donna l’empire des mers ? Quelles furent ses aventures sur terre ? 4. Qui épousa Neptune ? Comment obtint-il la main d’Amphitrite ? Quels enfants eut-il de ce mariage ? 5. Qu’est-ce que les Tritons ? Quelles étaient leurs fonctions ? 6. Qu’est-ce que les Harpies ? Quelles étaient les plus connues ? 7. Quels sont les dieux marins les plus célèbres ? 8. Qu’était Protée ? Quelle était sa science ? Comment éludait-il les questions de ceux qui le consultaient ? Comment pouvait-on le contraindre à révéler ses secrets ? 9. Qu’est-ce que les Sirènes ? Quelle prédiction leur avait faite l’oracle ? Comment Ulysse se prémunit-il contre leurs enchantements ? Quel fut leur sort ? 10. Qu’est-ce qu’Eole ? Où habitait-il ? Quel présent fit-il à Ulysse ? Quels étaient les noms des principaux vents ? 11. Qu’est-ce que Glaucus ? Comment est-il représenté ? Qu’est-ce que la fable raconte sur sa vie ? Quel sens pourrait-on donner à cette fiction ? 12. De qui Mélicerte était-il fils ? Quelles furent ses destinées ? Quelles furent celles de sa mère ? 13. Qu’était Charybde ? Pourquoi fut-elle métamorphosée en un gouffre affreux ? Qu’était Scylla ? Pourquoi subit-elle le même sort que Charybde ? 14. Où était honoré Neptune, le maître de tous ces dieux ? Quels étaient les plus grands jeux célébrés en son honneur ? Que faisait-on dans ces jeux ? Qui les institua ? Quelles victimes offrait-on, et quel animal consacrait-on à Neptune ? 15. Comment ce dieu est-il représenté ?

Chapitre XVI.
Pluton et les divinités infernales. §

1. Pluton était, comme Jupiter et Neptune, fils de Cybèle et de Saturne. Son père l’avait dévoré immédiatement après sa naissance, mais Jupiter lui fit prendre un breuvage qui le força de le rejeter de son sein. Pluton se montra reconnaissant de ce bienfait, en défendant Jupiter dans le combat qu’il eut à soutenir contre les géants. Après sa victoire, le souverain des dieux lui donna l’empire des enfers. Les païens se figuraient le palais de ce dieu au centre de la terre et le croyaient entouré de murs impénétrables et flanqué de tours menaçantes. On plaçait l’entrée de ce lieu redoutable en Italie, près du lac Averne, dans un marais qui répandait des vapeurs si malfaisantes qu’elles donnaient la mort à tous les oiseaux qui essayaient de le traverser. Les poëtes ont peuplé l’entrée de cet affreux séjour de toutes les divinités allégoriques les plus sombres.

Devant le vestibule, aux portes des enfers,
Habitent les Soucis et les Regrets amers,
Et des Remords rongeurs l’escorte vengeresse ;
La pâle Maladie et la triste Vieillesse ;
L’indigence en lambeaux, l’inflexible Trépas,
Et le Sommeil son frère et le dieu des combats ;
Le Travail qui gémit ; la Terreur qui frissonne
Et la Faim qui frémit des conseils qu’elle donne ;
Et l’Ivresse du crime et les filles d’Enfer
Reposant leur fureur sur des couches de fer ;
Et la Discorde enfin, qui, soufflant la tempête,
Tresse en festons sanglants les serpents de sa tête.
Delille, trad. de l’Enéide, vi.

2. Les fleuves qui coulaient dans ces lieux étaient l’Achéron, le Cocyte, le Phlégéthon, le Styx, l’Erèbe et le Léthé. L’Achéron avait été changé en fleuve infernal par Jupiter qui le punit d’avoir fourni de l’eau aux géants. Son cours était impétueux et rapide, mais il ne roulait que des eaux fétides et fangeuses. Le Cocyte où il se déchargeait traversait un marais rempli d’une onde croupissante et livide. Ce fleuve, comme son nom l’indique, n’était alimenté que par les larmes des méchants. Ses bords étaient couverts d’ifs qui répandaient sur ses flots une ombre triste et ténébreuse. Le Phlégéthon roulait des torrents de flammes et faisait le tour du Tartare. Ses bords étaient arides et déserts ; ni arbres, ni plantes, rien n’y pouvait croître. Le Styx, aux eaux empestées, faisait neuf fois le tour de cette terrible demeure. C’était par ce fleuve que les dieux juraient, et une fois qu’ils avaient prononcé son nom, leur serment était irrévocable. L’Erèbe, qu’on prend aussi quelquefois pour l’enfer, fut aussi condamné à couler dans les sombres royaumes de Pluton, parce qu’il avait, à l’exemple de l’Achéron, prêté secours aux Titans. Enfin le Léthé ou fleuve de l’oubli avait la propriété de faire perdre la mémoire à ceux qui se désaltéraient dans son onde. Les ombres étaient obligées d’y boire, et elles se trouvaient prêtes à souffrir de nouveau les misères de la vie et à reprendre un corps, comme le supposaient les défenseurs de la métempsycose.

3. Pour passer ces fleuves, il fallait monter sur la barque de Charon, le nocher des enfers. Charon était fils de l’Erèbe et de la Nuit. On le représente sous la figure d’un vieillard austère et inexorable, avec une longue barbe fort négligée, des yeux noirs et perçants qui se cachent sous d’épais sourcils. Il n’admettait sur sa barque que les âmes de ceux qui avaient reçu les honneurs funèbres et qui pouvaient payer passage. Les autres étaient obligés d’errer pendant cent ans sur les sombres bords avant de pouvoir être transportées sur l’autre rive. C’est pourquoi les anciens avaient grand soin d’accomplir les derniers devoirs envers les morts et de leur mettre sur la langue une pièce de monnaie pour adoucir l’humeur farouche du nautonier.

4. Au delà du fleuve, sur le seuil même des enfers, se trouvaient l’implacable Cerbère, le gardien de ces lieux. C’était un chien à trois têtes, dont le cou était hérissé de serpents. Il se montrait doux et caressant pour les ombres qui demandaient à entrer dans le noir séjour, mais il était impitoyable pour celles qui tentaient d’en sortir. Cependant Hercule le dompta, quand il alla chercher aux enfers Alceste, l’épouse d’Admète ; Orphée trompa sa vigilance par la mélodie de ses chants, lorsqu’il alla redemander à Pluton Eurydice sa chère épouse ; enfin la Sibylle qui accompagnait Enée l’assoupit en lui jetant un gâteau soporifique composé de miel et de pavots.

5. Lorsqu’on a franchi l’entrée des enfers, se présentent les trois juges, Minos, Eaque et Rhadamanthe, qui ont mission d’interroger les ombres et de prononcer sur leur destinée. Ces trois personnages avaient régné sur la terre. Minos avait été roi de Crète et avait fait le bonheur de cette île par la sagesse de ses lois ; Eaque avait laissé également des souvenirs de douceur et d’équité dans l’ile d’Egée, et Rhadamanthe avait été si estimé pour sa justice en Béotie que sa loyauté était passée en proverbe. On appelait un jugement équitable, un jugement de Rhadamanthe. Les vertus de ces trois princes leur méritèrent l’honneur d’être placés par les poëtes comme juges aux enfers. Ceux qui avaient fait le bien étaient envoyés par leur sentence aux Champs-Elysées, et ceux qui avaient fait le mal étaient condamnés au Tartare.

6. Le Tartare était affreux. Les poëtes l’ont rempli de tours de fer et d’airain, de fournaises ardentes et de monstres horribles. Là étaient les Furies ou Euménides, divinités vengeresses acharnées à tourmenter les méchants. Elles étaient au nombre de trois, Mégère, Alecto et Tisiphone ; toutes trois filles de l’Achéron et de la Nuit. La Terreur, la Rage, la Pâleur et la Mort les accompagnaient. Elles tourmentaient les coupables pendant leur vie par les remords et par des visions effrayantes, et, après leur mort, elles les déchiraient de leur fouet sanglant et allumaient dans leurs membres avec leurs torches enflammées un feu dévorant. Ces redoutables déesses étaient représentées avec des habits noirs et ensanglantés, un air sombre et terrible, l’œil en feu, des ailes de chauve-souris, des serpents pour cheveux, et des torches à la main.

7. Outre ces divinités vengeresses, il y avait encore les Parques, filles de la Nuit. Elles étaient aussi trois, Clotho, Lachésis et Atropos. Elles étaient occupées à filer nos destinées. Clotho, la plus jeune, tenait la quenouille, Lachésis tournait le fuseau, et Atropos tranchait le fil fatal avec des ciseaux d’or. Elles mêlaient ensemble la laine et la soie, pour marquer toutes les vicissitudes de la vie humaine. La laine blanche mêlée de soie indiquait les jours heureux, la laine noire les jours malheureux.

Les Parques d’une même soie
Ne dévident pas tous nos jours.
[Malherbe]

8. Les grands coupables dont la fable a conservé le souvenir et raconté les châtiments sont les Titans, Sisyphe, Phlégyas, Tantale, les Danaïdes et Ixion. Les Titans, qui s’étaient révoltés contre Jupiter, furent ensevelis sous le mont Etna que les anciens considéraient sans doute, à cause de ses fréquentes éruptions, comme un des soupiraux de l’enfer. Sisyphe, fils d’Eole, avait désolé l’Attique par ses brigandages, et il était condamné à rouler jusqu’au sommet d’une montagne une pierre énorme qui retombait sans cesse et qui par là éternisait ses peines. Phlégyas, qui avait mis le feu au temple de Delphes, se sentait tourmenté par l’appréhension continuelle d’être écrasé par un rocher suspendu sur sa tête coupable. Tantale, roi de Phrygie, avait violé les droits de l’hospitalité, en servant sur sa table les membres de Pélops son fils aux dieux qui le visitaient. Jupiter voulut qu’il fût dévoré sans cesse d’une soit ardente et d’une faim insatiable. Pour ajouter à sa peine, il le fit plonger dans l’eau jusqu’au cou, et fit placer sous ses yeux une branche d’arbre chargée des fruits les plus appétissants. Quand ce roi criminel essayait de boire, l’eau se retirait à mesure qu’il faisait effort pour en approcher ses lèvres, et, quand il voulait manger, la branche d’arbre s’éloignait. Les poëtes ont appliqué ce supplice à l’avare qui amasse des trésors sans jamais y toucher.

Tantale dans un fleuve a soif et ne peut boire.
Tu ris, change le nom, la fable est ton histoire.
[Horace]
[Desmarets" role="translator]

Les Danaïdes, filles de Danaüs, roi d’Argos, étaient au nombre de cinquante. Toutes avaient fait périr leurs maris, à l’exception d’Hypermestre qui conserva le sien appelé Lyncée. En punition de leur forfait, ces femmes cruelles furent condamnées à remplir d’eau un tonneau percé aux deux bouts, ce qui rendait leurs fatigues éternelles. Enfin Ixion était attaché à une roue couverte de serpents qui tournait sans relâche.

9. Les Champs-Elysées étaient, au contraire, un délicieux séjour ou les poëtes supposaient réunies toutes les espèces de jouissances. Là régnait un printemps éternel, un air toujours pur et serein ; une douce clarté illuminait cette région enchantée, et les ombres qui l’habitaient se promenaient à travers des bosquets de myrtes et de roses. Elles avaient bu de l’eau du fleuve Léthé, et, après avoir ainsi oublié toutes les peines qu’elles avaient eues sur la terre, elles se livraient aux occupations qui leur offraient le plus d’attraits. Les philosophes s’entretenaient de la vérité et de sa contemplation ; les poëtes y chantaient des vers harmonieux et faciles ; les guerriers s’y exerçaient à la lutte, sans craindre de se blesser et de répandre leur sang ; enfin tous trouvaient le bonheur dans l’activité et le travail.

10. Le dieu des enfers était haï sur la terre. Il eut peu de temples, et l’on ne lui sacrifiait qu’en secret des taureaux noirs ou des victimes humaines. On lui consacrait le narcisse, le capillaire et le cyprès, l’arbre des tombeaux ; ses prêtres en étaient couronnés. On le représente de différentes manières. Quelquefois il emporte Proserpine évanouie sur son char traîné par des chevaux noirs, ou bien il est sur un trône d’ébène entouré des Furies et des Parques ; sa droite est armée d’un sceptre à deux pointes ou d’une large fourche, et de l’autre il tient la clef qui ferme la porte de l’infernal séjour.

11. Il ne faut pas confondre Pluton avec Plutus, qui est aussi une divinité infernale. Plutus est le dieu des richesses. Il a la figure d’un vieillard, la démarche lente et pénible, pour annoncer que les richesses ne s’amassent que lentement et avec peine ; mais, quand il s’en retourne, il a des ailes, pour signifier que les richesses s’évanouissent rapidement. Il a une bourse à la main et il est aveugle, parce que la fortune répand ses faveurs sur les bons comme sur les méchants. On en a fait une divinité infernale, soit parce que les richesses font souvent faire naufrage à la vertu, soit parce qu’elles sortent, comme tous les métaux, du sein de la terre.

Questionnaire. §

1. Qu’était Pluton ? Qui lui conserva la vie ? Quelle reconnaissance en témoigna-t-il à Jupiter ? Où était son palais ? Quelle idée en avaient les anciens ? 2. Quels fleuves coulaient dans ces royaumes ? Qu’est-ce que l’Achéron ? — le Cocyte ? — le Phlégéthon ? — le Styx ? — l’Erèbe ? — le Léthé ? 3. Comment traversait-on ces fleuves ? Qu’est-ce que Charon ? A quelles conditions était-on admis sur sa barque ? 4. Quel était le gardien des enfers ? Par qui sa vigilance fut-elle surprise ? De quelle manière ? 5. Quels étaient les juges des enfers ? Quelle est leur histoire ? Pourquoi les poëtes les ont-ils honorés de ces fonctions ? 6. Qu’est-ce que le Tartare ? Qu’est-ce que les Euménides ? Comment tourmentaient-elles les coupables ? De quelle manière étaient-elles représentées ? 7. Qu’est-ce que les Parques ? Quelles étaient leurs fonctions ? 8. Quels étaient les châtiments des grands coupables ? Quel était le supplice des Titans, de Phlégyas, de Sisyphe, de Tantale, des Danaïdes et d’Ixion ? 9. Quelles idées les anciens se faisaient-ils des Champs-Elysées ? Quelles étaient les occupations des heureux mortels qui y séjournaient ? 10. Quel était le culte de Pluton ? Quelles plantes lui étaient consacrées ? Comment était-il représenté ? 11. Qu’est-ce que Plutus ? Comment était-il représenté ? Pourquoi en a-t-on fait une divinité infernale ?

Deuxième partie.
Des divinités du second ordre. §

Indépendamment des grands dieux, qui formaient le conseil de Jupiter et qui avaient influence sur les destinées du monde, les païens reconnaissaient encore d’autres divinités qui ne recevaient pas les mêmes honneurs, mais qui néanmoins exerçaient une profonde influence sur la vie humaine. Ces divinités subalternes n’habitaient pas dans le ciel, elles résidaient sur la terre, et c’est pour ce motif qu’on les plaçait dans une catégorie intérieure à celle des dieux dont nous avons décrit la puissance et les attributs. Elles étaient infiniment nombreuses. Les païens ayant déifié tous les objets qui frappaient leurs sens, il est impossible d’énumérer toutes les divinités particulières que renfermaient la terre, la mer et les enfers. Les érudits les comptaient par milliers. Nous nous bornerons à rappeler ici les divinités champêtres et domestiques et les dieux terrestres qui offrent le plus d’intérêt.

Chapitre I.
Des divinités champêtres. §

1. Après avoir divinisé la terre sous le nom de Cybèle, les païens eurent une foule d’autres divinités du second ordre qui présidaient à tout ce que la terre enfante et produit. Parmi cette multitude de divinités subalternes, les poëtes distinguent surtout Pan et Palès, Faune et Sylvain, Flore, Pomone, Vertumne et le dieu Terme.

Pan et Palès. §

2. En grec Pan signifie tout. Chez les Egyptiens particulièrement, ce dieu avait été d’abord considéré comme le symbole de tout l’univers. Les Grecs en firent le dieu des bergers et le vénérèrent comme le protecteur des troupeaux. Son culte était surtout répandu en Arcadie où la population ne se composait que de bergers vivant dans de délicieuses vallées du produit de leurs nombreux troupeaux. Ce dieu eut aussi ailleurs des temples. A Rome, on célébrait ses fêtes sous le nom de Lupercales, au mois de février, chaque année. Ce nom était tiré de celui de la grotte où l’on pensait que Romulus et Rémus avaient été nourris par une louve. Les prêtres du dieu Pan se nommaient luperci.

3. On ne versait point le sang des victimes sur ses autels, on ne lui offrait que du lait et du miel. Il était représenté de la manière la plus difforme. Il avait des cornes sur la tête, le nez camus, la barbe et les cheveux négligés, et le corps d’un bouc depuis la ceinture jusqu’aux pieds. On l’avait ainsi représenté moitié homme et moitié animal, pour faire comprendre que l’universalité des êtres se trouvait en lui renfermée. Souvent aussi en sa qualité de dieu des bergers, on lui donnait une houlette et une flûte à sept tuyaux. La fable suppose qu’il était l’inventeur de cet instrument, et qu’il avait appris aux bergers à en jouer.

4. Pausanias dit que quand les Gaulois se précipitèrent sur la Grèce, Pan les frappa d’une terreur subite au moment où ils se disposaient à piller le temple de Delphes. De là serait venue l’expression de terreur panique. D’autres prétendent que cette locution a été employée parce que les forêts, auxquelles Pan préside, inspirent un sentiment sombre et mélancolique dont on ne peut se rendre compte.

5. Palès, la déesse des bergers n’a point été connue des Grecs. Ce sont les Romains qui inventèrent cette divinité, et l’on dit que Romulus la préposa le premier à la vénération de ses compagnons. Son nom lui vient, d’après quelques étymologistes, de palea, paille. Dans ses fêtes, les bergers commençaient par purifier leurs étables avec de la fumée de soufre, de laurier, de romarin, de buis et d’olivier. Ils offraient à la déesse du vin cuit, du lait et du millet, et faisaient tourner leurs troupeaux autour de son autel. Dans leurs réjouissances, ils mettaient le feu à de grands amas de paille, s’amusaient à sauter par-dessus, et les plus agiles recevaient pour prix un jeune chevreau ou un agneau.

Faune et Sylvain. §

6. Faune était aussi vénéré par les bergers. Il avait été roi du Latium après Picus, son père, et les Latins en firent une divinité champêtre, parce qu’ils supposaient qu’il avait enseigné aux hommes l’agriculture. Il donna naissance aux Faunes, divinités rustiques qui habitaient les forêts et les campagnes. Fénelon fait ainsi la description d’un Faune. « Il était gracieux et folâtre : sa tête était couronnée de lierre et de pampres ; ses tempes étaient ornées de grappes de raisin : de son épaule gauche pendait sur son côté droit en écharpe un feston de lierre. Le Faune était enveloppé au-dessous de la ceinture par la dépouille affreuse et hérissée d’une jeune lionne qu’il avait tuée dans les forêts. Il tenait dans sa main une houlette courbée et noueuse. Sa queue paraissait derrière comme se jouant sur son dos. »

7. Sylvain était un des fils de Faune. Les Romains en firent le dieu des forêts. Quelquefois on le confond avec Pan et même avec Faune son père. On le représentait à peu près de la même manière que le dieu Pan, avec cette différence qu’il tenait une branche de pin à la main. On donne généralement les noms de Sylvains, de Faunes ou de Satyres aux dieux champêtres. Les Satyres ressemblaient aux Faunes à l’extérieur, mais ils ne s’occupaient pas comme eux d’agriculture. Ces dieux railleurs et lascifs étaient la terreur des bergers et des bergères. Pour les apaiser, on leur offrait les prémices des fruits et des troupeaux. Ces Satyres avancés en âge prenaient le nom de Silènes. Nous avons raconté les aventures du plus ancien et du plus célèbre d’entre eux dans la fable de Bacchus.

Flore, Pomone, Vertumne, Priape et Terme. §

8. Flore était la déesse des fleurs et du printemps. On la représentait sous la figure d’une jeune fille parée de bouquets et de guirlandes, et portant une corbeille de fleurs. Elle eut pour époux Zéphire ; ce qui signifie seulement qu’au printemps un vent doux et léger caresse les fleurs. Ses fêtes étaient célébrées par les dames romaines au son des trompettes, et elles portaient le nom de jeux floraux.

9. Pomone était la déesse des fruits et des jardins. Elle est unie par la fable à Vertumne, le dieu de l’automne, parce que c’est dans cette saison que les fruits parviennent à leur maturité. Cette déesse tient dans ses mains une corne d’abondance, en signe des bienfaits qu’elle répand sur la terre, et elle est couronnée de feuilles de vigne et de raisin, parce que la vendange se faisait sous ses auspices.

10. Priape était le dieu chargé du même empire que Pomone. Comme elle, il présidait aux arbres fruitiers et aux jardins. Les Romains croyaient qu’il faisait fructifier leurs arbres, et ils mettaient sa statue dans leur jardin. Ceux qui nourrissaient des troupeaux de chèvres et de brebis, ou ceux qui élevaient des abeilles l’honoraient tout spécialement. On le représentait avec des cornes et des oreilles de chèvre, une couronne de feuilles de vigne ou de laurier, et on lui donnait un panier pour porter les fruits, une faucille pour moissonner, des instruments de jardinage ou une verge pour faire peur aux oiseaux.

11. Le dieu Terme était le gardien des propriétés. Il veillait sur les bornes et vengeait les usurpations. Ovide fait à peu près parler ainsi le maître d’un champ qui s’adresse à ce dieu :

Terme, qui que tu sois, ou de bois ou de pierre,
Tu n’es pas moins un dieu que le dieu du tonnerre,
Garde que mon voisin ne me dérobe rien ;
        Mais dans ton poste inébranlable,
Si son avide soc empiétait sur mon bien,
        Crie aussitôt comme un beau diable :
Halte-là, mon voisin insatiable,
C’est là ton champ, et c’est ici le mien.

On dit que Numa introduisit à Rome le culte de ce dieu, ce qui signifie que sous ce prince la propriété commença à être respectée chez les Romains. On honorait ce dieu sur les bornes des champs aussi bien que dans les temples. Numa institua des fêtes en son honneur appelées Terminales, et lui éleva un temple sur le mont Tarpéien. On ne lui offrait d’abord que du lait, du vin, des fruits et des gâteaux de farine nouvelle. On lui sacrifia ensuite des agneaux et de jeunes truies. La chair de ces victimes était partagée entre les deux familles qui venaient de diviser leur propriété et de planter les bornes qui en devaient fixer les limites. La borne elle-même était revêtue de guirlandes et frottée d’huile. Le dieu Terme n’était dans l’origine qu’une pierre grossière carrée. Plus tard on lui donna une forme humaine ; mais la base resta pyramidale. Il était sans bras et sans pieds, en témoignage de son immobilité.

Questionnaire. §

Quelles étaient les principales divinités champêtres ? 2. Qu’était le dieu Pan chez les Egyptiens et chez les Grecs ? Dans quel lieu son culte était-il spécialement répandu ? Quelle fête se célébrait à Rome en son honneur ? Comment se nommaient ses prêtres ? 3. Quelles victimes lui offrait-on ? Comment était-il représenté ? 4. D’où vient l’expression de terreur panique ? 5. Qu’est-ce que Palès ? Qui inventa cette divinité ? Comment les bergers célébraient-ils sa fête ? 6. Qu’est-ce que le dieu Faune ? Quelle fut son histoire ? Comment Fénelon décrit-il un jeune Faune ? 7. Qu’est-ce que Sylvain ? A quel titre les Romains l’honoraient-ils ? Comment était-il représenté ? Qu’est-ce que les Satyres ? Quel était leur caractère ? Comment apaisait-on leur fureur ? Quel nom recevaient les vieux Satyres ? 8. Qu’est-ce que Flore ? Comment était-elle représentée ? Quel nom les Romains donnaient-ils à ses fêtes ? 9. Qu’est-ce que Pomone ? Pourquoi était-elle unie à Vertumne ? Quels étaient les attributs de cette déesse ? 10. Qu’était Priape ? Quelle était sa puissance ? Par qui était-il honoré ? De quelle manière était-il représenté ? 11. Quelles étaient les fonctions du dieu Terme qui l’introduisit, à Rome ? Où était-il honoré ? Quelles offrandes plaçait-on sur ses autels ? Comment était-il représenté ?

Chapitre II.
Les dieux domestiques. §

1. Les dieux domestiques s’appelaient Lares ou Pénates. Les Lares étaient les dieux protecteurs de chaque maison et les gardiens de chaque famille. Ils s’appelaient Viales quand ils étaient placés sur les chemins, et Compitales quand ils présidaient aux carrefours. Les fêtes établies en leur honneur prenaient aussi ce dernier nom parce qu’elles étaient célébrées dans les mêmes lieux. On suspendait des hommes de laine et de cire, comme des victimes expiatoires, et on suppliait les Lares de faire tomber sur ces vains simulacres tous les châtiments mérités par les crimes des hommes.

2. Les Pénates étaient les dieux protecteurs des villes et des empires. Chaque famille avait le droit de choisir ses Pénates et les prenait souvent parmi les dieux du premier ordre. Les Pénates avaient leurs statues dans le lieu le plus secret de la maison, et on leur offrait un culte et des sacrifices dans l’intérieur de la famille comme aux dieux Lares, et c’est ce qui les a souvent fait confondre avec eux. Les Romains étaient très-attachés au culte de ces divinités domestiques. Enée fut beaucoup loué pour avoir sauvé dans l’incendie de Troie les dieux tutélaires de cette grande cité.

3. On consacrait aux Pénates des chiens, symbole de la fidélité domestique, et l’on allumait devant eux des lampes, symbole de la vigilance. A l’âge de dix-sept ans les patriciens déposaient à leurs pieds la bulla. C’était un petit ornement d’or ou d’argent qu’ils avaient pris avec la robe prétexte. On offrait à ces dieux de l’encens, du vin et quelquefois des animaux.

4. Indépendamment des Pénates et des Lares, on peut encore placer parmi les divinités domestiques le Génie. Genius ou Génie était fils du Ciel et de la Nature, et l’on supposait qu’il donnait à tout l’être et le mouvement. Les empires, les villes, les provinces et tous les lieux particuliers avaient leur génie. Chaque homme aussi avait le sien, et comme nous sommes enclins tout à la fois au bien et au mal, on admettait que l’homme avait deux génies, l’un bon et l’autre mauvais. Le bon lui inspirait le bien, le mauvais le poussait au mal. Le jour de l’anniversaire de sa naissance, chaque citoyen sacrifiait à son Génie. Il lui offrait du vin, de l’encens et des fleurs, mais point de victimes sanglantes.

5. Le bon Génie était représenté sous la figure d’un jeune homme riant et gracieux, couronné de pavots et portant des pampres chargés de raisin. Le mauvais Génie avait la physionomie d’un vieillard chagrin, à la barbe longue et négligée. Sur la main il avait un hibou, oiseau de mauvais augure.

Questionnaire. §

1. Comment s’appelaient les dieux domestiques ? Quels étaient les attributs des Lares ? Quels étaient leurs différents noms ? Quelles fêtes célébrait-on en leur honneur ? Qu’étaient les Pénates ? Parmi quelles divinités étaient-ils choisis ? Quel était leur culte ? Pourquoi les a-t-on confondus avec les Lares ? 3. Qu’est-ce qu’on leur consacrait ? Quelles offrandes plaçait-on sur leurs autels ? 4. Qu’est-ce que Genius ou le Génie ? Sur qui s’étendait sa protection ? Combien chaque homme avait-il de Génies ? Que leur offrait-il le jour de sa fête ? 5. Comment était représenté le bon Génie ? Comment était représenté le mauvais ?

Chapitre III.
De quelques autres divinités du second ordre, Comus, le Sommeil, Morphée, Momus, l’Aurore, Hébé et Ganimède. §

1. Comus était le dieu des festins et de la joie. Son nom lui vient d’une chanson qu’on chantait dans les repas. Pour l’honorer, les jeunes gens couraient la nuit à la clarté des flambeaux, la tête ceinte de fleurs, chantant et jouant des instruments. On le représente jeune, chargé d’embonpoint, le visage enluminé par le vin et le front couronné de roses. Il tient, à la main droite un flambeau et s’appuie de la gauche sur un pieu.

2. Le Sommeil, fils de l’Erèbe et de la Nuit, habitait dans un antre où le soleil ne pénétrait jamais. La Fontaine, qui a passé la moitié de sa vie à encenser ses autels, nous a fait du palais de ce dieu une charmante description.

Sous les lambris moussus de ce sombre palais,
Echo ne répond pas et semble être assoupie.
La molle Oisiveté, sur le seuil accroupie,
N’en bouge nuit et jour et fait qu’aux environs
Jamais le chant des coqs ni le bruit des clairons
Ne viennent au travail inviter la nature.
Un ruisseau coule auprès et forme un doux murmure.
Les simples, dédiés au dieu de ce séjour,
Sont les seules moissons qu’on recueille à l’entour.
De leurs fleurs en tout temps sa demeure est semée.
Il a presque toujours la paupière fermée.
Je le trouvai dormant sur un lit de pavots :
Les Songes l’entouraient sans troubler son repos.
De fantômes divers une cour mensongère,
Vains et frôles enfants d’une vapeur légère,
Troupe qui sait charmer le plus profond ennui,
Prête aux ordres du dieu, volait autour de lui.
Là cent figures d’air dans leurs moules gardées,
Là des biens et des maux les légères idées,
Prévenant nos destins, trompant notre désir,
Formaient des magasins de peines et de plaisirs.
Je regardais sortir et rentrer ces merveilles ;
Telles vont au butin de nombreuses abeilles,
Et tel dans un Etat de fourmis composé,
Le peuple rentre et sort, en cent parts divisé.

3. Près du Sommeil veillaient les Songes, ses enfants. Les trois principaux de ces Songes étaient Morphée, Phantase et Phobétor. Ils avaient chacun leur palais. Morphée, quelquefois vénéré comme le chef des Songes, est aussi considéré comme le ministre du Sommeil, son père, et comme le Sommeil lui-même. Il endormait les mortels avec des plantes de pavots et leur envoyait des songes. Les poëtes imaginèrent que les songes passaient par deux portes, l’une de corne et l’autre d’ivoire. La première était destinée aux illusions vaines et passagères, la seconde aux visions véritables. On représentait Morphée avec des ailes de papillon, symbole de sa légèreté.

4. Momus était aussi fils du Sommeil et de la Nuit. C’était le dieu de la raillerie et des bons mots. Son nom en grec signifie reproche. Il n’épargnait personne dans ses satires, et son caractère caustique le fit chasser du ciel. Neptune, Vulcain et Minerve l’avaient un jour choisi pour juge de leurs ouvrages. Il les critiqua tous de la manière la plus sanglante. A Neptune il reprocha de n’avoir pas mis les cornes de son taureau devant les yeux pour qu’il frappât plus sûrement ; à Vulcain, qui avait forgé un homme, il dit qu’il eût dû lui ménager une fenêtre au cœur, par laquelle on eût pu voir ses plus secrètes pensées ; enfin, il se moqua de la maison de Minerve, parce qu’on ne pouvait la transporter ailleurs quand on avait un mauvais voisin. On représentait ce dieu bizarre le masque levé, parce que la raillerie démasque les vices des hommes, et une marotte à la main en signe de folie.

5. L’Aurore était fille du Soleil et de la Terre, et, selon quelques poëtes, elle était mère des Vents, des Astres et de Lucifer. Elle eut pour époux un fameux chasseur, Tithon, fils de Laomédon, roi de Troie. Sur les prières de l’Aurore, Jupiter avait accordé l’immortalité à Tithon, mais sans lui donner le privilège de ne jamais vieillir. Tithon devint tellement cassé par les ans, qu’il conjura le souverain des dieux de le changer en cigale, et il obtint ce triste avantage.

6. Aurore eut de son mariage avec Tithon deux fils, Memnon et Hémathion, qui périrent l’un et l’autre au siége de Troie. Elle les regretta si vivement que ses larmes abondantes produisirent la rosée du matin. Memnon avait régné sur l’Egypte. Après sa mort, les Egyptiens lui élevèrent une statue colossale dans la ville de Thèbes. Cette statue rendait des sons lorsqu’elle était frappée par les premiers rayons du soleil. Ce phénomène, qui peut s’expliquer tout naturellement par la dilatation de la pierre, fut embelli par la fiction. On dit que la statue se réjouissait du retour de l’Aurore et qu’elle s’attristait de son départ.

7. Aurore se maria ensuite avec Céphale, un jeune chasseur qui était déjà uni à Procris, la fille d’Erechthée, roi d’Athènes. Elle fit présent à son nouvel époux d’un arc qui frappait toujours infailliblement le but. Procris s’étant un jour cachée derrière un buisson pour épier les démarches de Céphale, celui-ci crut que c’était un faon de biche qui s’était là retiré, lui lança sa flèche et se perça ensuite lui-même de désespoir, lorsqu’il reconnut sa méprise. Ils furent tous deux changés en étoiles et attachés à la voûte du ciel.

8. Les peintres représentaient l’Aurore sortant de son palais de vermeil, montée sur un char couleur de feu que traînaient les chevaux Lampus et Phaéton. Elle portait à sa main une torche, et était vêtue d’une longue robe de safran. On en faisait aussi une nymphe couronnée de fleurs et assise sur un char auquel était attelé Pégase, pour figurer qu’elle était l’amie des poëtes. Homère dit qu’elle ouvrait de ses doigts de rose les portes de l’Orient, et lui met sur la tête un long voile rejeté en arrière, parce qu’elle dissipe les ténèbres qui voilaient la clarté du jour.

9. Hébé était la déesse de la jeunesse. On la supposait fille de Junon et de Jupiter. Le souverain des dieux lui avait confié le soin de verser du nectar aux immortels. Un jour elle tomba et renversa le vase qui renfermait cette précieuse liqueur. Par cette maladresse elle perdit sa charge, qui fut donnée à Ganimède, fils de Tros, roi de Troie et le protégé de Jupiter. Junon, touchée du malheur de sa fille, la retint près d’elle, la chargea d’atteler son char, et lui donna pour époux Hercule, qui fut ainsi récompensé de ses illustres travaux.

Ganimède avait mérité d’être l’échanson des dieux par l’innocence de ses mœurs et la pureté de sa vie. Il méditait, loin de la cour du roi son père, dans les forêts du mont Ida, quand Jupiter le jugea digne du séjour des immortels. Pour le transporter dans l’Olympe, il vint lui-même, sous la figure d’un aigle, s’abattre à ses côtés, le saisit et l’emporta dans sa céleste demeure.

Questionnaire. §

1. Qu’était Comus ? D’où lui venait son nom ? Que faisaient les jeunes gens pour l’honorer ? Comment était-il représenté ? 2. Qu’est-ce que le Sommeil ? Quelle description La Fontaine a faite de son palais ? 3. Quels étaient ses enfants ? Qu’est-ce que Morphée ? Quels étaient ses attributs ? Comment était-il représenté ? 4. Qu’était Momus ? Que signifie ce mot ? Comment critiqua-t-il les ouvrages des dieux ? De quelle manière était-il représenté ? 5. Qu’était l’Aurore ? Quelles furent les destinées de Tithon ? 6. Quels étaient ses fils ? Sur quel peuple avait régné Memnon ? A quelle fable donna lieu sa statue colossale ? 7. Quels furent les aventures de Céphale et de Procris ? En quoi furent-ils métamorphosés ? 8. Comment les peintres représentaient-ils l’Aurore ? Quelle description en fait Homère ? 9. De qui Hébé était-elle fille ? Quelle était sa charge ? Comment la perdit-elle ? A qui fut-elle ensuite confiée ? Comment Ganimède fut-il introduit dans l’Olympe ?

Troisième partie.
Des divinités allégoriques. §

Non contents de diviniser la terre et ses productions, le ciel et tous ses phénomènes, les païens donnèrent encore lu vie et le mouvement aux êtres les plus abstraits, et prêtèrent ainsi des formes allégoriques aux biens et aux maux, aux vices et aux vertus, aux sentiments et aux passions. Toutes les pensées qui agitent l’intelligence humaine prirent corps et visage pour recevoir l’encens des mortels abusés. Ces divinités allégoriques furent si nombreuses qu’il serait impossible de les énumérer. Nous ferons seulement connaître ici celles qui furent les plus célèbres.

Chapitre I.
Des Vertus. §

1. Les principales divinités que nous pouvons ranger sous ce titre glorieux sont la Vérité, la Vertu en général, la Justice, la Force, la Pudeur et la Miséricorde.

2. La Vérité était considérée comme la fille du Temps ou de Saturne et la mère de la Vertu. On la représentait sous les traits d’une jeune fille légèrement vêtue, à l’air noble et majestueux, aux yeux étincelants comme des astres. Elle tenait un livre ouvert avec une palme dans une main et de l’autre un miroir orné de fleurs et de pierreries, pour signifier que la vérité peut se parer de tous les ornements du langage. On disait qu’elle se tenait cachée au fond d’un puits, sans doute pour faire entendre qu’elle est rare dans le commerce de la vie.

3. La Vertu, fille de la Vérité, avait un vêtement blanc, symbole de l’innocence, et les ailes déployées, parce qu’elle élève les cœurs où elle habite. On lui donnait cet air simple et modeste qui sied si bien au mérite et qui inspire toujours le respect. Elle avait pour siége un cube de marbre en témoignage de sa solidité ; elle tenait une pique, parce qu’elle n’est possible qu’à la condition d’un combat perpétuel ; elle portait un sceptre pour rappeler qu’elle donne à celui qui la pratique un empire souverain sur lui-même et sur le monde, et on la couronnait de lauriers pour annoncer les grandes récompenses qui lui sont réservées. Les Romains lui élevèrent un temple sous les Scipions. Marius et Marcellus lui en bâtirent un second et le placèrent si près de celui de l’Honneur qu’on ne pouvait pénétrer dans le second sans passer par le premier. Magnifique allégorie qui prouve que les païens, malgré l’obscurcissement de leur intelligence, n’avaient point oublié l’étroite union qui règne entre toutes les vertus.

4. La Justice, appelée Thémis par les Grecs, était fille du Ciel et de la Terre. Les poëtes ont fait naître de Thémis l’Equité, la Loi et la Paix. On la représente sous la figure d’une femme au regard terrible et sévère. Elle tient d’une main une balance et de l’autre une épée. Ses yeux sont couverts d’un bandeau, et quelquefois elle a les oreilles bouchées en signe d’impartialité. Astrée, sa fille, présidait aussi à la justice. On disait qu’elle avait fixé son séjour sur la terre pendant l’âge d’or et qu’elle en avait été ensuite bannie par les crimes des hommes. Elle était remontée au ciel, où elle forme maintenant le signe de la Vierge dans le Zodiaque. C’est une de ces mille allégories qui font allusion à la chute de l’homme, d’abord heureux et innocent, et aux progrès continuels de sa dégradation morale.

5. La Force était fille de Thémis, ou de la Justice et sœur de la Tempérance. Son symbole était le lion, le roi des animaux. Elle est représentée en amazone. D’une main elle embrasse une colonne et de l’autre elle tient un rameau de chêne.

6. La Pudeur avait des temples à Rome et à Athènes. Le plus ancien de ces temples n’était ouvert qu’aux dames d’origine patricienne. Virginie, la première femme noble qui épousa un plébéien, ayant été bannie de ces assemblées religieuses, construisit elle-même un autre temple qu’elle dédia à la Pudeur plébéienne. On représentait celle déesse sous la figure d’une femme voilée ou d’une vierge portant la main droite au visage et un de ses doigts au front, pour montrer que l’empreinte de cette vertu doit briller dans tous les traits et particulièrement dans les yeux et sur le front.

7. La Miséricorde eut un temple à Athènes et à Rome. Ce temple jouissait du droit d’asile, c’est-à-dire que les criminels ne pouvaient y être arrêtés. Il serait aussi fastidieux qu’inutile de rappeler les autres vertus qui, comme la Bonne Foi, la Prudence, la Piété, la Tempérance, eurent des autels. Nous allons passer aux biens qui furent érigés en divinités.

Questionnaire. §

1. Quels sont les principales vertus qui furent érigées en divinités ? 2. Comment la Vérité était-elle considérée ? Sous quelle figure la représentait-on ? En quel lieu disait-on qu’elle habitait ? 3. De qui la Vertu était-elle fille ? Quels étaient ses attributs et ses symboles ? Qui lui éleva des temples à Rome ? Où était placé le dernier de ses temples ? 4. Quel nom avait la Justice chez les Grecs ? Quels étaient ses enfants ? Comment était-elle représentée ? Qu’est-ce que la fable nous raconte d’Astrée sa fille ? Que signifie ce récit ? 5. Qu’était la Force ? Quel était son symbole ? Comment était-elle représentée ? 6. Où la Pudeur avait-elle des temples ? Qui pouvait pénétrer dans ces temples ? Qui en bâtit un à la Pudeur plébéienne ? Comment cette déesse était-elle représentée ? 7. Dans quelles villes la Miséricorde fut-elle honorée ? De quel privilège jouissaient ses temples ?

Chapitre II.
Des Biens. §

1. Les biens sont toujours le fruit de la vertu, et les hommes n’en possèdent de véritables qu’à la condition qu’ils seront solidement vertueux. Ainsi il n’y a pas de bonheur pour le coupable, parce que les remords le déchirent et le tourmentent sans cesse. Il n’y a pas de paix non plus pour la famille dont les membres ne sont pas esclaves de leurs devoirs, parce que des haines et des dissensions perpétuelles les troublent et les dévorent. Et une nation n’est forte, vigoureuse et libre que quand elle est profondément morale, parce que le vice la désunit et engendre dans son sein toutes sortes d’infirmités et de malheurs. Dans leurs ingénieuses fictions, les anciens auraient dû nous montrer les biens comme issus de toutes les vertus qu’ils avaient divinisées ; mais les ténèbres qui obscurcissaient leur entendement ne leur permirent pas de voir clairement cette vérité. Ils paraissent cependant en avoir au moins entrevu les premières lueurs.

2. Ainsi ils ont fait la Paix fille de Jupiter et de Thémis. On disait qu’elle avait présidé à l’âge d’or. Elle eut des temples dans la Grèce et à Rome. Celui d’Athènes était très-riche et magnifiquement orné. Rome, la cité guerrière par excellence, mit longtemps à achever celui qu’elle bâtit à cette déesse. Ce fut dans ce temple qu’on déposa toutes les dépouilles de Jérusalem, après la prise de cette ville par Titus. On représentait la Paix sous la figure d’une femme belle, douce et modeste, ayant sur la tête une couronne de lauriers et tenant à la main une corne d’abondance, Quelquefois elle portait une baguette ou un caducée, signe de sa puissance, des épis et des roses, symbole de ses douceurs et de ses plaisirs. Plutus, le dieu des richesses, reposait sur son sein.

3. La Concorde avait aussi à Rome un temple. Cette déesse était représentée sous l’image d’une jeune fille couronnée de guirlandes, portant dans ses mains des cornes d’abondance. Quelquefois elle tenait un faisceau de joncs qui séparés auraient été facilement brisés, mais qui réunis ne pouvaient être rompus. C’était le symbole matériel de cette devise : L’union fait la force. Le sénat romain s’assemblait dans le temple de la Concorde pour décider les grandes affaires de la république. Ce temple était dans le Capitole, la demeure des dieux. C’était sans doute pour signifier qu’une nation n’est forte que quand elle est unie, et que son union a besoin d’ailleurs d’être protégée par le ciel.

4. La Victoire était une des divinités les plus honorées. On la disait fille du Styx et de Pallante, origine bizarre qui ne s’explique pas facilement. Tous les peuples lui élevaient des temples et s’efforçaient de mériter ses faveurs. Les Romains la placèrent au Capitole et la représentèrent avec des ailes, tenant d’une main une couronne de laurier et de l’autre une palme entourée de trophées. On la plaçait sur un globe, pour montrer que son empire s’étend sur toute la terre. On lui offrait des fruits, des fleurs et des couronnes, mais jamais le sang ne coulait sur ses autels.

5. La Liberté, le plus noble don que Dieu ait fait à l’homme, n’était guère connue que de nom chez les anciens. Comme nous l’avons déjà dit, cette prérogative si belle a nécessairement la vertu pour compagne ; et, comme avant Jésus-Christ le monde entier croupissait dans une honteuse corruption, l’esclavage dégradait l’humanité entière. Cependant le nom de liberté avait conservé sa vertu magique, et les païens eux-mêmes le prononçaient avec tant de respect et d’enthousiasme qu’ils en firent une divinité. Les statues de cette déesse représentaient une femme vêtue de blanc, symbole de l’innocence, tenant un bonnet de la main droite en signe d’affranchissement et une pique de la gauche, parce qu’on ne peut acquérir et conserver ce bien précieux qu’à force de combats.

Questionnaire. §

1. Comment les biens véritables doivent-ils être considérés ? Quelles fictions auraient dû imaginer les païens ? Pourquoi ne les ont-ils pas imaginées ? N’ont-ils pas entrevu la vérité ? 2. De qui ont-ils fait naître la Paix ? Quels temples éleva-t-on à cette déesse à Rome et à Athènes ? Comment était-elle représentée ? Quel était le sens de ces symboles ? 3. Par qui la Concorde était-elle honorée ? Comme la représentait-on ? En quel lieu était son temple à Rome ? Pourquoi le sénat y tenait-il ses assemblées ? 4. Qu’était la Victoire ? Que disait-on de son origine ? Quels honneurs lui rendirent les Romains ? Que lui offrait-on en sacrifice ? 5. La Liberté était-elle bien connue des anciens ? Pourquoi n’en jouissaient-ils pas ? Quelle vénération avaient-ils pour son nom ? Comment était-elle représentée ?

Chapitre III.
Des Vices. §

1. Les principaux vices érigés en divinités furent la Méchanceté, la Vengeance, l’Envie, la Discorde et la Paresse.

2. La Méchanceté, que les Grecs appelaient Até, était une déesse malfaisante qui ne prenait plaisir qu’à tourmenter les hommes. Jupiter, son père, irrité de tous les maux qu’elle faisait, la chassa du ciel et jura quelle n’y rentrerait plus. Depuis ce temps Até parcourut la terre avec une effrayante rapidité, semant partout les calamités et les afflictions. Les Prières, qui sont aussi comme Até filles de Jupiter, la suivaient en boitant et réparaient le mal produit par leur malencontreuse sœur. C’est, sous le voile ingénieux de l’allégorie, le récit de la malédiction portée par Dieu contre la terre après la chute du premier homme. Cette touchante fiction des Prières, qui remplissent partout une mission réparatrice, prouve que l’homme conserva toujours l’espérance, et que dans sa plus profonde dégradation il avait des idées de régénération et de salut.

3. La Vengeance ou Némésis était la fille de l’Océan et de la Nuit. On l’appelait encore Adrastée. Elle devait châtier les méchants et les usurpateurs de la gloire et de la renommée.

Némésis vous observe, et frémit des blasphèmes
Dont rougit à vos yeux l’aimable Vérité,
N’attirez pas sur vous, trop épris de vous-mêmes,
            Sa terrible équité.
C’est elle dont les yeux certains, inévitables,
Percent tous les replis de vos cœurs insensés ;
Et nous lui répondons des éloges coupables
            Qui nous sont adressés.
Rousseau.

On la représentait avec des ailes pour exprimer la rapidité avec laquelle la peine suit ordinairement le crime. Elle était armée de serpents et de torches ardentes, et avait une couronne sur la tête.

4. L’Envie, fille de la Nuit, fut toujours flétrie comme un vice infiniment honteux et déshonorant. On lui donnait la physionomie d’une vieille femme horriblement maigre, au front ridé, au teint livide, aux yeux louches et enfoncés, au regard inquiet, à l’air sombre et sinistre. Sa tête était couverte de serpents au lieu de cheveux ; elle tenait trois serpents d’une main et de l’autre une hydre. Un reptile monstrueux lui dévorait le sein et lui inspirait son poison.

Mais, que vois-je ? la noire Envie
Agitant ses serpents affreux
Pour ternir l’éclat de ma vie,
Sort de son antre ténébreux.
L’Avarice lui sert de guide ;
La Malice au souris perfide,
L’Imposture aux yeux effrontés,
De l’Enfer filles inflexibles,
Secouant leurs flambeaux horribles,
Marchent sans ordre à ses côtés.
Rousseau.

5. La Discorde portait chez les Grecs le nom d’Eris. Elle était sans cesse occupée à semer le trouble et la guerre parmi les hommes. Hésiode dit qu’elle était fille de la Nuit. Virgile la représente avec une chevelure hérissée de serpents et attachée par des bandelettes ensanglantées. Les peintres lui donnaient un air hagard, des vêtements déchirés, et lui faisaient tenir d’une main des torches enflammées ou un poignard et de l’autre un rouleau sur lequel on lisait ces mots : Guerres, confusion et querelles. Voltaire a fait de cette déesse un affreux tableau :

Ce monstre impérieux, sanguinaire, inflexible,
De ses propres sujets est l’ennemi terrible.
Aux malheurs des mortels il borne ses desseins,
Le sang de son parti rougit souvent ses mains :
Il habite en tyran dans les cœurs qu’il déchire,
Et lui-même il punit les rigueurs qu’il inspire.
Son haleine en cent lieux répand l’aridité ;
Le fruit meurt en naissant dans son germe infecté ;
Les épis renversés sur la terre languissent ;
Le ciel s’en obscurcit, les astres en pâlissent ;
Et la foudre en éclats, qui gronde sous ses pieds,
Semble annoncer la mort aux peuples effrayés.

6. La Paresse était fille du Sommeil et de la Nuit. Il nous semble que son culte était aussi digne des habitants des villes que de ceux des campagnes. Cependant chez les Romains elle était spécialement honorée par ces derniers. Le laboureur était heureux après ses grandes fatigues de prendre un instant de repos, et il plaçait pour ce motif la paresse au rang de ses divinités favorites. La tortue était l’emblème de cette déesse, et on lui offrait pour victimes des limaçons.

7. Il y avait une multitude d’autres vices qui étaient également divinisés. Le vice en général avait même été personnifié, et on lui prêtait les grâces d’un jeune adolescent demi-nu, courant avec agilité dans un sentier couvert de fleurs sous lesquelles des serpents s’agitent. Il avait pour attribut un masque qu’il tenait à la main, des hameçons et des filets. Le Mensonge, la Fraude, le Parjure et tous les crimes les plus monstrueux avaient des autels, ce qui suffit pour faire comprendre la corruption profonde qui souillait alors la société.

Questionnaire. §

1. Quels furent les principaux vices érigés en divinités ? 2. Comment les Grecs appelaient-ils la Méchanceté ? Quel était le rôle de cette déesse ? Quelle mission avaient reçu les Prières ? Quel était le sens de cette allégorie ? 3. Quels noms portait la Vengeance ? Quelles étaient ses fonctions ? Comment était-elle représentée ? 4- Quelle idée les anciens s’étaient faite de l’Envie ? Quelle physionomie lui prêtaient-ils ? 5. Comment les Grecs appelaient-ils la Discorde ? Qu’en disent Hésiode et Virgile ? Comment était-elle représentée par les peintres ? Quel tableau en a fait Voltaire ? 6. Qu’était la Paresse ? Par qui était-elle spécialement honorée ? Quel était son emblème ? Quels étaient ses victimes ? 7. Quels sont les autres vices qui furent divinisés par les païens ? Comment représentèrent-ils le vice en général ?

Chapitre IV.
Des Maux. §

1. Nous ne parlerons ici que de Bellone, des Tempêtes, de la Vieillesse, des Maladies et de la Pauvreté.

2. Bellone, comme nous l’avons déjà dit5, était la déesse de la guerre, l’épouse de Mars. Elle avait un temple à Rome où l’on recevait les ambassadeurs des nations, et où l’on décernait le triomphe aux généraux victorieux. Les temples de Comana dans la Cappadoce, consacrés à la même divinité, étaient aussi très-célèbres. Ils étaient servis par une foule de prêtres qui honoraient cette déesse au jour de ses fêtes par des gestes convulsifs et des danses bizarres. Ils se faisaient aussi sur tout le corps des incisions, et croyaient agréable à Bellone le sang qui sortait de ces plaies.

3. Les Tempêtes étaient renfermées avec les Vents dans l’antre d’Eole, et ce dieu avait sur elles toute puissance. Jupiter les faisait déchaîner surtout contre les marchands avares qui parcouraient les mers pour amasser des richesses. On les redoutait tellement qu’avant d’entreprendre un voyage on leur offrait des sacrifices pour prévenir leur fureur.

4. La Vieillesse était une divinité couverte de rides ; on la disait fille de la Nuit. Les Grecs lui élevèrent un temple, où ils la conjuraient de leur épargner les infirmités qui lui font cortége. On rendait également un culte public à la Fièvre, à la Goutte et à une foule de maladies. Il n’y avait vraiment rien, ni dans la nature matérielle, ni dans les affections de l’homme, ni dans les sentiments de son cœur, qui ne fût changé en divinités, tant l’intelligence du peuple était profondément obscurcie.

5. La Pauvreté, que le christianisme a ennoblie, était elle-même placée parmi les dieux funestes à la terre. On la faisait naître du Luxe et de la Paresse qui trop souvent l’engendrent encore parmi nous, et les poëtes la représentaient comme une femme d’une pâleur extrême, mal vêtue, demandant l’aumône en glanant dans un champ dont la récolte était enlevée. Un peintre l’a revêtue de mauvais habits et l’a couronnée de rameaux aux feuilles desséchées, symbole de la perte des biens.

Questionnaire. — 1. Quels sont les maux qui ont été spécialement divinisés ? 2. Qu’était Bellone ? Quel emploi faisaient les Romains du temple qu’ils lui élevèrent ? En quels lieux avait-elle d’autres temples ? Quelles cérémonies faisaient ses prêtres pour l’honorer ? 3. Où étaient renfermées les Tempêtes ? Contre qui les soulevait Jupiter ? Par qui étaient-elles redoutées ? 4. De qui la Vieillesse était-elle fille ? Que lui demandaient les Grecs ? Quel culte rendaient-ils aux Maladies ? 5. Quelle était l’origine de la Pauvreté ? Comment les poëtes et les peintres la représentaient-ils ?

Chapitre V.
De quelques autres divinités allégoriques. §

1. Nous en avons averti, nous n’avons point la prétention d’énumérer toutes les divinités allégoriques des Grecs et des Latins, parce que leur nombre était immense. Nous citerons cependant encore la Fortune, la Nécessité, l’Occasion, le Silence et la Renommée.

2. La Fortune avait la direction de toutes les choses humaines, et distribuait, selon ses caprices, les biens et les maux. Les païens ne connaissaient pas le dogme si consolant d’une Providence sage et éclairée qui veille sur tout et qui sait punir ou récompenser selon les lois de la plus sévère justice. Ils admettaient, au lieu de cette Providence, une divinité aveugle, maîtresse de tous les événements, qu’ils honoraient sous le nom de Fortune ou de Hasard. On la représentait chauve avec des ailes aux pieds. Un de ses pieds était en l’air, et l’autre légèrement posé sur une roue en signe de son instabilité. Elle avait un bandeau sur les yeux pour signifier qu’elle ne discerne ni la vertu, ni le talent, et qu’elle répand sans raison ses faveurs. Aucune divinité ne compta un aussi grand nombre de temples et d’adorateurs. A Rome, elle en avait à elle seule plus que tous les autres dieux. On la vénérait sous tous les noms. Il y avait la Fortune virile, la Fortune publique, la Fortune privée, la Fortune libre, la Fortune affermie, la Fortune équestre, la grande, la petite, la bonne, la mauvaise Fortune, etc. Au reste on peut dire que cette divinité n’a point vu renverser ses idoles, car elle a toujours vu les hommes encenser ses statues et s’agenouiller devant ses autels.

3. La Nécessité était une autre divinité inventée par le fatalisme. On la disait sœur du Destin et souvent même on la confondit avec ce dieu irrésistible. Ses arrêts étaient irrévocables, et aucun de ceux qu’elle poursuivait ne lui pouvait échapper. Elle était sourde à leurs plaintes et à leurs prières, et on la représentait pour ce motif entourée de chaînes, de clous et de marteaux, avec des mains de bronze. A Corinthe, elle avait un temple où personne, à l’exception des prêtres, n’avait le droit d’entrer.

4. L’Occasion était la déesse de l’à-propos. En Grèce, c’était un dieu ; à Rome, une déesse. Elle présidait au moment le plus favorable pour le succès. Souvent on la peint comme la Fortune, avec cette différence que le derrière de sa tête est absolument chauve, tandis que sur le devant il n’y a qu’une mèche de cheveux qu’il faut saisir au passage. Ou bien encore on la représente passant avec vitesse sur le tranchant d’un rasoir, sans se blesser.

5. Le Silence, appelé aussi Sigalion et Harpocrate, était également révéré comme un dieu. On plaçait ses statues sur la porte des temples pour montrer que la Divinité demande à être honorée par un recueillement profond, plutôt que par des paroles. On le représentait un doigt sur les lèvres, et il apprenait à ses adorateurs la discrétion.

6. La Renommée était fille de Titan et de la Terre et messagère de Jupiter. Elle publiait dans l’univers entier toutes les nouvelles bonnes ou mauvaises. On la représentait avec des ailes et sonnant de la trompette. Les poëtes feignaient qu’elle était toute couverte d’yeux et d’oreilles, et qu’elle avait cent bouches pour annoncer ses nouvelles.

Quelle est cette déesse énorme,
Ou plutôt ce monstre difforme
Tout couvert d’oreilles et d’yeux,
Dont la voix ressemble, au tonnerre,
Et qui des pieds touchant la terre,
Cache sa tête dans les cieux ?

C’est l’inconstante Renommée,
Qui sans cesse les yeux ouverts
Fait sa revue accoutumée
Dans tous les coins de l’univers.
Toujours vaine, toujours errante,
Et messagère indifférente
Des vérités et de l’erreur,
Sa voix en merveilles féconde
Va chez tous les peuples du monde
Semer le bruit et la terreur.
Rousseau.

7. Ovide décrit ainsi le palais de la Renommée : « Au milieu de l’univers, entre l’Océan, les terres et les plaines célestes, aux confins de ces trois mondes, il est un lieu où l’on voit tout ce qui se passe dans les autres lieux, quelle que soit leur distance, et où l’on entend tout ce qui se dit. C’est là qu’habite la Renommée. Elle s’est choisi un palais sur le sommet d’une montagne, elle l’a environné de mille issues et de mille ouvertures, et ses appartements ne sont fermés par aucune porte. Le jour et la nuit, sa demeure est ouverte. Formée tout entière d’un airain retentissant, elle résonne à tout bruit et répète toutes les paroles qu’elle entend. Au dedans point de repos, point de silence ; ce n’est cependant pas du fracas, mais un sourd et continuel murmure, comme le bruit des flots de la mer quand vous les entendez de loin, ou comme les derniers roulements de la foudre que Jupiter promène dans les nues. Là s’agite un peuple léger, là vont et viennent mille vaines rumeurs vraies ou fausses, des paroles confuses qui s’entrechoquent et repaissent les oreilles avides. Ces messagers portent partout les nouvelles ; le mensonge va croissant dans leur bouche, et ceux qui les écoulent ajoutent encore à ce qu’ils ont entendu. Là sont la Crédulité, l’Erreur téméraire, la vaine Joie, les Terreurs, la Sédition et les Bruits incertains. La déesse elle-même voit ce qui se passe dans le ciel, dans l’Océan et sur la terre, et son regard scrutateur interroge tout l’univers. »

[Translator : Louis Pouget, Th. Guiard, Chevriau, Fouqier]

Questionnaire. §

1. Quelles sont les autres divinités allégoriques qu’il importe de connaître ? 2. Quelles idées les païens se faisaient de la Fortune ? Comment était-elle représentée ? Ses temples étaient-ils nombreux ? Sous quels noms était-elle vénérée ? 3. Comment comprenait-on la Nécessité ? De quelle manière était-elle représentée ? Où avait-elle un temple ? 4. Qu’est-ce que l’Occasion ? Comment la représente-t-on ? 5. Quels noms donnait-on au Silence ? Où plaçait-on ses statues ? Comment était-il représenté ? 6. Que disait-on de la Renommée ? Quelles fictions imaginèrent les poëtes à son sujet ? 7. Quelle description Ovide a faite de sa demeure ?

Quatrième partie.
Des héros ou demi-dieux. §

Chapitre I.
Caractère des temps héroïques. §

1. Lorsque les hommes eurent perdu les croyances primitives, leurs mœurs s’altérèrent. De doux et policés qu’ils étaient, ils devinrent féroces et barbares. La loi du plus fort fut substituée au règne de la justice, et ceux qui l’emportaient sur les autres par la vigueur du corps abusaient de cet avantage au profit de leurs mauvaises passions. Toutes les contrées se peuplèrent de brigands qui insultaient les voyageurs et attentaient tout à la fois à leurs biens, à leur honneur et à leur vie. Les contrées inhabitées virent aussi se multiplier dans leur sein les bêtes féroces, et l’homme eut à se défendre contre les animaux sauvages, aussi bien que contre ceux de ses semblables qui vivaient sans foi et sans principes. De nation à nation, l’intérêt excita des guerres injustes et cruelles, et les peuples n’eurent pas d’autre ressource que la force pour conserver leur indépendance.

2. On conçoit que quand, au milieu d’une société ainsi bouleversée par les plus épouvantables fléaux, il se rencontra un homme robuste et bien intentionné qui consentit à mettre ses forces et sa puissance au service de l’intérêt général, tous ses contemporains durent exalter sa vertu et vanter ses exploits. L’enthousiasme populaire, qui sait rarement se modérer, oublia même ses défauts pour ne tenir compte que de ses bienfaits, et en fit un dieu. Telle fut l’origine des héros et des grands hommes dont la fable a célébré les actions.

3. Nous réduirons à quatre chefs principaux tous les événements héroïques dont la tradition a conservé le souvenir : l’expédition des Argonautes ; les exploits d’Hercule, de Thésée et de tous les héros qui avaient suivi Jason dans la Colchide ; la guerre de Thèbes et la guerre de Troie. Il est à remarquer que chacun de ces événements correspond à un progrès social. L’expédition des Argonautes fut entreprise pour défendre la civilisation naissante de la Grèce contre les invasions des pirates ; les exploits d’Hercule et de Thésée sont le symbole des efforts qu’il a fallu faire pour établir l’ordre à l’intérieur et le maintenir contre les fureurs du brigandage ; la guerre de Thèbes est une vengeance du droit social et de la sainteté du serment, et la guerre de Troie est tout à la fois une défense du droit des gens et de l’honneur national.

Questionnaire. §

1. Quelles furent les mœurs des temps héroïques ? Quels désordres régnaient alors dans la société ? 2. Quelle reconnaissance durent avoir les peuples pour ceux qui les délivrèrent de cette anarchie ? N’est-ce pas l’origine des héros ou des demi-dieux ? 3. A combien de chefs peut-on rattacher tous les événements des temps héroïques ? Quels rapports ont ces événements avec le progrès de la civilisation ?

Chapitre II.
De l’expédition des Argonautes. §

1. L’histoire nous apprend que les différentes peuplades de la Grèce s’unirent pour attaquer dans leurs repaires, sur les rives du Pont-Euxin en Colchide, les pirates qui infestaient les mers. La jeunesse thessalienne et les plus courageux habitants du Péloponèse s’armèrent pour cette entreprise. Ils choisirent pour chef un Eolien, Jason, roi de Thessalie. Le navire Argo était le plus considérable de toute la flotte, et on appela pour ce motif les guerriers qui le montaient les Argonautes. Ils triomphèrent des pirates, s’emparèrent de leur pays et revinrent chargés de butin6.

2. La fable a singulièrement embelli cet événement. D’après ses fictions, Phryxus, fils d’Athamas, roi de Thèbes, et Hellé, sa sœur, auraient fui les fureurs d’Ino, leur belle-mère. Ils seraient montés l’un et l’autre pour faire route sur un bélier à la toison d’or, et auraient ainsi essayé de traverser la mer. Mais Hellé, épouvantée par le bruit des flots, se laissa tomber à l’endroit qui a porté depuis le nom d’Hellespont. Phryxus arriva sain et sauf en Colchide chez son parent Eétès. Celui-ci fit périr Phryxus et s’empara de la toison d’or.

3. En Grèce on apprit bientôt l’indigne conduite du tyran. Le roi d’Iolchos en Thessalie, Eson, ayant confié la régence de ses Etats à Pélias, un de ses proches parents, en attendant que son fils Jason fut en âge de régner, le régent se fit usurpateur et ne voulut rendre au jeune prince son trône qu’à la condition qu’il irait reconquérir la toison d’or. L’entreprise était remplie de dangers. Mais Jason se sentait dans la première vigueur de l’âge ; il avait l’ambition de la gloire et cherchait à tout prix à se faire un nom. Il fit donc construire, avec des bois coupés sur le mont Pélion, un vaisseau à cinquante rames ; il en forma le mât avec un chêne de la forêt de Dodone, qui conserva toute sa vertu prophétique, et il engagea tous les guerriers de la Grèce à le suivre. Hercule, Thésée, Castor et Pollux, qui devaient plus tard s’immortaliser par leurs propres exploits, Nestor, que nous reverrons sous les murs de Troie, Orphée, le premier chantre du monde, en un mot, tous les hommes les plus distingués répondirent à son appel. On donna le nom d’Argo au vaisseau qu’ils montaient, soit parce qu’il sortait des chantiers d’Argos, ou que tel était le nom de celui qui l’avait construit.

4. La flotte partit du cap de Magnésie en Thessalie. Tymphis, habile pilote, tenait le gouvernail ; Lyncée, avec sa vue perçante, découvrait les écueils, et Orphée enflammait le courage de ses compagnons et trompait leurs ennuis par les sons de sa lyre. La traversée fut pleine de périls et d’aventures. Les héros voyageurs abordèrent dans l’île de Lemnos, où ils furent accueillis avec empressement par les Amazones qui venaient d’égorger leurs époux. Ils séjournèrent deux ans dans cette contrée, passèrent de là en Samothrace où Phinée leur promit de les conduire en Colchide, s’ils voulaient délivrer son pays des Harpies. Ils entrèrent ensuite dans l’Hellespont, côtoyèrent l’Asie-Mineure, et, après bien des combats, des aventures et des tempêtes, ils arrivèrent sous les murs d’Æa, capitale de la Colchide.

5. Quand Jason réclama d’Eétès la toison d’or, le tyran répondit qu’il la lui rendrait, s’il domptait deux taureaux furieux qui avaient les pieds et les cornes d’airain et qui vomissaient la flamme. L’intrépide guerrier devait les atteler à une charrue de diamant, et labourer avec eux un champ de quatre arpents, pour y semer les dents d’un terrible dragon qu’il lui fallait vaincre et exterminer.

Deux taureaux indomptés sont les premiers remparts
    Qui défendent le champ de Mars ;
La flamme qui se mêle à leur brûlante haleine,
    Forme autour d’eux un affreux tourbillon ;
    Il faut forcer leur fureur inhumaine
A tracer sur la pleine un pénible sillon.
        Aussitôt du sein de la terre
        Tes yeux verront de toutes parts
        Sortir des escadrons épars,
Qui se rassembleront pour te livrer la guerre.
Ce n’est pas tout encore : un dragon furieux
Fait dans ce lieu terrible une garde constante ;
Jamais le doux sommeil n’approche de ses yeux.
Rien ne saurait tromper sa fureur vigilante.
Rousseau.

6. Avec l’aide de Médée, fille du roi Eétès, Jason parvint à terminer heureusement son entreprise. S’étant emparé de la toison d’or, il s’enfuit de Colchos avec Médée et repartit pour la Grèce. Eétès les poursuivit, et envoya contre eux son fils Absyrte. Médée saisit ce jeune prince, l’égorgea cruellement et dispersa ses membres sur le rivage. L’horreur de ce spectacle glaça d’effroi le malheureux Eétès. Il cessa ses poursuites contre Jason, et ne songea plus qu’à recueillir les restes inanimés de son fils chéri pour leur rendre les derniers honneurs.

7. Jason, délivré des attaques d’Eétès, n’en fut pas plus heureux. La vengeance des dieux sembla s’être attachée aux meurtriers d’Absyrte. Une tempête affreuse les assaillit dans leur retour et les jeta au delà des colonnes d’Hercule. Téthys et les nymphes dirigèrent pourtant leurs vaisseaux à travers les écueils de Charybde et de Scylla, et la lyre harmonieuse d’Orphée les empêcha de se laisser séduire par les chants des Sirènes. Arrivés à l’île des Phéaciens, ils trouvèrent la flotte et l’armée d’Eétès dont ils trompèrent les envoyés. Une nouvelle tempête les assaillit ensuite et poussa leurs navires sur les côtes de l’Egypte. Ils furent obligés de transporter leurs vaisseaux sur leurs épaules jusqu’au lac Titonis. Mais enfin, après tous ces malheurs et toutes ces fatigues, ils débarquèrent en Thessalie à l’endroit d’où ils étaient partis. Ainsi fut terminée l’expédition des Argonautes.

8. Malheureusement Jason n’était pas à la fin de ses souffrances et de ses revers. Pélias refusa de lui rendre son trône, comme il en était convenu. Médée résolut de se venger de cette trahison. Cette magicienne avait rajeuni Eson, le père de Jason, par la vertu de certains breuvages. Les filles de Pélias, étonnées de ce prodige, prièrent la magicienne de le renouveler en faveur de leur père. Médée eut l’air d’y consentir, et leur conseilla de couper leur vieux père en morceaux et de jeter ses membres dans une chaudière ardente. Ces filles trop crédules firent ce qui leur avait été commandé, et leur malheureux père fut victime de leur horrible superstition. Ce crime affreux ne rendit pas à Jason ses Etats. Les fils de Pélias continuèrent à rogner sur la Thessalie, et le conquérant de la toison d’or fut contraint de s’exiler à Corinthe avec Médée.

9. Dans cette dernière ville il eut la faiblesse de concevoir une passion coupable pour Glaucé, fille du roi de Corinthe. Cet affront rendit Médée furieuse, et elle envoya à sa rivale une robe parsemée de diamants. Cette robe avait été trempée dans les poisons les plus violents et les plus subtils. Aussitôt que Glaucé s’en fut revêtue, elle sentit courir dans tous ses membres un feu dévorant qui la consuma en quelques instants. Jason la vit s’évanouir sous ses yeux, sans pouvoir lui prêter aucun secours. Dans son indignation il jura la mort de Médée. Mais cette femme cruelle n’attendit pas ses coups. Elle massacra elle-même ses propres enfants, et se fit enlever sur un char par des dragons volants qui la transportèrent à Athènes. Jason malheureux mena depuis ce moment une vie errante. Médée lui avait prédit qu’il périrait frappé par un des débris du vaisseau des Argonautes. La prédiction s’accomplit. Un jour qu’il se promenait sur les bords de la mer près de ce vaisseau tiré à sec, une poutre s’en détacha et lui fracassa la tête.

Telle fut l’expédition des Argonautes. Elle a beaucoup occupé les poëtes. Apollonius de Rhodes et Valérius Flaccus l’ont chantée en vers.

Questionnaire. §

1. Qu’est-ce que l’histoire nous apprend de l’expédition des Argonautes ? 2. De quelles fictions la fable a-t-elle orné cet événement ? 3. A quelle occasion fut entreprise la conquête de la toison d’or ? Qui était à la tête de l’expédition ? Quels sont les grands hommes qui en firent partie ? D’où vint à cette expédition le nom qu’elle porte ? 4. Qui dirigeait la flotte ? Dans quels lieux passèrent les Argonautes ? Où séjournèrent-ils ? 5. A quelles conditions Eétès s’engagea-t-il à rendre à Jason la toison d’or ? 6. Comment ce héros s’en empara-t-il ? Comment échappa-t-il aux poursuites d’Eétès ? 7. Quelles calamités assaillirent Jason à son retour ? Quel secours il reçut des nymphes et de Téthys ? Quelles épreuves subit-il encore avant de rentrer en Thessalie ? 8. Quelle fut la conduite du perfide Pélias à son égard ? Quelle vengeance cruelle exerça Médée ? où s’exila Jason ? 9. Quelle faute commit-il à Corinthe ? Comment se vengea Médée ? Que devint cette femme cruelle ? Quelle fut la mort de Jason ? Quels poëtes ont chanté l’expédition des Argonautes ?

Chapitre III.
Hercule. §

1. Le plus célèbre des Argonautes fut Hercule. Il était fils de Jupiter et d’Alcmène, femme d’Amphitryon, roi de Thèbes. Junon, dans son humeur vindicative et jalouse, résolut défaire périr cet enfant à son berceau. Elle envoya donc contre lui deux dragons énormes. Hercule les vit venir à lui en souriant, les saisit de ses bras robustes et les mit en pièces. C’est ainsi qu’il prouva qu’il était vraiment du sang de Jupiter. Le devin Tirésias lui prédit tous ses futurs exploits, et Pallas fléchit la colère de Junon contre lui. La reine des dieux voulut même le nourrir de son lait. Hercule en laissa tomber dans le ciel quelques gouttes, et les poëtes ont dit que la voie lactée s’était ainsi formée.

2. Les maîtres les plus habiles furent chargés de l’éducation de ce héros. Autolycus lui apprit à conduire un char et à lutter ; Euryte, roi d’Œchalie, à tirer de l’arc ; Eumolpe, à chanter ; Castor et Pollux, à se livrer à tous les exercices du gymnase ; Chiron le Centaure lui enseigna les sciences et la morale, et Linus l’art de jouer de la lyre. Ce dernier maître lui ayant un jour reproché avec sévérité une faute qu’il avait faite, Hercule indigné lui cassa sur la tête sa lyre et le tua du même coup.

3. Arrivé à l’âge de dix-huit ans, à l’époque où les jeunes gens décident leur avenir, Hercule s’abandonna à ses réflexions. Un jour qu’il était assis dans un lieu solitaire, l’esprit préoccupé des plus graves pensées, il vit s’avancer à lui deux femmes d’une grande taille. L’une joignait la noblesse à la beauté, et n’avait d’ornements que ceux de la nature. Elle avait les yeux chastes, la figure modeste, son vêtement était d’une blancheur éclatante. Le héros reconnut à tous ces traits la Vertu. L’autre avait un visage fardé, le regard arrogant et superbe, une parure recherchée et un embonpoint qui semblait le fruit de la mollesse. Elle se considérait elle-même, et ses yeux cherchaient partout des admirateurs : c’était la Volupté. Elle s’empressa d’accourir vers le héros, et lui dit :

« Hercule, je vois que tu ne sais quel chemin tu dois prendre. Si tu t’attaches à moi, je te conduirai par la route la plus riante et la plus facile ; aucun plaisir ne te sera refusé, aucune peine n’affligera ta vie. Tu n’auras à redouter ni la guerre, ni les vains soucis ; ta seule occupation sera de trouver les boissons et les mets qui pourront te plaire et tout ce qui flattera le mieux tes sens ; tu ne songeras qu’au moyen le plus court d’être heureux. Et si tu crains de manquer jamais d’argent pour acheter des plaisirs, rassure-toi, je t’en comblerai sans prescrire à ton corps ni à ton esprit des travaux pénibles. Tout sacrifier au bonheur, voilà le privilège de quiconque suit mes lois. » La Vertu reprit aussitôt : « Et moi aussi, Hercule, je parais devant toi ; c’est que je n’ignore pas de qui tu tiens le jour, c’est que ton éducation m’a révélé ton caractère. Si tu choisis ma route, tu brilleras entre les grands hommes par tes exploits et tes vertus. Je ne t’abuserai pas en le promettant les plaisirs. Ce n’est qu’au prix des soins et des travaux que les dieux répandent le bonheur et l’éclat sur la vie des hommes. Si tu veux que ton corps devienne robuste et vigoureux, souviens-toi de l’accoutumer à l’empire de l’âme et de l’exercer au milieu des fatigues et des sueurs. Je donne le bonheur et la gloire à ceux qui écoulent ma voix ; jeunes, ils ont le plaisir d’entendre les éloges des vieillards ; vieux, ils aiment à recueillir les respects de la jeunesse. Quand le terme fatal arrive, l’oubli du tombeau ne les ensevelit pas tout entiers, mais leur mémoire, toujours florissante, vit dans un long avenir. »

[Xénophon]
[Translator : Leclerc"]

4. Hercule, enflammé par ce discours, se décida pour la Vertu et devint dès lors le vengeur de la justice et le libérateur de ses contemporains. Il débuta dans sa carrière glorieuse par les travaux que lui imposa Eurysthée, fils de Nicippe, femme de Sthénélus, roi d’Argos. Ce tyran, excité par la jalouse Junon, ordonna au jeune héros des entreprises gigantesques qui sont connues dans la table sous le nom des douze travaux d’Hercule.

1º Il y avait dans la forêt de Némée un lion furieux et terrible qui dévastait ce pays. Hercule fut chargé de l’attaquer. Après de grands efforts le héros le saisit, le déchira de ses mains, et se fit de sa peau une espèce de bouclier et de vêtement.

2º Le marais de Lerne près d’Argos renfermait une hydre à sept têtes. Quand on en coupait une, il en renaissait aussitôt plusieurs autres. Hercule les écrasa toutes d’un seul coup de sa massue, et envenima ses flèches en les trempant dans le sang de ce monstre épouvantable.

3º Une biche consacrée à Diane, et que pour ce motif on n’osait percer de flèches, habitait sur le mont Ménale. Elle avait les cornes d’or et les pieds d’airain, et elle était si agile que personne ne pouvait l’atteindre. Hercule la poursuivit un an entier, la saisit au passage du fleuve Ladon, et l’apporta sur ses épaules à Eurysthée.

4º Il prit également tout vivant un sanglier affreux qui avait sa retraite sur le mont Erymanthe, et le présenta à ce même prince qui faillit en mourir de frayeur.

5º Il fit la guerre aux oiseaux monstrueux qui couvraient le lac Stymphale en Arcadie. Ces oiseaux étaient si nombreux et si gros qu’ils obscurcissaient la lumière du soleil. Hercule les perça tous de ses flèches empoisonnées.

6º Il alla ensuite combattre les Amazones. C’était un peuple de femmes guerrières qui habitaient la Scythie. Eurysthée avait dit à Hercule de lui apporter la ceinture d’Hippolyte, leur reine. Hercule es attaqua, les vainquit et fit cette princesse prisonnière.

7º Les écuries d’Augias, roi de l’Elide, infectaient toute la Grèce. Elles n’avaient pas été nettoyées depuis trente ans. Hercule détourna le fleuve Alphée, le fit passer à travers et les purifia en quelques instants. Augias n’ayant pas voulu récompenser Hercule, comme il le lui avait promis, le héros pilla la ville d’Elis et tua ce monarque perfide.

8º Il mit en pièces Diomède, roi de Thrace, qui nourrissait ses chevaux de chair humaine, et il extermina en Espagne Busiris, qui s’était rendu coupable du même forfait.

9º Il attaqua encore Géryon, un autre brigand qui régnait sur la Bétique, et qui nourrissait aussi ses bœufs de chair humaine. Les poëtes ont fait de ce tyran un monstre à trois corps qui faisait garder ses troupeaux par un chien à deux têtes et par un dragon qui en avait sept. Cette fiction tient sans doute à la forme des Etats de Géryon qui comprenaient les îles Majorque et Minorque et des possessions sur le continent, et les gardiens faisaient allusion à l’organisation de son administration civile et militaire.

10º Il enleva les pommes d’or du jardin des Hespérides, gardées par un dragon qui avait cent têtes poussant à la fois cent espèces de sifflements.

11º Il attaqua un taureau qui jetait le feu par les narines, et que Neptune avait lancé contre Minos dans l’île de Crète, d’où il menaçait toute la Grèce.

12º Enfin il descendit aux enfers pour délivrer Thésée son ami. Il enchaîna Cerbère et vint à bout de son entreprise.

5. Après avoir exécuté tous ces immenses travaux, Hercule crut n’avoir pas encore assez fait pour sa gloire. Il se mit à parcourir l’univers pour le purger de tous les monstres et de tous les brigands qui l’infestaient. Cacus, brigand fameux, qui vivait retiré sur le mont Aventin, une des sept collines de Rome, lui ayant dérobé ses bœufs, Hercule le poursuivit et l’attaqua dans son antre. En vain le volcan vomit des tourbillons de flammes et de fumée, Hercule le saisit et l’étouffa. En Libye, il combattu le géant Anthée, qui massacrait tous les voyageurs et qui avait fait vœu d’élever à Neptune son père un temple avec des crânes d’hommes. La lutte fut terrible parce que toutes les fois qu’Anthée tombait, la Terre, sa mère, lui donnait de nouvelles forces. Hercule s’en étant aperçu, souleva le géant dans l’air et l’étouffa entre ses bras. Après la défaite d’Anthée, le peuple des Pygmées qui lui obéissait et qui se composait d’hommes de deux pieds de haut, osa défier le fils de Jupiter. Le héros enveloppa cette nation tout entière dans sa peau de lion et déposa ce singulier présent aux pieds d’Eurysthée. On dit aussi qu’il sépara les deux montagnes Calpé en Europe, et Abyla en Afrique et creusa ainsi le détroit de Gibraltar qui unit la Méditerranée à l’Océan. Ces deux montagnes furent appelées les Colonnes d’Hercule, et on prétendit qu’Hercule y avait lui-même gravé ces mots : Nec plus ultrà ; Rien au delà.

6. Hercule eut ensuite ses faiblesses. Junon, qui n’avait pu le vaincre en l’exposant à de rudes travaux, réussit à le rendre méprisable en soufflant dans son cœur les plus violentes passions. Cet homme extraordinaire, qui avait remporté de si éclatantes victoires, ne rougit pas de se faire l’esclave d’Omphale, reine de Lydie. Il s’habillait comme elle, passait les jours entiers à ses côtés occupé à filer comme une de ses suivantes. Il secoua pourtant ces liens ignominieux et s’unit à Déjanire, qui avait été auparavant fiancée au fleuve Achéloüs. Le fleuve voulut défendre ses droits, mais Hercule retrouva son ancienne vigueur et le vainquit. Il s’en retournait chez lui avec son épouse, lorsqu’il fut arrêté par les eaux débordées du fleuve Evène. Le Centaure Nessus s’offrit pour passer Déjanire sur son dos. Hercule y consentit, mais aussitôt il s’aperçut que l’officieux Centaure cherchait à lui dérober sa compagne. Soudain il le perce de l’une de ses flèches empoisonnées. Tout en expirant, Nessus songea à sa vengeance. Il donna sa robe toute teinte de son sang à Déjanire, en lui disant qu’elle pourrait s’en servir pour reconquérir l’affection de son époux, si jamais elle la perdait.

7. Hercule ayant manifesté quelque temps après le désir de contracter un nouveau mariage avec Iole, fille d’Eurytus, roi d’Œchalie, cette nouvelle remplit de trouble et d’amertume la malheureuse Déjanire. Elle envoya à son époux inconstant la robe du Centaure pour le guérir de sa criminelle passion. Hercule s’en revêtit, mais aussitôt qu’il eut placée sur ses épaules, il sentit un feu violent courir dans toutes ses veines. La robe fatale était empoisonnée, et le demi-dieu était rongé par le poison. Sentant que sa fin était prochaine, il fit élever un bûcher sur le mont Œta, remit ses armes à Philoctète son compagnon et son ami, et se donna lui-même la mort. Déjanire, en apprenant la fin tragique d’Hercule, fut frappée d’une si profonde douleur qu’elle en mourut.

8. Après son trépas, Hercule fut mis au rang des dieux. Dans le ciel les poëtes lui ont fait épouser Hébé, la déesse de la jeunesse. Les peuples de la Grèce et de l’Italie lui ont élevé des temples. Le plus célèbre était à Rome, on l’appelait le temple du grand Hercule ; ni chiens, ni mouches, dit-on, n’y entraient. On donne ordinairement à Hercule le nom d’Alcide, parce que son aïeul portait celui d’Alcée. On le représente sous la figure d’un homme robuste, les épaules couvertes de la peau du lion de Némée, une massue à la main. Quelquefois il a son arc et son carquois rempli de flèches ; ou bien encore il a le front ceint d’une couronne de peuplier blanc. Cet arbre lui était consacré, parce qu’en descendant aux enfers il s’était entouré la tête de son feuillage.

Questionnaire. §

1. Quel fut le plus célèbre des Argonautes ? Quels monstres la jalousie de Junon suscita contre Hercule encore au berceau ? Qui lui prédit sa future grandeur ? Qui le réconcilia avec Junon, et qu’elles furent les suites de cette réconciliation ? 2. Qui fut chargé de l’éducation d’Hercule ? Comment se conduisit-il envers Linus ? 3. Quelle vision eut-il à l’âge de dix-huit ans ? Quel discours lui tint la Volupté ? Quel discours lui adressa la Vertu ? 4. Par quels exploits se signala-t-il d’abord ? Racontez les douze grands travaux qu’il exécuta. 5. Après ces travaux ne fit-il pas encore d’autres merveilles ? Quelles sont-elles ? 6. Par quelles faiblesses se déshonora ce héros ? Pourquoi tua-t-il le Centaure Nessus ? Quel présent fit ce Centaure mourant à Déjanire ? 7. A quelle occasion Déjanire envoya-t-elle à Hercule un vêtement empoisonné ? Comment mourut ce héros ? 8. Quels honneurs lui rendit-on après sa mort ? Où était le plus célèbre de ses temples ? Quel nom donne-t-on ordinairement à Hercule ? Comment est-il représenté ?

Chapitre IV.
Thésée. §

1. Thésée était fils d’Egée, roi d’Athènes, et d’Æthra, fille de Pittée, roi du Péloponèse. La fable l’a fait fils de Neptune pour avoir le plaisir de jeter du merveilleux dans sa vie et autour de son berceau. Sa mère lui donna le jour dans le Péloponèse. Egée, en la quittant pour retourner à Athènes, avait caché son épée sous un rocher énorme, et lui avait recommandé de ne lui envoyer son fils que quand il serait en âge de remuer ce rocher et de prendre l’arme qui devait le faire reconnaître. Thésée avait à peine seize ans que déjà il avait ceint l’épée de son père. Son esprit bouillant ne rêvait que gloire et aventures. Les exploits d’Hercule son parent troublaient son sommeil, et avant de se rendre à Athènes il voulut se signaler en exterminant les brigands et les monstres qui infestaient l’Attique.

2. Quand il arriva à Athènes, il trouva dans cette ville Médée, l’épouse cruelle de Jason, qui dominait entièrement Egée son père. Cette marâtre vit d’un mauvais œil le jeune héros et résolut sa perte. Elle le rendit suspect au roi et décida ce monarque à l’empoisonner. Egée était sur le point de commettre cet épouvantable forfait, lorsqu’il vit tout à coup briller à côté de l’accusé l’épée qu’il avait autrefois laissée dans le Péloponèse. Il reconnut dans Thésée son fils, et chassa Médée dont la perfidie venait d’être dévoilée. Thésée fut comblé de gloire et proclamé l’héritier du trône d’Athènes. Il n’eut rien de plus empressé que de se montrer digne de ce nouveau titre, en délivrant ses possessions de tous les scélérats qui les souillaient de leurs meurtres et de leurs abominations.

3. Phalaris, Scyron, Procuste, Périphète et Sinnis, tels furent les principaux brigands qu’il fit périr. Phalaris était un tyran d’Agrigente. Il faisait brûler à petit feu dans un taureau d’airain tous ceux qu’il condamnait à mort et se plaisait à entendre leurs gémissements. Scyron dévastait l’Attique. Il arrêtait les voyageurs, les dépouillait et les conduisait ensuite au sommet d’un rocher d’où il les précipitait dans la mer. Procuste désolait ces mêmes contrées. Il avait fait faire un lit de fer sur lequel il étendait ses victimes. Il leur rognait les jambes quand elles étaient plus longues que ce lit, et il les tiraillait avec des cordes lorsqu’elles étaient plus courtes. Périphète vivait dans les environs d’Epidaure, et tuait tous les voyageurs à coups de massue. Thésée s’empara de cette arme et s’en fit un trophée. Sinis ou Cercyon courbait les arbres les plus forts, attachait à la cime ceux qu’il avait saisis, et aimait à voir leurs membres déchirés par la violence du mouvement que les branches leur imprimaient en se redressant subitement. Thésée lui fit endurer le même supplice.

4. Ce prince combattit également avec succès les monstres les plus affreux. Il tua un taureau qui ravageait les plaines de Marathon, et atteignit le sanglier de Calydon que Diane dans sa vengeance avait suscité contre l’Etolie. Mais le plus célèbre de tous ses exploits fut le meurtre du Minotaure. Ce monstre était moitié homme et moitié taureau. Il avait reçu le jour de Pasiphaé, femme de Minos, roi de Crète. Minos le tenait renfermé dans un labyrinthe où il le nourrissait de chair humaine. Ce labyrinthe était l’ouvrage de Dédale, un des ouvriers les plus habiles de ces temps héroïques. Il s’étendait dans un immense enclos et était formé de chambres et d’avenues qui offraient tant de détours qu’il était impossible à celui qui y entrait d’en retrouver l’issue. Dédale qui l’avait imaginée et construit y fut le premier renfermé par Minos qui eut à se plaindre de son infidélité. L’ingénieux artiste avait pour compagnon d’infortune son fils Icare. Il ne vit pas d’autre moyen pour sortir de ce lieu avec lui que de fabriquer des ailes artificielles qu’il attacha avec de la cire à ses épaules et à celles de son fils et de s’envoler ainsi dans les airs. Il avait bien recommandé à l’imprudent Icare de le suivre dans son vol, et de ne pas s’élever trop haut dans la crainte que le soleil ne fondit ses ailes. Mais le jeune homme n’écouta que son impétuosité téméraire et tomba dans la mer. Sa chute fit donner à cet endroit de la Méditerranée le nom de mer Icarienne.

5. Minos, après avoir ainsi puni Dédale, apprit que son fils Androgée venait d’être tué par des Athéniens pour avoir remporté sur eux le prix des jeux publics. Dans son indignation il se mit à la tête d’une armée et fit une invasion sur le territoire d’Athènes. La victoire le favorisa, et il imposa pour condition de paix aux Athéniens, d’envoyer tous les ans dans l’île de Crète sept jeunes garçons qui devaient être dévorés par le Minotaure. On avait déjà payé trois fois cet infâme tribut, lorsque Thésée demanda à monter lui-même sur le vaisseau qui allait faire voile vers la Crète pour combattre le Minotaure. Les voiles du navire étaient noires, selon la coutume, pour signifier le deuil des Athéniens ; mais Thésée était convenu avec son père que, s’il revenait vainqueur, ces voiles funèbres seraient remplacées par des voiles blanches. Il partit donc pour sa périlleuse entreprise. Ariane, la fille de Minos, fut touchée de son courage et vint à son secours. Elle lui donna le fil à l’aide duquel il devait sortir du labyrinthe après avoir tué le Minotaure. Le héros tua ce monstre, et se hâta tellement de retourner dans sa patrie pour y porter cette heureuse nouvelle qu’il oublia de changer les voiles de son navire. Egée, à la vue du vaisseau qui revenait avec ses ornements lugubres, crut que son fils avait été victime de son généreux dessein. De douleur il se précipita dans la mer, qui depuis ce moment reçut le nom de mer Egée.

6. Avant son départ Thésée s’était engagé, s’il était victorieux, à envoyer chaque année offrir des actions de grâces à Délos. Les députés chargés de ce devoir sacré étaient couronnés de branches de lauriers et montaient sur le navire qu’avait lui-même monté Thésée. Devenu roi d’Athènes par la mort de son père, Thésée se distingua par la sagesse de son gouvernement. Il rassembla en une seule ville tous les dèmes ou bourgades qui avaient d’abord constitué Athènes, divisa le peuple en trois corps auxquels il accorda les plus grands privilèges, renouvela les jeux Isthmiques en l’honneur de Neptune, et établit plusieurs fêtes religieuses, parce qu’il savait que la religion est le frein moral le plus puissant pour les nations. Et lorsqu’il eut ainsi complètement organisé ses Etats, il reprit le cours de ses aventures et de ses exploits.

7. Il s’unit d’une étroite amitié avec Pirithoüs, roi des Lapithes en Thessalie, et combattit avec lui les Centaures. C’étaient des hommes célèbres par leur habileté dans l’art de l’équitation. Ils se tenaient si bien à cheval qu’ils semblaient ne faire qu’un avec leur monture. C’est pourquoi les poëtes ont dit qu’ils étaient demi-hommes et demi-chevaux. Hercule et Thésée en tuèrent un grand nombre aux noces de Pirithoüs. Ce prince fit ensuite alliance avec Thésée, et l’accompagna dans une expédition contre les Amazones. Ils les vainquirent, et Thésée épousa leur reine Hippolyte. Il en eut un fils du même nom dont nous raconterons la fin tragique. Ils voulurent après cette victoire descendre aux enfers pour ravir à Pluton Proserpine, mais ils furent loin d’être aussi favorisés de la fortune dans cette dernière entreprise. Pirithoüs fut étranglé et dévoré par Cerbère et Thésée fut retenu captif jusqu’à ce qu’Hercule vînt le délivrer.

8. Après sa délivrance, Thésée épousa Phèdre, fille de Pasiphaé et de Minos et sœur d’Ariane. Il mena un jour sa nouvelle épouse à Trézène où habitait le jeune Hippolyte son fils. Phèdre conçut aussitôt une passion criminelle pour le fils de son époux, et osa la lui déclarer. Le vertueux Hippolyte alarmé repoussa vivement les coupables paroles qu’il venait d’entendre. Phèdre se vengea de ce dédain en calomniant le jeune prince près de son père. Thésée eut la faiblesse de croire aux accusations de son épouse et de livrer son cher fils à la vengeance de Neptune, qui lui avait promis d’exaucer tous ses vœux. Aussitôt Hippolyte fut dévoré par des monstres marins. Racine a raconté ainsi sa mort :

A peine nous sortions des portes de Trézène ;
Il était sur son char ; ses gardes affligés
Imitaient son silence autour de lui rangés.
Il suivait tout pensif le chemin de Mycènes ;
Sa main sur les chevaux laissait flotter les rênes ;
Ces superbes coursiers qu’on voyait autrefois
Pleins d’une ardeur si noble, obéir à sa voix,
L’œil morne maintenant, et la tête baissée,
Semblaient se conformer à sa triste pensée.
    Un effroyable cri, sorti du sein des flots,
Des airs, en ce moment, a troublé le repos,
Et du sein de la terre une voix formidable
Répond, en gémissant, à ce cri redoutable.
Jusqu’au fond de nos cœurs, notre sang s’est glacé ;
Des coursiers attentifs le crin s’est hérissé.
Cependant, sur le dos de la plaine liquide,
S’élève à gros bouillons une montagne humide :
L’onde approche, se brise, et vomit à nos yeux,
Parmi des flots d’écume, un monstre furieux.
Son front large est armé de cornes menaçantes ;
Tout son corps est couvert d’écailles jaunissantes ;
Indomptable taureau, dragon impétueux,
Sa croupe se recourbe en replis tortueux ;
Ses longs mugissements font trembler le rivage.
Le ciel avec horreur voit ce monstre sauvage ;
La terre s’en émeut, l’air en est infecté,
Le flot qui l’apporta recule épouvanté.

    Tout fuit, et sans s’armer d’un courage inutile,
Dans le temple voisin chacun cherche un asile.
Hippolyte lui seul, digne fils d’un héros,
Arrête ses coursiers, saisit ses javelots,
Pousse au monstre ; et, d’un dard lancé d’une main sûre,
Il lui fait dans le flanc une large blessure.
De rage et de douleur le monstre bondissant
Vient aux pieds des chevaux tomber en mugissant,
Se roule, et leur présente une gueule enflammée
Qui les couvre de feu, de sang et de fumée.
La frayeur les emporte ; et, sourds à cette fois,
Ils ne connaissent plus ni le frein, ni la voix ;
En efforts impuissants leur maître se consume ;
Ils rougissent le mors d’une sanglante écume.
On dit qu’on a vu même, en ce désordre affreux,
Un dieu qui d’aiguillons pressait leurs flancs poudreux.
A travers les rochers la peur les précipite ;
L’essieu crie et se rompt. L’intrépide Hippolyte
Voit voler en éclats tout son char fracassé ;
Dans les rênes lui-même il tombe embarrassé.
Excusez ma douleur. Cette image cruelle
Sera pour moi de pleurs une source éternelle.
J’ai vu, Seigneur, j’ai vu votre malheureux fils
Traîné par les chevaux que sa main a nourris.
Il veut les rappeler, et sa voix les effraie ;
Ils courent. Tout son corps n’est bientôt qu’une plaie.
De nos cris douloureux la plaine retentit.
    Leur fougue impétueuse enfin se ralentit :
Ils s’arrêtent, non loin de ces tombeaux antiques
Où des rois ses aïeux sont les froides reliques.
Je cours en soupirant, et sa garde me suit ;
De son généreux sang la trace nous conduit ;
Les rochers en sont teints ; les ronces dégoutantes
Portent de ses cheveux les dépouilles sanglantes.
J’arrive, je l’appelle, et, me tendant la main,
Il ouvre un œil mourant qu’il referme soudain.
« Le ciel, dit-il, m’arrache une innocente vie.
Prends soin, après ma mort, de la triste Aricie...
Cher ami, si mon père un jour désabusé
Plaint le malheur d’un fils faussement accusé,
Pour apaiser mon sang et mon ombre plaintive,
Dis-lui qu’avec douceur il traite sa captive,
Qu’il lui rende… » A ces mots, ce héros expiré
N’a laissé dans mes bras qu’un corps défiguré,
Triste objet où des dieux triomphent la colère,
Et que méconnaîtrait l’œil même de son père.
Racine, Phèdre, acte v.

9. Phèdre, bourrelée de remords, se tua de désespoir. Thésée, banni d’Athènes par l’ingratitude de ses sujets, se retira dans l’île de Scyros pour y mener loin des affaires une vie calme et tranquille. Lycomède, qui en était roi, fut jaloux de la réputation de son hôte et le jeta à la mer. Les Athéniens rendirent de grands honneurs à ses cendres. Cimon les fit transporter à Athènes, et elles y furent reçues avec une grande pompe. On lui éleva un temple magnifique pour éterniser sa mémoire.

Questionnaire. §

1. De qui Thésée était-il fils ? Qu’est-ce que la fable dit de sa naissance ? A quel signe son père voulait-il le reconnaître ? 2. Que trouva-t-il à Athènes quand il s’y présenta pour la première fois ? Quels furent les sentiments de Médée à son égard ? Comment les projets de cette femme cruelle furent-ils déjoués ? 3. Quels sont les principaux brigands exterminés par Thésée ? Quels étaient les crimes de chacun de ces brigands ? 4. Quel fut le plus brillant des exploits de Thésée ? Qui avait donné le jour au Minotaure ? Où était- il renfermé ? Qui avait construit le labyrinthe ? Quel fut le sort de Dédale et de son fils Icare ? 5. Pourquoi Minos avait-il rendu les Athéniens ses tributaires ? Combien de fois payèrent-ils cet infâme tribut ? Comment les en délivra Thésée ? Pourquoi Egée se jeta-t-il à la mer ? 6. Quels vœux avait faits Thésée avant son départ ? Quelle fut sa conduite comme roi d’Athènes ? 7. Avec qui s’unit-il pour reprendre ses courses et ses aventures ? Qu’est-ce que les Centaures ? Où furent-ils exterminés par Thésée et Hercule ? Quelle fut l’issue de l’expédition entreprise par Thésée et Pirithoüs contre les Amazones ? Ne furent-ils pas malheureux dans la tentative qu’ils firent pour descendre aux enfers ? 8. Que fit Thésée après sa délivrance ? Quels furent les aventures d’Hippolyte ? Comment mourut-il ? 9. Quel fut le sort de Phèdre ? Comment Thésée termina-t-il ses jours ? Quel respect eurent pour lui les Athéniens ?

Chapitre V.
Castor et Pollux. §

1. Castor et Pollux étaient fils de Tyndare, roi de Sparte, et de Léda, son épouse. Rien n’est plus absurde que ce que la fable raconte à leur égard. Elle dit qu’ils eurent pour père Jupiter, et qu’ils sortirent de deux œufs. Castor était mortel comme Tyndare, mais Pollux était immortel comme Jupiter.

2. Cette différence de nature n’empêcha point leur étroite union. Jamais on ne vit deux frères s’aimer d’un amour plus tendre. Ils partageaient ensemble leurs plaisirs et leurs peines, leurs revers et leurs succès, et ne pouvaient se séparer. Ils eurent l’un et l’autre la gloire de purger l’Archipel de tous les pirates qui l’infestaient et de délivrer les côtes du Péloponèse des monstres qui les désolaient. Ces exploits les firent regarder de leur vivant comme les protecteurs de leur patrie, et après leur mort on les mit au rang des dieux marins. Ils étaient invoqués par les matelots, et on leur sacrifiait des agneaux blancs parce qu’ils étaient considérés comme des divinités amies.

3. Ils étaient du nombre des héros qui suivirent Jason à la conquête de la Toison d’or, et ils eurent une très-grande part à cette entreprise. De retour dans leur patrie, ils attaquèrent Thésée qui avait fait prisonnière leur sœur Hélène. Dans une émeute qui s’éleva à l’occasion de leur mariage, Castor fut mis à mort. Pollux en eut un grand chagrin. Il supplia Jupiter de rendre à son frère la vie et de lui accorder l’immortalité. Mais le souverain des dieux ne pouvait exaucer une telle demande. Le Destin avait décidé qu’il n’en serait pas ainsi, et nulle puissance ne pouvait d’ailleurs faire d’un homme un immortel. Seulement dans le conseil des dieux on convint que l’immortalité dont jouissait Pollux serait partagée par Castor. Pour opérer cette merveille sans occasionner des changements trop fréquents, on statua que les deux frères seraient placés dans le ciel et formeraient la constellation des Gémeaux. Une de ces deux constellations se cachant sous l’horizon quand’ l’autre paraît, c’est sans doute ce phénomène qui a donné lieu à cette invention bizarre.

4. Les Romains vénéraient beaucoup ces deux héros. Ils les honorèrent comme les dieux tutélaires de la navigation, et leur élevèrent sous ce litre un temple à Rome. On jurait même par ce temple7.

Questionnaire. §

1. De qui Castor et Pollux étaient-ils fils ? Comment la fable raconte-t-elle leur naissance ? 2. Quelle était la différence de leur nature ? Etaient-ils parfaitement unis ? Par quels exploits méritèrent-ils la vénération des Grecs ? Pourquoi étaient-ils honorés par les matelots ? Quelle victime leur offrait-on ? 3. Quelle part prirent-ils à l’expédition des Argonautes ? Comment mourut Castor ? Quelle demande adressa Pollux à Jupiter ? Comment partagea-t-il son immortalité avec son frère ? 4. Quel était le respect des Romains pour ces deux héros ? Les Romains ne juraient-ils pas par leur nom ?

Chapitre VI.
Persée et Bellérophon. §

1. Ces deux héros ne parurent pas dans l’expédition des Argonautes. Nous les avons placés ici parce que leurs exploits sont semblables à ceux d’Hercule, de Thésée et de tous les autres demi-dieux. Comme eux, ils purgèrent la terre des monstres et des brigands qui la remplissaient de crimes et de sang.

2. Persée était fils de Jupiter et de Danaé, fille d’Acrisius, roi d’Argos. Un oracle ayant annoncé à ce tyran qu’il périrait de la main d’un de ses petits-fils, ce barbare mit Danaé et son enfant dans un coffre de bois et les livra à la merci des flots. Une tempête les rejeta sur les côtes de la petite île de Séryphe, une des Cyclades, où ils furent admirablement accueillis par Polydecte, roi de cette île. Ce prince prit soin tout spécialement de l’éducation de Persée, et lui prodigua ses caresses et ses faveurs jusqu’à ce qu’il fût devenu grand. Mais alors il vit avec jalousie briller ses talents, et commença à redouter celui qu’il avait tant aimé. Il l’éloigna de sa cour et l’envoya tenter l’entreprise la plus périlleuse, en lui ordonnant de tuer Méduse et de lui apporter sa tête.

3. Méduse, comme nous l’avons déjà dit, était une des trois Gorgones. Ces trois sœurs descendaient de Neptune par Phorcys et Céto, deux divinités maritimes. Leurs mains étaient d’airain, leur chevelure de serpents, et leur regard tuait ou pétrifiait ceux qu’elles fixaient. Heureusement Persée fut aidé dans cette expédition par les habitants de l’Olympe. Minerve lui prêta son bouclier, Mercure ses ailes, Pluton son casque, et Vulcain forgea son cimeterre. A l’aide de ces armes divines, il vainquit ces monstres et coupa la tête de Méduse. Du sang qui sortit de cette tête naquit Pégase, le coursier ailé des poëtes, qui de son premier coup de pied fit jaillir la fontaine de l’Hippocrène. Persée porta dans toutes ses expéditions la tête de Méduse pour pétrifier ses ennemis, et il était ordinairement monté sur Pégase.

4. Cet agile coursier le porta en un instant dans la Mauritanie. Là régnait Allas que les poëtes nous représentent portant le monde sur ses épaules, parce qu’il fut l’inventeur de la sphère. On lui avait dit de prendre garde au fils de Jupiter. Pour ce motif il refusa l’hospitalité à Persée. Le héros lui montra sur-le-champ la tête de Méduse, le pétrifia et le changea en cette montagne qui dans ces lieux porte son nom. Persée passa de la Mauritanie en Ethiopie.

5. Dans cette contrée il délivra Andromède, fille de Céphée et de Cassiopée. Cette princesse avait eu la témérité de disputer le prix de la beauté à Junon et aux Néréides. Pour la punir de sa présomption, elle avait été livrée aux fureurs d’un monstre marin suscité par Neptune. Persée, monté sur Pégase, pétrifia le monstre, brisa les chaînes d’Andromède et la rendit à son père qui la lui offrit pour épouse. Phinée, le frère de Céphée, qui avait été fiancé à cette princesse, attaqua Persée, mais le héros pétrifia tous ses ennemis et resta possesseur de sa conquête. Il consacra la tête de Méduse à Minerve qui I accepta et la fit graver à son tour sur sa redoutable égide.

6. Persée revint ensuite en Grèce avec son épouse et rétablit sur son trône Acrisius, son aïeul, malgré toutes les injures qu’il en avait reçues. Il lui était très-attaché et ne taisait que des vœux pour sa prospérité. Mais l’oracle qui avait annoncé qu’il serait son meurtrier devait s’accomplir. Un jour qu’il voulait montrer son adresse au jeu de palet, il l’atteignit à la tête et l’étendit sur la place. De douleur il quitta Argos et alla fonder Mycènes, où il fut tué par des traîtres. Après sa mort les citoyens de Mycènes et d’Argos élevèrent de grands monuments à sa mémoire. Jupiter le plaça avec Andromède, Cassiopée et Céphée parmi les constellations septentrionales, et il eut un temple à Athènes.

7. Bellérophon était fils de Glaucus, roi de Corinthe, et d’Epimède, fille de Sisyphe. On lui donna le surnom d’Hipponoüs parce qu’il apprit le premier aux hommes à conduire les chevaux en les tenant par la bride. Ayant eu ensuite le malheur de tuer son frère appelé Beller, bien que cet accident fût involontaire, on lui donna le surnom de Bellérophon qui signifie meurtrier de Beller. Après ce meurtre, il se retira chez Prœtus, roi d’Argos. Il y fut très-bien accueilli ; mais la reine l’ayant calomnié, Prœtus l’envoya en Lycie, près d’Iobatès, son beau-père, avec des lettres où il révélait l’accusation portée contre Bellérophon, et le priait de lui donner la mort. Iobatès se mit d’abord à célébrer des fêles en l’honneur de l’hôte qui venait le visiter. Il y avait déjà neuf jours que duraient ces réjouissances quand il ouvrit les lettres de Prœtus. Son étonnement fut grand quand il y trouva un acte d’accusation contre Bellérophon. Il ne voulut pourtant pas tremper ses mains dans le sang de ce héros illustre. Il prit le parti de l’exposer à des périls auxquels il ne pourrait échapper et l’envoya combattre la Chimère.

8. C’était un monstre qui faisait depuis longtemps l’effroi du pays. Il avait la tête d’un lion, la queue d’un dragon et le corps d’une chèvre. Sa gueule béante vomissait des tourbillons de flammes et de fumée. Minerve aida Bellérophon à vaincre ce monstre terrible et lui amena le cheval Pégase. Le héros, ainsi protégé par les dieux, dompta encore une multitude d’animaux, et fit reconnaître son innocence par les succès que le ciel lui assurait. Iobatès n’hésita pas à lui donner en mariage sa fille Philonoé et à le déclarer son successeur. Après sa mort, Bellérophon fut placé par les poëtes au rang des astres, et par allusion à l’aventure qui lui était arrivée chez Iobatès, on appelait Lettres de Bellérophon toutes celles qui renfermaient des ordres contraires aux intérêts de celui qui les portait.

Questionnaire. §

1. Persée et Bellérophon prirent-ils part à l’expédition des Argonautes ? Quel est le caractère de leurs exploits ? 2. De qui Persée était-il fils ? Quelles destinées lui prédit l’oracle ? Où passa-t-il son enfance ? Qui prit soin de son éducation ? Pourquoi Polydecte l’éloigna-t-il de sa cour ? Quelle guerre lui ordonna-t-il ? 3. Qu’est-ce que les Gorgones ? Par qui Persée fut-il aidé dans l’expédition qu’il entreprit contre elles ? Que fit-il de la tête de Méduse ? 4. Comment triompha-t-il d’Atlas, roi de Mauritanie ? Quelle métamorphose fit-il subir à ce prince ? 5. Quels furent ses exploits en Ethiopie ? Quel était le crime d’Andromède ? Quel combat eut à livrer Persée pour obtenir sa main ? A qui consacra-t-il la tête de Méduse ? 6. Quels service rendit-il à son beau-père Acrisius ? Comment lui donna-t-il involontairement la mort ? Quelle fut la fin de Persée ? Quels honneurs lui rendirent les habitants de Mycènes et d’Argos ? Jupiter n’en fit-il pas une constellation ? 7. De qui Bellérophon était-il fils ? Quels surnoms lui a-t-on donnés ? D’où lui vient le nom de Bellérophon ? Quelles furent ses aventures à Argos et en Lycie ? Comment prouva-t-il son innocence ? 8. Qu’est-ce que la Chimère ? Qui aida Bellérophon à la dompter ? Quels honneurs ont rendus les poëtes à ce héros ? Ses aventures n’ont-elles pas donné lieu chez les Grecs à une locution particulière ?

Chapitre VII.
Orphée, Arion et Amphion. §

1. Orphée était fils d’Apollon et de Clio. C’est le poëte et le musicien le plus fameux des temps héroïques. On disait qu’au son de la cithare les fleuves suspendaient leurs cours, les montagnes s’ébranlaient et les bêtes sauvages quittaient les forêts, voulant par là faire comprendre qu’il changea les mœurs de ses contemporains, en les faisant passer de la rudesse de la vie sauvage aux douceurs de la vie civilisée.

        Divin Orphée, à qui les dieux
Ont prodigué des sons la science charmante,
        Par les accents mélodieux
             De ta lyre savante,
        Suspends la rage menaçante
        De tant de monstres furieux.
Rousseau.

2. Il épousa la nymphe Eurydice, et la perdit le jour même de son mariage. Dans sa douleur il descendit aux enfers pour la redemander à l’austère Pluton. Toutes les divinités infernales furent touchées de ses accents, et sa chère épouse lui fut rendue à condition qu’elle le suivrait et qu’il ne tournerait pas la tête pour la voir, avant d’être sorti du sombre séjour. Déjà l’impatient Orphée aperçoit la lumière. Il croit avoir franchi les limites du redoutable empire, il regarde en arrière, et perd une seconde fois celle qui devait faire le charme de sa vie. Il se retira au désespoir sur le mont Rhodope où les Bacchantes se vengèrent de ses dédains en mettant son corps en lambeaux et en jetant sa tête dans l’Hèbre. Virgile a raconté cette histoire, et Delille a traduit en beaux vers français cet épisode du prince des poëtes latins.

    Un jour tu poursuivais sa fidèle Eurydice :
Eurydice fuyait, hélas ! et ne vit pas
Un serpent que les fleurs recelaient sous ses pas.
La mort ferma ses yeux, les nymphes ses compagnes
De leurs cris douloureux remplirent les montagnes,
Le Thrace belliqueux lui-même en soupira,
Le Rhodope en gémit et l’Hèbre en murmura.
Son époux s’enfonça dans un désert sauvage.
Là, seul, touchant sa lyre, et charmant son veuvage,
Tendre épouse ! c’est toi qu’appelait, son amour,
Toi qu’il pleurait la nuit, toi qu’il pleurait le jour.
    C’est peu ; malgré l’horreur de ces profondes voûtes,
Il franchit de l’enfer les formidables routes,
Et, perçant ces forêts où règne un morne effroi.
Il aborda des morts l’impitoyable roi.
A ses chants accouraient du fond des noirs royaumes
Des spectres pâlissants, de livides fantômes
Semblables aux essaims de ces oiseaux nombreux
Que chasse au fond des bois l’orage ténébreux ;
Des vierges, des époux, des héros et des mères,
Des enfants moissonnés dans les bras de leurs pères,
Victimes que le Styx, bordé de noirs roseaux,
Environne neuf fois de ses lugubres eaux.
L’enfer même s’émut dans ses cavernes sombres
Et Cerbère oublia d’épouvanter les ombres ;
Sur sa roue immobile Ixion respira,
Et sensible une fois, Alecton soupira.
Enfin il revenait des gouffres du Ténare
Possesseur d’Eurydice et vainqueur du Tartare ;
Sans voir sa tendre amante, il précédait ses pas ;
Proserpine à ce prix l’arrachait au trépas.
Presque aux portes du jour, troublé, hors de lui-même,
Il s’arrête, il se tourne… il revoit ce qu’il aime.

    C’en est fait, un coup d’œil a détruit son bonheur.
Le barbare Pluton révoque sa faveur,
Et des enfers charmés de ressaisir leur proie
Trois fois le gouffre avare en retentit de joie.
Orphée ! ah ! cher époux, quel transport malheureux,
Dit-elle, ton amour nous a perdus tous deux.
Adieu, l’enfer se rouvre et mes yeux s’obscurcissent ;
Mes bras tendus vers toi déjà s’appesantissent,
Et la mort, déployant son ombre autour de moi,
M’entraîne loin du jour, hélas ! et loin de toi.
Elle dit, et soudain dans les airs s’évapore.
Orphée en vain l’appelle, en vain la suit encore,
Il n’embrasse qu’une ombre, et l’horrible nocher
De ces bords désormais lui défend d’approcher.
Alors deux fois privé d’une épouse si chère,
Où porter sa douleur, où traîner sa misère ?
Par quels sons, par quels pleurs fléchir le dieu des morts
Déjà cette ombre froide arrive aux sombres bords.
Près du Strymon glacé, dans les antres de Thrace
Durant sept mois entiers il pleura sa disgrâce.
Sa voix adoucissait les tigres des déserts,
Et les chênes émus s’inclinaient dans les airs.
Telle sur un rameau durant la nuit obscure
Philomèle plaintive attendrit la nature,
Accuse en gémissant l’oiseleur inhumain
Qui, glissant dans son nid une furtive main,
Ravit ces tendres fruits que l’amour fit éclore
Et qu’un léger duvet ne couvrait pas encore.
………………………………………………
………………………………………………
La nuit, à la faveur des mystères sacrés,
Dispersa dans les champs ses membres déchirés.
L’Hèbre roula sa tête encor toute sanglante ;
Là sa langue glacée et sa voix expirante,
Jusqu’au dernier soupir formant un faible son,
D’Eurydice en flottant murmurait le doux nom ;
Eurydice, ô douleur ! touchés de son supplice,
Les échos répétaient : Eurydice ! Eurydice !

3. On bâtit un temple à Orphée à l’endroit où l’on trouva sa tête. Apollon le changea en cygne, et sa lyre fut placée parmi les astres. On le représente le front couronné de lauriers, un luth ou une lyre à la main, et autour de lui on voit des animaux féroces charmés par la mélodie de ses accents.

4. Arion fut le rival d’Orphée. Il vivait à la cour de Périandre, roi de Corinthe. Ce prince récompensa généreusement ses talents. Un jour qu’il allait de Tarente à Corinthe, des brigands l’assaillirent et lui demandèrent ses trésors. Arion prit sa lyre, et essaya de calmer leur fureur par la douceur de ses sons. Ne pouvant y réussir, il se jeta à la mer, sa lyre à la main. Un dauphin, que ses sons harmonieux avaient attiré sur le rivage, le reçut sur son dos et alla le déposer à la pointe du cap Ténare. Par reconnaissance les poëtes ont placé ce dauphin parmi les astres.

5. Amphion était fils de Jupiter et d’Antiope, femme de Lycus, roi de Thèbes. Il était si habile dans la musique qu’on dit qu’il bat il les murs de Thèbes au son de sa lyre. Les pierres, sensibles à ses accords, venaient se placer d’elles-mêmes à l’endroit qu’il désirait. C’est toujours le symbole de la puissance magique exercée par la musique et la poésie sur les premiers hommes.

Questionnaire. §

1. De qui Orphée était-il fils ? Quelles merveilles la tradition attribue-t-elle à son talent ? 2. Quelle fut son épouse ? Que fit-il pour la recouvrer ? A quelle condition Pluton la lui rendit-il ? Quel fut le triste sort d’Orphée après cette nouvelle perte ? Racontez-en vers toutes ses aventures. 3. Quel souvenir gardèrent de lui les Grecs ? Quel honneur lui fit Apollon ? Comment est-il représenté ? 4. Quel fut le rival d’Orphée ? Où vivait-il ? Comment échappa-t-il aux brigands qui en voulaient à sa fortune et à sa vie ? 5. Qu’est-ce que la fable raconte d’Amphion ? Que signifie cette fiction ?

Chapitre VII.
Guerre de Thèbes. §

I. Amphion construisit les murs de Thèbes, mais le premier fondateur de cette ville fut Cadmus. La fable le dit fils d’Agénor, roi de Phénicie, et de la nymphe Mélie. Elle suppose qu’il fut envoyé par son père à la recherche d’Europe sa sœur, et que, ne pouvant la retrouver, il consulta l’oracle de Delphes pour savoir où il devait s’établir. Apollon lui ordonna de s’arrêter là où un bœuf le conduirait et d’y bâtir une ville. Il rencontra dans la Phocide une génisse qu’il prit pour guide et qui le conduisit en Béotie. Là il bâtit la Cadmée, qui devait plus tard servir de citadelle à la ville de Thèbes, que ses descendants construisirent.

2. Les compagnons de Cadmus étant allés puiser de l’eau dans une fontaine voisine, la fable ajoute qu’ils furent dévorés par un dragon fils de Mars et de Vénus. Minerve engagea Cadmus à tuer ce monstre et à en semer les dents dans un champ voisin. Il le fit, et ces dents donnèrent aussitôt naissance à des guerriers qui attaquèrent d’abord Cadmus, et qui s’entr’égorgèrent ensuite, à l’exception de cinq qui survécurent à ce massacre et l’aidèrent à bâtir la Cadmée. La colonie dont Cadmus était le chef répandit en Grèce la science des Phéniciens et des Egyptiens. C’est sans doute ce qui a porté les Grecs à attribuer l’invention de l’écriture à Cadmus, comme l’a si bien dit Brébeuf :

C’est de lui que nous vient cet art ingénieux
De peindre la parole et de parler aux yeux,
Et par les traits divers de figures tracées,
Donner de la couleur et du corps aux pensées.

L’histoire n’a pas pleinement confirmé ce fait. Car les monuments anciens et une foule de témoignages historiques prouvent que l’écriture alphabétique était connue en Grèce avant l’arrivée de Cadmus ; seulement après lui elle devint d’un usage bien plus général et bien plus fréquent8.

3. Cadmus avait épousé Hermione, fille de Vénus et de Mars. Un oracle lui ayant annoncé que sa postérité était menacée des plus grands malheurs, il se retira en Illyrie avec sa femme pour ne pas être témoin de ces calamités. Dans leur exil ils furent l’un et l’autre changés en serpent. Les prédictions de l’oracle ne s’en accomplirent pas moins. Polydore, le fils et le successeur de Cadmus, fut dévoré par les Bacchantes ; Labdacus, un de ses descendants, fut enlevé par une mort prématurée, et laissa son trône à Laïus, son fils, qui était encore au berceau. Laïus fut deux fois chassé de ses Etats, et pour comble de malheur l’oracle lui apprit qu’il périrait de la main de l’enfant que Jocaste sa femme était sur le point de mettre au monde. Il crut prévenir ce parricide en ordonnant la mort de ce fils immédiatement après sa naissance. Mais celui qu’il chargea de l’exécution de ce forfait fut touché des grâces de cet enfant, et se contenta de l’attacher par les pieds à un arbre et de l’exposer ainsi aux êtes féroces.

4. Phorbas, berger du roi de Corinthe, entendit par hasard les cris de cet enfant. Il accourut vers lui, le délivra et le recueillit dans sa maison. La reine de Corinthe voulut le voir. Elle fut si ravie de la beauté et de la noblesse de ses traits qu’elle l’adopta pour son fils. Elle lui donna le nom d’Œdipe (pieds enflés), parce qu’il conservait les traces des liens qui l’avaient enchaîné. Œdipe, devenu grand, consulta l’oracle sur ses destinées, et l’oracle lui répondit qu’il serait le meurtrier de son père et l’époux de sa mère, et que de lui sortirait une race détestable. Effrayé par cette prédiction, Œdipe, qui se croyait le fils de Polybe et de Péribée, s’éloigna de Corinthe pour se dérober à tous ces maux et prit le chemin de la Phocide.

5. Un jour il trouva dans un défilé étroit un vieillard qui lui en disputa le passage. Ce vieillard était Laïus. Œdipe, qui ne le connaissait pas, entra en lutte avec lui et le mit à mort. Le malheureux vainqueur était déjà parricide. Jocaste restée veuve promit aussitôt son trône et sa main à celui qui triompherait du Sphinx. C’était un monstre qui troublait les environs de Thèbes. Il avait la tête d’une femme, le corps d’un chien, les ailes et la queue d’un dragon, les ongles et les pieds d’un lion. Il proposait des énigmes à tous les passants, et dévorait ceux qui ne les pouvaient deviner. Il avait demandé aux Thébains : Qui marche le matin à quatre pieds, à deux sur le midi, et à trois le soir ? L’oracle avait dit que ce monstre périrait aussitôt qu’on aurait trouvé le mot de son énigme. Œdipe le trouva, et dit que cet animal était l’homme qui, dans son enfance, se traîne sur ses pieds et sur ses mains, au milieu de sa carrière marche sur deux pieds, et à la fin de sa vie s’appuie sur un bâton qui lui sert d’un troisième soutien. Le Sphinx vaincu se jeta à la mer.

6, Œdipe épousa Jocaste sa mère, et en eut deux fils, Etéocle et Polynice, et deux filles, Antigone et Ismène. Le pays des Thébains s’étant trouvé en proie à une peste cruelle, l’oracle consulté déclara que le fléau ne cesserait qu’après le bannissement du meurtrier de Laïus. Après bien des recherches, Œdipe se reconnu coupable de tous les crimes que l’oracle lui avait annoncés. Ces révélations le remplirent d’horreur pour lui-même, il se creva les yeux et s’exila de Thèbes, ayant pour guide sa chère Antigone, le modèle de la piété filiale. Après de longs voyages, il s’arrêta près d’un bourg de l’Attique à Colone, dans un bois consacré aux Euménides. De là il vint à Athènes, où Thésée le reçut avec une grande bonté. Un coup de tonnerre l’avertit de sa fin prochaine, et la terre s’entrouvrit doucement pour le recevoir.

7. Les fils d’Œdipe, Etéocle et Polynice, étaient convenus de partager ensemble le pouvoir et de régner alternativement chacun une année. Etéocle l’aîné refusa de céder le trône à son frère, et celui-ci lui déclara la guerre. Polynice alla demander des secours près d’Adraste, roi d’Argos. La Messénie, l’Arcadie, l’Argolide prirent sa défense, et envoyèrent contre Thèbes leurs troupes, sous la conduite des sept chefs que le talent du poëte Eschyle a rendus si célèbres : Polynice, Adraste, Tydée, Capanée, Amphiarüs, Hippomédon et Parthénopée. Ils gardèrent les sept portes de Thèbes avec leurs sept corps d’armée. Dans une sortie Etéocle et Polynice se rencontrèrent, et, après un rude combat, se percèrent mutuellement de leurs épées. On les brûla sur le même bûcher, et la fable raconte qu’en signe de leur haine la flamme se divisa pour ne pas confondre ensemble les cendres de ces deux frères ennemis. Racine décrit ainsi leur combat et leur mort :

Polynice, tout fier du succès de son crime,
Regarde avec plaisir expirer sa victime :
Dans le sang de son frère il semble se baigner,
Et tu meurs, lui dit-il, et moi je vais régner.
Regarde dans mes mains l’empire et la victoire,
Va rougir aux enfers de l’excès de ma gloire,
Et pour mourir encore avec plus de regret,
Traître, songe en mourant que tu meurs mon sujet.
En achevant ces mots, d’une démarche fière
Il s’approche du roi couché sur la poussière ;
Et pour le désarmer il avance le bras.
Le roi, qui semble mort, observe tous ses pas :
Prêt à rendre la vie, il en cache le reste ;
Et sa mort au vainqueur est un piège funeste.
Dans le moment fatal que ce frère inhumain
Lui veut ôter le fer qu’il tenait à la main,
Il lui perce le cœur ; et son âme ravie,
En achevant ce coup, abandonne la vie.
Polynice frappé pousse un cri dans les airs,
Et son âme en courroux s’enfuit dans les enfers.

8. Créon, le frère de Jocaste, s’empara du souverain pouvoir et défendit de rendre les derniers honneurs à Polynice, parce qu’il était mort en combattant contre son pays. Cette sévère défense causa la perte de tout le reste de la famille. Antigone voulut inhumer son frère et fut condamnée à mort. Le fils de Créon, qui était fiancé à cette princesse, n’eut pas la force de lui survivre. Le chagrin fit également périr Créon et son épouse. Les chefs argiens qui étaient venus mettre le siége devant Thèbes ne furent pas plus heureux. Tous succombèrent sous les murs de cette ville à l’exception d’Adraste. Mais leurs fils, les Epigones, vengèrent leur mort.

9. Dix ans après l’expédition d’Adraste, Alcméon, fils d’Amphiarüs, Egialée, fils d’Adraste, Diomède, fils de Tydée, Promaque, fils de Parthénopée, Sthénélus, fils de Capanée, Thersandre, fils de Polynice, Polydore, fils d’Hippomédon, prirent les armes. Le devin Tirésias avait prédit que cette fois la ville serait prise et ruinée. Elle le fut en effet. Les Thébains, vaincus dans un combat, abandonnèrent leur ville au pillage. Le fils de Polynice, Thersandre, remonta sur le trône de Laïus ; mais la malédiction portée par le destin contre le sang d’Œdipe ne cessa de s’appesantir sur cette famille. Tous ses descendants furent malheureux, et les Thébains se virent obligés de fonder une nouvelle dynastie.

Questionnaire. §

1. Quel fut le vrai fondateur de Thèbes ? A quelle occasion cette ville fut-elle fondée ? 2. Quel fut le sort des compagnons de Cadmus ? Quel conseil donna Minerve à ce prince ? Quelle invention lui attribuent les Grecs ? L’histoire est-elle ici d’accord avec la fable ? 3. Qui épousa Cadmus ? Quelle prédiction lui fit l’oracle ? Comment s’accomplit cette prédiction ? Quelle fut la naissance d’Œdipe ? 4. Qui lui sauva la vie ? Par qui fut-il sauvé ? Que lui annonça l’oracle ? 5. Comment fut-il le meurtrier de son père ? Que promit Jocaste à celui qui ferait périr le Sphinx ? Quelle était la forme de ce monstre ? Quelle énigme proposa-t-il aux Thébains ? Quel sens lui donna Œdipe ? Quels furent les enfants d’Œdipe et de Jocaste ? Comment se reconnut-il coupable d’inceste et de parricide ? Quelle fut sa destinée après ces tristes révélations ? 7. Que devinrent ses fils Etéocle et Polynice ? Quels furent les guerriers qui vinrent au secours de Polynice ? Comment les frères ennemis se donnèrent-ils mutuellement la mort ? 8. Quel fut le sort des sept chefs ? Que devint la famille d’Œdipe ? 9. Les Epigones ne furent-ils pas plus heureux que les sept chefs ? Quels étaient les noms des Epigones ? Quelle fut la fin des descendants d’Œdipe ?

Chapitre IX.
Guerre de Troie. §

1. Les exploits des sept chefs devant Thèbes enthousiasmèrent le courage des Grecs qui se levèrent comme un seul homme pour entreprendre le plus grand événement des temps héroïques, la guerre de Troie. On comptait alors dans la Thessalie, la Grèce centrale, le Péloponèse et les îles, cinquante et un Etats de quelque importance. Trente-quatre étaient Hellènes, et dix-sept ou Pélasges, ou Phéniciens, ou Phrygiens. Ces petits royaumes furent assez puissants pour mettre en mer une flotte de mille soixante-quatre vaisseaux, montés par une armée de près de cent mille hommes. Les îles de Crète et de Rhodes et leurs colonies de l’Asie-Mineure fournirent encore cent vingt-deux navires et dix mille soldats. Toutes ces troupes furent dirigées contre le pays où régnait Priam.

2. Depuis longtemps une rivalité jalouse avait jeté la discorde entre les Grecs et les Asiatiques. Tantale, le bisaïeul des rois d’Argos, avait retenu dans les fers Ganymède, un prince troyen, et violé les droits les plus sacrés. Hercule, issu du même sang, avait détruit la ville de Troie et fait mourir Laomédon, qui en était alors roi. Pâris, fils de Priam, le successeur de ces princes outragés, vint en Grèce, à la cour de Ménélas, et usa de représailles. Il enleva Hélène, l’épouse du prince qui lui donnait l’hospitalité, et refusa de donner aux Atrides une satisfaction proportionnée à l’outrage qu’il leur avait fait. Les Atrides appelèrent la Grèce entière aux armes, et les princes les plus illustres répondirent à leur appel. Ils se rendirent tous à Mycènes. Là on vit paraître le frère de Ménélas, Agamemnon, roi d’Argos, qui fut le chef de l’expédition ; le vieux Nestor, roi de Pylos, célèbre par son éloquence ; les deux Ajax, l’un fils d’Oïlée, roi de Locride, et l’autre fils de Télamon, roi de Calamine ; Diomède, roi d’Etolie ; Idoménée, roi de Crète ; Podalire et Machaon, fils d’Esculape, médecins illustres ; Ulysse, fils de Laërte, roi d’Ithaque, et Achille, le plus vaillant des Grecs.

3. Ces deux derniers auraient voulu ne pas prendre part à l’expédition. Ulysse contrefit l’insensé et se mit à labourer le sable sur le bord de la mer et à y semer du sel au lieu de blé. Mais Palamède soupçonna que cette folie n’était qu’une feinte, et pour l’éprouver il posa le jeune Télémaque à l’endroit où devait être tracé le sillon. Ulysse leva le soc de la charrue pour ne pas blesser son fils, et sa ruse fut découverte. — Achille était fils de Thétis. Sa mère l’avait plongé immédiatement après sa naissance dans les eaux du Styx, et avait ainsi rendu tout son corps invulnérable. Mais comme en le plongeant elle l’avait retenu par le talon, cette partie n’avait pas été baignée dans les eaux sacrées du fleuve et était restée accessible aux blessures des combats. D’après un oracle, cet illustre guerrier devait périr sous les murs de Troie. Pour éviter ce malheur, Thétis sa mère t’envoya à la cour de Lycomède, roi de Scyros. Le monarque le déguisa et le fit élever avec ses filles. Comme le devin Calchas avait annoncé aux Grecs qu’ils ne pourraient jamais sans Achille renverser Troie, Ulysse s’offrit pour aller à la recherche de ce héros. Il se présenta donc chez Lycomède à titre de marchand, et fit aux filles de ce prince de magnifiques présents. Aux joyaux et aux pierreries il avait mêlé des armes. Achille prit les armes et se trahit. Ulysse l’emmena sur-le-champ avec lui, et ils se rendirent ensemble au camp des Grecs.

4. Avant le départ, Agamemnon paya bien cher l’honneur de commander à toute la Grèce. La flotte était à peine réunie en Aulide que le devin Calchas déclara que les vents ne se montreraient point favorables tant qu’Agamemnon n’aurait pas apaisé le courroux de Diane qu’il avait excité en tuant une biche consacrée à cette déesse, et il ajouta qu’il fallait le sang d’Iphigénie, la fille de ce prince, pour calmer le ciel :

Vous armez contre Troie une puissance vaine,
Si dans un sacrifice auguste et solennel,
         Une fille du sang d’Hélène
De Diane en ces lieux n’ensanglante l’autel.
Pour obtenir les vents que le ciel vous dénie,
        Sacrifiez Iphigénie.
Racine.

Agamemnon consentit à cet abominable sacrifice, mais la fable ajoute que Diane se contenta de sa soumission, qu’elle mit une biche sur l’autel à la place d’Iphigénie, et qu’elle fit de cette princesse une de ses prêtresses.

5. Les Grecs ayant ainsi satisfait aux arrêts du destin, leur flotte mit à la voile par un vent favorable, et ils arrivèrent sans perte sous les murs de Troie. Le siége de cette ville dura dix ans. Agamemnon se conduisit avec orgueil et lâcheté. Ménélas son frère fut plus brave. Il avait provoqué à un combat singulier le ravisseur de son épouse, le lâche Pâris, et il avait été convenu en présence des deux armées qu’Hélène serait le prix du vainqueur. Ménélas remporta la victoire, et c’en était fait de Pâris si Vénus ne l’eût soustrait aux coups de son adversaire en l’enveloppant d’un nuage. Le Troyen parjure, tout vaincu qu’il était, refusa de renvoyer Hélène, et cette nouvelle perfidie enflamma encore la colère des Grecs.

6. Pendant neuf ans on se livra une foule de combats dont les succès et les revers furent toujours balancés. Dans la dixième année du siége, Agamemnon eut la bassesse de vouloir se venger d’Achille qui l’avait obligé à rendre à Chrysès, prêtre d’Apollon, sa fille Chryséïs. Par représailles le chef des Grecs usa de son souverain pouvoir pour forcer à son tour le fils de Thétis à rendre Briséïs, une de ses captives. Cette injustice et cet affront irritèrent Achille. Il se retira dans sa tente, laissant tout le poids de la guerre à Ménélas et aux autres Grecs. Les Troyens profitèrent de cette retraite pour attaquer les assiégeants avec plus de vigueur. Déjà ils les avaient vaincus dans plusieurs rencontres, déjà ils les tenaient renfermés dans leurs camps, se montrant sur le point de forcer leurs retranchements, et Achille restait inexorable. Le spectacle des malheurs des Grecs et des victoires des Troyens, les prières de ses amis, rien ne put le fléchir. A la fin il se décida pourtant à remettre ses armes à Patrocle, son cher compagnon, et lui permit de marcher à l’ennemi avec ses troupes. Patrocle fut vaincu et tué de la main d’Hector. Ce malheur remplit de chagrin le bouillant Achille, qui jura de venger la mort de son ami.

7. Tétis, sa mère, lui fit don d’une armure nouvelle qui sortait des ateliers de Vulcain. Achille la revêtit et marcha au combat. Rien ne pouvait lui résister. Les Troyens effrayés prirent la fuite au seul son de sa voix terrible. Dans leur épouvante, ils se jetèrent dans le Xanthe. Achille les y poursuivit et en tua un si grand nombre que le fleuve fut retardé dans son cours par leurs cadavres amoncelés. Le Xanthe irrité se soulève alors contre le héros victorieux. Il appelle à son secours le Simoïs et toutes les rivières qui lui payent tribut, et une lutte surhumaine s’engage entre ce fleuve et le fils de Thétis. Mais arrive Vulcain qui de la part de Junon oblige tous ces fleuves à rentrer dans leur lit et à laisser Achille poursuivre ses succès contre les Troyens. Le fougueux guerrier s’avança jusque sous les murs de Troie. Là il rencontra Hector, le meurtrier de son cher Patrocle. Le héros troyen n’osa se mesurer avec le plus vaillant des Grecs : et trois fois il fit le tour des murs de Troie pour éviter sa rencontre. Enfin il se vit forcé de combattre. Il le fit avec courage, mais après de grands efforts il lui fallut succomber. Achille lui perça les talons, l’attacha avec une courroie à son char, et le traîna trois fois autour des remparts d’Ilion.

8. Après cette atroce vengeance, le fils de Thétis vint rendre les honneurs funèbres aux mânes de Patrocle. Il lui éleva un grand bûcher, immola de sa main douze captifs, et célébra des jeux magnifiques. La nuit suivante, sa tente fut témoin de l’une des scènes les plus déchirantes. On y vit entrer le roi Priam, qui venait redemander en pleurant les restes inanimés de son fils Hector. Cet auguste vieillard se jeta aux genoux d’Achille, lui parla au nom de son père, et lui baissa la main en prononçant ces belles paroles : Juge de mon malheur en me voyant baiser la main qui a tué mon fils. Achille avait juré de laisser le corps d’Hector sans sépulture et de l’abandonner en pâture aux chiens et aux oiseaux. Mais son cœur ne put être insensible aux larmes de Priam, et il remit à ce père infortuné les restes sanglants de son cher fils. Quelque temps après, Achille demanda en mariage à Priam sa fille Polyxène. Elle lui fut accordée ; mais, au moment où il allait l’épouser, le lâche Pâris, qui avait appris d’Apollon l’endroit où ce guerrier était vulnérable, le blessa au talon d’une flèche empoisonnée qui lui donna la mort. Thétis vint avec une troupe de nymphes pleurer sur le corps de son fils ; les neuf Muses firent entendre leurs chants lugubres ; l’oracle de Dodone fit l’apothéose du guerrier, et les Grecs, après la ruine de Troie, immolèrent sur son tombeau Polyxène.

9. Troie ne fut prise qu’à l’aide d’un stratagème. Les Grecs, lassés de combattre, firent construire un grand cheval de bois dans les flancs duquel ils cachèrent l’élite de leurs guerriers. Ils répandirent ensuite le bruit de leur départ, et feignirent d’abandonner cette colossale machine, comme un présent offert à Minerve pour obtenir du ciel un retour favorable. Les Troyens, trompés, firent tous leurs efforts pour introduire ce cheval dans leurs murs. Laocoon, fils de Priam et d’Hécube et prêtre d’Apollon et de Neptune, se douta de la perfidie des Grecs. Mais ses discours ne purent tirer ses concitoyens de leur aveuglement. Ils crurent même qu’en lançant sa javeline dans les flancs du cheval il avait commis une impiété et que celait pour l’en punir que deux serpents affreux, sortis de la mer, s’étaient jetés sur ses deux fils et l’avaient ensuite étouffé lui-même dans leurs replis tortueux. A force de bras ils traînèrent donc la fatale machine au sein de leur cité, et commencèrent à se réjouir du départ des Grecs. Le traître Sinon, qui s’était fait passer pour un transfuge, ouvrit pendant ce temps les flancs du cheval, et une foule de guerriers valeureux en sortirent tout armés. Les Troyens surpris virent leur patrie en feu avant d’avoir pu courir aux armes.

10. Priam fut tué par Pyrrhus, fils d’Achille, sur l’autel de Jupiter qu’il tenait embrassé. Hécube, son épouse, devint le partage d’Ulysse, qui la reçut au nombre de ses captives. Elle fut conduite chez Polymnestor, roi de Thrace, le meurtrier de son jeune fils Polydore. Elle se vengea en lui faisant crever les yeux par des femmes troyennes pendant qu’elle exterminait elle-même les enfants de ce monarque. Les poëtes ont dit que les dieux l’avaient métamorphosée en chienne ; c’était sans doute pour peindre les imprécations que dans sa rage elle vomissait contre les Grecs. Pâris périt blessé par une des flèches d’Hercule que lui lança Philoctète. En vain eut-il recours à la science de la nymphe Œnone qu’Apollon avait instruite de la vertu des plantes, il ne put guérir. Le pieux Enée, fils d’Anchise et de Vénus, chargea sur son dos les dieux pénates de sa patrie, prit son fils Ascagne par la main, et se retira avec lui sur le mont Ida. Il y construisit une flotte de vingt vaisseaux, côtoya la Grèce, la Thrace et l’Epire, et fut jeté par une tempête en Afrique, où Virgile suppose qu’il vécut quelque temps à la cour de Didon, qui venait de fonder Carthage. En quittant ce séjour enchanté, une nouvelle tempête le jeta en Sicile, où il célébra des jeux funèbres en l’honneur d’Anchise. Là il consulta la sibylle, et pénétra avec elle dans les enfers où il apprit ses destinées et celles de sa postérité. Il fonda ensuite en Italie Lavinium, qui fut le berceau d’Albe et de Rome. Cet illustre fondateur disparut, dit-on, enlevé par Vénus dans un combat contre les Rutules. Virgile a chanté les aventures d’Enée dans son poème admirable de l’Enéide, et a rattaché ainsi Rome aux destinées fameuses de la ville de Troie.

11. Les Grecs ne furent guère plus heureux que les Troyens. Agamemnon et sa postérité furent en proie aux calamités les plus terribles. A son retour ce prince fut égorgé par Clytemnestre, son épouse, qui avait conçu une passion criminelle pour Egisthe, et qui désirait le faire couronner roi d’Argos. Egisthe, pour s’assurer la possession paisible de son trône usurpé, médita la mort d’Oreste, fils d’Agamemnon. Electre, la sœur d’Oreste, déjoua ce complot en envoyant secrètement son frère dans la Phocide, chez le roi Strophéus, leur oncle. Oreste revint après douze ans d’exil, et tua de sa propre main sa mère Clytemnestre et Egisthe, son beau-père. L’horreur de ce parricide le tourmenta sans cesse. Il consulta l’oracle à ce sujet, et l’oracle lui répondit qu’il n’échapperait à ce tourment qu’en allant dans la Tauride enlever la statue de Diane. Pylade, son cousin et son ami, qui avait toujours partagé ses revers et sa fortune, le suivit dans cette grande expédition. Ils furent faits prisonniers l’un et l’autre en Tauride, où l’on immolait sur les autels de la déesse tous les étrangers qu’on saisissait. On avait décidé cette fois qu’un des deux seulement périrait. Alors il y eut un combat d’amitié pour savoir lequel donnerait sa vie pour son ami. Le sort tomba sur Oreste. Il allait être immolé, lorsque Iphigénie, sa sœur, qui servait à l’autel, lr reconnut. Ils s’enfuirent ensemble, emportant la statue de la déesse. Oreste épousa Hermione, la fille de Ménélas, et Pylade, Electre, la sœur d’Oreste.

12. Pyrrhus, dans le partage des esclaves, avait eu Andromaque, la veuve d’Hector. Il la préféra à Hermione, son épouse. Oreste vengea cette princesse outragée et le mit à mort. — Diomède, a son retour de Troie, trouva ses Etats dans un tel désordre qu’il fut obligé de se réfugier avec ses compagnons chez Daunus, roi d’Illyrie, où la fable dit qu’ils furent tous changés en hérons. — Idoménée essuya une violente tempête à son retour, et promit à Neptune, s’il rentrait dans l’île de Crète, de lui offrir la première créature vivante qui s’offrirait à lui. Ce fut son fils. La superstition triompha de la nature, et ce père barbare fut fidèle à son serment. Mais les Crétois, indignés d’un tel forfait, le renversèrent de son trône et le chassèrent de leur île. Idoménée fugitif alla se fixer sur les côtes de la grande Hespérie, où il fonda Salente. — Les deux Ajax eurent aussi l’un et l’autre des destinées fort tragiques. Le fils de Télamon, ayant disputé à Ulysse les armes d’Achille et ayant été vaincu par l’éloquence de son astucieux rival, devint furieux jusqu’à perdre la raison. Il se jeta sur des pourceaux qu’il prit pour Ménélas et ses juges, et se perça de son épée lorsqu’il reconnut sa méprise. — Le fils d’Oïlée se vit à son retour assailli par une violente tempête que Minerve souleva contre lui. Il parvint à se sauver sur un rocher, et dans son orgueil il s’écria : J’en échapperai malgré les dieux. Neptune, irrité par ce blasphème, fendit le rocher d’un coup de trident et engloutit le présomptueux guerrier.

13. Mais le plus célèbre de tous les Grecs par ses aventures fut Ulysse, dont Homère nous a raconté lui-même dans l’Odyssée tous les périls. Aussitôt qu’il se fut mis en mer pour regagner sa chère Ithaque, il fut battu par une tempête qui brisa plusieurs de ses vaisseaux. Les vents le poussèrent dans l’île africaine des Lothophages. Cette île était peuplée d’arbres dont les fruits délicieux faisaient oublier à ceux qui en mangeaient jusqu’au nom de leur pays. Les compagnons d’Ulysse eurent la témérité d’y toucher, et succombèrent sous leurs charmes. Ulysse eut mille peines à les détacher de ces lieux et à les faire remonter sur leurs vaisseaux. Dans cette seconde navigation ils éprouvèrent encore une tempête qui les jeta sur les côtes de Sicile où habitaient les Cyclopes. Le plus célèbre d’entre eux était le géant Polyphème. Il était fils de Neptune, avait une taille élevée, un aspect hideux, et son œil placé au milieu de son front lançait la flamme, comme une fournaise. Le matin il quittait son antre, et allait faire paître pendant le jour ses troupeaux nombreux. Le soir, quand il était rentré avec eux, il fermait sa caverne avec un bloc immense de rocher. A son retour il surprit Ulysse et ses compagnons dans sa demeure. A leur vue il fit éclater une joie féroce, saisit deux des compagnons d’Ulysse, les brisa contre le roc, et les dévora. Le lendemain il fit de même. Ulysse s’approcha alors du géant, et lui offrit une coupe d’un vin délicieux. Polyphème la but à longs traits, en demanda une nouvelle, et supplia Ulysse de lui dire son nom. Mon père et ma mère, lui dit Ulysse, m’appellent, Personne. Eh bien ! reprit le Cyclope, en récompense de tes services je te mangerai le dernier. A peine eut-il prononcé cette parole qu’il s’endormit. Ulysse profita de l’ivresse et du sommeil de ce monstre pour lui crever l’œil avec un pieu dont le bout avait été durci et rougi au feu. Polyphème poussa de grands cris. Les autres Cyclopes accoururent et lui demandèrent qui l’avait frappé. Personne ! s’écria-t-il, Personne ! Ils crurent qu’il avait perdu la raison et se retirèrent. Ulysse trouva moyen de sortir de la caverne en se cachant avec ses compagnons sous le ventre des béliers dont la toison était la plus épaisse.

14. Dans l’île d’Æa, la magicienne Circé enchanta les compagnons d’Ulysse et les changea en pourceaux. Le roi d’Ithaque, aidé des conseils de Mercure, obligea cette enchanteresse à rendre à ses compagnons leur forme première et reprit le cours de ses voyages. Ils furent encore remplis d’aventures. Enfin, après vingt ans d’absence, il revit sa chère patrie. On le croyait mort depuis longtemps. Une foule de princes se disputaient la main de Pénélope, sa fidèle épouse. Cette princesse avait d’abord renvoyé sa décision au jour où elle aurait achevé une tapisserie à laquelle elle travaillait depuis plusieurs années. Mais, pour gagner du temps, elle défaisait la nuit ce qu’elle faisait le jour. Enfin elle promit sa main et sa couronne à celui qui se servirait de l’arc d’Ulysse et ferait passer une flèche à travers douze anneaux disposés à la suite l’un de l’autre. Ulysse, déguisé en mendiant, se mêla à la foule des prétendants. Il sollicita l’honneur d’entrer en lice, et sa flèche alla tomber au delà du dernier anneau, après avoir traversé tous les autres. Alors il se fit reconnaître. Télémaque son fils l’aida à détruire tous ses ennemis, et il régna tranquillement sur ses Etats et sur le cœur de Pénélope, sa chère épouse.

15. Ici se termine l’histoire des temps héroïques de la Grèce. Pour compléter rémunération de tous les demi-dieux célébrés par les poëtes, qu’il nous suffise de nommer Cléobis et Biton, deux enfants illustres par leur piété touchante envers leur mère ; Niobé, qui pleura tellement ses enfants que la douleur la transforma en rocher ; Philomèle et Progné, changées Philomèle en rossignol et Progné en hirondelle, et Térée, leur persécuteur, en un oiseau appelé la huppe ; Pyrame et Thisbé, qui étaient si étroitement unis qu’ils ne purent se survivre.

Questionnaire. §

1. Quel fut le plus grand événement des temps héroïques ? Quels peuples prirent part à la guerre de Troie ? 2. Quelle fut l’origine de la discorde qui s’éleva entre les Grecs et les Asiatiques ? Quelle insulte fut faite par Pâris à Ménélas ? En quel lieu se réunirent les héros qui devaient prendre part à cette expédition ? Quels furent ces héros ? 3. Quelle ruse employa Ulysse pour ne pas sortir de son pays ? Comment Palamède découvrit-il sa ruse ? Qu’est-ce que l’oracle avait prédit d’Achille ? Quels moyens employa sa mère pour l’éloigner du camp des Grecs ? Comment fut-il reconnu par Ulysse ? 4. Qu’arriva-t-il avant le départ de la flotte ? Iphigénie fut-elle immolée ? 5. Combien dura le siége de Troie ? Quelle fut la conduite d’Agamemnon ? Par quel exploit se signala Ménélas ? 6. A quelle occasion Agamemnon fit-il injure à Achille ? Quelle fut la conduite d’Achille ? Quel fut le sort de Patrocle ? De quelle manière Achille vengea-t-il la mort de Patrocle ? 7. Racontez ses combats contre le Xanthe et contre Hector ? Comment traita-t-il son noble rival après sa défaite ? 8. Quels honneurs funèbres rendit-il à Patrocle ? Quelle fut son entrevue avec Priam ? Comment mourut Achille ? 9. Par quel stratagème les Grecs s’emparèrent-ils de la ville de Troie ? Quel était l’avis de Laocoon ? Pourquoi fut-il méprisé ? 10. Quel fut le sort de Priam ? — d’Hécube ? — de Paris ? Que fit Enée ? Quelles furent ses aventures ? Où est-il allé s’établir ? Comment est-il mort ? 11. Quels furent les malheurs d’Agamemnon ? Que devint sa famille ? Quel crime commit Oreste ? Comment parvint-il à calmer les remords qui troublèrent sa conscience ? 12. Quel fut le sort de Pyrrhus ? — de Diomède ? — d’Idoménée ? — des deux Ajax ? 13. Qui a fait le récit des aventures d’Ulysse ? Qu’arriva-t-il à ses compagnons dans l’île des Lotophages ? Racontez leurs aventures en Sicile parmi les Cyclopes. 14. Quels enchantements Circé opéra sur les compagnons d’Ulysse ? Comment ce roi rentra-t-il dans ses Etats ? Que faisait Pénélope pour tromper les ambitieux qui l’obsédaient ? Comment Ulysse se fit-il reconnaître ? 15. Quels sont les autres demi-dieux qui ont encore été célébrés par les poëtes ?

Chapitre X.
Des principales institutions religieuses et politiques des temps héroïques. §

1. Les principales institutions religieuses et politiques furent les ligues amphictyoniques, les jeux, les oracles et les mystères.

Ligues amphictyoniques. §

2. Les temps héroïques furent une époque de mouvement et d’agitation. Les migrations et les colonies étaient extrêmement fréquentes. Le premier besoin qui se fit alors sentir fut un besoin d’unité. La Grèce comprit que jamais elle ne pourrait jouer un rôle comme nation, si elle ne se faisait respecter au dehors, en unissant fortement les mille petits Etats qui la partageaient. Amphictyon, fils de Deucalion, fut le premier qui proposa aux diverses tribus de se liguer ensemble pour se défendre contre les attaques de ses voisins. On applaudit à son dessein ; le bourg d’Anthela fut choisi pour tenir les assemblées ; on promulgua des lois générales appelées amphictyoniques, pour régler le but et les conditions de cette ligue ; et on offrit des sacrifices communs à Cérès pour faire de la divinité et de la religion le centre et le lien de la confédération. Cette première ligue ne comprenait que douze peuplades, mais bientôt on en forma cinq autres sur le même modèle. Leurs siéges furent à Delphes, à Oncheste en Béotie, à l’île d’Eubée, à l’isthme de Corinthe et à Calaurie.

Ces ligues donnèrent naissance à de grandes confédérations, et contribuèrent à la prospérité de la Grèce, en prévenant une foule de guerres intestines et en rendant la nation formidable au dehors L’esprit d’association se développa pendant tous les temps héroïques, et tous les grands hommes qui parurent alors le favorisèrent de toute la puissance de leur génie. C’est dans ce but que les jeux publics furent établis.

Jeux publics. §

3. Comme dans les sociétés anciennes, on estimait extraordinairement la force, la beauté et tous les avantages du corps ; les exercices avaient spécialement pour but la lutte, le pugilat ou la course. On les appelait jeux ou fêtes. Les plus célèbres étaient les jeux pythiques, néméens, isthmiques et olympiques. Les jeux pythiques, établis en l’honneur de la victoire d’Apollon sur le serpent Python, tombèrent d’abord en désuétude. Ils furent établis par les amphictyons après la guerre sacrée contre les habitants de Cirrha et de Crissa. On les célébrait tous les cinq ans, et l’on couronnait de lauriers les vainqueurs. Les jeux néméens se tenaient près de la forêt de Némée ; ils acquirent de l’importance après la défaite des Perses. Le but de leur institution était de rappeler le souvenir des guerriers morts pour le salut de la patrie. Celui qui les présidait portait des habits de deuil, et récompensait les athlètes victorieux avec des couronnes d’ache mortuaire. D’après quelques auteurs, ils se célébraient tous les trois ans, mais le plus grand nombre croient qu’ils ne se tenaient que tous les cinq ans. Les jeux isthmiques, qui doivent leur nom à l’isthme de Corinthe où on les célébrait, eurent tant d’éclat, qu’ils survécurent à la ruine de Corinthe elle-même. Le concours du peuple était si grand, qu’on ne pouvait y placer que les principaux membres de la Grèce. On y disputait successivement le prix de la lutte, de la course, du saut, du disque et du javelot. C’est ce qu’on appelait le pentathle. D’après Plutarque, il y avait aussi des combats de musique et de poésie : on décernait aux vainqueurs des guirlandes de feuilles de pin.

Mais les plus célèbres de tous les jeux de la Grèce furent les jeux olympiques. Hercule Idéen les inventa, et voulut qu’ils bissent célébrés tous les cinq ans pendant cinq jours. On supposait que Jupiter et Saturne y avaient ensemble combattu à la lutte, que Mercure y avait remporté le prix de la course, Mars celui du pugilat, et qu’Apollon s’y était signalé par son adresse. On interrompit ces jeux jusqu’au temps de Pélops, qui les fit représenter en l’honneur de Jupiter, ils furent encore négligés après lui jusqu’à Iphitus, législateur de Sparte, qui les rétablit en 884, pour faire cesser une peste qui désolait toute la Grèce. On convint alors de les célébrer tous les quatre ans pendant cinq jours. Comme on gravait sur une table de marbre le nom des vainqueurs, un historien eut l’idée de fonder sur cette base la chronologie, et son système fut si universellement adopté que les Grecs ne comptèrent que par olympiades. Dans ces jeux on donnait des prix pour la course, le saut, la lutte, le jet du disque et du dard. Il y avait la course des chars, la course des chevaux, la course des gens armés. Le lieu où l’on courait était une arène de huit cents pieds de long qu’on appela stade et qui servit de mesure de distance aux Grecs. Le vainqueur ne recevait qu’une couronne d’olivier, mais à Sparte on lui confiait un grade distingué dans les armées, et à Athènes il avait le droit de se placer au prytanée à côté des magistrats. Les Eléens avaient la présidence des jeux, et le nombre des juges fut réduit à dix, à cause des dix tribus qui partageaient l’Elide. Pendant ces jeux toutes les inimités, toutes les guerres cessaient. C’était une sorte de trêve religieuse qui rappelle la trêve de Dieu au moyen âge. On ne peut dire tous les avantages que la religion et l’Etat en tiraient.

Une disposition générale à diriger ce qui n’était qu’un divertissement vers un but d’éducation intellectuelle, et à convertir les amusements publics en une récréation pour l’esprit, fit bientôt, dit Cantu, associer aux exercices du corps la musique, la poésie et la lecture. Alcibiade conduisait à Olympie six chars dans un même jour ; Pythagore y discutait au milieu des lutteurs ; les princes éloignés y envoyaient leurs chevaux pour y remporter le prix de la course ; peintres et sculpteurs y exposaient au jugement du public, les uns leurs tableaux, les autres leurs statues ; Hérodote y lisait son histoire ; Pindare et Corinne y disputaient le prix de la poésie ; Eschyle, Sophocle, Euripide y représentaient leurs tragédies ; les orateurs y prononçaient leurs harangues ; les grands hommes y jouissaient de leur gloire ; Thémistocle y reçut sa plus douce récompense ; Platon y eut un avant-goût de son immortalité.

Des oracles, des devins et des sibylles. §

4. Apollon était renommé par ses oracles dans un grand nombre de villes. Les plus célèbres de ces oracles furent ceux de Delphes, de Délos, de Claros et de Patare. La prêtresse de Dodone s’illustra aussi dans l’art de la divination. Elle pénétrait les secrets de l’avenir et du passé, en interprétant le murmure d’une fontaine qui coulait au pied d’un chêne. Dans le premier âge du monde, la Divinité, comme l’attestent nos livres saints, s’était mise très-souvent en rapport direct avec les hommes. Or les prêtres et les prêtresses des idoles exploitaient au profit de leur puissance la foi que le peuple avait dans ces communications célestes, ils se dirent inspirés par le dieu qu’ils servaient et se mirent à faire des prédictions. Souvent l’ambiguïté de leurs réponses contribua beaucoup à les faire trouver véridiques. D’autres fois leurs paroles, en assurant à quelqu’un la victoire ou en lui annonçant des revers, enflammaient ou abattaient son courage, et parvenaient ainsi à produire ce qu’ils avaient présagé. Indépendamment des oracles, il y avait encore les augures qu’on déduisait du vol et du chant des oiseaux, des entrailles des victimes, des songes et de mille autres accidents naturels. Mais, comme tous ces moyens de puissance ne reposaient que sur des tromperies et des déceptions, ils ne pouvaient être de longue durée. Sous Solon et Lycurgue, les oracles étaient si respectés, qu’on n’osait rien entreprendre d’important sans les consulter. Les philosophes les attaquèrent comme une superstition, et portèrent le peuple à réfléchir sur ces trames dont il était victime. Nous voyons même dès le temps de Philippe et de Démosthène les plus célèbres oracles tomber dans le plus complet discrédit. On savait que leurs prédictions étaient vénales, et que l’or du roi de Macédoine faisait philippiser la pythie.

5. Indépendamment des oracles, il y avait encore les devins et les sibylles. Les devins avaient la réputation de connaître l’avenir. Les plus célèbres furent Tirésias, Amphiaraüs et Calchas. Tirésias était né des dents du serpent tué par Cadmus au temps de la conquête de la Toison d’or. Il avait reçu de Jupiter la science de l’avenir, et il vécut au delà de la durée de cinq âges d’homme. Amphiaraüs était le fils d’Apollon et d’Hypermnestre, et se distingua dans les guerres de Thèbes. Jupiter le foudroya et le fit entrer avec son char dans les entrailles de la terre. Calchas, qui devait à Apollon la connaissance du passé, du présent et de l’avenir, fut le devin des Grecs au siége de Troie. Ils ne faisaient rien que par son ordre, et son caractère prophétique le rendait maître des événements. Il mourut pour n’avoir pu deviner des énigmes que lui avait proposées un autre devin appelé Mopsus. — Les sibylles étaient des femmes qui savaient aussi l’avenir. On en compte dix, dont la plus célèbre fut celle de Cumes. Elle présenta à Tarquin des livres qui renfermaient, disait-on, toutes les destinées de Rome. Ces livres étaient gardés par deux prêtres appelés duumvirs, et ils étaient consultés dans toutes les grandes calamités. Ils furent consumés dans l’incendie du Capitole sous Sylla, et remplacés par d’autres qu’on recueillit en Italie, en Grèce et en Asie, mais qui n’eurent jamais autant d’autorité.

Des mystères. §

6. Tous ces devins n’étaient que des imposteurs qui spéculaient sur la crédulité du vulgaire. Mais le plus grand tort des prêtres fut de renfermer dans le secret de leur sanctuaire la science des vérités primitives. Pour maintenir leur puissance et rendre le peuple esclave de leurs caprices, ils eurent deux doctrines : l’une ésotérique ou intérieure, et l’autre exotérique ou extérieure. La doctrine exotérique était cette doctrine grossière, remplie de superstitions et d’absurdités, qu’on enseignait au peuple. La doctrine ésotérique n’avait pas conservé, il est vrai, toute la pureté des anciennes traditions. Elle avait été défigurée par le magisme et ses pratiques, ainsi que par les théories nuageuses et spéculatives des prêtres philosophes ; mais elle était plus voisine de la vérité et renfermait même des dogmes très-élevés. C’était elle qu’on dévoilait dans les mystères. La première loi de ces mystères était le secret le plus absolu ; il a toujours été si bien gardé, que l’érudition la plus impatiente de connaître n’a pas encore pu satisfaire son avide curiosité, en cherchant ce qui s’y passait. A Eleusis se trouvaient les mystères de Cérès et de Proserpine, qu’on a toujours considérés comme les plus célèbres de la Grèce. Les Athéniens s’y firent initier, lorsqu’ils se furent rendus maîtres de ce pays. Les philosophes, les guerriers, les littérateurs et tous les grands hommes ambitionnèrent l’honneur d’y être reçus. Ces mystères se célébraient tous les ans et duraient quinze jours. Pendant ce temps, on ne pouvait arrêter personne, ni présenter aucune requête en justice.

Il nous semble impossible d’ajouter foi à la description qu’on fait des cérémonies et des épreuves de l’initiation. Nous ne voyons dans ce tableau qu’un récit poétique, imaginé à plaisir pour environner d’un certain air de grandeur des mystères déjà si profonds. Nous nous contenterons de donner les noms de ceux qui remplissaient quelques fonctions importantes dans cette cérémonie. Celui qui y présidait portait le nom d’hiérophante ou révélateur des choses sacrées, et vivait dans le célibat le plus austère ; le second ministre était appelé dadouche ou porte-flambeau ; le troisième kéryx ou chef des hérauts sacrés, et le quatrième épibôme parce qu’il servait à l’autel. Il y avait encore au-dessous de ces prêtres du premier rang plusieurs officiers inférieurs, tels que l’archonte-roi, qui faisait des prières et des sacrifices, et les épimélètes ou administrateurs, qui étaient choisis par le peuple.

Les savants sont partagés à l’égard de l’influence morale de ces mystères. Les uns prétendent qu’ils ne servaient qu’à voiler des obscénités, et les autres soutiennent au contraire qu’ils révélaient aux initiés les doctrines les plus pures et les plus consolantes. Il nous paraît que, pour accorder ces opinions et se rendre compte de tous les témoignages contradictoires qu’on trouve à ce sujet dans les auteurs de l’antiquité, il faut distinguer différentes époques. Dans le commencement, les mystères ne renfermant, a notre avis, que les doctrines révélées à l’homme par Dieu, devaient contribuer aux progrès de la civilisation, eu inspirant le goût de la vertu aux initiés. C’est ce qui explique comment Cicéron a pu, n accord avec Platon et tous les hommes les plus instruits de la Grèce, en faire un si magnifique éloge, en les appelant le plus grand des bienfaits qu’Athènes ait reçus, parce qu’ils enseignèrent aux Athéniens non-seulement à vivre heureux, mais à mourir tranquilles, en se confiant dans un plus bel avenir. L’hymne d’Orphée qu’on y chantait est un acte de foi aux vérités les plus sublimes. Mais, à mesure qu’on s’éloigna de ces temps anciens, l’enseignement primitif s’obscurcit, la morale s’altéra, et les plus grands désordres souillèrent ces sanctuaires. C’est pourquoi les Pères de l’Eglise, et particulièrement Clément d’Alexandrie, nous font une peinture si effrayante des horreurs qui se commettaient dans ces initiations monstrueuses.

Questionnaire. §

1. Quelles sont les principales institutions religieuses et politiques des temps héroïques ? 2. Pour quel motif furent créées les ligues amphictyoniques ? Qui créa la première ? Quelle était la constitution de cette ligue ? Quelles autres ligues se formèrent sur ce modèle ? Quelle fut la conséquence de toutes ces confédérations ? 3. Dans quel but établit-on des jeux publics ? Quels étaient les plus célèbres de ces jeux ? En quoi consistaient les jeux pythiques ? - les jeux néméens ? — les jeux isthmiques ? Qui établit les jeux olympiques ? Quels prix y étaient décernés ? Qui les présidait ? Quels grands hommes y furent couronnés ? 4. Quel était le dieu renommé par ses oracles ? Qu’est-ce qui donna naissance à cette superstition ? Quelle était l’influence des oracles ? Comment tombèrent-ils dans le discrédit ? 5. Quels étaient les devins les plus célèbres ? Dites un mot de leur histoire. A qui donnait-on le nom de sibylles ? Combien en a-t-on compté ? Quelle était la plus célèbre ? Quel fut le sort des livres sibyllins ? 6. Quelles étaient les dispositions des prêtres anciens par rapport aux vérités qu’ils connaissaient ? Que faisait-on dans les mystères ? Quels furent les plus fameux ? Quels étaient les noms de ceux qui y remplissaient des fonctions importantes ? Quelle fut l’influence morale des mystères ?

Deuxième section.
De la mythologie indienne, persane, égyptienne, gauloise et scandinave. §

Chapitre I.
De la religion des Indiens. §

1. Les Indiens sont très-religieux. Comme celles de tous les autres peuples, leurs croyances furent pures à l’origine. Ils connurent l’unité de Dieu et sa trinité, la chute de l’homme, la promesse d’un rédempteur et l’immortalité de l’âme. On retrouve encore dans le chaos de leur mythologie bizarre les débris de ces vérités primitives. Mais leur imagination, folle jusqu’à l’extravagance, enveloppa des nuages les plus ténébreux tous ces dogmes fondamentaux. Leur trinité se compose, il est vrai, de trois personnes, Brahma, Vischnou et Shiva ; mais ces trois personnes ont des attributions contraires : Brahma est créateur, Vischnou conservateur, et Shiva est le dieu de la mort et de la destruction. Pour comble d’absurdité, ils donnent à chacune de ces trois personnes une déesse pour compagnie, et consacrent à cette dualité monstrueuse un culte infâme et déshonorant.

2. Brahma, le premier membre de la Trimourti, est le dieu créateur. Il naquit avec quatre têtes, et un lotos fut son berceau. Assis dans le calice de cette fleur, il porta ses quatre yeux autour de lui, et n’aperçut qu’une vaste étendue d’eau couverte de ténèbres. Il passa des siècles, absorbé dans la contemplation sans pouvoir rien comprendre au mystère de son origine. Enfin il se mit en prières, s’adressa à Baghavan son premier ancêtre, et les ténèbres s’enfuirent alors devant lui. Le grand dieu lui donna en spectacle tous les mondes endormis et gisant dans leur germe. Brahma, saisi d’admiration, les contempla et commença l’œuvre de la création. D’abord il produisit les sept sphères célestes (souargas), éclairées par la splendeur des génies bienfaisants (devatas). Ensuite il fit le ciel et la terre, le soleil et la lune, et forma les sept régions inférieures où sont relégués les génies malfaisants (daïlias). Nous verrons plus loin comment leurs prêtres expliquent la formation du genre humain.

3. Vischnou est le conservateur du monde créé par Brahma. La théologie indienne semble ici une réminiscence du dogme de la chute de l’homme et de la promesse d’un futur rédempteur. Mais, au lieu de s’incarner une fois pour le salut du monde, la seconde personne de la trinité indienne, Vischnou, s’est déjà incarnée huit à neuf fois : une première, en poisson, pour sauver Manou du déluge ; une seconde, en sanglier, pour soulever la terre du fond des eaux ; une troisième, en tortue, pour aider à retrouver l’amrita, l’ambroisie ou breuvage d’immortalité ; une quatrième, en homme-lion, pour vaincre le géant Hiranya ; une cinquième, en brahmane nain, pour renverser le tyran Bali ; une sixième, en brahmane armé d’une hache, pour châtier l’insolence des rois de la race du Soleil ; une septième, en la personne de Rama, pour délivrer la terre des tyrans qui l’opprimaient ; une huitième, en la personne de Crichna, pour combattre le mal sous toutes les formes, et une neuvième, sous le nom de Bouddha. Cette dernière produisit une révolution religieuse, que nous constaterons en parlant de la lutte du bouddhisme et du brahmanisme.

4. Shiva, la troisième personne de la Trimourti, est le dieu de la mort et de la destruction. C’est l’ennemi de Brahma et de Vischnou. On dit aussi qu’il est le dieu qui produit, parce que la vie naît de la corruption. De là le double aspect sous lequel on l’envisage. Quand Shiva est considéré comme le dieu producteur, il est représenté assis sur un taureau blanc, et il est entouré d’une foule de divinités qui lui rendent hommage. Rien de plus puissant, rien de plus noble aux yeux des Indiens. Sous son aspect menaçant et terrible, rien de plus monstrueux. « Des dents aiguës et tranchantes hérissent ses gencives, le feu sort de ses lèvres béantes, des crânes humains forment un diadème sur sa chevelure flamboyante, et un collier au-dessus de sa poitrine ; des serpents s’entortillent autour de sa taille et de ses bras ; la lance, l’épée, la flamme sont dans ses mains ; le tigre a remplacé le taureau, enfin son corps est tout entier d’un blanc cendreux, symbole terrible d’incandescence et de destructions implacables. »

5. Le dogme de la dégradation originelle, combiné avec celui de l’immortalité, jeta les Indiens dans les absurdités de la métempsycose. Au lieu d’admettre, comme l’enseigne la révélation, des souffrances éternelles, pour punir les méchants et un supplice expiatoire d’une durée limitée pour purifier les taches légères des justes, les livres sacrés des Indiens distinguent ici-bas différents degrés dans la réhabilitation de tous les hommes, et fondent sur celle différence l’inégalité native qui règne entre eux. Ainsi les brahmines sont plus purs et plus saints que tous les autres, et c’est à ce titre qu’on leur doit l’obéissance et le respect. Il en est de même des xathryas, des vaïscias et des soudras, et la distinction des castes n’a point un autre fondement.

D’après la théologie indienne, quand les âmes sont parfaitement purifiées, elles se réunissent à l’Etre suprême pour toujours. Si au contraire elles sont coupables, elles sont précipitées dans le Narara ou l’enfer, et elles y souffrent d’horribles tourments pendant 3, 150,600,000 siècles. Les âmes intermédiaires sont récompensées du bien qu’elles ont fait en passant dans le corps des brahmines, ou bien elles achèvent leur expiation en passant dans celui des bêtes, et en montant par degrés l’échelle des êtres animés jusqu’à ce qu’elles soient dignes d’entrer en union avec la Divinité. Cette doctrine fait voir à ces peuples abusés l’âme de leurs ancêtres dans un chien, dans un serpent où même dans un insecte. C’est pourquoi leur sympathie va jusqu’à faire construire des hôpitaux pour les animaux infirmes, tandis qu’ils n’ont que de l’indifférence pour l’homme qui souffre, parce qu’ils le croient toujours criminel.

6. Ces différentes erreurs inspirèrent aux Indiens les superstitions les plus extravagantes. Dans leurs fêtes religieuses, ils se meurtrissent le corps et s’imposent les supplices les plus cruels. L’idole de Jagrenat, dans le Bengale, est placée, au mois de-juin, sur un chariot immense traîné par une multitude d’hommes, de femmes, d’enfants, et l’on voit des milliers de dévots se précipiter sous les roues du char, et se faire ainsi fracasser les bras et les jambes pour obtenir un sourire de leur sanguinaire divinité. D’après les rêveries du panthéisme, ils font consister la perfection dans l’absorption complète de l’homme en Dieu. Ils veulent qu’on se retire dans une solitude si profonde et qu’on impose tellement silence à ses sens, qu’on perde tout désir, toute affection, toute volonté et tout sentiment. Le saint par excellence, le yogui, ne lit rien, ne s’occupe de rien, ne sent rien, dédaigne son corps et toutes les choses matérielles, éteint en lui le sentiment de son individualité à un tel point, qu’il n’y ait plus pour lui ni jour ni nuit, et qu’il croie enfin que la grande âme du monde et lui ne font qu’un, qu’il est Brahma et qu’il jouit comme lui du bonheur parfait. Les autres faquirs ou religieux ne sont pas moins étonnants par leur bizarrerie. Il y en a qui vivent dans les forêts, se couvrant de l’écorce des arbres et se nourrissant de racines ; d’autres colportent des amulettes, des remèdes miraculeux, font danser des serpents et disent la bonne aventure ; enfin on en voit qui passent des journées entières étendus par terre se laissant baigner par la pluie qui tombe par torrents ou bien s’exposant tout nus sur une pierre presque ardente aux rayons d’un soleil brûlant.

7. Ce panthéisme extravagant qui sanctionne toutes ces pratiques absurdes s’est partagé, comme toutes les erreurs anciennes et nouvelles, en plusieurs camps. Les deux sectes les plus remarquables furent celles des brahmines et des bouddhistes. Les brahmines l’ont emporté sur leurs adversaires, et maintenant ils dominent sur l’Inde entière. Ils défendent le système des castes, et vénèrent comme inspirés les livres des Védas. Ils se donnent pour les dieux de la terre, et prétendent sérieusement que quand Brahma voulut créer les hommes, il tira les brahmines de sa tête, les xathryas de ses épaules, les vaïscias de son ventre et les soudras de ses pieds. C’est sur ces rêveries qu’ils forment la distinction radicale des quatre castes qui sont la base de la constitution indienne. Pour assurer leur domination, les brahmines se sont réservé exclusivement le droit de lire les Védas : les xathryas et les vaïscias peuvent en entendre la lecture ; mais les soudras n’ont pas d’autre droit que de faire des présents aux brahmines. Ces prêtres entretiennent dans le peuple les superstitions les plus honteuses, ils lui font adorer les oiseaux et les serpents, et, au lieu de tuer ces animaux, l’Hindou leur porte les mets les plus exquis au bord de leurs trous. Ils adorent aussi les pierres, les plantes, et célèbrent une fête solennelle en l’honneur d’une herbe très-commune qu’ils appellent darba. Le bœuf et la vache sont parmi eux en très-grande vénération. Ils prennent de l’urine de vache pour leur servir d’eau lustrale ; ils s’en lavent le corps et en boivent. Le plus grand bonheur pour un brahmine et ce qui assure son éternité, c’est de mourir en tenant une vache par la queue.

8. Les brahmines, qui ont accrédité toutes ces folies, ne dominèrent pas toujours en maîtres absolus sur la conscience de ces malheureux Hindous. Dans le vie siècle avant J.-C., le fils d’un roi de Mabar, le célèbre Bouddha, se fit passer pour une des incarnations de Vischnou. Il attaqua la distinction des castes, et apprit à ses disciples à nier l’inspiration des Védas, qui consacraient par leur doctrine ce système politique. Les bouddhistes croient qu’il y eut une succession de manifestations ou d’incarnations de la Divinité, pour instruire et améliorer les hommes et les êtres créés. Leur doctrine, mêlée de panthéisme, se rapproche pourtant plus du théisme pur que celle des brahmes. Ils furent tout-puissants dans l’Inde jusqu’au commencement de l’ère chrétienne. Alors une lutte s’engagea entre eux et les brahmes. Ils résistèrent avec vigueur ; mais, obligés de plier devant leurs adversaires, ils se réfugièrent en Chine, où ils se sont perpétués jusqu’aujourd’hui. Leurs livres religieux sont prodigieusement étendus. Ils en ont fait un abrégé qui ne comprend pas moins de cent huit volumes. Les savants qui les ont parcourus attestent qu’ils renferment les idées les plus délirantes que l’intelligence humaine ait produites. Leurs premiers sages étaient en possession d’une morale exacte et d’une métaphysique très-profonde ; mais, à force d’entasser des chimères les unes sur les autres pour tromper le vulgaire, ils tombèrent dans les utopies et les rêveries les plus insensées.

9. La grande majorité des savants regarde le brahmanisme comme antérieur au bouddhisme. Cette dernière secte aurait supplanté la première depuis le ve ou le vie siècle avant J.-C. jusqu’au commencement de l’ère vulgaire, et le brahmanisme se serait ensuite relevé pour régner jusqu’à nos jours. Des travaux récents semblent ébranler cette opinion. D’après certains faits et certains monuments, il semblerait que le bouddhisme aurait précédé le brahmanisme, et que cette secte serait respectivement de date assez récente. Dans cette hypothèse, les Védas et les autres livres des brahmes, au lieu de remonter à une antiquité très-reculée, ne compteraient pas plus de deux mille ans d’existence, et même quelques-uns de ces livres auraient été composés au moyen âge. Quoi qu’il en soit, il est certain, d’après l’une et l’autre opinion, qu’il y eut de grandes révolutions religieuses dans l’Inde pendant le vie siècle avant J.-C. et au commencement de l’ère chrétienne. La nature des doctrines qui excitèrent ces mouvements et les faits historiques s’accordent à nous montrer ces bouleversements comme le résultat de la captivité des Juifs à Babylone et de la prédication de l’Evangile. Nous citons en passant ce synchronisme remarquable qu’on peut remarquer en traitant de l’histoire sacrée.

Questionnaire. §

1. Quel est le caractère des Indiens ? Quelles furent leurs croyances primitives ? Comment est composée leur trinité ? 2. Qu’est-ce que Brahma ? Quelle fut sa naissance ? Comment créa-t-il le monde ? 3. Qu’est-ce que Vischnou ? Quelles sont ses différentes incarnations ? 4. Quels sont les attributs de Shiva ? Comment ce dieu est-il représenté ? 5. D’où est venue la métempsycose ? Quelles sont, d’après les Indiens, les destinées des âmes après la mort ? 6. Quelles sont les superstitions que ces erreurs ont produites ? Que font-ils dans leurs fêtes pour honorer les dieux ? En quoi font-ils consister la perfection ? Qu’est-ce que les yogui ? Qu’est-ce que les faquirs ? 7. Quelles sont les grandes sectes qu’on distingue aujourd’hui dans l’Inde ? Quelles absurdités débitent au peuple les brahmines ? 8. En quel temps parut Bouddha ? Quelle réforme a-t-il opérée ? Quel est le caractère de ses sectaires ? 9. Laquelle de ces deux sectes est la plus ancienne ? Ces traditions n’offrent-elles pas des synchronismes remarquables ?

Chapitre II.
De la religion des Perses. §

1. Les croyances primitives des Perses furent pures comme celles de tous les peuples. Tous les savants s’accordent à dire qu’ils reconnaissaient un Être suprême, créateur et maître de toutes choses. Hérodote, Xénophon, Strabon et d’autres auteurs anciens attestent qu’ils ne croyaient pas que leurs dieux eussent des formes humaines, et qu’ils ne leur élevaient ni temples, ni autels. A la vérité ces mêmes historiens rapportent qu’ils adoraient les éléments, comme le feu, la terre et l’eau ; mais les Parses ou les Parsis, leurs descendants, prétendent que leurs adorations remontaient au Créateur, et que c’était le vrai Dieu qu’ils adoraient ainsi dans les œuvres de ses mains. Parmi les Pères, Minucius Félix et saint Cyprien regardent le premier des mages par la science, Hostanès, comme ayant eu des idées très-exactes sur Dieu, les anges et les démons.

2. Ces mages, dont Hostanès était le chef, jouissaient d’une très-grande autorité. Maîtres et dispensateurs de toutes les lumières, ils formaient une tribu, une caste particulière, comme tous les prêtres de l’Orient, et ils n’admettaient dans leur sein que les étrangers de grande distinction, comme Daniel et Thémistocle. Leur puissance s’étendait sur tout ce qui était du ressort de la religion et de la science. Ils interprétaient les livres sacrés, observaient les astres pour en tirer la connaissance de l’avenir, expliquaient les songes, prenaient part aux affaires publiques, siégeaient dans les tribunaux et le conseil du roi, faisaient l’éducation des princes, et s’ils ne régnaient pas, ils limitaient souvent la volonté suprême du chef de l’Etat par leur volonté propre qu’ils disaient être celle du ciel. Tout en admettant l’unité de Dieu, ils adressaient leur culte au feu et aux astres, et ils poussèrent peut-être plus loin que les autres peuples les folies de l’astrologie judiciaire. Ils admettaient aussi la doctrine des deux principes, comme nous l’expliquerons à l’occasion de Zoroastre ; mais, à l’exemple des prêtres égyptiens, ils tenaient secrètes leurs doctrines, et laissaient le peuple se précipiter dans les plus monstrueuses erreurs, spéculant sur son ignorance au profit de leur pouvoir.

3. Nos saintes Ecritures nous font connaître jusqu’où allaient ces déplorables égarements. Daniel nous dit que les Chaldéens adoraient un dragon ou serpent, et nous parle en même temps d’une idole de bois servie, sous le nom de Bel, par un grand nombre de prêtres qui faisaient croire à la multitude que leur dieu inanimé consommait chaque jour douze mesures de farine, quarante brebis et six amphores de vin. Les Perses adoptèrent toutes ces extravagances après leur conquête. Jérémie, qui voulait prémunir les Juifs contre les séductions qu’ils trouveraient dans la terre étrangère, leur écrit une lettre où il fait la description de tous les dieux d’or, d’argent et de bois, qu’on honorait d’un culte à Babylone. Le livre d’Esther nous apprend également que la cour du roi de Perse était souillée par l’idolâtrie. Enfin nous savons par les auteurs profanes que, sur les bords du Tigre et de l’Euphrate, les Perses s’agenouillaient devant une divinité impure appelée Mithra, et qu’ils lui offraient des sacrifices déshonorants. C’était, absolument la même divinité que l’Astarté des Phéniciens, la Milytta des Chaldéens, l’Anaïtis des Arméniens, la Vénus des Grecs.

4. Les mages, qui se faisaient à tous ces désordres et qui les autorisaient pour dominer plus facilement sur le peuple abruti, ayant été presque tous massacrés après le meurtre du faux Smerdis, il se fit en Perse une grande révolution dans les idées religieuses. C’était d’ailleurs l’époque où la présence des Juifs à Babylone avait répandu de grandes lumières dans tout l’Orient sur la nature de Dieu et la destinée de l’homme. Daniel avait convaincu d’imposture les prêtres des idoles ; et les rois de Perse, touchés par sa parole et ses miracles, avaient publié dans tout leur empire, différents édits où ils confessaient le vrai Dieu et ordonnaient au peuple de l’adorer. Au milieu du mouvement général des esprits, sous Darius, on vit surgir un réformateur du nom de Zoroastre, qui tout en rétablissant l’ordre des mages, se fit le restaurateur de leur doctrine. Les Orientaux le disent disciple de Daniel, d’Ezéchiel ou d’Esdras, et quelques-uns même l’ont pris pour un Juif. Il est certain que sa doctrine offre de nombreuses ressemblances avec celle des Hébreux.

5. Zoroastre admet un premier principe qu’il appelle le Temps sans borne, ou l’Eternel (Zérouane Akéréné). Ce premier principe en a produit deux autres qui lui sont subordonnés, le principe du bien ou de la lumière, Ormuzd, et le principe du mal ou des ténèbres, Akrimann, que les livres sacrés des Perses nomment aussi Saitan ou Satan. Ormuzd a créé au-dessous de lui six grands esprits dont il est le chef (amchaspands). Ces grands esprits président à toute la création. Ils ont sous leurs ordres une multitude d’izeds et de fervers (anges gardiens), qui composent l’armée céleste, et qui sont comme les anges gardiens de tous les hommes. Ahrimann de son côté a pareillement sous lui sept grands démons (dews) et une foule d’autres esprits de ténèbres et de mensonge. Il est l’auteur de la chute du premier homme et de la première femme, et depuis que le péché est entré dans le monde une lutte a commencé entre son armée et celle d’Ormuzd. Cette lutte doit durer douze mille ans et se terminer par la victoire du bien sur le mal, d’Ormuzd sur Ahrimann. Alors le règne de Zérouane Akéréné sera sans partage. Une admirable harmonie, une paix parfaite régnera entre tous les mondes, et ceux qui assisteront à ce spectacle seront ravis dans une sorte d’inaltérable ivresse.

6. Entre Ormuzd et Ahrimann les Perses plaçaient encore Mithra, le plus brillant des izeds. Cet esprit médiateur avait aussi son culte et ses autels. On le représentait sous la figure d’un jeune guerrier qui plonge son cimeterre dans la gorge d’un taureau qui plie les genoux.  « Ce taureau, dit M.  Gérusez, est l’emblème de l’année solaire qui expira pour renaître. Les mystères de ce dieu se célébraient au fond d’une grotte par l’entremise des mages, qui initiaient ceux des jeunes Persans que la rigueur des épreuves n’effrayait pas. Ces épreuves, d’abord légères, devenaient de plus en plus redoutables. L’eau et le feu y étaient tour à tour employés ; les adeptes étaient soumis au jeûne et à l’emprisonnement ; on les flagellait, on leur commandait des exercices violents qui mettaient souvent leur vie en péril. Ceux qui pouvaient supporter ces terribles épreuves recevaient de la bouche des prêtres des dogmes mystérieux qu’ils ne devaient point violer. Au terme des cérémonies de l’initiation, on posait sur la tête du néophyte une couronne qu’il rejetait en disant : C’est Mithra qui est ma couronne ; il gardait l’épée qu’on lui offrait en même temps. Dès lors il était soldat de Mithra, le frère et le compagnon d’armes de tous les initiés. »

7. Le livre qui renferme la doctrine de Zoroastre se nomme le Zend-Avesta. Il est écrit en deux langues différentes, le zend et le pelvi. Tous les livres zends sont canoniques, et leur réunion forme une sorte de bréviaire que les prêtres doivent réciter tous les jours avant le lever du soleil.

8. Les Perses symbolisèrent leur doctrine dans les éléments. Ils adorèrent Dieu dans le soleil et le feu qu’ils regardaient comme les emblèmes du bon principe. Les serpents, les herbes vénéneuses et tout ce qui leur paraissait nuisible sur la terre, étaient au contraire à leurs yeux le produit du mauvais principe. Au lieu de rester spectateur oisif de cette grande lutte du bien contre le mal, en s’abîmant, à la façon de l’Indien, dans une stérile contemplation, le vrai fidèle d’Ormuzd doit au contraire, d’après Zoroastre, prendre part au combat et hâter, autant qu’il est en lui, le triomphe du bien. Dans ce but, il lui faut s’efforcer de devenir aussi pur que la lumière et de conserver son âme et son corps exempts de toute souillure. C’est pourquoi les Perses se soumettent à une foule de purifications qui ressemblent beaucoup à celles des Hébreux. Ils s’abstiennent aussi des animaux qu’ils regardent comme impurs et immondes, évitent les lépreux qu’ils supposent les esclaves d’Ahrimann, se confessent à Ormuzd ou bien à ses prêtres de leurs fautes, font des prières contre Ahrimann, et célèbrent des fêtes en l’honneur d’Ormuzd. Ils s’attendent à être jugés après leur mort selon leurs œuvres. Ils se figurent que l’âme de chaque individu se présentera devant un grand pont (Tchinevad), qui forme la barrière entre ce monde-ci et l’autre. C’est là qu’Ormuzd attend tous les hommes jour les juger. Quand une âme est trouvée juste par Ormuzd, elle est conduite au delà du pont par les saints anges (izeds), où elle est introduite dans une terre de délices ; mais, si elle a mal vécu, elle reste en deçà pour expier ses fautes.

Questionnaire. §

1. Quelles furent les croyances primitives des Perses ? Quel est le sentiment des savants à ce sujet ? 2. Quelle était l’autorité des mages ? Quelle était leur doctrine ? 3. Quelles furent, d’après nos saintes Ecritures, les superstitions idolâtriques des Perses ? Qu’en disent les auteurs profanes ? 4. En quelle circonstance parut Zoroastre ? A qui emprunta-t-il sa doctrine ? 5. Quelle était sa doctrine ? Sous quels noms reconnut-il le principe du bien et le principe du mal ? Quels esprits a créés Ormuzd ? Quels noms portent ceux qui ont été produits par Ahrimann ? Quel doit être le résultat de leur lutte ? 6. Qu’est-ce que Mithra ? Comment était-il représenté ? Que savez-vous de ces mystères ? 7. Comment se nomme le livre qui renferme la doctrine de Zoroastre ? 8. Quelles étaient les pratiques religieuses des Perses ? Pourquoi avaient-ils recours aux purifications ? Comment comprenaient-ils l’autre vie ?

Chapitre III.
De la religion des Egyptiens. §

1. On lisait sur un temple égyptien cette inscription : Je suis celui qui est, fut, sera ; aucun mortel na soulevé le voile qui me couvre. Et sur un autre : A toi qui es une et tout, divine Isis. On ne peut donc douter que l’unité de Dieu n’ait été le fondement de la religion égyptienne. Les prêtres savaient que l’Etre suprême est unique, et qu’on ne peut le représenter sous aucune image corporelle. En approfondissant leurs doctrines philosophiques, on remarque même qu’ils reconnaissaient en Dieu trois formes principales ou trois personnes, et qu’en général leurs idées étaient conformes à celles des Indiens. Comme eux, ils admettaient un Verbe créateur et intelligence suprême, qui s’est révélé au monde sous le nom d’Hermès ; croyaient à la chute des âmes, aux incarnations de la Divinité, à la métempsycose, et ne voyaient dans le soleil, la lune, le ciel, la terre, le Nil et toute la nature, que le reflet de la Divinité se transformant et se reproduisant sans cesse. Ils avaient leurs livres sacrés qu’ils regardaient comme l’œuvre d’Hermès, et les débris que nous en ont conservés les écrivains anciens prouvent l’élévation et la beauté de leurs pensées.

2. Mais toutes ces lumières étaient ensevelies dans les sanctuaires et voilées sous des emblèmes mystérieux, qui ne pouvaient être compris que des initiés. Les doctrines qu’on enseignait au peuple étaient extrêmement grossières. Chaque temple avait sa divinité particulière ; la puissance de ces divinités était réglée par l’importance de la cité où le temple avait été construit, et la dignité de chaque prêtre dépendait ensuite de l’élévation du dieu qu’il servait. Thèbes étant l’une des villes les plus anciennes et les plus renommées, sa trinité d’Isis reçut les hommages de toute l’Egypte. L’Egyptien grossier ne voyait guère dans tous ces dieux que la nature matérielle. Osiris était pour lui le Nil, le feu, le soleil, le principe maie, actif et vivifiant ; il le représentait sous la figure d’un taureau ou d’un bœuf ; Isis au contraire était la lune, la terre, le principe passif, et il lui donnait pour symbole une génisse. A ces divinités bienfaisantes il opposait Typhon, le principe malfaisant, le roi de la mort et de la destruction, et Nephtys, sa sœur, la terre inféconde, la sécheresse et la stérilité.

3. La fable raconte ainsi les aventures d’Osiris, d’Isis et de Typhon. Osiris était fils de Jupiter et de Junon. Il régna sur l’Egypte et rendit son peuple heureux en le gratifiant d’une foule d’inventions utiles. Les Egyptiens disaient qu’il leur avait appris à cultiver la terre, à planter la vigne, à faire le vin, à employer les métaux, et qu’en un mot il les avait fait passer de la barbarie à la civilisation. Son épouse Isis eut le mérite de faire connaître aux peuples l’orge et le blé et de s’associer ainsi aux bienfaits d’Osiris. Après avoir répandu sur ses sujets les lumières de la science et de l’industrie, Osiris voulut communiquer aux autres peuples ces mêmes avantages dans l’intérêt de l’humanité. Il alla d’abord en Ethiopie où, par le charme de la musique et de la poésie, sans autre ressource que son éloquence persuasive, il adoucit la férocité des mœurs de cette nation. De là il passa en Arabie et dans les Indes, et partout il fut environné des respects et des hommages de tous les peuples qu’il éclairait.

4. Cependant son épouse Isis était restée à Thèbes pour gouverner l’Egypte. Osiris lui avait laissé pour premier ministre Hermès qui devait l’aider de ses conseils, et Hercule qui était chargé du commandement de ses armées. La sagesse et la force de ces deux hommes n’empêchèrent pas Typhon, le frère d’Osiris, de tenter une révolte contre Isis et de chercher à lui ravir sa couronne. Il échoua dans son entreprise, mais au retour d’Osiris il usa de ruse pour exécuter son perfide dessein.

5. Quand ce prince rentra dans ses Etats, les Egyptiens l’accueillirent avec enthousiasme. Typhon feignit de partager la commune allégresse et l’invita à un festin splendide qu’il avait préparé, disait-il, pour célébrer son heureux retour. Tous les personnages illustres que Typhon avait fait entrer dans sa conjuration se trouvaient parmi les convives. Sur la fin du repas, Typhon fit paraître un coffre magnifique et le promit à celui qui pourrait exactement le remplir avec son corps. Tous les seigneurs le tentèrent vainement. Osiris, sur qui on avait pris mesure à son insu, y réussit pour son malheur. Car à peine fut-il entré dans ce coffre que les conjurés en scellèrent le couvercle et le jetèrent dans le Nil.

6. Isis était à Chemnis lorsqu’elle apprit cette affligeante nouvelle. Elle se mit à la recherche de son époux, et erra vainement sur les bords du Nil et le long des côtes de la Méditerranée. Alors désespérée, elle se fit aider dans ses recherches par le dieu Anubis qui a la forme d’un chien. Ce dieu la conduisit en Phénicie près de Byblos. Là le coffre fatal s’était arrêté. L’arbre qu’il avait touché s’était accru avec une telle rapidité qu’en un instant il était devenu gigantesque. Le roi de Byblos le fit abattre, et sa tige servit à supporter le faîte de son palais. Isis, instruite de tout ce qui s’était passé, vint à Byblos, et s’assit éplorée au bord d’une fontaine où les femmes du pays venaient puiser de l’eau. Ceux qui la virent furent touchés de la noblesse de ses traits et de l’élévation de ses discours. Ils l’introduisirent aussitôt près de la reine. Cette princesse lui confia le soin d’allaiter son fils. Isis le nourrit en lui mettant son doigt à la bouche. On remarqua ce prodige, et on interrogea Isis sur son origine et le motif de ses voyages. La déesse raconta ses aventures, et demanda au roi de Byblos le tombeau d’Osiris. Le monarque le lui accorda sans peine, et elle revint en Egypte où elle le cacha dans un asile secret au milieu d’une sombre forêt.

7. Typhon découvrit le tombeau d’Osiris, l’ouvrit et partagea le corps de son frère en quatorze lambeaux qu’il dispersa dans toutes les parties de l’Egypte. Quand Isis sut qu’elle avait une seconde fois perdu son époux, elle s’embarqua dans un esquif de papyrus, et recommença ses recherches. Elle retrouva tous les lambeaux du corps d’Osiris, à l’exception d’un seul, les ensevelit à Philæ, à l’extrémité méridionale de l’Egypte, et fit élever des tombeaux et des temples dans tous les lieux où elle avait trouvé un des restes de son époux. Horus succéda à Osiris son père, et se vit également attaqué par Typhon. Isis ayant un jour favorisé la révolte de ce génie malfaisant, Horus indigné dépouilla sa mère de son diadème, et le remplaça par des cornes de vache, symbole sons lequel on représentait toujours cette déesse. Mais Typhon fut constamment vaincu, et la paix et l’abondance régnèrent avec le fils d’Osiris.

8. Le peuple, qui prenait ces fables au sérieux, était très-superstitieux. Il adorait les arbres, les plantes et les légumes de ses jardins. Il plaçait aussi sur ses autels toutes sortes d’animaux, dans l’espérance de les charmer et d’obtenir leurs faveurs. C’est ainsi qu’il prostituait son culte au bélier qui féconde les troupeaux, au chien qui en est le gardien, à l’ibis, à l’ichneumon et au chat, les ennemis des crocodiles et des rats qui infestaient l’Egypte. « Mais de tous ces animaux, dit Rollin, le bœuf Apis était le plus célèbre. On lui avait bâti des temples. On lui rendait des honneurs extraordinaires pendant sa vie et de plus grands encore après sa mort. L’Egypte alors entrait dans un deuil général. On célébrait ses funérailles avec une magnificence qu’on a de la peine à croire. Sous Ptolomée Lagus, le bœuf Apis étant mort de vieillesse, la dépense de son convoi, outre les frais ordinaires, monta à plus de cinquante mille écus. Après qu’on avait rendu les derniers honneurs au mort, il s’agissait de lui trouver un successeur, et on le cherchait dans toute l’Egypte. On le reconnaissait à certains signes qui le distinguaient de tout autre : sur le front, une tache blanche en forme décroissant ; sur le dos, la figure d’un aigle ; sur la langue celle d’un escarbot. Quand on l’avait trouvé, le deuil faisait place à la joie, et ce n’était plus dans toute l’Egypte que festins et réjouissances. On amenait le nouveau dieu à Memphis pour y prendre possession de sa nouvelle qualité, et il y était installé avec beaucoup de cérémonies9. »

Questionnaire. §

1. Quelle était la croyance des prêtres égyptiens ? Quels étaient leurs livres ? 2. Le peuple participait-il à leurs lumières ? Quelle idée se faisait-il à Osiris ? — d’Isis et de Typhon ? 3 Comment la fable raconte-t-elle les aventures d’Osiris et d’Isis ? Quels services rendit Osiris à l’Egypte ? Quels bienfaits répandit Isis ? Dans quels lieux voyagea Osiris ? 4. Que faisait Isis pendant l’absence de son époux ? Par qui fut-elle attaquée ? Quel fut le résultat des tentatives de Typhon ? 5. De quel stratagème usa Typhon pour perdre son frère à son retour ? 6. Que devint Isis, lorsqu’elle apprit la mort de son époux ? Qui l’aida dans la recherche de son corps ? Quelles furent ses aventures à Byblos ? 7. Que fit Typhon après le retour d’Isis ? Comment Isis retrouva-t-elle les restes inanimés d’Osiris ? Qui succéda à Osiris ? Quelles furent les aventures d’Horus ? 8. Les Egyptiens étaient-ils très-superstitieux ? Quels animaux adoraient-ils ? Quel est le plus célèbre de ces animaux ? A quels signes reconnaissait-on le dieu Apis ?

  Chapitre  IV.
De la religion des Gaulois. §

1. « Les Gaulois, dit César, reconnaissent Mercure, Apollon, Jupiter, Mars et Minerve. Mais ils ont pour Mercure une vénération particulière. Leur croyance, à l’égard de ces divinités, est presque la même que la croyance des autres peuples ; ils regardent Mercure comme l’inventeur de tous les arts ; ils pensent qu’il préside aux chemins, et qu’il a une grande influence sur le commerce et les richesses, qu’Apollon éloigne les maladies, qu’on doit à Minerve les éléments de l’industrie et des arts mécaniques, que Jupiter régit souverainement le ciel, et que Mars est le dieu de la guerre. »

2. Il ne faudrait cependant pas, d’après ces paroles, conclure qu’il y avait identité parfaite entre la religion des Gaulois et celle des Romains. Ces deux peuples déifièrent l’un et l’autre la nature et ses merveilles, l’esprit de l’homme et ses œuvres, ce qui établit de nombreuses ressemblances entre leur polythéisme ; mais ils exprimèrent leurs sentiments religieux chacun selon son caractère et son génie. Le Gaulois, doué d’une imagination plus triste et moins féconde, ne se créa pas un aussi grand nombre de divinités, et leur adressa un culte plus sauvage et moins mélancolique. Au lieu d’admirer la nature dans ses formes riantes et gracieuses, il se plut à offrir ses hommages aux vents, aux tempêtes et aux forêts. Il avait tant de respect pour ses forêts lugubres et silencieuses, qu’il aurait considéré comme impie celui qui eût osé les abattre. Ce peuple n’avait point de temples, parce qu’il ne croyait pas que la Divinité pût être resserrée dans l’étroite enceinte de quelques murailles, et il ne lui élevait pas de statue, parce qu’il ne croyait pas qu’elle pût être représentée.

3. Les Gaulois eurent toujours foi à l’immortalité de l’âme, aux peines et aux récompenses dans l’autre vie. Ils disaient qu’après la mort les âmes allaient habiter dans les nuages. Ceux qui avaient bien vécu avaient pour demeure des palais aériens, les lâches et les méchants étaient condamnés à errer sans cesse avec les vents. Ils savaient aussi que la mort ne rompt point les rapports du ciel et de la terre, et qu’au delà de la tombe le juste s’intéresse toujours au sort de ceux qui lui ont été chers. Peut-être aucune nation n’a-t-elle attaché plus d’importance aux présages. S’agissait-il d’exécuter quelque grande entreprise, on pensait que les ombrés descendaient de leurs nuages pour annoncer à la terre un bon ou un mauvais succès. Le montagnard croyait que ces mêmes ombres commandaient aux vents et aux tempêtes. Souvent, guidé par son imagination rêveuse et fantastique, il gravissait péniblement ses montagnes escarpées, et s’arrêtait à la cime pour écouter au milieu des bruyères le sifflement des vents et le bruit du tonnerre qu’il prenait pour la voix mélancolique et sombre de ceux qui n’étaient plus. On savait que chaque homme a son génie tutélaire qui l’accompagne partout, et l’on disait qu’il poussait un cri plaintif à notre dernier soupir. On se préoccupait également des bons et des mauvais esprits. Les bons ne se montraient que de jour dans des vallées riantes et solitaires, les mauvais n’apparaissaient que la nuit au milieu des tempêtes. « C’était aux esprits qu’on attribuait la plupart des effets naturels. L’écho venait-il frapper les oreilles, c’était l’esprit de la montagne que l’on entendait. Le bruit sourd qui précède les tempêtes était le rugissement de l’esprit de la colline. Si le vent faisait résonner les harpes des bardes, c’étaient les ombres qui, par ce contact léger, prédisaient la mort d’un grand personnage. Un chef ou un roi ne perdait jamais la vie sans que les harpes des bardes attachés à sa famille ne rendissent ce son prophétique10. »

4. Leurs prêtres portaient le nom de druides. Ce nom venait du mot celtique deru qui signifie chêne. Ils se divisaient en trois classes : les druides proprement dits, les ovates ou vates et les bardes. Les druides proprement dits habitaient dans de vieilles forêts où ils se rendaient presque inaccessibles. Ils formaient la classe savante de la nation, et jouissaient en vertu de leurs lumières d’une autorité immense. Ils nommaient à tous les emplois, présidaient aux assemblées générales de la nation, jugeaient tous les crimes, déterminaient les peines et les amendes, réformaient ou abrogeaient les lois anciennes, en créaient de nouvelles et s’occupaient, en un mot, des affaires civiles aussi bien que des intérêts religieux. Les ovates étudiaient spécialement l’astronomie, la médecine, l’histoire naturelle, et se faisaient de toutes ces sciences un moyen d’influence par la divination. C’était particulièrement dans ce but qu’ils dirigeaient leurs études. Tous les phénomènes de la nature devenaient entre leurs mains autant de pronostics que la crédulité du peuple admettait, et qui permettait aux prêtres de se mêler à tout. Ainsi, au nom du ciel, ils commandaient aux chefs des villes et des armées, et devenaient les arbitres suprêmes de leurs déterminations et de la conduite de l’Etat. Les bardes chantaient les exploits des guerriers, et leurs vers avaient un crédit si extraordinaire qu’ils suffisaient pour immortaliser. On croyait qu’aucun guerrier ne pouvait pénétrer dans le palais aérien de ses pères, si les bardes n’avaient chanté son hymne funèbre. Les ombres privées de cet honneur erraient dans les brouillards du lac Légo, et on leur attribuait les vapeurs malsaines qui s’élevaient de ce marais.

5. La doctrine des druides était enveloppée de beaucoup de mystères. Ils avaient pour maxime de ne rien écrire. Toutes leurs connaissances étaient renfermées dans des vers qu’on était obligé d’apprendre de mémoire. C’était un travail de quinze ou vingt années. Quoique nous ne puissions déterminer d’une manière bien positive les croyances de ces prêtres, il paraît certain qu’ils admettaient l’éternité de l’esprit et de la matière, qu’ils tentaient d’expliquer tous les phénomènes du monde sensible par l’eau et le feu, qui étaient à leur avis les premiers éléments des choses, et qu’ils reconnaissaient l’immortalité de l’âme. Ce dogme fondamental avait été défiguré dans leur théorie par les rêves de la métempsycose. Ils faisaient passer l’âme dans des créatures d’un ordre inférieur avant de lui permettre de s’élever au séjour du bonheur. Mais là elle reprenait ses habitudes, ses joies et ses plaisirs. « Le guerrier y retrouvait son cheval, ses armes et des combats ; le chasseur avec ses chiens continuait à y poursuivre le buffle et le loup dans d’éternelles forêts ; le prêtre à instruire les fidèles ; le client à servir son patron. »

6. Les druides cultivaient aussi la médecine, mais leur science était pleine de superstitions ; ils faisaient dépendre la vertu des plantes moins de leur naturel que du cérémonial avec lequel on les avait cueillies et préparées.

« Ainsi il fallait cueillir le samolus à jeun et de la main gauche, l’arracher de terre sans le regarder, et le jeter de la même manière dans les réservoirs où les bestiaux allaient boire ; c’était un préservatif contre leurs maladies. La sélage, espèce de mousse qui croît dans les lieux ombragés des montagnes et dans les fentes des rochers, et qui agit assez violemment comme purgatif, demandait, pour être récoltée, bien plus de précautions encore. On s’y préparait par des ablutions et une offrande de pain et de vin ; on partait nu-pieds, habillé de blanc : sitôt qu’on avait aperçu la plante, on se baissait comme par hasard, et, glissant la main droite sous le bras gauche, on l’arrachait sans jamais employer le fer, puis on l’enveloppait d’un linge qui ne devait servir qu’une fois. C’était un autre cérémonial pour la verveine, très-estimée comme remède souverain contre les maux de tête. Mais de tous les spécifiques de la médecine druidique, aucun ne pouvait être mis en parallèle avec le fameux gui de chêne ; il réunissait à lui seul plus de vertus que tous les autres, ensemble, et son nom exprimait l’étendue de son efficacité : les druides l’appelaient d’un mot qui signifie guérit tout.

7. « Il devait être coupé le sixième jour de la lune, et il devait tomber, non pas sous le fer, mais sous le tranchant d’une faucille d’or. Une foule immense accourait de toutes parts pour assister à la fête, et les apprêts d’un grand sacrifice et d’un grand festin étaient faits sous le chêne privilégié. A l’instant marqué, un druide en robe blanche montait sur l’arbre, la serpe d’or à la main, et tranchait la racine de la plante que d’autres druides recevaient dans une saie blanche ; car il ne fallait pas qu’elle touchât la terre. Alors on immolait deux taureaux blancs dont les cornes étaient liées pour la première fois, et l’on priait le ciel de rendre son présent salutaire à ceux qu’ils en avaient gratifiés. Le reste de la journée se passait en réjouissances. »

8. Ce qu’il y avait d’affreux dans la religion des anciens Gaulois, c’était cette superstition sauvage et barbare qui leur faisait immoler des victimes humaines, soit pour apaiser le courroux des dieux, soit pour chercher le secret de l’avenir dans les entrailles de celui qui devait être immolé.

« De vieilles femmes, aux pieds nus, aux cheveux blancs, aux vêtements blancs, retenus par une ceinture garnie d’airain, accompagnaient chez les Kimris trans-rhénans toutes les expéditions militaires, et dressaient au milieu du camp leur appareil de sorcellerie, consistant en une énorme chaudière de cuivre, de longs couteaux et un escabeau. Lorsque ces hideuses prêtresses avaient choisi une victime parmi les captifs, elles la garrottaient et la suspendaient au-dessus de la chaudière ; une d’elles montait sur l’escabeau, la frappait à la gorge et recevait le sang dans une coupe ; la couleur de ce sang, sa rapidité, sa direction donnaient autant de signes prophétiques qu’on interprétait ; ses compagnes se partageaient ensuite ses membres et ses entrailles palpitantes.

9. « En Gaule, c’étaient les hommes qui présidaient à ces superstitions barbares ; ils perçaient la victime au-dessus du diaphragme, et tiraient leurs pronostics de la pose dans laquelle elle tombait, des convulsions de ces membres, de l’abondance et de la couleur de son sang ; quelquefois ils la crucifiaient à des poteaux dans l’intérieur des temples, ou faisaient pleuvoir sur elle, jusqu’à la mort, une nuée de flèches et de dards. — Le cérémonial le plus usité et le plus solennel pour les sacrifices humains était aussi le plus affreux. On construisait en osier ou en foin un immense colosse à figure humaine, on le remplissait d’hommes vivants, on le plaçait sur un bûcher, un prêtre y jetait une torche brûlante, et le colosse disparaissait bientôt dans des flots de fumée et de flammes. Alors le chant des druides, la musique des bardes, les acclamations de la foule couvraient les cris des victimes, et le Gaulois crédule croyait avoir sauvé les jours de sa famille, prolongé les siens, affermi la gloire de sa patrie et fait monter vers le ciel un encens de prédilection11 .»

Questionnaire. §

1. Quelle était la religion des Gaulois ? Quelle était la divinité qu’ils adoraient, spécialement ? 2. Y avait-il identité entre le polythéisme gaulois et le polythéisme romain ? D’où provenait leur différence ? Pourquoi les Gaulois n’avaient-ils ni temples ni statues ? 3. Quelles étaient leurs idées sur l’autre vie ? Que pensaient-ils des présages ? Comment se représentaient-ils les bons et les mauvais esprits ? Quelle influence supposaient-ils à ces esprits sur la nature ? 4. Comment s’appelaient les prêtres gaulois ? Quelle était l’origine de ce nom ? En combien de classes se divisait leur hiérarchie ? Quel était le caractère des druides ? Quelle était leur puissance ? Quelles fonctions remplissaient les ovales et les bardes ? 5. Quelle était la doctrine des druides ? Comment se transmettait cette doctrine ? Par quelle erreur avaient-ils défiguré le dogme de l’immortalité de l’âme ? 6. Quel abus faisaient-ils de la médecine ? Quelles étaient leurs superstitions touchant le samolus, la sélage et la verveine ? Quelle était à leurs yeux la plus précieuse de toutes les plantes ? 7. Quel était le cérémonial suivi pour couper le gui ? Quelle espèce de victimes immolait-on à cette occasion ? 8. Quelle était la plus épouvantable des superstitions gauloises ? Que faisait-on chez les Kimris trans-rhénans dans les expéditions militaires ? 9. Quelles cruautés exerçaient les Gaulois dans ces sacrifices affreux ? Exposez le cérémonial le plus usité et le plus solennel pour les sacrifices humains.

Chapitre V.
De la religion des Scandinaves. §

1. L’ancienne religion des peuples du Nord était simple et pure comme celle de toutes les nations à leur origine. Leurs premiers sages enseignaient qu’il y avait un dieu suprême, maître de l’univers, auquel tout est soumis. Ils lui attribuaient une puissance infinie, une science sans bornes et une justice incorruptible. Comme les Gaulois, ils ne voulaient pas qu’on adorât la Divinité dans des temples, ni qu’on lui élevât des statues, sans doute dans la crainte qu’on ne se fit de sa nature une idée grossière et matérielle. Ils savaient que Dieu a créé une multitude infinie d’intelligences subalternes, et ils croyaient que ces intelligences présidaient à la terre, à l’eau, à l’air, au feu, au soleil, à la lune, aux astres, aux arbres, aux fontaines, aux fleuves, aux forêts, en un mot, à toutes les parties du monde sensible. Mais les passions des hommes et l’imagination des poëtes ne tardèrent pas à obscurcir ces vérités à la fois si simples et si sublimes.

2. La notion de Dieu fut ainsi altérée. On confondit avec, le dieu suprême un conquérant ambitieux, le superbe Odin, qui abusa de sa puissance et de ses victoires pour se faire adorer par le peuple. Les Scandinaves l’appelaient le maître de l’univers, le chef suprême des armées, et supposaient qu’il y avait au-dessous de lui douze dieux dont le pouvoir était subordonné au sien. Les plus remarquables de ces divinités étaient Balder, le dieu de la bonté, le principe du bien, le type du beau ; Tyr, je dieu de la guerre et le protecteur des braves ; Niord, le Neptune du Nord, le dieu des mers ; Braga, le dieu de l’éloquence et de la poésie ; Hiemdall, le gardien de l’arc-en-ciel qui, près de ces barbares, passait pour un pont au moyen duquel les dieux communiquaient avec la terre. Odin embrassait de son regard immense tout l’univers. On disait qu’il traversait les airs monté sur un coursier qui avait huit jambes, et que, pendant les combats, il planait au-dessus du champ de bataille pour enflammer l’ardeur des guerriers.

3. Odin avait pour épouse Frigga ou Fréa, la reine des déesses du Nord, comme Odin était le roi des dieux. Les Scandinaves appelaient Fréa la terre-mère, la mère des dieux, et son alliance avec Odin était pour eux le symbole de l’union du ciel et de la terre. La mythologie islandaise place sous sa dépendance douze déesses subalternes, comme elle a mis douze dieux sous la domination d’Odin. Chacune de ces déesses a des fonctions particulières. Eira présidait à la médecine ; Fulla à la parure ; Frya à l’amitié, Snotra aux sciences et aux bonnes mœurs, etc. Fréa avait une messagère comme Junon. Mais on l’appelait Gna au lieu d’Iris.

4. De l’alliance d’Odin et de Fréa étaient nés plusieurs dieux du second ordre. Le plus célèbre est le dieu Thor qui s’éleva jusqu’au premier rang parmi les dieux des Scandinaves, il présidait aux vents, à la foudre et aux tempêtes. On le regardait comme le défenseur et le protecteur des dieux, et l’Edda l’appelle le plus vaillant des enfants d’Odin. Il a une massue, des gantelets de fer et une ceinture qui a la vertu de renouveler sa vigueur à mesure qu’il en a besoin. Enfin, c’est le dieu de la force, et il n’est pas étonnant que des barbares l’aient mis à côté d’Odin et de Fréa. Ces trois dieux se partagèrent les honneurs suprêmes ; mais les Danois donnèrent la préférence à Odin, les Norwégiens à Thor, et les Suédois à Fréa.

5. Le conseil des dieux, présidé par ces divinités du premier ordre, se tenait, sous un grand frêne. « Ce frêne, dit M. de Tressan , est le plus grand de tous les arbres ; ses branches couvrent la surface du monde, son sommet touche aux cieux ; il est soutenu par trois grandes racines, dont une s’étend jusqu’au neuvième monde ou aux enfers ; un aigle, dont l’œil perçant découvre tout, repose sur ses branches, un écureuil monte et descend sans cesse pour faire ses rapports ; plusieurs serpents enchaînés s’efforcent de le détruire ; dans une source voisine, appelée la fontaine des choses passées, trois vierges puisent continuellement une eau précieuse dont elles arrosent le frêne. Cette eau entretient la beauté de son feuillage, et, après avoir rafraîchi ses branches, elle retombe sur la terre, où elle forme la rosée dont les abeilles composent leur miel. Ces trois vierges ou fées se tiennent toujours sous le frêne ; elles dispensent les jours des hommes ; chaque homme a la sienne qui détermine la durée et les événements de sa vie ; les trois principales se nomment le Passé, le Présent et l’Avenir. »

6. Les poëtes qui imaginèrent toutes ces fictions, ont conservé quelque chose de ces traditions primitives ; mais ils les ont profondément dénaturées, en les révélant des couleurs de la poésie. Nous avons cru qu’on aimerait à trouver ici leurs paroles sur la création. « Dans l’aurore des siècles, dit l’un d’eux, il n’y avait ni mer, ni rivage, ni zéphyrs rafraîchissants. On ne voyait point de terre en bas, ni de ciel en haut ; tout n’était qu’un vaste abime, sans herbe et sans semence : le soleil n’avait point de palais ; les étoiles ne connaissaient point leurs demeures ; la lune ignorait son pouvoir : alors il y avait un monde lumineux, brûlant, enflammé du côté du midi, et de ce monde s’écoulaient sans cesse dans l’abîme, qui était au septentrion, des torrents de feu étincelant, qui, s’éloignant de leurs sources, se congelaient en tombant dans l’abîme, et le remplissaient de scories et de glaçons. Ainsi l’abime se combla peu à peu ; mais il restait au dedans un air léger et immobile, et des vapeurs glacées s’en exhalaient sans cesse, jusqu’à ce qu’un souffle de chaleur, étant venu du midi, fondit ces vapeurs, et en forma des gouttes vivantes, d’où naquit le géant Ymer. On raconte que, pendant qu’il dormait, il se forma de sa sueur un homme et une femme, desquels est descendue la race des géants, race mauvaise et corrompue, aussi bien qu’Ymer, son auteur. Il en naquit une meilleure, qui s’allia avec celle du géant Ymer. On appelait celle-ci la famille de Bor, du nom du premier de cette famille, qui était père d’Odin. Les fils de Bor tuèrent le géant Ymer, et le sang coula de ses blessures en si grande abondance qu’il causa une inondation générale, où périrent tous les géants, à la réserve d’un seul qui, s’étant sauvé sur une barque, échappa avec toute sa famille. Alors un nouveau monde se forma. Les fils de Bor, ou les dieux, traînèrent le corps du géant dans l’abime, et en fabriquèrent le globe ; de son sang ils formèrent la mer et les fleuves ; la terre, de sa chair ; les grandes montagnes, de ses os ; les rochers, de ses dents et des fragments de ses os brisés. Ils firent de son crâne la voûte du ciel, qui est soutenue par quatre nains nommés Sud, Nord, Est et Ouest. Ils y placèrent des flambeaux pour l’éclairer, et fournirent à d’autres feux l’espace qu’ils devaient parcourir, les uns dans le ciel, les autres sous le ciel. Les jours furent distingués, et les années eurent leur nombre. Ils firent la terre ronde, et la ceignirent du profond Océan, sur les rivages duquel ils placèrent des géants. Un jour que les fils de Bor ou des dieux s’y promenaient, ils trouvèrent deux morceaux de bois flottants, qu’ils prirent, et dont ils formèrent l’homme et la femme. L’aîné des fils leur donna l’âme et la vie ; le second, le mouvement et la science ; le troisième leur fit présent de la parole, de l’ouïe et de la vue, à quoi il ajouta la beauté et des habillements. C’est de cet homme, nommé Askus, et de cette femme, nommée Embla, qu’est descendue la race des hommes qui a eu la permission d’habiter la terre. »

[Translator : Mennechet]
[Sturluson]

7. Au milieu de toutes ces descriptions poétiques, on reconnaît des vestiges de l’histoire de la création telle que la raconte Moïse. Les Scandinaves paraissent encore avoir mieux connu l’existence d’une autre vie et le dogme de la ruine du monde. Leur paradis est le Valhalla. C’est un lieu de délices où Odin reçoit tous les braves morts sur les champs de bataille. Il leur donne pour compagnes des vierges d’une ravissante beauté, les Valkiries, qui n’ont pas d’autre emploi que de prévenir tous les désirs de ces héros morts au champ de l’honneur. Leur enfer s’appelait Niflheim. Tous ceux qui n’étaient pas morts de la mort du soldat allaient dans ce dernier séjour, où régnait la Mort ayant pour palais l’Angoisse, pour table la Famine, pour serviteurs l’Attente et la Lenteur, et pour lit la Maigreur. On conçoit qu’une pareille doctrine devait terriblement exciter le courage de ces peuples superstitieux.

8. La mythologie des Scandinaves suppose, comme celle de tous les autres peuples, la chute et la dégradation du monde actuel. Mais elle croit que les mauvais génies qui règnent actuellement sur la création seront détruits après la ruine de l’univers. Ainsi Loke, le génie du mal que ses vices ont fait déchoir de l’état de perfection dans lequel les dieux l’avaient créé, sera anéanti avec ses enfants qui sont : la Mort, Héla, le Loup, Fenris, et le Serpent, Migdard, dont les anneaux enveloppent la terre. Tous ces génies malfaisants, dit l’Edda, seront lâchés contre le monde pour le dévorer. Puis, après de grands efforts, ils seront anéantis avec la nature entière et la plupart des dieux. « Alors, continue l’Edda , le puissant, le vaillant, celui qui gouverne tout, sort des demeures d’en haut pour rendre la justice divine ; il prononce ses arrêts ; il établit les sacrés destins qui dureront toujours. Il y a une demeure éloignée du soleil, dont les portes sont tournées vers le nord ; le poison y pleut par mille ouvertures ; elle n’est composée que de cadavre de serpents ; des torrents y coulent, dans lesquels sont les parjures et les assassins ; un dragon noir et ailé vole sans cesse autour, et dévore les corps des malheureux qui y sont renfermés. »

Questionnaire. §

1. Quelle était la religion primitive des peuples du Nord ? Comment ces croyances primitives se sont-elles obscurcies ? 2. Qu’était Odin ? Quels étaient les principaux des dieux qui lui obéissaient ? 3. Quels étaient les attributs de Fréa ? Quelles étaient les déesses placées au-dessous d’elle ? Comment se nommait sa messagère ? 4. De qui était né le dieu Thor ? Quel était son rang parmi les autres dieux ? Par quelle nation étaient adorées toutes ces divinités suprêmes ? 5. Où se tenait le conseil des dieux ? Décrivez le lieu de cette assemblée, et l’arbre sous lequel les dieux étaient assis. 6. Comment les poëtes scandinaves racontent-ils la création ? 7. Croient-ils à l’autre vie ? Qu’est-ce que le Valhalla ? Qu’est-ce que le Niflheim ? 8. Quelle sera, d’après les Scandinaves, la fin du monde ?

FIN.

Table analytique des matières. §

Abréviations. §

C. Contrée.

Const. Constellation.

Descr. Description.

Div. Divinité.

Ep. Epouse

Fl. Fleuve.

Hist. Histoire.

Médit. Méditerranée.

Métam. Métamorphose.

Mont. Montagne.

Pélop. Péloponèse.

Pers. Personnage.

Pr. Prince.

Suiv. Suivant.

V. Ville.

A §

Abimelech, roi de Gérare, 7.

Abraham ; culte du vrai Dieu au temps de ce patriarche, 7.

Absyrte, frère de Médée. 107.

Abyla, mont. d’Afrique, 115.

Achéloüs, fl. de Grèce, 115.

Achéron, fl. des enfers, 12, 69.

Achille, ses armes, 54, 145 ; va assiéger Troie, 142.

Acrisius, roi d’Argos, 127.

Actéon, chasseur, 40.

Adam et Eve, connurent le vrai Dieu, 7.

Admète, roi de Thessalie, 33, 70.

Adonis, son hist. et son culte, 58.

Adraste, roi d’Argos, 138.

Adrastée, nymphe, 20, 94.

Æa, île de Circé, 151.

Æa, v. de Colchide, 107.

Aëllo, harpie, 63.

Agamemnon, son sceptre, 51 ; assiége Troie, 142 et suiv. ; 148.

Age d’or, sa descr. 15.

Age d’argent, âge d’airain, âge de fer, 15.

Agénor, roi de Phénicie, 135.

Aglaé, une des Grâces, 58.

Ahriman, 173.

Aigle, métam. de Jupiter, 87.

Ajax, fils d’Oïlée, 142, 150.

Ajax, fils de Télamon, 142, 150.

Albe, v. d’Italie, 148.

Alcée, aïeul d’Hercule, 117.

Alceste, ép. d’Admète, 70.

Alcibiade, 157.

Alcide, nom d’Hercule, 116.

Alcmène, ép. d’Amphitrion, 28.

Alcméon, fils d’Amphiaraüs, 140.

Alecto, furie, 71.

Alexandre, jour de sa naissance, 41.

Alphée, fl. d’Elide, 113.

Amalthée, chèvre, 20.

Amathonie, v.de l’île de Cypre, 56.

Amazones, 106, 113, 122.

Ambroisie ou Nectar, 86.

Amchaspands, 174.

Amphictyon, fils de Deucalion, 154.

Amphiaraüs, un des sept chefs devant Thèbes, 139, 159.

Amphion, musicien, 134.

Amphitrite, nymphe, 62.

Amphryse, fl. de Thessalie, 33.

Amphytrion, roi de Thèbes. 110.

Amrita, ambroisie, 164.

Anaïtis, div. des Arméniens, 173.

Anchise, père d’Enée, 148.

Ancilles, boucliers, 49.

Androgée, fils de Minos.

Andromaque, veuve d’Hector, 149.

Andromède, fille de Céphée, 128.

Anémone, métam. d’Adonis, 59.

Anges, chez les Perses, 174

Anges rebelles, ont donné lieu à la fable des Titans, 25.

Angoisse, 195.

Antigone, fille d’Œdipe, 138.

Antiope, ép. de Lycus, 134.

Anthée, géant, fils de la Terre, 115.

Anthela, bourg, 154.

Anubis, chien, div. des Egyptiens, 180.

Apis, bœuf, 181.

Apollon, un des douze grands dieux, 21 ; son hist., son culte, 32 et suiv.

Apollonius de Rhodes, poëte, 109.

A propos ou Occasion, div., 100.

Arabie, c. d’Asie, 179.

Arachné, ouvrière, rivale de Minerve, 45.

Arcadie, c. du Pélop., 23, 76, 139.

Arc-en-ciel, métam. d’Iris, 29.

Archonte, roi, 161.

Aréopage, 48.

Arès, un des noms de Mars, 48.

Aréthuse, 30.

Ariane, sa couronne, 51 ; son hist., 54, 120.

Arion, musicien, 134.

Argé, cyclope, 13.

Argo, navire, 105.

Argolide, c. du Pélop., 139.

Argonautes, 104 et suiv.

Argos, v. du Pélop., 29, 106, 148.

Argus, serviteur de Junon, 27.

Aristée, berger, 64.

Artémis, un des noms de Diane, 41.

Artémisies, fêtes de Diane, 41.

Ascalaphe, pers. des enfers, 31.

Ascagne, fils d’Enée, 148.

Asie-Mineure, 106.

Askus, 194.

Asope, reine d’Egine, 28.

Astarté, div. des Phéniciens, 173.

Astrée, fille de Thémis, 89.

Astres, fils de l’Aurore, 85.

Astrologie judiciaire, 172.

Até, ou la Méchanceté, 94.

Athamas, roi de Thèbes, 65, 105.

Athènes, v. de la Grèce, 45, 117, 120.

Athéniens, 120, 160, 162.

Atlas, ses attributs, 41, 128.

Atrides, fils d’Atrée, 142.

Atropos, parque, 74.

Attente, 495.

Atys, 49.

Augias, roi d’Elide, 113.

Aulide ou Aulis, port, 143.

Augures, 158.

Auguste, ferme le temple de Janus, 45.

Aurore, fille du Soleil, 85.

Auster, vent du midi, 65.

Autolycus, instituteur d’Hercule, 140.

Automne, 79.

Avares, figurés par Tantale, 72.

Aventin, colline à Rome, 114.

Averne, bouche des enfers, 68.

B §

Babel, dispersion des peuples après la construction de cette tour, 8.

Babylone, 170, 172, 173.

Bacchanales, 54.

Bacchantes, 54, 132, 137.

Bacchus, un des douze grands dieux, 24 ; il combat les géants ou Titans, 24 ; son hist., 52 et suiv.

Balance, const., 34.

Balder, 190.

Bali, tyran, 164.

Baghavan, ancêtre de Brahma, 164.

Bardes, 184, 185.

Baucis, ép. de Philémon, 24.

Bécubo, bonne vieille protégée par Cérès, 31.

Bel, idole des Chaldéens, 172.

Bélier, const., 34.

Beller, frère de Bellérophon, 129.

Bellérophon, héros, 129.

Bellone, ép. de Mars, 49, 97.

Bengale, c. de l’Inde, 166.

Béotie, c. de la Grèce, 25.

Bérécynthie, nom de Cybèle, 17.

Bérénice, reine d’Egypte, 59.

Bétique, c. d’Espagne, 114.

Biche, consacrée à Diane, 113, 143.

Biens, honorés chez les anciens, 94.

Biton, 152.

Bœuf, guide de Cadmus, 135 ; bœuf Apis, 184.

Boileau, vers sur les allégories de la fable, 9 ; l’âge d’or, 15 ; l’état sauvage, 35.

Bor, 193.

Boréas ou Borée, vent du nord, 65.

Bouddha, incarnation de Vischnou, 165, 168.

Bouddhistes, 167.

Braga, div. des Scandinaves, 194.

Brahma, div. de l’Inde, 163.

Brahmines, 166, 167, 168.

Brébeuf, vers sur Cadmus, 136.

Briaré, un des géants ou Titans, 24.

Briséis, esclave d’Achille, 144.

Bronté, un des Cyclopes, 13.

Bruits incertains, div. allégoriques, 102.

Bulla, ornement des jeunes patriciens à Rome, 82.

Busiris, brigand, 114.

Byblos, v. de Phénicie, 180.

C §

Cacus, brigand, 114.

Cadmée, citadelle de Thèbes, 135.

Cadmus, fondateur de Thèbes, 135.

Caducée, 42, 43.

Calaurie, île de la mer Egée, 154.

Calchas, devin, 143, 159.

Calliope, muse, 36.

Calisto, nymphe, 40.

Calpé, mont., une des colonnes d’Hercule, 115.

Calydon (sanglier de), 119.

Cancer ou écrevisse, const., 34.

Cantu, auteur cité, 157.

Capanée, un des sept chefs devant Thèbes, 139, 140.

Capitole, demeure des dieux à Rome, 90, 92, 159.

Capricorne, const., 34.

Carthage, v. d’Afrique, 29, 148.

Cassiopée, ép. de Céphée, 129

Castalie, fontaine de Béotie, 37.

Castor, fils de Léda, 105, 125 et suiv.

Caucase, mont. d’Asie, 21.

Cécrops, fondateur d’Athènes, 45.

Céléno, harpie, 63.

Centaures, défaits par Thésée, 124.

Céphale, chasseur, 86.

Céphée, roi d’Ethiopie, 129.

Cerbère, chien des enfers, 70, 114, 121.

Cercyon, brigand, 119.

Cérès, une des douze grandes div., 24 ; détails sur cette déesse, 29 et suiv. Ses mystères, 160.

César, 182.

Céto, div. maritime, 128.

Chaldéens, 172.

Champs-Elysées, 71, 73.

Chaos, le plus ancien des dieux, 12.

Charon, nocher des enfers, 69.

Charybde, gouffre, 66.

Chemnis, v. d’Egypte, 179.

Chersonèse Taurique, 41.

Cheval de bois, introduit dans Troie, 147.

Chevelure de Bérénice, const., 60.

Chienne, métam. d’Hécube, 148.

Chimère, monstre, 130.

Chine, 169.

Chiron, centaures, 110.

Chouette, 46.

Christianisme, excellence des idées qu’il a répandues, 98.

Chronologie, 156.

Chryséis, fille de Chrysès, 144.

Chrysès, prêtre d’Apollon, 144.

Chute de l’homme, connue des Perses, 174 ; — des Scandinaves, 195.

Cicéron, son opinion sur les mystères, 164.

Circé, magicienne, 64, 154.

Cirrha, v. de la Grèce, 155.

Civilisation naissante de la Grèce, 104, 164.

Claros, v. d’Ionie ayant un oracle, 158.

Clément d’Alexandrie, 162

Cléobis, 152.

Clio, muse, 36.

Clotho, parque, 74.

Clytemnestre, ép. d’Agamemnon, 148.

Cocyte, fl. des enfers, 69.

Cœus, père de Latone, 32.

Coffre de Typhon, 179.

Colchide, c. d’Asie, 104.

Colchos ou Colchide, 106.

Colonne, bourg de l’Attique, 138.

Colonnes d’Hercule, 115.

Comana, v.de Cappadoce, 97.

Compitales, div. des carrefours, 81.

Comus, dieu des festins, 83.

Concorde, div. allégorique, 92.

Connaissance du vrai Dieu, 7.

Conseil des dieux, 7.

Constellations parcourues par le soleil, 34.

Coq, oiseau de Mars, 48, 49.

Corne d’abondance, 20.

Corinne, 137.

Corinthe, v. de la Grèce, 137, 156.

Corybantes, prêtres de Cybèle, 18.

Couronne d’olivier, prix aux jeux olympiques, 157.

Couronne, const., 54.

Course (jeu de la), 156. — Course des chars, des chevaux, des gens armés, 156.

Création de Moïse, défigurée par les peuples du Nord. 194.

Créon, frère de Jocaste, 140.

Crédulité, div. allégorique, 102.

Crète, île de la Médit., 20, 70, 119, 141, 149.

Crétois, 150.

Crichna, incarnation de Vischnou, 165.

Crissa, v. de la Grèce, 155.

Cupidon, fils de Vénus, 57.

Cybèle, sœur et ép. de Saturne, 14 ; son histoire, 17 et suiv.

Cyclades, îles de la Médit., 127.

Cyclopes, fils de la Terre, 13, 32, 50.

Cygne, métam. d’Orphée et const., 134.

Cyllénicus, un des noms de Mercure, 43.

Cypre, île de la Médit., 56,58.

Cyprien (Saint), cité, 171.

Cypris, un des noms de Vénus, 59.

Cyrinas, roi de Cypre, 58.

Cythère, île de Vénus. 59.

Cythérée, un des noms de Vénus, 59.

D §

Dactyles, prêtres de Cybèle, 18.

Dadouche, pers. des mystères, 164.

Daïtias, génies malfaisants, 164.

Danaé, fille d’Acrisius, 127.

Danaïdes, punies aux enfers, 73.

Daniel, prophète, 171, 172, 173.

Danois, peuple du Nord, 192.

Darba, herbe sacrée, 168.

Dardanelles, détroit, 33.

Darius, 173.

Daunus, roi d’Illyrie, 149.

Dauphins, 67, 134.

Dédale, son hist., 119.

Déjanire, aimée d’Hercule, 115.

Delille, descript. de l’Averne, 65 ; Episode d’Eurydice, 132.

Délos, île de la mer Egée, une des Cyclades, 32, 120 ; son oracle, 158.

Delphes, son temple incendié par Phlégyas, 72 ; pillé par les Gaulois, 77 ; sa ligue, 154 ; son oracle, 158.

Déluge de Deucalion, 25.

Démons, chez les Perses, 174.

Dents, semées par Cadmus, 136, 159.

Deru, chêne, 185.

Destin, ses attributs, 11 ; idée faussée de la Providence, 99.

Deucalion, roi de Thessalie, 24.

Devatas, génies bienfaisants, 164.

Devins, 159.

Dews ou Démons, 174.

Diane, une des douze grandes div., 21 ; son hist., son culte, 39 et suiv.

Didon, reine de Carthage, 148.

Diomède, roi d’Etolie, blesse Mars, 47 ; assiége Thèbes, 140 ; va assiéger Troie, 142, 149.

Diomède, roi de Thrace, 114.

Dioné, mère de Vénus, 56.

Discorde, habite l’enfer, 68, 95.

Disque, 156.

Divinité communiquant avec les hommes, 158, 166.

Doctrines des mystères païens, 159. — Doctrines religieuses des Perses, 172 et suiv.

Dodone, oracle et forêt, 26, 106, 146 ; — sa prêtresse, 158.

Dolius, un des noms de Mercure, 43.

Dragon de Jason, 107 ; — des Hespérides, 114 ; — de Cadmus, 136.

Druides, prêtres des Gaulois, 185.

Dryades, nymphes, 62.

Duumvirs, à Rome, 159.

Dyndimène, un des noms de Cybèle, 17.

E §

Eaque, juge des enfers, 70.

Echo, nymphe poursuivie par Junon, 28 ; habite le palais du Sommeil, 83.

Ecrevisse ou Cancer, const., 34.

Ecriture sainte, explications qu’elle nous donne sur l’origine du monde, 7, 12.

Ecriture, son invention, 136.

Edda, poème sacré des Scandinaves, 194.

Eétès, roi de Colchide, 105.

Egée, roi d’Athènes, 117, 121.

Egée, île, 70.

Egée, mer, 121.

Egialée, fils d’Adraste, 140.

Egide, 44, 129.

Egine, île ravagée par Junon, 28.

Egisthe, tué par Oreste, 148.

Egypte, 7,21.

Egyptiens, leur mythol., 76, 177.

Eira, 191.

Electre, sœur d’Oreste, 149.

Eléens, habitants de l’Elide, 157.

Eleusines, fêtes de Cérès, 30.

Eleusis, bourg de l’Attique, 30, 160.

Elide, c. de la Grèce, 113.

Elis, capitale de l’Elide, 113.

Embla, 495.

Empolius, un des noms de Mercure, 43.

Encelade, un des géants ou Titans, 24.

Enée, ses armes, 51 ; sauve ses pénates, 81 ; son histoire, 148 et suiv.

Enéide, poème de Virgile, 148.

Enigme d’Œdipe, 138.

Enna, campagne de Sicile, 30,

Envie, fille de la Nuit, 95.

Eole, dieu des vents, 64, 98.

Eolides et Eoliennes, îles de la mer de Sicile, 64.

Eoüs, un des chevaux du Soleil, 34.

Epaphus, fils d’Io, 28.

Ephèse, v. d’Asie, 41.

Ephialte, un des géants ou Titans, 21.

Epibôme, pers. des mystères, 161.

Epidaure, v. de l’Argolide, 119.

Epimède, fille de Sisyphe ; 129.

Epimélètes, pers. des mystères, 161.

Epiméthée, frère de Prométhée, 22.

Epire, c. d’Europe, 148.

Epreuves, dans la religion des Perses, 174.

Equité, fille de Thémis, 89.

Erato, muse, 36.

Erèbe, fl. des enfers, 69.

Erechtée, roi d’Athènes, 86.

Erésichton, roi d’Athènes, 34.

Eridan, ou le Pô, fl. d’Italie, 35.

Eris, ou la Discorde, 95.

Erostrate, 41.

Erreur, div. allégorique, 102.

Erymanthe, mont, du Pélop., 113.

Eschyle, poëte grec, 139, 157.

Esculape, fils d’Apollon, son histoire, 32.

Esdras, 173.

Eson, père de Jason, 105, 108.

Esotérique (doctrine), 160.

Esther (livre d’), 172.

Etéocle, fils d’Œdipe, 138.

Ethiopie, c. d’Afrique, 128, 178.

Etna, mont, de Sicile, 21, 50.

Eubée, île de la mer Egée, 154.

Euménides ou Furies, 71.

Eumolpe, instituteur d’Hercule, 110.

Eunomie, ou la législation, 23.

Euphrate, fl. d’Asie, 172.

Euphrosine, une des Grâces, 58.

Euripide, poëte grec, 157.

Europe, fille d’Agénor, 135.

Eurus, vent du sud-est, 65.

Euryale, Gorgone, 44.

Eurydice, ép. d’Orphée, 70, 132 et suiv.

Eurynome, mère des Grâces, 58.

Eurysthée, roi d’Argos, 112, 113, 115.

Euryte ou Eurytus, roi d’Œchalie, 110, 116.

Euterpe, muse, 36.

Evangile, son influence sur les révolutions religieuses de l’Inde, 170.

Evène, fl. d’Etolie, 116.

Exotérique (doctrine d’), 160.

Ezéchiel, prophète, 173.

F §

Fable, sens allégorique des principales fictions, 9, 15, 23, 25, 42, 45, 53, 72, 76, 89, 105, 117.

Faim, habite le vestibule de l’enfer, 68.

Famine, pers. allégorique, 195.

Faquirs, 167.

Faunes, 77 ; ses fils, 77, 78.

Fées, 192.

Fénélon, descr. d’un faune, 77.

Fenris, loup, 195.

Fervers, 174.

Feu, adoré par les hommes, 8, 178 ; feu sacré entretenu par les Vestales, 19.

Fièvre, son culte chez les Grecs, 98.

Flore, son culte et ses attributs, 78.

Foi, bonne Foi, div. allégorique, 90.

Fontenelle, vers sur Diane, 40.

Force, fille de Thémis, 90.

Fortune, div. allégorique, 99.

Fraude, son culte, 97.

Fréa et Frigga, ép. d’Odin, 191.

Frya, 191.

Fulla, 191.

Furies, div. des enfers, 74.

G §

Gallus, fl. de Phrygie, 48.

Ganymède, pr. troyen. 86, 87, 142.

Gaulois, attaquent la Grèce, 75 ; leur religion, 182, 183.

Géants, fils de la Terre, 24 ; explication de leur fable, 25.

Gémeaux, const., 34.

Génies, div. domestiques, 82.

Géryon, brigand, 114.

Gibraltar, détroit.

Glaucé, rivale de Médée, 109.

Glaucus, dieu marin, 65.

Glaucus, roi de Corinthe, 129.

Gna, 191.

Gorgades, îles de l’Océan, 44.

Gorgones, sœurs issues de Neptune, 44, 127.

Goutte, son culte chez les Grecs, 98.

Grâces, 56.

Grèce, 104, 136, 142, 152, 154.

Grecs, leurs dieux et leur culte, 42, 35, 47, 76, 98, 99 ; leurs expéditions héroïques, 105, 142, et suiv.

Guerre de Thèbes, 135 et suiv.

Guerre de Troie, 141 et suiv.

Gui de chêne, 187.

H §

Halirrothius, fils de Neptune, 48.

Hamadryades, nymphes, 62.

Harpies, monstres, 63, 106.

Harpocrate, ou le Silence, 100.

Hasard, ou Fortune, 99.

Hébé, déesse de la jeunesse, 86 ; épouse Hercule, 116.

Hèbre, fl. de Thrace, 132.

Hébreux, voy. Juifs.

Hécate, un des noms de Diane, 39.

Hector, fils de Priam, 145.

Hécube, ép. de Priam, 147.

Hegemonius, un des noms de Mercure, 43.

Hela, ou la Mort, 195.

Hélène, fille de Léda, 126 ; enlevée par Pâris, 142.

Hélicon, mont. de la Béotie, 36.

Hellé, fille d’Athamas, 105.

Hellènes, ou Grecs, 141.

Hellespont, 105.

Hemathion, fils de l’Aurore, 85.

Hercule, 104 ; son histoire, ses douze travaux, 110 et suiv. ; autres actions, 142.

Hermès, un des noms de Mercure, 43 ; — div. des Egyptiens, 177.

Hermione, fille de Vénus, 136.

Hermione, fille de Ménélas, 149.

Hérodote, historien grec, 157, 171.

Hésiode, poëte grec, 95.

Hésione, fille de Laomédon, 33.

Hespérie, Italie méridionale, 149.

Hespérides, jardin aux pommes d’or, 114.

Heures, 34 ; instruisent Vénus, 56.

Hibou, oiseau de Cérès, 31.

Hiemdall, div. des Scandinaves, 194.

Hiérophante, pers. des mystères, 164.

Hindous, voy. Indiens.

Hippocrène, fontaine de Béotie, 37, 128.

Hippolyte, fils de Thésée, 32, 124.

Hippolyte, reine des Amazones, 443, 424.

Hippomédon, un des sept chefs devant Thèbes, 139.

Hipponoüs ou Bellérophon, 129.

Hiranya, géant, 164.

Homère, poëte grec, auteur de l’Iliade et de l’Odyssée, 26, 86, 150.

Homme, énigme du Sphinx, 138.

Honneur, son temple, 89.

Horus, fils d’Osiris, 180.

Hostanès, chef des Mages, 171.

Hyacinthe, ami d’Apollon, 33.

Hyades, const.,53.

Hydre de Lerne, 113.

Hymen, fils de Vénus, 57.

Hymne d’Orphée, 162.

Hypermnestre, une des Danaïdes, 73.

Hypermnestre, mère d’Amphiaraüs, 159.

I §

Icare, son histoire, 120.

Icarienne (mer), 120.

Ida, nymphe, 20.

Ida, mont, de la Troade, 148.

Idée, surnom de Cybèle, 17.

Idoménée, roi de Crète, 142, 149.

Ilion, citadelle de Troie, 145.

Illyrie, contrée d’Europe, 136.

Immortalité de l’âme, 183, 186.

Incarnations de Vischnou, 164, 168.

Inde, c. d’Asie, 53, 179.

Indiens et Hindous, 163, 165, 168.

Indigence, habite le vestibule de l’enfer, 68.

Initiations aux mystères, 30, 161.

Ino, ép. d’Athamas, 65, 105,

Io, mère d’Epaphus, 28.

Iobatès, roi de Lycie, 130.

Iolchos, ville de Thessalie, 105.

Iole, fille d’Eurytus, 116.

Iphigénie, fille d’Agamemnon, 143, 149.

Iphitus, législateur de Sparte, 156.

Iris, messagère de Junon, 28, 29.

Ischia, île de la mer Méd., 24.

Isis, div. des Egyptiens, 177 et suiv.

Islande, île du nord, sa mythologie, 191, 192.

Ismène, fille d’Œdipe, 138.

Isthme de Corinthe, 154, 155.

Isthmiques, jeux, 66, 124, 155.

Italie, 14.

Ithaque, île de la mer Ionienne, 142, 150, 152.

Ivresse du crime, habite le vestibule de l’enfer. 68.

Ixion, puni aux enfers, 72, 73.

Izeds, 174.

J §

Jagrenat (idole de). 166.

Janus, roi du Latium, 14, 15.

Japet, père de Prométhée, 24.

Jason, chef des Argonautes, 104.

Javelot, jeu en Grèce, 156.

Jérémie, prophète, 172.

Jérusalem, dépouilles de cette ville, 92.

Jeux publics, 155, 156.

Jeux floraux ou de Flore, 79.

Jocaste, ép. de Laïus, 137.

Joie vaine, personnage allégorique, 102.

Judée, 59.

Juifs ou Hébreux, 170, 172, 173, 175.

Junon, fille de Saturne, 14, l’une des douze grandes div., 24 ; son hist., 27 et suiv.

Jupiter, fils de Saturne, sa naissance, 14 ; son hist., son culte et ses attributs, 20 et suiv.

Justice, fille de Thémis, 23, 89.

K §

Kéryx, pers. des mystères, 164.

Kimris, 188.

L §

Labdacus, roi de Thèbes, 137.

Labyrinthe de Dédale, 11 9.

Lachésis, parque, 71.

Ladon, fl.du Pélop., 113.

La Fontaine ; récit de Philémon et Baucis, 24 ; les filles de Minée, 51 ; le palais du Sommeil, 83.

Lagus, (Ptolémée), roi d’Egypte, 181.

Laïus, roi de Thèbes, 137.

Lampadophories, fêtes de Vulcain, 51.

Lampus, un des chevaux de l’Aurore, 86.

Laocoon, pr. troyen, 147.

Laomédon, roi de Troie, 33, 62, 85, 142.

Lapithes, peuple de Thessalie, 121.

Lares, div. domestiques, 81, 82.

Latium, c. d’Italie, 14.

Latone, mère d’Apollon et de Diane, 28, 32.

Lavation, fête de Cybèle, 18.

Lavinium, v. d’Italie, 148.

Léda, ép. de Tyndare, 125.

Législation, fille de Jupiter, 23.

Lego, lac, 185.

Lemnos, île de la mer Egée, 50, 51, 106.

Lenteur, pers. allégorique, 195.

Lerne, marais, 442.

Léthé, fl. des enfers, 69, 73.

Lettres de Bellérophon, ce qu’elles signifient, 130.

Leucothoé ou Ino, 66.

Liberté, 93.

Libye, c. d’Afrique, 26, 115.

Libyens, adoraient Neptune, 66.

Ligues amphictyoniques, 154.

Linus, musicien, 110.

Lion, const., 34.

Lion, symbole de la force, 90.

Lipari, îles de la mer Tyrrhénienne, 50, 51.

Livres sibyllins, 159.

Loke, génie du mal, 195.

Loi, fille de Thémis, 89.

Loup, métam. de Lycaon, 24.

Louve, allaite Romulus et Rémus, 76.

Lothophages (île des), 150.

Lucifer, fils de l’Aurore, 85.

Lysine, un des noms de Junon, 27.

Lustrale (eau), chez les Indiens, 168.

Lune, un des noms de Diane, 39.

Lupercales, fêtes de Pan, 76.

Luperci, prêtres de Pan, 76.

Lutte, jeu en Grèce, 155.

Luxe, père de la pauvreté, 98.

Lycaon, changé en loup, 23.

Lycomède, roi de Scyros, 124, 143.

Lycurgue, législateur de Sparte, 158.

Lycus, roi de Thèbes, 135.

Lyncée, mari d’Hypermnestre, 73.

Lyncée, Argonaute, 106.

Lyre d’Orphée, 134 ; — d’Amphion, 134.

M §

Mabar, patrie de Bouddha, 168.

Machaon, fils d’Esculape, 142.

Mages, 171, 173.

Magnésie, port de Thessalie, 106.

Maïa, fille d’Atlas, 41.

Maigreur, pers. allégorique, 195.

Majorque, île des Baléares, 114.

Maladie, habite le vestibule de l’enfer, 68.

Manou, législateur des Indiens, 164.

Mars, un des douze grands dieux, 24 ; son histoire, 47 et suiv.

Marsyas, satyre, 38.

Matuta, temple de Junon, à Rome, 29.

Matuta, ou Ino, 66.

Mauritanie, c. d’Afrique, 128.

Maux, honorés comme div., 192.

Méchanceté, fille de Jupiter, 94.

Médée, magicienne, 107, 118.

Méduse, une des Gorgones, 44, 128.

Mégalésies, fêtes de Cybèle, 18.

Mégère, furie, 71.

Melpomène, muse, 36.

Melchisédech, roi de Salem, pontife du vrai Dieu, 7.

Mélicerte, div. maritime, 65.

Mélie, nymphe, 135.

Mélisses, nom de deux nymphes, 20.

Memnon, Gis de l’Aurore, 85.

Memphis, v. d’Egypte, 51, 182.

Ménades ou Bacchantes, 54.

Ménale, mont. d’Arcadie, 113.

Ménélas, roi de Sparte, 142.

Mensonge, vice divinisé, 97.

Mercure, un des douze grands dieux, 21 ; voyage avec Jupiter, 24 ; son histoire et son culte, 41 et suiv.

Messénie, c. du Pélop., 139.

Métempsycose, chez les Indiens, 165, 166 ; — chez les Egyptiens, 177 ; — chez les Gaulois, 186.

Métis, ou la Réflexion, 23.

Midas, roi de Phrygie, 37.

Midgard, serpent, 195.

Milytta, div. des Chaldéens. 173.

Minotaure, monstre, 120.

Minée, roi de Thèbes ; ses filles, 54.

Minervalia, fêtes de Minerve, 46.

Minerve, l’une des douze grandes divinités, 21 ; sa naissance, 23 ; son histoire et son culte, 44 et suiv., 85, 128, 136.

Minorque, lie des Baléares, 114.

Minos, juge aux enfers, 70 ; son histoire, 119, 120.

Minutius Félix, cité, 171.

Miséricorde, vertu divinisée, 90.

Mithra, div. des Perses, 173, 174.

Mnémosyne, mère des Muses, déesse de la mémoire, 23, 36.

Momus, dieu de la raillerie, 83, 84.

Mopsus, devin, 159.

Morphée, fils du Sommeil, 84.

Mort, accompagne les Furies, 71. — Pers. de l’enfer Scandinave, 195.

Musique, sa puissance sur les premiers hommes, 135.

Mycènes, v. ; sa fondation, 129.

Mystères du paganisme, 30, 160 ; — mystères des Druides, 186.

Mythologie, sens de ce mot, 8 ; origine de la mythologie, 8 ; son importance, 9.

N §

Naïades, nymphes, 62.

Naïs, nymphe, 65.

Napées, nymphe, 62.

Narara, enfer des Indiens, 166.

Naxos, île de la Médit., 52, 54.

Nécessité, sœur du Destin, 100.

Nectar, 86.

Némée, forêt de l’Argolide, 112.

Néméens, jeux, 155.

Némésis, ou la vengeance, 94.

Néoptolème, ou Pyrrhus, fils d’Achille, 147.

Nephtys, sœur de Typhon, 178.

Neptune, fils de Saturne, 14 ; un des douze grands dieux, 20 ; son histoire, son culte, ses fêtes, 61 et suiv.

Nérée, div. maritime, 61, 62.

Néréides, nymphes, 62, 67.

Nessus, centaure, 116.

Nestor, roi de Pylos, 106, 142

Nicippe, femme de Sthénélus, 112.

Niflheim, 194.

Nil, fl. d’Egypte, 177.

Niobé et ses fils, 40 ; changée en rocher, 152.

Niord, div. des Scandinaves, 191.

Niza, v. de Mauritanie, 52.

Noé, plusieurs de ses descendants après la confusion de Babel, adorèrent les objets de la création, 8.

Nomius, un des noms de Mercure, 43.

Norwégiens, peuple du Nord, 192.

Nuit, fille du Chaos, 12.

Numa, roi de Rome, 15, 19, 49, 80.

O §

Occasion, div. allégorique, 100.

Océan, fils du Ciel, 61.

Océanides, nymphes, 61.

Ocypète, harpie, 63.

Odin, div. des Scandinaves. 190.

Odyssée, poème d’ Homère, 150.

Œchalie, v. d’Etolie, 110, 116.

Œdipe, son histoire, 137.

Œnone, nymphe, 148.

Œta, mont, de Thessalie, 116.

Œthon, un des chevaux du Soleil, 34.

Oïlée, roi de Locride, 142.

Oisiveté, au palais du Sommeil, 83.

Olympe, mont, aux frontières de la Thessalie, regardée comme le séjour de Jupiter et des dieux, 51, 87.

Olympiades, système de chronologie, 156.

Olympie, v. de la Grèce, 157.

Olympiques, jeux, 66, 155, 156.

Omphale, reine de Lydie, 115.

Oncheste, v. de Béotie, 154.

Oracles, 157, 158 et suiv.

Oréades, nymphes, 62.

Oreste, fils d’Agamemnon, 149.

Orgies, 54.

Ormuzd, principe du bien, 173.

Orphée, poëte, 70, 106, 134, 132, 164.

Osiris, div. des Egyptiens, 178.

Ovide, poëte, 79, 101.

P §

Pactole, fl. de Phrygie, 38.

Paix, fille de Thémis, 23, 89, 91 ; son temple à Rome, 15.

Palamède, pr. grec, de l’île d’Eubée, 142.

Palès, dieu des bergers, 76.

Pâleur, habite l’enfer, 71.

Pallante, 92

Pallas, vaincue par Minerve, 44.

Pan, dieu des bergers, son culte, 76.

Panathénées, fêtes, 46.

Parses et Parsis, adorateurs du feu, 174.

Pandore, son hist. 22.

Panthéisme, des Egyptiens, 76 ; des Indiens, 167, 169.

Paon, oiseau de Junon, 28, 29.

Paphos, v. de Cypre, 56.

Paresse, vice divinisé, 90.

Pâris, persécuté par Junon, 28 ; son hist., 142, 144.

Parjure, vice divinisé, 97.

Parnasse, mont, de Béotie, 25.

Parques, div. des enfers, 71, 74.

Parthénon, temple de Minerve, 45.

Parthénopée, un des sept chefs devant Thèbes, 139.

Pasiphaé, ép. de Minos, 119.

Patare, v. de Lycie ; son oracle, 158.

Patrocle, pr. des Locriens, 145.

Pausanias, auteur cité, 77.

Pauvreté, div. funeste, 98.

Péché, chez les Perses, 174.

Pégase, cheval ailé, 37, 86, 128, 129.

Pélasges, peuples primitifs de la Grèce, 141.

Pélias, son hist., 105, 108, 109.

Pélion, mont, de Thessalie, 106.

Péloponèse, c. de la Grèce, 105.

Pébos, fils de Tantale, 72, 156.

Pelvi, langue sacrée des mages, 175.

Pénates, dieux domestiques, 81.

Pénée, fl. de Thessalie, 32.

Pénélope, ép. d’Ulysse, 152.

Pentathle, jeux publics de la Grèce, 156.

Penthée, roi de Thèbes, 54.

Périandre, roi de Corinthe, 134.

Péribée, ép. de Polybe, 137.

Périphète, brigand, 118.

Permesse, fl. de Béotie, 37.

Perrault, vers sur les attributs des Muses, 36.

Persée, fils de Jupiter, 127 et suiv.

Perses, 171.

Personne, ruse d’Ulysse au moyen de ce nom, 151.

Phaéton, fils d’Apollon, 34.

Phaéton, un des chevaux de l’Aurore, 86.

Phalaris, tyran d’Agrigente, 118.

Phantase, un des songes, 84.

Pharaon, roi d’Egypte, 7.

Phéaciens (île des), 108.

Phébé, mère de Latone, 32.

Phébé, un des noms de Diane, 39.

Phèdre, ép. de Thésée, 121.

Phénicie, c. d’Asie, 59, 180.

Phéniciens, 141.

Phidias, sculpteur grec, 26, 45.

Philæ, île, en Egypte, 180.

Philémon, vieillard phrygien, 24.

Philippe, roi de Macédoine, 158.

Philoctète, fils de Pæan, ami d’Hercule, 146, 148.

Philomèle, changée en rossignol, 152.

Philonoé, fille d’Iobatès, 130.

Phinée, roi de Samothrace, 106.

Phinée, frère de Céphée, 129.

Phlégéton, fl. des enfers, 69.

Phlégon, un des chevaux du Soleil, 34.

Phlégyas, puni aux enfers, 72.

Phobétor, un des songes, 84.

Phocide, c. de la Grèce, 135, 148.

Phœbus, un des noms d’Apollon, 34.

Phorbas, berger, 137.

Phorcys, div. maritime, 128.

Phrygie, c. de l’Asie-Mineure, 18, 24, 33, 72.

Phrygiens, 141.

Phryxus, fils d’Athamas, 103.

Picus, roi du Latium, 77.

Piété, div. allégorique, 90.

Pindare, poëte grec, 157.

Pinde, mont, aux frontières de la Thessalie, 36.

Pirates, 105.

Pirithoüs, roi des Lapithes, 121.

Pittée et Pitthèe, roi de Trézène dans le Pélop., 117.

Platon, philosophe grec, 157, 161.

Plutarque, auteur cité, 156.

Pluton, fils de Saturne, 14 ; son hist., 68 et suiv.

Plutus, dieu des richesses, 30, 74, 92.

Podalire, fils d’Esculape, 142.

Poésie, sa puissance sur les premiers hommes, 135.

Poissons, const., 34.

Pollux, 106, 125 et suiv.

Polybe, roi de Corinthe, 137.

Polydore, fils d’Hippomédon, 136, 140.

Polymnestor, roi de Thrace, 147.

Polymnie, muse, 36.

Polynice, fils d’Œdipe, 138.

Polyphème, Cyclope, 151.

Polyxène, fille de Priam, 146.

Pommes d’or, 114.

Pomone, déesse des fruits, 79.

Pont-Euxin, 105.

Porphyrion, géant, 21.

Portumnus, div. maritime, Pourceaux, 150, 152.

Praxitèle, sculpteur, 60.

Priam, roi de Troie, 146.

Priape, div. des jardins, 79.

Prières, filles de Jupiter, 94.

Printemps, 78.

Procris, ép. de Céphale, 86.

Procuste, brigand, 118.

Prœtus, ses filles, 28 ; son hist., 130.

Progné, changée en hirondelle, 152.

Progrès social dans les temps héroïques, 104.

Promaque, fils de Parthénopée, 140.

Prométhée, fils de Japet, 21.

Proserpine, enlevée par Pluton, 29 ; ses mystères, 160.

Protée, dieu marin, 63. Providence, 99.

Prudence, 90.

Prytanèe d’Athènes, 157.

Ptolémée, roi d’Egypte, 59 ; — Ptolémée Lagus, 181.

Pudeur, divinité, 90.

Pugilat, 155.

Pygas, reine des Pygmées, 28.

Pygmées, peuple, 115.

Pylade, ami d’Oreste, 149.

Pyrame, 152.

Pyroïs, un des chevaux du Soleil, 34.

Pyrrha, ép. de Deucalion, 25

Pyrrhus, ou Néoptolème, fils d’Achille, 147.

Pythagore, philosophe grec, 157.

Pythie, prêtresse d’Apollon, 459.

Pythien, surnom d’Apollon, 32.

Pythiens et Pythiques, jeux en l’honneur d’Apollon, 32, 155.

Pythonisse, prêtresse d’Apollon, 32.

Q §

Quinquatria, fêtes de Minerve, 46.

R §

Racine, récit de la mort d’Hippolyte, 122, 123. Mort d’Etéocle et Polynice, 139. Sacrifice d’Iphigénie, 143.

Rage, habite l’enfer, 71

Rama, incarnation de Vischnou, 164.

Réflexion, produit la pensée, 23.

Regrets, habitent l’enfer, 68.

Remords, habitent l’enfer, 68.

Rémus, frère de Romulus, 48, 76.

Renommée, div., 101.

Reproche, nom de Momus, 84.

Révélation, éclaire l’homme sur sa destinée, 166.

Rhadamanthe, juge des enfers, 70.

Rhéa, un des noms de Cybèle, 17.

Rhodes, île de la mer Egée, 141.

Rhodope, mont, de Thrace, 132.

Ris, accompagnent Vénus, 56.

Rollin, auteur cité, 181.

Romains, leurs dieux et leur culte, 48, 77, 78, 89, 100, 126.

Rome, protégée de Mars, 48 ; ses destinées, 148, 159.

Romulus, 48, 49, 76.

Rousseau, poëte ; descrip. du chaos, 12 ; peinture du temps, 16 ; boite de Pandore, 22 ; portraits de Mars, 47 ; métam. de Protée, 63 ; Némésis ou la vengeance, 94 ; l’Envie, 95 ; la Renommée, 101 ; la Toison d’or, 107 ; Eloge d’Orphée, 132.

Rutules, peuple d’Italie, 148.

S §

Sacrifice d’Iphigénie, 143.

Sagittaire, const., 34.

Saitan ou Satan, 173.

Salente, ville d’Hespérie ou d’Italie, 149.

Saliens, prêtres de Mars, 49.

Samia, temple de Junon à Samos, 29.

Samolus, 186.

Samos, île de la mer Egée, 124.

Samothrace, île de la mer Egée, 106.

Sanglier de Calydon, 119 ; — d’Erymanthe, 113.

Satan, 173.

Saturnales, fêtes de Saturne, 15.

Saturne, ou le Temps, son hist, 13 et suiv.

Satyres, div. des bois, 78.

Saut, jeu de la Grèce, 156.

Scamandre, ou Xanthe, fl. de la Troade, 145.

Scandinaves, peuple du Nord, 190.

Scorpion, const., 34.

Scylla, nymphe et gouffre, 66.

Scyron, brigand, 118.

Scythie, contrée d’Asie, 113.

Sédition, siége dans le palais de la Renommée, 102.

Sélage, 186.

Sémélé, mère de Bacchus, 28, 52.

Serpent, métam. de Cadmus, 136 ; — adoré des Chaldéens, 172.

Séryphe, île, une des Cyclades, 127.

Shiva, div. de l’Inde, 163, 165.

Sibylles, femmes inspirées, 70, 148 ; — Sibylle de Cumes, 159.

Sicile, île de la Médit., 148, 151.

Sigalion, ou le Silence, 109.

Silence, div. allégorique, 100.

Silène, satyre, 53, 78.

Simoïs, fl. de la Troade, 145.

Sinnis, brigand, 118.

Sinon, espion grec, 147.

Sirènes, 64, 108.

Sisyphe, puni aux enfers, 72.

Smerdis, mage usurpateur, 173.

Snotra, 191.

Solon, législateur des Athéniens, 158.

Sommeil, fils de l’Erèbe, 68, 83.

Songes, habitent le palais du. Sommeil, 84.

Sophocle, poëte grec, 157.

Souargas, sphères célestes, 164.

Soucis, habitent le vestibule de l’Enfer, 68.

Soudras, 166, 168.

Sparte, v. de la Grèce, 156.

Sphère, inventée par Atlas, 41.

Sphinx, monstre, 138.

Stade, mesure de longueur, 157.

Statue de Memnon, 85 ; — de Diane, 149.

Stellio, changé en lézard, 34.

Stérope, un des Cyclopes, 13.

Sthénélus, roi d’Argos, 112.

Sthénélus, fils de Capanée, 140.

Stheno, une des Gorgones, 44.

Strabon, historien grec, 171.

Stropheus, nom de Mercure, 43.

Stropheus, roi de Phocide, 149.

Stymphale, lac d’Arcadie, 44 3.

Styx, fl. des enfers, 69.

Suédois, peuple du Nord, 192.

Sylvain, dieu des bois, 78.

Sylla, dictateur romain, 159.

T §

Tantale, puni aux enfers, 72 ; son hist., 142.

Tapisserie de Pénélope, 152.

Tarpéien, mont, à Rome, 80.

Tarquin, roi de Rome, 159.

Tartare, abîme où sont engloutis les méchants, 25 ; sa desc. 69, 71.

Taureau, const., 34.

Taureau de Phalaris, 119.

Tauride, c. d’Asie, 119.

Tchinevad, grand pont, 176.

Télamon, roi de Salamine, 142.

Télémaque, fils d’Ulysse, 142.

Tempé, vallée de Thessalie, 33.

Tempêtes, 98.

Tempérance, div. allégorique, 90.

Temples célèbres, 18, 26, 41, 45, 90, 124, 126, 177.

Temps, honoré chez les Perses, 173.

Térée, changé en huppe, 152.

Terme, son culte, 79.

Terminales, fêtes du dieu Terme 80.

Terre, son hist., 43 ; mère d’Anthée, 115.

Terreur, habite l’enfer, 68, 74 ; habite le palais de la Renommée, 102.

Terreur panique, 77.

Terpsichore, muse, 36.

Téthys, ép. de l’Océan, 64.

Thalie, Grâce, 58,

Thalie, muse, 36.

Thèbes, v. de Béotie, 134, 138, 140.

Thèbes, v. d’Egypte, 83, 178.

Théisme, dans l’Inde, 169.

Thémis, ép. de Jupiter, 23, 89.

Thémistocle, général athénien, 157, 171.

Thersandre, fils de Polynice, 140.

Thésée, roi d’Athènes, 54, 104, 114, 117 et suiv.

Thessalie, c. de la Grèce, 105.

Thétis, mère d’Achille, 143.

Thor, 194.

Thrace, c. d’Europe, 147.

Thyrses, attributs de Bacchus, 54.

Thisbé, 152.

Tigre, fl. d’Asie, 172.

Tirésias, devin, 110, 140, 159.

Tisiphone, furie, 71.

Titéa, nom de la Terre, 61.

Tithon, époux de l’Aurore, 85.

Titan, fils de la Terre, son hist., 13, 14.

Titans ou Géants, 21, 25, 72.

Titonis, lac, 108.

Titus, empereur romain, 92.

Toison d’or, 105.

Travail, habite le vestibule de l’enfer, 68.

Travaux d’Hercule, 112 et suiv.

Trépas, habite le vestibule de l’enfer, 68.

Tressan, auteur cité, 192.

Trêve de Dieu, au moyen âge, 157.

Trimourti ou Trinité des Indiens, 163 ; — trinité des Egyptiens, 178.

Tritons, div. maritimes, 60, 62.

Troie, v. d’Asie, 47, 141 et suiv.

Trophonius, antre et oracle de Jupiter, 26.

Tros, roi de Troie, 86.

Troyens, 145.

Tydée, un des sept chefs devant Thèbes, 139.

Tymphis, Argonaute, 106.

Tyndare, roi de Sparte, 125.

Typhon, div. des Egyptiens, 178.

Typhon, géant, 21.

Tyr, div. des Scandinaves, 191.

U §

Ulysse, roi d’Ithaque, 64, 142, 143, 150, 151.

Uranie, muse, 36.

Uranus ou le Ciel, son hist., etc., 13.

V §

Vaiscias, 166, 168.

Valerius Flaccus, poëte, 109.

Valhalla, 194.

Valkiries, 194.

Vates, 185.

Védas, livres sacrés des Indiens, 168.

Vengeance ou Némésis, 94.

Vents, fils de l’Aurore, 85, 98.

Vénus, une des douze grandes div., 21 ; son hist., son culte, 56 et suiv., 144.

Verbe créateur, chez les Perses, 177.

Vérité, div. allégorique, 88.

Vérités, obscurcies chez les anciens, 91.

Verseau, const., 34.

Vertu, div. allégorique, 88, 111, 112.

Vertumne, dieu de l’automne, 79.

Vesta, déesse du feu, 19.

Vestales, prêtresses de Vesta, 19.

Viales, div. des chemins, 84.

Vialis, nom de Mercure, 43.

Vices, honorés, 94, 96.

Victimes humaines, 188.

Victoire, honorée des Romains, 92.

Vieillesse, habite le vestibule de l’enfer, 68 ; son culte, 98.

Vierge, const., 34.

Vischnou, div. de l’Inde, 163, 164, 168.

Virgile, poëte latin, 64, 132.

Virginie, dame romaine, 90.

Voie lactée, 110.

Voltaire, portrait de la Discorde, 96.

Volupté, div. allégorique, 111.

Vulcain, un des douze grands dieux, 24 ; son hist., son culte, 50 et suiv., 145.

X §

Xanthe, ou Scamandre, fl. de la Troade, 145.

Xathryas, 166, 168.

Xénophon, historien grec, 171.

Y §

Ymer, 193.

Yogui, saint parmi les Indiens, 167.

Z §

Zend, langue sacrée des mages, 175.

Zend-Avesta, livre de Zoroastre, 175.

Zéphyre, vent d’Occident, 33, 53, 65, 78.

Zérouane-Akéréné, 173.

Zodiaque, 34.

Zoroastre, réformateur perse, 172, 173.