François Veron

1643

La discipline des Eglises prétenduement réformées

Édition de Doranne Lecercle
2018
Source : François Veron, Des règlements ou avertissements particuliers in La discipline des Eglises prétenduement réformées de France, ou l'ordre par lequel elles sont conduites et gouvernées, Paris, LOUIS VENDOME, rééd. 1663, p. 381-384 ; Paris, Louis Boulanger, 1643, p. 623-625.
Ont participé à cette édition électronique : François Lecercle (Responsable d’édition) et Clotilde Thouret (Responsable d’édition).

[FRONTISPICE] §

La
DISCIPLINE
des
EGLISES
prétendues réformées de France,
ou
l'ordre par lequel
elles sont conduites et gouvernées.
Ensemble la manière de baptiser tant les juifs, les
Turcs et les Payens que les autres Infidelles. Avec
un ample recueil des Observations et Questions
faites par les Synodes Nationaux sur la pluspart
des articles de la discipline.

Reveu, corrigé et augmenté.
A Paris,
Chez Louis Vendosme, au bout de la
ruë de la Harpe, proche le pont S. Michel,
au Sacrifice d'Abraham.
MDCLXIII.
Avec privilege du Roy.

{p. 381}

Chapitre XIV.
Des règlements ou avertissements particuliersI §

XXVII.

Les danses seront réprimées, et ceux qui font état de danser ou assister aux danses, après avoir été admonestés plusieurs fois, seront excommuniés quand il y aura pertinacitéII et rébellion. Si sont chargés les Consistoires de bien pratiquer cet Article, en faire lecture publique au nom de Dieu, en l’autorité des Synodes ; Et les Colloques et Synodes Provinciaux exhortés de bien prendre garde aux Consistoires qui ne feront devoir de les censurer.

Du S.N. de Figeac, 1579. Art. 26.

« Pour le regard des danses, les Consistoires sont avertis, qu’ils aient à faire observer tant étroitement qu’ils pourront l’Article 27. des Règlements, qui défend de danser, distinguant prudemment entre ceux qui se montreront du tout rebelles aux saintes admonitions, et ceux qui montreront par leur discontinuation avoir profité des admonitions qui leur auront été faites, de ne point danser. »

Du S.N. de la Rochelle, 1581. Art.

« A cause que les danses et autres dissolutions croissent en toutes les Eglises, les Consistoires seront exhortés de bien pratiquer l’Article 27. des Règlements, et le 26. du Synode de Figeac, et d’en faire {p. 382}lecture publique au nom de Dieu et de l’autorité de cette Compagnie ; et les Synodes et Colloques ont charge de censurer les Consistoires qui ne feront leur devoir. »

XXVIII.

Les Momeries et Batelleries ne seront point souffertes, ni faire le Roi boitIII, ni le Mardi gras ; semblablement les joueurs de passe-passe, tours de gobelets, souplesses, marionnettes. Et les Magistrats Chrétiens exhortés de ne les souffrir, d’autant que cela entretient la curiosité, et apporte de la dépense, et perte de temps. Ne sera loisible aux Fidèles d’assister aux Comédies, Tragédies, Farces, Moralités, et autres jeux joués en public ou en particulier, vu que de tout temps cela a été défendu entre les Chrétiens, comme apportant corruption de bonnes mœurs, mais surtout quand l'Ecriture Sainte y est profanée. Néanmoins quand en un Collège il sera trouvé utile à la jeunesse de représenter quelque Histoire, on le pourra tolérer, pourvu qu’elle ne soit comprise en l'Ecriture Sainte, qui n’est {p. 383}baillée pour être jouée, mais purement prêchée, aussi que cela se fasse rarement, et par l’avis du Colloque, qui en verra la composition.

Du S.N. de Saint Maixant, 1609. Art. 16. des Obs. sur la Disc.

« La Compagnie enjoint aux Consistoires, Colloques et Synodes Provinciaux, de procéder par toutes censures Ecclésiastiques contre ceux qui plantent des MaisIV, et y commettent des débauches et insolences. »

XXIX.

Tous jeux défendus par les Edits du Roi, comme cartes, dés, et autres jeux de hasard, et ceux où il y aura avarice, impudicité, perte notoire de temps, ou scandale, seront réprimés, et les personnes reprises, et admonestées au Consistoire, et censurées selon les circonstances. Les BlanquesV aussi ne peuvent être approuvées, soit qu’elles se fassent par la permission du Magistrat, ou autrement : Et les Magistrats fidèles sont exhortés d’y tenir la main.

Du S.N. de Montpellier, 1598. Art. 28. des Obs. sur la Disc.

{p. 384}

« La Blanque qui sera autorisée par le Magistrat pour le soulagement des mineurs débiteurs et marchands, ne sera condamnée ; mais bien les autres qui ne sont de cette qualité, comme celles qu’on appelle Roues de Fortune, sont défendues. »

{p. 623}

Censure de ces trois Art.

1. Je répète ici, « Conducteurs aveugles, qui coulez le moucheron, et engloutissez le chameau », Math. 23. v. 24. Un Ministre, Moine Apostat, Concubinaire, excommunie quelque femme {p. 624} pour avoir dansé ou assisté aux danses : Mais où ont-ils trouvé en l’Ecriture que danser est un péché qui mérite Excommunication ? Quoi ! David n’est-il pas loué d’avoir dansé, 2. Rois 6.5 ? Quoi si le Roi donne un Ballet, les Dames de cette irréligion qui y assisteront seront excommuniées ?

2. Que trouvent-ils tant à redire à faire le Roi boit, et le Mardi gras, eux qui autorisent en leur rime de Marot, Ps. 23.5. « Et jusqu’aux bords pleine Tasse me donnes » ? Quel mal d’assister à des Tragédies qui enseignent à fuir le vice, duquel on représente le châtiment ?

3. Quel grand mal de passer quelque heure à jouer aux cartes pour relâcher son esprit ? Ce n’est pas que je ne réprouve tous excès, et ces Mardi gras, que plusieurs Paroisses, par dévotions et Prédications extraordinaires, comme entre toutes celle de S. Nicolas du Chardonnet, et son Curé, très pieux et très docte contrepointentVI : Mais que les Ministres corrigent plutôt leur libertinage en tant de sujets si importants, et spécialement leur schisme et division de la vraie Eglise, vice opposé {p. 625} à la charité, « sans laquelle rien ne profite », 1. Cor. 13. 3. Je les louerais de leur sévérité en ces matières, si elle procédait d’autre esprit que du leur, qui est de libertinage, à ne vouloir jeûner, se confesser, etc., à concubinages sous voile de Mariage de Moines Apostats, etc.