Le Répertoire à la Comédie-Française et à l’Odéon. §
{p. 933} On est Français ; on paie ses impôts ; on sait qu’une partie de ces impôts est destinée à soutenir la Comédie-Française et l’Odéon, à entretenir le Conservatoire, qui est une pépinière d’artistes pour ces théâtres nationaux : voilà une dépense qu’on approuve ! On est heureux, en mettant une pincée de sel dans son œuf à la coque, de penser qu’on subvient, pour sa petite part, aux frais du culte de Corneille, de Racine et de Molière : si tout l’argent public était assuré d’un aussi bon emploi, on ne réclamerait aucun dégrèvement. D’ailleurs, cette somme allouée à nos établissemens de tragédie et de comédie, ce n’est pas seulement une aide que l’état leur donne, mais le signe de son droit sur eux : pour s’y soustraire, voudraient-ils refuser ce subside, ils ne le pourraient pas. Et la raison de ce droit ? C’est le devoir qu’a l’état de veiller à la conservation de certains chefs-d’œuvre qui sont le plus glorieux lot de notre patrimoine commun.
Corneille, Racine, Molière ! Ces trois noms, depuis notre enfance, sont logés dans notre cervelle, comme ceux de trois demi-dieux particuliers à notre pays ; sur un rayon de notre bibliothèque, si chétive qu’elle soit, si encombrée de romans nouveaux, nous gardons leurs ouvrages ; nous les montrons à nos enfans, à peu près comme telle mère leur montre l’évangile, et tel père la Déclaration des droits de {p. 934} l’homme. Et au-dessous de Corneille, de Racine et de Molière, on se rappelle qu’il y a d’autres classiques, des quarts de dieux et des demi-quarts, entrevus jadis au lycée ou chez les pères, dans des recueils de morceaux choisis, et retrouvés depuis, par la ville, sur les plaques des rues. On se souvient que Voltaire a fait des tragédies, et aussi un certain Crébillon, et avant eux un nommé Rotrou ; on connaît ou l’on croit connaître Beaumarchais, Regnard et Marivaux ; on n’ignore pas que Boursault, Destouches, Dancourt, Le Sage, Gresset, Piron, Sedaine ont existé. Qui encore ? Dufresny ! Oui, ma foi, il y a quelque part une rue Dufresny ; Dufresny, comme les autres, doit avoir sa petite chapelle dans le temple où le maître-autel est occupé par cette trinité : Corneille, Racine, Molière. Les offices de tous ces saints, dictés par eux, forment ensemble un monument sacré : le répertoire classique. Nulle partie n’en est méprisable, nulle sans doute n’est négligée : que dire de la principale, qui se compose des offices de la trinité elle-même, admirés par tout l’univers ? Ceux-ci sont célébrés avec scrupule, avec joie : on est tranquille là-dessus, on a payé pour l’être ; on voit la Comédie-Française, on voit l’Odéon : en passant devant Notre-Dame, qui douterait que la messe y soit dite régulièrement ?
Il est bien vrai que si, l’an dernier, on est entré à la Comédie-Française, on a trouvé Le Député de Bombignac, et, cette année, Denise ; de même, à l’Odéon, Severo Tovelli et L’Arlésienne. Mais quoi ! c’est que, par l’attrait de la nouveauté, on a poussé la porte ces jours-là plutôt que d’autres : à l’ordinaire, cependant, ce n’est pas M. Bisson, ni même M. Dumas fils, ce n’est pas M. François Coppée ni M. Alphonse Daudet, qui sont honorés derrière ces portes ; c’est Corneille, Racine, Molière ; on le sait, et il suffit qu’on le sache. Napoléon l’a déclaré : « Le Théâtre-Français est la gloire de la France ; l’Opéra n’en est que la vanité. »
La gloire de la France ! pourquoi ce titre ? Parce que c’est là que le génie dramatique, par lequel notre nation excelle entre toutes, se perpétue depuis deux siècles. Il y a cinq ans déjà, cette maison a fêté le deux-centième anniversaire de sa fondation ; elle est, parmi nos institutions publiques, une des plus anciennes et des plus vénérables : un écho y répète, selon l’ordonnance royale du 21 octobre 1680, des paroles inspirées par le plus pur esprit de notre race et disposées par l’art théâtral le plus parfait que le monde ait connu. On est certain que cet écho ne laisse pas tomber ces paroles, on se contente de cette certitude ; en traversant cette place, même sans prêter l’oreille, on est saisi de respect, et l’on n’imagine pas que cette émotion soit une duperie ; on sent que, du haut de ce balcon, quarante chefs-d’œuvre au moins contemplent la foule : ah ! qu’on est fier d’être Français quand on regarde la Comédie !
Cependant, un matin, on a la sur son almanach : 6 juin, naissance de Corneille, « Oh ! oh ! s’est-on dit, voici une fameuse date ! Notre
{p. 935}professeur de rhétorique, autrefois, nous vantait cette sentence de M. Nisard : « Le jour où le grand Corneille cesserait d’être populaire sur notre théâtre, ce jour-là, nous aurions cessé d’être une grande nation ! » Heureusement, ce jour-là n’est pas venu ni près de venir : Corneille est populaire chez nous, autant que peut l’être un homme de l’ancien régime et qui « savoit la politique, » suivant le témoignage de son neveu, aussi bien que les belles-lettres et l’histoire, « mais les prenoit principalement du côté qu’elles ont rapport au théâtre. Il n’avoit pour toutes les autres connaissances ni loisir, ni curiosité, ni beaucoup d’estime. »
Oui vraiment, notre professeur nous recommandait souvent cette phrase de Fontenelle… Autant qu’un poète qui ne fut que poète, et qui le fut sous les rois, peut être populaire, Corneille l’est encore : on l’a bien vu, l’automne dernier, à Rouen, lors du deux-centième anniversaire de sa mort ; ce fut une assez belle fête pour une fête de province. M. de Bornier fournit des vers ; et je ne sais combien de corporations, entre autres celle des zingueurs, défilèrent, à la suite de l’Académie française, par les rues décorées et pavoisées ; il y eut des régates, en ballon, dans l’après-midi ; et, le soir, des illuminations et « l’embrasement du pont de pierre. »
Ce soir, que fera-t-on ici, à la Comédie-Française ? Qu’auront imaginé messieurs les sociétaires pour celte solennité ? En octobre, ils se sont rendus à l’appel de M. le curé de Saint-Roch, qui les avait conviés à une messe ; ils ont joué à Paris Polyeucte ; à Rouen, Horace et le Cid ; ici et là, un vieil à-propos : Corneille et Richelieu, et trois actes du Menteur ; avant Le Menteur, à Paris, M. Got a lu un Éloge de Corneille extrait du discours de réception du Racine à l’Académie. Voilà pour la commémoration de la mort : d’aucuns ont jugé que c’était peu ; c’était pourtant quelque chose. Pour celle de la naissance, qu’est-ce que nos gens auront inventé ? Ou, du moins, sans invention, combien de chefs-d’œuvre de Corneille vont-ils représenter ces jours-ci, et dans quel ordre ? Auquel accorderont-ils le privilège d’ouvrir ce jubilé ? Plus que Racine, autant que Molière, le grand homme du jour a gardé la faveur publique ; il est même, sinon plus estime ni plus aimé, du moins plus respecté que Molière ; il tient le dessus dans cette trinité, il est Dieu le père : allons voir quels honneurs ses cardinaux lui rendent !
On y va : Horace et le Menteur ! .. C’était déjà, cet automne, l’affiche du Théâtre des Arts : MM. les sociétaires fêtent Corneille à la rouennaise. Aussi bien, c’était chose réglée dès 1881, et peut-être avant : Corneille naît, Corneille meurt, Horace et le Menteur sont de service ? rien de nouveau pour aujourd’hui. Et demain ? Et après ? Plus de Corneille : disparu, oublié. Du moins, ce soir, entre les deux pièces, voici annoncé un à-propos tout neuf : Pour Corneille, de M. François Fabié. On se renseigne : est-ce une comédie ? est-ce un drame ? Ni l’un ni. l’autre : M. François Fabié, paraît-il, avait bien fait à cette occasion {p. 936} quelque chose comme une comédie ou un drame, MM. les sociétaires et pensionnaires n’ont pas eu le loisir d’apprendre ce petit ouvrage. Pour le remplacer, ils ont demandé à l’auteur quelques vers. Chut ! le rideau se lève. M. Coquelin, en habit noir, parmi ses camarades en costume, s’avance vers la rampe. Pourquoi M. Coquelin ? Est-il tragédien, par hasard ? Joue-t-il seulement le Menteur ? Est-il, en qualité de doyen, l’orateur de la troupe ? Non pas, mais il était de passage : ses camarades en ont profité pour le prier de faire honneur à Corneille ; il va dire ces quelques vers. Les dire ? Eh ! non : il n’a pas eu le loisir de les apprendre ; il va les lire ; et, de fait, les ayant à peine lus une première fois, il les lit assez mal. M. Fabié raconte une anecdote de la vie de Corneille ; vers la fin, il hausse le ton en alexandrins convenablement frappés ; il plaint le poète de n’être pas né ou du moins mort de nos jours : on lui aurait fait un si bel enterrement ! Il tance Dangeau pour cette note écrite négligemment sur son journal : « Le bonhomme Corneille est mort. »
Il se récrie comme il faut contre cette insulte et ce « blasphème. »
Voilà qui va bien ; mais, de grâce, messieurs les sociétaires, est-ce que vous-mêmes, aujourd’hui, ne traitez pas Corneille un peu trop en « bonhomme ? »
Il est spécieux de dire aux gens : « Vous ne savez pas ce que vous avez perdu à ne pas mourir deux cents ans plus tard ; »
mais ne les honorer que par ce discours, c’est les honorer à peu de frais !
Telles sont les réflexions que l’on ne peut s’empêcher de faire ; et, mis en éveil par cet incident, on se demande si le temple des classiques est desservi aussi exactement qu’on le croyait. Pour peu qu’on soit critique, on résout de se rendre compte des choses par le menu ; on feuillette une collection de vieilles affiches1; qu’importent un à-propos de plus ou de moins, et des vers récités ou lus, et bien lus ou mal, si l’œuvre de l’auteur qu’il s’agit de célébrer est maintenue en vie par les comédiens ? Voilà le seul hommage qui intéresse le poète : même une promenade au Panthéon réjouirait moins sa mémoire ; il dort très bien à Saint-Roch, pourvu qu’il entende en rêve un bruit d’applaudissemens venu de la Comédie-Française.
Hélas ! on aurait tort de se plaindre qu’Horace et le Menteur reviennent trop souvent sur l’affiche : c’était la première fois de l’année qu’ils s’y montraient. Combien de représentations, depuis le 1er janvier jusqu’au 1er juin, en cinq mois entiers, le Cid a-t-il obtenues ? Deux. Et Polyeucte ? Une seule. Il est vrai que, l’année précédente, le Cid avait poussé jusqu’à dix, ainsi que le Menteur, et Polyeucte jusqu’à huit ; Horace déjà s’était tenu à une. Mais Cinna ? Dans ces dix-sept mois, il est comme s’il n’était pas. Mais Pompée ? mais Rodogune ? jusqu’où faut-il {p. 937} remonter pour en découvrir la trace ? Rodogune, plus souvent applaudie que le Cid au XVIIIe siècle ! Faut-il reculer si haut pour la découvrir ? Les gens de ma génération pourraient le croire : pour eux, aussi bien que Pompée, Rodogune est abolie. Après cela, nommerai-je Sertorius, Nicomède ou Don Sanche ? Des noms, en effet, voilà ce que sont devenues ces trois pièces ; mais, pour des réalités, comment s’étonner qu’elles n’en soient plus ? Où Cinna disparaît elles n’ont rien à prétendre.
Pourtant quel accapareur que ce Corneille, si l’on regarde à côté de lui Racine ! Oh ! pour celui-ci, son affaire est nette. Combien de représentations depuis le 1er janvier ? Zéro. Vous lisez bien : zéro. Et en 1884 ? Cinq de Britannicus, trois de Phèdre, autant d’Iphigénie : c’est tout. Mais Andromaque ? Mithridate ? Athalie ? Esther ? Néant, néant ! Quant à Bajazet et Bérénice, des vieillards assurent que ces ouvrages ont été représentés à la Comédie-Française : nous voulons les croire ; quelle preuve de respect ! En 1872, lors du début de M. Mounet-Sully, dans le rôle d’Oreste, un peu avant le lever du rideau, je me rappelle avoir entendu ce dialogue entre deux spectateurs du parterre : « Sais-tu ce que c’est qu’Andromaque ? — Je sais seulement que c’est une comédie et que ça se passe à Rome. »
Au train dont vont les choses, il sera difficile avant peu de trou ver dans le parterre de la Comédie-Française deux spectateurs aussi bien renseignés sur une tragédie de Racine.
Est-ce, d’aventure, que MM. les sociétaires, égarés par l’esprit de curiosité ou par le faux goût, sacrifient Corneille et Racine à des classiques secondaires, à des primitifs ou à des épigones ? Est-ce qu’ils sont tout occupés de restaurer la Sophonisbe de Mairet, le Venceslas et le Saint Genest de Rotrou ? Est-ce qu’ils reprennent Rhadamiste et Zénobie, de Crébillon, ou Tancrède, de Voltaire, ou seulement Mirope et Zaïre ? Nullement ; Zaïre même a glissé dans l’oubli : au-dessous de cette demi-douzaine de pièces qui figurent le répertoire de Corneille et de Racine, je n’aperçois rien, rue de Richelieu, qui ressemble à une tragédie. Notons à part l’Œdipe roi, de Sophocle, traduit par M. Jules Lacroix, qui a été représenté deux fois en 1884. Honnis cela, depuis dix-sept mois, pour rencontrer autre chose qu’une comédie, un vaudeville ou un drame de mœurs contemporaines, il faut s’avancer jusqu’à Hernani et Ruy Blas, jusqu’à On ne badine pas avec l’amour et aux Caprices de Marianne : Voltaire et Crébillon, aussi bien que Rotrou et Mairet, sont au rancart ; à Dieu ne plaise que je m’en indigne, quand je vois Corneille et Racine en si mauvais point ! Il faut le remarquer pourtant, si j’avais intitulé cette revue : « le Répertoire tragique à la Comédie-Française, »
j’aurais pu me contenter de mettre après ce titre une demi-douzaine de pages blanches.
Mais la Comédie est la Comédie : le répertoire comique, sans doute, y est entretenu dans la perfection ; il y profite naturellement de tout ce qu’a perdu le tragique. Nous avons dit que Le Menteur, en 1884, avait {p. 938}été joué dix fois : c’est bon signe. Cette année déjà, comme l’année dernière, les Plaideurs ont été tirés une fois de la remise : eh ! ce n’est pas si mal. D’ailleurs nous sommes dans la maison de Molière : celui-ci doit avoir la part du lion. Il l’a, en effet, et pour lui nous sommes à peu près contens. A peu près, oui, tout juste ; et qu’on n’exige pas de nous un témoignage plus favorable, sinon nous demanderons comment L’Avare, en dix-sept mois, a mérité seize représentations et le Misanthrope seulement neuf, Les Femmes savantes six, Tartufe et Amphitryon cinq ; pourquoi L’École des femmes, produite sept fois l’année dernière, et les Précieuses, deux fois seulement, n’ont pas encore paru cette année. Nous demanderons surtout ce qu’on attend, depuis le 1er janvier 1884, — sans regarder plus en arrière, — pour se souvenir de l’École des maris, de Sganarelle et de George Dandin. Admettons que Les Fâcheux et Le Sicilien puissent être négligés pendant si longtemps et qu’on laisse refroidir L’Impromptu de Versailles : nous réclamerons au moins pour La Critique de L’École des femmes. Admettons que les seringues de M. de Pourceaugnac se rouillent dans le magasin, et qu’on nous fasse attendre une reprise de Don Garcie : faudra-t-il mourir sans avoir revu Don Juan ? Et je dis : revu ; mais combien sont-ils avec moi qui ne l’ont jamais vu, étant venus trop tard, après Bressant trop vieux ?
Ainsi Molière lui-même, dînant chez Molière, est à la portion congrue : jugez des autres ! L’an dernier, rien pour Regnard, ce qui s’appelle rien, et déjà cette façon de le traiter devenait une tradition. Cet hiver, on a restitué Le Légataire avec succès ; on nous promet à présent Les Folies amoureuses : cette vogue durera-t-elle ? Beaumarchais, à ce compte, pourra envier Regnard : on a joué Le Mariage de Figaro en 1884, on l’a même joué dix-huit fois, et déjà trois fois en 1885 ; mais du Barbier, point de nouvelles ! Quant à ce délicieux, spirituel, original Marivaux, — le seul de nos comiques, on l’a remarqué avec justesse, qui ne doive rien à Molière, — il ne compte, à la Comédie-Française, que par Le Jeu de l’amour et du hasard, et par L’Épreuve ; mais Le Legs ? mais Les Fausses Confidences ? MmeArnould-Plessy les a emportés avec elle, comme M. Bressant a emporté Don Juan, MmeSarah Bernhardt Zaïre, et tant d’autres, qu’on pourrait nommer, tant de pièces qui ne sont plus que de lointains fantômes de chefs-d’œuvre ! Et ce n’est pas seulement Le Legs et Les Fausses Confidences que je ferais jouer pour mon plaisir, si j’en avais le pouvoir, mais La Surprise de l’amour et La Seconde Surprise, La Double Inconstance, L’École des mères, L’Heureux stratagème, Les Sincères et Les Sermens indiscrets… Il ne coûte rien de former des vœux, ni d’exprimer des regrets : pourquoi n’en accorder qu’à Marivaux ? Disons que volontiers nous aurions vu, au moins une fois dans notre vie, Le Glorieux, Le Chevalier à la mode, Turcaret, Le Méchant, La Métromanie, La Gageure imprévue, mais disons-le vite : de pires privations, dénoncées plus haut, nous consolent de celles-ci. {p. 939} Entre Molière, Regnard, Beaumarchais, Marivaux, représentés on sait comme, et les auteurs vivans, qui trouvons-nous sur le terrain de la comédie ? Scribe, avec Bertrand et Raton et Bataille de dames, l’un donné dix-neuf fois l’an dernier et l’autre dix-sept, — en ce point, ne nous plaignons pas de la chicherie du comité ; — Dumas père, le plantureux (qui n’a pas un seul drame ici), avec Mademoiselle de Belle-Isle tout uniment ; George Sand, avec Le Marquis de Villemer et Le Mariage de Victorine ; Sandeau, avec Mademoiselle de la Seiglière ; Musset, avec Il ne faut jurer de rien, Le Chandelier, Le Caprice, Il faut qu’une porte soit ouverte ou fermée ; Barrière, avec Le Feu au couvent, une insignifiante petite pièce pour tout bagage ( il est vrai que les Faux Bonshommes, récemment, ont été reçus à correction par le comité, mais, comme on pouvait le prévoir, ils se sont soustraits à la correction) ; Delphine de Girardin, avec La Joie fait peur ; Caraguel, avec Le Bougeoir ; Gozlan, avec La Pluie et le Beau Temps : voilà tous les morts qui se dressent, à consulter les annales de la Comédie depuis dix-sept mois, entre Molière ou Marivaux et M. Dumas fils ou M. Augier. On peut trouver que ce n’est guère et que beaucoup manquent à l’appel ; mais sur ces disparus, encore une fois, ne prolongeons pas nos doléances ; rappelons-nous que non-seulement Les Fausses Confidences et Zaïre, mais Don Juan, aussi bien que Bajazet et que Rodogune, nous ont été enlevés : on ne geint pas une heure durant pour un ongle cassé à la main gauche, lorsqu’on est amputé du bras droit.
A ce petit nombre d’ouvrages conservés après la mort des auteurs ajoutez quelques pièces d’écrivains vivans qui sont admises dans le répertoire : Le Demi-Monde et L’Étrangère de M. Dumas fils ; L’Aventurière, Philiberte, Le Gendre de M. Poirier, Les Effrontés, Les Fourchambault et Le Post-Scriptum de M. Augier ; Les Pattes de mouches de M. Sardou ; Le Monde où l’on s’ennuie, L’Étincelle et Le Dernier Quartier, de M. Pailleron ; L’Ami Fritz et Les Rantzau de MM. Erckmann-Chatrian ; Le Testament de César Girodot de MM. Belot et Villetard ; Gringoire, de M. de Banville ; Volte-Face, de M. Guiard ; Chez l’avocat, de M. Paul Ferrier, et Les Projets de ma tante, de je ne sais qui ; quoi encore ? L’Été de la Saint-Martin, de MM. Meilhac et Halévy, qui nous fait penser à chercher ici Froufrou et La Petite Marquise ; — vous ne les trouverez pas, cependant, pas plus que vous ne trouverez une seule pièce de M. Feuillet. — Pour être exact, joignez à ce que vous tenez là Corneille et Richelieu, de M. Emile Moreau, et Toujours, de M. de Courcy. Vous n’aurez plus, si vous désirez avoir la liste complète des ouvrages représentés au Théâtre-Français depuis un an et cinq mois (nous avons omis seulement de nommer quelques pièces de Molière), vous n’aurez plus qu’à inscrire à la suite ces nouveautés : Les Maucroix, de M. Albert Delpit ; Une Matinée de contrat, de M. Desvallières ; Smilis, de M. Jean Aicard ; Le Député de Bombignac, de M. Bisson ; Mademoiselle Du Vigean, de {p. 940} MmeSimone-Arnaud ; La Duchesse Martin, de M. Meilhac ; Denise, de M. Dumas fils ; enfin trois à-propos : Maître et Valets, le Centenaire de Figaro, Racine à Port-Royal. Voilà décidément tout ce qui a tenu, pendant deux hivers, deux printemps, un été, un automne, entre les murailles de cet édifice sacré. Assurément, il n’est pas resté vide, comme ces fourgons que Bonaparte, tout le long de la campagne d’Italie, appelait le trésor de l’armée. Pourtant le trouve-t-on aussi plein qu’on le supposait, et d’aussi belles choses ? Est-ce bien là cette arche sainte qu’on regardait avec tant de sécurité ? Pendant le siège de Paris, j’ai admiré à la devanture d’un magasin une boîte de filet de bœuf conservé, je l’ai achetée fort cher : une tranche de viande, une seule, occupait bien le dessus ; mais dessous, c’était un hachis suspect. Voilà, si l’on me pardonne cette comparaison, qui rend ma pensée avec outrance, l’image de la Comédie-Française : naïfs contribuables, nous croyons que c’est tout bœuf, et quel bœuf ! Le bœuf Apis lui-même ! Soulevez la première tranche, vous ne trouverez pas la seconde.
Mais la seconde et le reste, c’est peut-être à l’Odéon, second Théâtre-Français, qu’il faut les chercher. Rue de Richelieu, il arrive sans doute que le répertoire soit embarrassé par le succès d’une pièce nouvelle : comment faire que Le Député de Bombignac, en 1884, n’atteigne pas cinquante-sept représentations, et la Duchesse Martin cinquante-deux ? Que Denise, dans le commencement de cette année, ne s’élance pas jusqu’à soixante-neuf ? Sur la rive gauche, ces accidens sont rares. Pour Severo Torelli, qui va jusqu’à cent six, pour le Bel Armand qui touche à soixante et une, combien d’essais malheureux comme La Famille d’Arnelles et le Divorce de Sarah Moore ! Ce n’est même pas L’Exil d’Ovide ni Le Mari qui, depuis deux ans, auront bouché la voie aux classiques : voyons la destinée de ces grands hommes dans les derniers exercices, — de septembre 1883 à juin 1884, et de septembre 1884 à juin 1885.
Dans la première de ces périodes, combien de tragédies de Corneille ? Pas une. Dans la seconde, Le Cid, Horace, Polyeucte osent poindre ils reviennent de loin ; c’est déjà beau qu’ils arrivent trois ; ne demandons pas quand suivra le reste. Est-ce donc que les demi-dieux se réjouissent du nombre trois : Phèdre, Andromaque, Bérénice, voilà toute la part de Racine en 1883-84 ; à quoi il convient d’ajouter, en 1884-85, Andromaque derechef et Athalie.
Les classiques secondaires, où sont-ils ? Voici Voltaire tout seul, avec Mahomet tout sec. Ensuite il faut venir jusqu’au Charles VII de Dumas père, à la Marie Stuart de Lebrun, au Louis XI et aux Enfans d’Edouard de Casimir Delavigne. Antony, Henriette Maréchal et L’Arlésienne, malgré leurs dénoûmens funestes, ne sauraient compter comme tragédies. Pour faire bon poids, admettrons- nous dans le plateau de la balance le Macbeth de M. Jules Lacroix ? Même avec cet appoint, il ne parait pas {p. 941}] que le fléau incline décidément du côté de l’Odéon : autant qu’au Théâtre-Français, la charge de tragique est légère.
Tournons vers le comique. Sans doute, au quartier Latin, on aime à rire avec les bons auteurs : en ceci, du moins, nous serons satisfaits. Oui vraiment, l’année dernière et cette année, voici Le Menteur et Les Plaideurs ; voici, répartis sur l’une et l’autre, à peu près les mêmes ouvrages de Molière que nous avons vus là-bas ; seulement, au lieu du Bourgeois gentilhomme, d’Amphitryon et des Précieuses, nous apercevons Monsieur de Pourceaugnac, L’École des maris et Sganarelle : ne pouvait-on nous montrer le tout ? Quant à l’introuvable Don Juan, ici non plus que là-bas on n’en a cure. « La terre s’ouvre et l’abîme, »
est-il écrit, au moment que le héros de Molière donne la main au Commandeur : ne le rendra-t-elle jamais ?
Heureux Beaumarchais, l’année dernière ! Non-seulement Le Barbier et Figaro, mais Eugénie elle-même a vu la rampe de l’Odéon. Heureux Regnard, cette année ! Il est partout à la mode : après le Légataire et Les Ménechmes, voici que reverdissent ici les Folies amoureuses. Mais Marivaux, mon Marivaux ! .. Dans ce long espace, Le Jeu de l’amour et du hasard, c’est de lui tout ce qui refleurit : une oasis ! On assure pourtant que l’Odéon est une école d’application de l’art dramatique : avec celle de Racine, quelle meilleure discipline pour de jeunes acteurs que celle de Marivaux ? Où donc apprendront-ils avec plus d’agrément à discerner et à rendre les nuances du sentiment et du style ?
Toutefois Marivaux, comme Regnard et Beaumarchais, figure dans cette maison après Molière, Racine et Corneille. Mais, au-dessous de ces noms ; il faut dégringoler jusqu’à Brueys, dont L’Avocat Pathelin prévaut ici sur La Vraie Farce de Me Pathelin ; jusqu’à Dallainval (L’École des bourgeois) ; jusqu’à Andrieux (Les Étourdis) ; jusqu’à J.-B. Hoffman (Le Roman d’une heure) ; jusqu’à Picard (Les Ricochets et L’Acte de naissance) ; jusqu’à Wafflard et Fulgence (Le Voyage à Dieppe et Le Célibataire et L’Homme marié). — J’omets, comme étrangère, une pièce traduite de Kotzebue, Les Deux Frères. — Voilà quel gros de comiques sépare les grands classiques, à jamais admirables et aimables, des contemporains. A transcrire cette liste, je me souviens de la rencontre que je fis, il y a quelques années, d’un jeune auteur. « Eh bien ! lui dis-je, vous m’aviez parlé d’une pièce gaie… Quelles nouvelles ? — Bonnes nouvelles ! fit-il en souriant. — Elle est reçue quelque part ? — Non pas ! Mais M. de La Rounat, à qui je l’avais d’abord présentée, m’a fait venir : Monsieur, m’a-t-il déclaré, vous n’avez pas le comique de l’Odéon ! »
Cette parole avait sonné à de joyeuses oreilles comme un bon augure. Y aurait-il, en effet, un comique de l’Odéon, qui ne serait pas le comique ? Trop de faveur accordé aux Wafflard et Fulgence, alors que tel et tel autre, parmi les meilleurs, sont délaissés, aurait bientôt fait d’accréditer cette opinion. De même, il y aurait un tragique de {p. 942} l’Odéon, qui ne serait pas le tragique : et c’est pourquoi Lebrun et Casimir Delavigne seraient triomphans, et Corneille et Racine humiliés. Mais tant qu’un décret du président de la république ou bien quelque arrêté d’un sous-secrétaire d’état n’aura pas « désaffecté »
l’Odéon pour le destiner expressément à ce comique et à ce tragique spéciaux, nous déplorerons que le culte des grands classiques, et de ceux qui viennent tout de suite après les grands, y soit négligé comme au Théâtre-Français ; sur la rive gauche, comme sur la rive droite, alternativement, nous gémirons au souvenir de ces morts illustres, et des hommages qu’ils recevaient naguère : super flumina ! ..
Pour Corneille ! c’était le titre du poème lu par M. Coquelin l’autre soir. Ce n’est pas seulement : Pour Corneille, qu’il faut dire, mais : Pour Racine, pour Molière, pour Marivaux et le reste, — comme on dit : Pour les pauvres ! C’est pour tous ceux-là que j’élève la voix, mais contre qui ? Accuserai-je d’impiété volontaire le comité de la Comédie Française et son administrateur, M. Perrin, et le directeur de l’Odéon, M. Porel ? Non pas ! Tout au plus leur reprocherai-je une résignation trop facile au fâcheux état que je signale. Vais-je crier à « l’obstruction »
et dénoncer tel ouvrage nouveau parce qu’il encombre la scène au détriment d’un chef-d’œuvre ancien ? Pas davantage. Le Testament de César Girodot se serait contenté assurément de dix représentations, l’année dernière, ou L’Ami Fritz de douze, ou Les Pattes de mouches de trente et une, ou Le Monde où l’on s’ennuie de dix-neuf, pour céder une soirée à Rodogune, à Bajazet, à Don Juan ou aux Fausses Confidences ; le Bougeoir se serait tenu à quarante-deux, pour laisser une petite place au Legs ou à La Critique de l’Ecole des femmes. Est-ce le méchant goût du public, enfin, qu’il faut charger de tout le péché ? Dois-je proclamer qu’on s’en défie, et qu’on n’ose guère, après expérience, lui proposer des classiques ? Mais point ! Athalie, cet hiver, est reprise à l’Odéon avec un peu de soin : Athalie, pendant une quinzaine, est à la mode. Le Bourgeois gentilhomme, au Théâtre-Français, est remis à flot : dix fois il attire la foule. Dix fois aussi Le Légataire : et quels éclats de rire dans la salle ! Quelles fanfares d’éloges ensuite dans la presse ! Il paraîtrait que ce n’est plus une si étrange entreprise que de faire rire les honnêtes gens, et que tout le monde veuille justifier de cette qualité.
Aussi bien la Comédie-Française et l’Odéon possèdent l’une et l’autre un fonds assuré de spectateurs pour rendu aux lettres est une élégance, et qui entendent une tragédie ou une comédie d’autrefois au moins comme la grand’messe. D’ailleurs, écouter une tragédie, fût-ce La Fille de Roland, il est convenu, depuis 1870, chez les classes dirigeantes, que c’est contribuer au relèvement de la patrie autant qu’on peut le faire sous un régime républicain : {p. 943} on s’accommoderait aussi volontiers, pour cet office, de Cinna, voire de Sertorius, ou de Mithridate. Écouter une comédie d’une bonne époque, c’est se mêler presque à l’entretien de personnages bien nés, comme il s’en trouvait jadis pour parler naturellement le français, et cela n’a pas mauvaise façon. Comique ou tragique, une des œuvres que nous regrettons serait la bienvenue, le mardi et le jeudi, chez M. Perrin. M. Porel, d’autre part, a ses chambrées populaires du lundi, qui se retrouvent à peu près les mêmes, enrichies seulement d’écoliers, dans l’après-midi du dimanche. C’est ici une collection de braves gens, désireux à la fois d’être émus ou amusés et de s’instruire, le tout à prix réduit. Petits bourgeois, commis, étudians, ils accourent à l’Odéon comme dans un lieu de divertissement et aussi dans une école littéraire qui serait aux écoles d’enfans ce qu’est le catéchisme de persévérance au petit catéchisme. Ils prennent du plaisir et croient trouver du profit à Louis XI et au Voyage à Dieppe ; pourquoi ne pas user de leur facilité pour leur donner des chefs-d’œuvre ? Ils les accepteraient aussi bien. Enfin, si deux couches de la société aussi distantes, ici et là, sont également bien disposées pour les classiques, il est à croire que les intermédiaires ne sont pas hostiles ; acclamés le dimanche et le lundi à l’Odéon, choyés le mardi et le jeudi à la Comédie-Française, il serait surprenant que, les autres jours, ici où là, les mêmes ouvrages fussent rebutés : aussi ne le sont-ils pas. Athalie, Le Bourgeois gentilhomme, Le Légataire, pour ne citer à nouveau que ces trois-là, nous répondent heureusement de l’humeur de tout ce public.
Que reste-t-il donc, si l’on ne peut s’en prendre aux directeurs ni aux confrères ni à l’auditoire, que reste-t-il pour expliquer l’abandon où gisent les classiques ? Il reste, hélas ! qu’il n’y a plus d’acteurs pour les jouer. Des tragédiens ? Passez en revue la nombreuse troupe de la Comédie-Française. Après M. Mounet-Sully, trop souvent malade et qui ne saurait suffire à tout, qui oserez-vous nommer ? M. Silvain, excellent au second plan et qui ne saurait occuper le premier. Et puis ? M. Dupont-Vernon et M. Maubant ; passons : à quoi bon les contrister ? M. Worms a pu jouer le Cid : il n’est pas tragédien pour cela. M. Laroche ne l’est pas, — est-il besoin de le dire ? — pour avoir joué Sévère. M. Martel n’est qu’un passable confident ; M. Villain en est à peine un. M. Garnier, M. Falconnier, sont encore des élèves ; M. Boucher en est un depuis trop longtemps. M. Duflos est une excellente recrue pour le drame, M. Albert Lambert fils en est peut-être une bonne ; mais, pour la tragédie ? Je voudrais m’écrier : « Ah ! qu’ils sont beaux les pieds de ceux qui viennent chausser le cothurne ! » Je ne vois venir que des pieds à brodequins et à souliers vernis. Quant aux tragédiennes, depuis MmeSarah Bernhardt, on n’en fait plus : Mlle Dudlay en tient lieu. A ses côtés, Mlle Lerou a de l’énergie, Mlle Bruck a de la gentillesse, et Mlle Fayolle… Mais pourquoi pousser si loin ? Regardons {p. 944} plutôt vers l’Odéon. Là, M. Paul Mounet tout seul fait figure de tragédien : il ne fait guère davantage. Auprès de lui, M. Albert Lambert et M. Chelles sont plutôt des acteurs de drame ; MM. Brémont, Rebel, Cosset, Hattier et les autres font de leur mieux, mais ce mieux n’est guère. Mlle Hadamard, avec des mérites différens, est la Dudlay de l’Odéon ; M"" Barthélémy, Caristie Martel, Antonia Laurent, Baréty, sont des écolières en tragédie : seront-elles jamais couronnées ?
Pour la comédie, le mal n’a pas encore empiré à ce point. Au Théâtre-Français, il reste une tête de troupe ; elle est affaiblie cependant, et voyez ce qui la suit. Pour remplacer tant de merveilleux artistes et pour succéder à ceux qui se retireront demain, qui a paru depuis quelques années ? MM. Truffier, Le Bargy, Baillet, de Féraudy, Leloir ; M. Clerh, qui n’est plus un jeune homme ; M. Samary, qui n’est qu’un enfant. Et, d’autre part, Mlle Bartet, dévouée plutôt à la comédie de mœurs contemporaines et au drame ; Mlles Pierson et Montaland, destinées sans conteste au genre moderne ; Mlles Marsy, Bruck, Müller, Frémaux, Kalb, Amel et Durand : — je crains de n’en pas oublier ! A l’Odéon, derrière M. Cornaglia, un vétéran, et M. Amaury, un jeune premier qui atteint déjà la seconde jeunesse.je ne vois guère à citer que M. Kéraval et peut-être M. Barral ; derrière Mmes Crosnier, Régis et Marie Samary, j’aperçois Mlles Rachel Boyer, Real et Nancy Martel ; le reste ! .. Ah ! je souhaiterais qu’un Hernani, — avec une doña Sol,— sortît des rangs et s’écriât : « Je prétends qu’on me compte ! »
Il n’y a plus de tragédiens ni de tragédiennes ; il n’y a guère de comédiens ni de comédiennes : à qui la faute ? Ne ressassons pas ce reproche qu’on a fait aux directeurs, et notamment à M. Perrin, de ne pas exercer assez leur jeune troupe. On aurait cultivé avec plus de zèle M. Joliet et Mlle Thénard, en aurait-on tiré des fruits merveilleux ? M. Porel, là-bas, qui souffle énergiquement son fourneau, trouve-t-il la pierre philosophale ? Son creuset ne fournira d’or qu’autant qu’il en aura reçu. Qui donc, en fin de compte, accuser de notre détresse ? La nature ? Quelque sot ! Le Conservatoire est le coupable ; et c’est lui que nous dénonçons, ce Conservatoire de déclamation dirigé par un compositeur de musique. Il y a deux ans déjà, nous avons signalé le mal : s’aperçoit-on qu’il est temps d’y porter remède ? Pour ma part, après l’examen que j’ai fait de l’état des classiques, au nom desquels la Comédie-Française et l’Odéon reçoivent un subside, j’en avertis M. le ministre des finances, si le Conservatoire n’est pas prochainement réformé, je refuse l’impôt.