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Ces lettres sont extraites des dossiers de correspondances passives et actives de Jean Paulhan. Elles s’inscrivent dans deux tranches chronologiques :
1925-1936, années pendant lesquelles Jean Paulhan a été nommé rédacteur en chef, puis directeur de La Nouvelle Revue française,
1950-1958, années de redémarrage de La NRF, après l’interruption de la fin de la guerre et de l’après-guerre…
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Ont participé à cette édition électronique : Clarisse Barthélemy (Responsable éditorial), Camille Koskas (Responsable éditorial), Thomas Bleton (Transcription) et Anne-Laure Huet (Édition TEI).
par suite d’une erreur de ma part, je me vois obligé de rétablir 26 lignes (ce qui ne
ferait encore que 31 pages ½.) J’écris à ce sujet à Paris, mais crois bien faire en vous
informant par le même courrier.
Croyez à ma désagréable surprise et à mon meilleur souvenir
placard 2, page 8, je mets donc sans guillemets : dans son Béarn, dans
sa Bretagne.
en haut du placard 3, nous supprimons le titre et passons à la ligne sans
aucun blanc.
à la 2e page du placard 3, je voudrais que flétrissent fût un peu en retrait par rapport à la ligne qui précède.
placard 4, page 3, note 1, la parenthèse est donc : (Girsy, Le Christ et la
Patrie, solo fine.)
Voudriez-vous bien indiquer mon intention, si je ne l’ai pas fait assez, dans le placard
4, page 7, note 1 : et dans la note qui termine l’article ; et, d’une manière générale, où
j’ai mis des croix au crayon rouge ?
Merci et bien cordialement vôtre
Julien Benda.
Je compte rester ici jusqu’au 27 ; peut-être aurai-je d’ici là les épreuves de l’article
suivant. Voudriez-vous me rappeler pour quelle localité vous comptez partir ([ainsi ?]
pourrions-nous combiner une conjonction et nous [voir ?]).
Si vous voyez quelque observation* à m’adresser, voulez-vous la marquer sur ces épreuves
et me les envoyer ? Je vous les renverrai par retour du courrier. Sinon, puis-je vous
demander de faire en sorte que les nouvelles secondes épreuves soient à la
Revue le 10 septembre r. de l’Assomption ? Je passerai alors par Paris, et rectifierai
quelques références.
J’espère ne point pâtir de ne point revenir à la fin de ce mois comme je vous l’avais
dit, si ce n’est que je manque le plaisir de passer une heure avec vous.
Votre cordialement dévoué
J.B.,
Julien Benda à Jean Paulhan (1er septembre 1927) §
Je viens d’envoyer à Abbeville plus des ¾ de mon dernier article. Je crois qu’il faudra
encore compter – oserai-je ajouter : au moins ! – sur 32 pages. Je suis
confus de mon indiscrétion. J’ai terminé par 6 propositions, en forme d’appendice, qui
résument toute ma pensée sur le sujet ; mes amis disent que c’est très bien .. Je
rentrerai à Paris à la fin de la semaine : j’espère vous y voir bientôt et vous montrer
votre article de Commerce du point de vue que vous savez. Je n’ai pas
ici cet article, mais me souviens qu’il contient un « par contre ». Cette expression est
très attaquée par les puristes .. Enfin, je me surprends à abuser du renversement des
rôles, qui me permet d’écheniller votre texte. Calmons-nous.
par suite d’une mienne erreur dans le remaniement de mes épreuves, je me vois obligé de
rétablir un alinéa de 26 lignes. Je crois que cela est encore possible (32 pages), puisque
la surpême limite que m’indiquait M. Paulhan ne serait pas atteinte en rétablissant cet
alinéa. Voudriez-vous avoir la bonté de me donner réponse touchant ce point, avant que je
retourne les épreuves à la maison Paillart ?
Croyez, Monsieur, à l’assurance de mes sentiments distingués
veuillez considérer comme non avenue ma lettre d’il y a trois jours ; je rétablis
l’alinéa dont j’ai besoin mais je supprime par ailleurs l’équivalent. – Et j’expédie à
l’imprimeur.
Excusez toute cette paperassie [paperasserie] et croyez-moi toujours bien vôtre
voici encore ma manie du scrupule qui vient vous importuner. Soyez indulgent.
Voudriez-vous, au troisième alinéa de l’article (« les traits, osons le dire etc .. »),
faire composer :
.. ; ils sont des formes de son agrippement à la vie, de sa douleur d’en être dépossédé,
de son application à jouir du moi, de cet individualisme effréné dont la génération de la
Marne et de Verdun semble assez bien exempte.
Enfin, avant l’avant-dernière astérisque, après la citation en petits caractères, au lieu
de
Je vous le dis : il n’y a que les démons …, voulez-vous mettre : Convenez-en : il n’y a
…
Encore mille excuses et croyez à mes meilleurs sentiments
je vous avais dit, en effet, il y a qq semaines, que je craignais que
mon premier article fût plus long que les 2 autres, alors que ce que j’avais à traiter
dans ces 2 derniers était beaucoup nouveau et plus important. Je me réjouis que ce manque
de proportion ne se soit pas produit, mais je vois que le secrétaire de rédaction s’en
réjouit moins. Laissez-moi espérer que vous changerez de sentiment en voyant l’article,
dont je ne crois pas me tromper en pensant qu’il dit vraiment des choses nouvelles par
rapport à la T. des C. [Trahison des Clercs] et propres à frapper le lecteur – notamment
dans la défense que j’ai faite de ma position quant à la question de la responsabilité de
la guerre. – D’ailleurs, j’ai encore l’espoir que ce que va nous renvoyer Paillart fera un
peu moins long que je ne vous l’ai écrit. Excusez mon indiscrétion, et croyez au grand
plaisir que j’aurai à vous revoir donc dans une dizaine de jours.
je voudrais bien revenir à Paris – pour causer avec vous des deux derniers articles de la
Fin de l’Eternel et de l’article que vous avez bien voulu m’envoyer –
le plus tard possible. Auriez-vous la bonté de me dire quand serait ce
« plus tard possible ». Je crois que ce pourrait être le 11 août. Nous enverrions alors à
la Abbeville une copie sur les épreuves de laquelle je ferais peu de retouches.
Merci de l’aimable offre que vous me faites d’aller vous visiter à Port-Cros. Croyez bien
que j’en userai l’an prochain, si mes adversaires me laissent encore en vie.
A bientôt, et avec mes meilleurs souvenirs J.B.
Puis-je vous prier de transmettre mes respectueux souvenirs à Madame Pascal. –
Je souhaiterais beaucoup, quand je vous reverrai, d’avoir la référence de cette pensée de
Taine, dont vous me disiez que votre père vous la donnerait.
Ci-joint la rédaction que, selon votre conseil, je crois qu’il convient de donner au
second alinéa.
Vae Victis !
J.B.,
Les Libres Propos m’adressent, dans leur numéro d’avril, [mot biffé
illisible] sous la signature [deux mots biffés illisibles] de MM. M[ichel] Alexandre,
directeur de cette revue, et A.Canguilhen, auteur de l’article dont je m’étais réclamé,
une lettre où les écrivains protestent contre ce qu’ils appellent ma « traduction » de
cet article. Je placerai sous les yeux de mes lecteurs le texte dont je fis
état : j’avais fait état :
je vous propose donc de faire mettre sur la Couverture de Septembre
SCHOLIES
par Julien Benda
Je compte que mon deuxième « scholie » serait à propos sur du livre de
Mauriac. (Je vous enverrai prochainement la note sur le livre de l’abbé Houtin)
Chaque scholie aurait environ la dimension du dernier que je vous ai remis; j’espère
pouvoir compter, pour chacun d’eux, sur les émoluments qui, grâce à vous, seront dévolus à
ce dernier. – J’en ferai, au moins, un tous les deux mois.
Si vous avez quelque chose à me dire touchant ces points ou d’autres, écrivez-moi :
chez Mr le Dr Bosquet. Coutances. Manche.
(je vous prierais aussi de me faire envoyer à cette adresse les épreuves de « Sur la
pensée bourgeoise. »)
J’espère que vous passez d’excellentes vacances et vous prie de croire, ainsi que Mme
Pascal, à mon meilleur souvenir.
Votre J.B.
Dans les Nouvelles littéraires prochaines, un mien article qui, je crois, vous
agréera ; c’est un conjugué de la « Note sur la réaction. » Ceignons les reins !
je renvoie à Paillart avec un ajou [sic] à la dernière note (E[rnest] Seillière sur
Balzac ; citations de Seillière extraordinaires.) |Peut-être cela fera-t-il une page de plus ?|
_________________
Je n’ai rien reçu encore quant à la Note sur la Réaction. Serait-ce la Conspiration du
Silence ? Mais je l’ai toujours crainte depuis 2 ans ..
____________________
Dans le prochain numéro il serait peut-être bon de signaler :
Dans les Libres Propos de juillet, une controverse entre Mme Jeanne
Alexandre et MM. D[aniel] Halevy et L[ouis] Guilloux au sujet du choix de lettres de
Proudhon publié par ces derniers. (Ils y sont accusés et apparemment convaincus d’une
singulière partialité.)
je reçois de Paillart une lettre datée du 12 où il me dit n’avoir point reçu ma note
Houtin-Sartiaux. Ne l’auriez-vous point reçue vous-même (je l’ai fait mettre à la poste
par la NRF le 6 août) ? ou bien, l’ayant reçue, ne l’envoyez-vous pas à Paillart pour
quelque raison ?
Je travaille à l’Infini, qui, je crois, troublera mes contemporains au
moins autant que la Trahison des clercs. Je suis heureux de savoir que
vous vous êtes remis aux Fleurs de Tarbes, d’autant plus que, cette
fois, vous traitez, je crois, des idées ou de l’absence d’idées de Bergson.
Je reçois beaucoup de lettres relatives à la « Note sur la réaction » (quelques-unes vous
amuseront.) Mais je ne sais rien des journaux. Retour à Paris vers le 15. Et vous ?
je n’ai jamais vu les épreuves de ma note sur Houtin ? Va-t-elle donc paraître sans que
j’en aie vu les épreuves ? Je tremble. Enfin, vous les avez vues et corrigées.
J’ai fait 3 « lettres à un jeune monarchiste », dont une au moins, entièrement inédite,
pourra vous intéresser en tant que directeur de la NRF. – Je parlerai du silence de l’A.F.
[Action Française] dans mon interview par Lefèvre, dans quelques semaines. – Faites-moi
savoir dès que vous le pourrez la date de votre retour.
quel excellent numéro (outre les artices de J.B. [Julien Benda]) Le Rostand est
excellent, et aussi le Schlumberger, les Arland. (Fernandez toujours défend sa peau, avec
son ev rationalisme évolutif dont on ne saura jamais s’il est évolutif parce
qu’il change d’objet ou parce qu’il change de nature.)
Je rentrerai vers le 20, et peut-être vous trouverai à Paris.
Après avoir qualifié cette lettre de « boutades d’un logicien solitaire qu’il
dont il n’eût pas trouvé « tout à fait loyal » de faire état dans son livre, M. Halévy la
commente ainsi : « L’essentiel etc..
Je suis tout aussi philosophe quand je polémique. Je ne puis souffrir ces admirateurs qui
font des distinctions. D’ailleurs, je ferai un scholie à leur adresse.
Meilleurs sentiments pour tous deux.
J.B.
Les 2 premières parties du « discours cohérent » sont faites et tapées. Elles font 30
pages (très pleines) de dactylographie. Comment causer un moment avec vous d’ici le 10
septembre ? N’aurez-vous pas l’occasion de passer quelques heures à Paris ?
IMEC, fonds PLH, boîte 100, dossier 095052 – juin 1930.
[fin 1930]
Adresse
jusqu’à Vendredi :
[adresse barrée remplacée par :]
chez Mlle N. Duys
Klatteweg 22
La Haye.
Cher ami,
voici la lettre note. – Elle ne me satisfait pas encore tout à fait, (ainsi je
dois trouver moyen de dire que nier les articles de 1872 était avantageux pour H.
[Halévy]. – Enfin, envoyez-la à l’impression. Je reviendrai le Lundi 17
et ferai les changements. – Etes-vous d’avis à la ligne 9 de la page 2, de
d’imprimer
périrait
Sans doute, oui ; puisque je préviens que je vais souligner tout ce que
H. [Halévy] a retranché !
Cordial souvenir à tous deux
J.B.
et faut-il terminer comme je fais, ou par :
il la répète dans son commentaire et la souligne
Le plus bref est peut-être le mieux, et ne pas avoir l’air de s’acharner.
je renvoie donc l’article à M.A. [Michel Alexandre] – Si toutes les objections qui
m’attendent sont de cette force, l’avenir est bon. – Les deux premières parties du Discours cohérent seront finies dans quelques jours.
Très heureux des bonnes nouvelles que vous me donnez de vous deux.
puis-je vous prier de ne pas oublier de dire à Ramon F. [Fernandez] que je lui ai envoyé
mon Discours, avec prière d’indulgence pour la « propreté de mes
mains » ?
Et puis-je vous dire combien j’aimerais vous voir talonner Cremieux pour que la Revue
mette le lecteur au courant des incroyables déformations que Massis fait subir aux textes
pour les besoins de ses passions ? (Après tout, avons-nous besoin, pour cela, de
Cremieux ?)
voici ce que je vous disais ce matin au téléphone et que vous paraissiez ne pas
entendre.
Il se pourrait que Gaston G[allimard] vous réponde, quand vous lui soumettrez mes
projets : » Le traité de Julien B[enda] expire en mars 1933 ; nous verrons à cette
époque-là. » C’est précisément la réponse que je voudrais éviter car il m’est très
difficile de travailler avec la perspective que la vie matérielle peut cesser de m’être
assurée en un si bref délai. O affreux besoin – bourgeois – de sécurité. (A dire dans mes
Mémoires.)
j’apprends qu’il va paraître prochainement un ouvrage de Meyerson : « le cheminement de
la pensée. » Voudriez-vous me réserver la note, - qui sera peut-être un scholie.
Meilleurs vœux de séjour à tous deux, et avec mon plus cordial souvenir à votre jeune
ménage.
je compte rentrer la semaine prochaine. Je crois que vs serez content de mon Renouvier,
du moins de certaines parties. J’aurai encore beaucoup à y retoucher.
La lettre de votre père m’impressionne, par son refus absolu de reconnaître l’improbité
fondamentale de H. [Halévy]IV – improbité [mots biffés illisibles] inspirée par un
fanatisme politique, qui me semble imprégner tous ses écrits, encore qu’il soit le plus
souvent insaisissable, moins peut-être par calcul de l’auteur que par la nature de son
esprit. (Ce fanatisme n’est d’ailleurs nullement « insaisissable» à ceux qui ont étudié
pour leur compte connaissent les sujets traités par H.: consulter Guéhenno au
sujet de MicheletV, R[obert] Dreyfus au
sujet des débuts de la 3ème Rép., Mme J[eanne] Alexandre au sujet de
Proudhon .. Un professeur d’histoire moderne, que je rencontre ici, fidèle lecteur de la
N.R.F., me dit que ce que j’ai relevé dans sa transcription de la lettre de Renouvier est
constant chez H. (Il m’en enverra [biffure] de nombreux exemples ; rassurez-vs, je n’en
ferai rien pour la revue ; [biffure] elle en a assez comme cela.)
Un dernier mot sur le fameux périrait – périra. S’il
me souvient
[suite sur carte postale « Leysin en hiver »]
bien, H. termine son commentaire (nov. 1930) ainsi (il le dit mieux) : L’essentiel (pour
R. [Renouvier] et son école ce n’est pas la France; l’essentiel c’est de tenter sur la
France une expérience et d’amener un peuple superstitieux, un peuple sensuel et sans mœurs
au régime de la moralité totale, de la bonne volonté pure. Au pis-aller, la
France périra comme nation .. (souligné par H.), qui ajoute aussi les 2
points.)
[Je me permets de poser à votre pèreVIla question suivante :
[ L’effet n’eût-il pas été incomparablement moindre considérablement moindre
(et H. ne le savait-il pas) si le mouvement se fût terminé par Au pis-aller,
la France périrait comme nation ..
C’est la différence du spéculatif et de l’implacable,
laquelle semble très perceptible.
Et puis, en y réfléchissant, j’aime bien mieux ne poser aucune question à votre père,
mais m’entretenir avec lui des sujets où nous sommes d’accord, et qui sont nombreux et
autrement importants.
la triste nouvelle me surprend peu, vu ce qui se passait depuis trois jours et ce que
m’en disait le docteur Le S[avoureux].
J’ai l’impression que vous étiez profondément uni à votre père et que sa mort vous doit
être une très dure épreuve. Croyez que j’y compatis de toute mon amitié.
Vous dirai-je mon deuil de philosophe ? ma tristesse de penser que disparaît un des rares
survivants de l’esprit libre et clair ? de penser que je l’ai connu si tard ?
je vous écris des Charentes, d’où je n’ai pas bougé, contrairement à ce que je vous
annonçais dans ma dernière lettre. Laboris causa, car je suis pour le
moment à vingt-quatre heures près. Depuis ma dernière lettre, j’ai reçu une réponse de la
Revue de Paris, qui, ayant lu ma première partie et mon plan, accepte
l’ouvrage. J’ai tout de suite répondu pour prendre date ; cela fera quatre numéros ; je
voudrais commencer le 15 novembre ; je n’ai pas encore reçu de réponse, mais, si je
commence en effet à cette date, il me faut immédiatement remonter à Paris et m’enfermer
quinze jours dans une bibliothèque (j’ai écrit à un jeune agrégé d’histoire pour
(il me faudra pendant ces quinze jours un jeune spécialiste, licencié ou agrégé
d’histoire, comme secrétaire ; j’ai écrit dans ce sens à plusieurs personnes ;
verriez-vous quelqu’un ?) – Si la Revue de Paris ne peut commencer à
cette date et si j’ai du répit, ne fût-ce que quinze jours, alors mes projets changent ;
je pourrais, si cela ne vous dérange pas, vous arriver le 5 ou 6 septembre, peut-être un
peu avant, et remonter à Paris vers le 15 ; peut-être j’ai idée que vous ne
rentrerez qu’au début d’octobre. Voulez-vous me dire si cette perspective vous convient ?
Pour moi, j’en serais très heureux.
Je vous envoie ci-joint une note sur un ouvrage relatif à la Politique
ecclésiastique du Second Empire ; j’aimerais, si elle vous convient, que vous la
donniez le plus tôt possible ; mais tous les auteurs vous parlant ainsi .. J’ai reçu,
relativement au D[iscours] cohérent, une curieuse lettre de J[ean]
Wahl ; je vous l’envoie et aussi la réponse que je lui adresse. Je songe à publier cette
réponse sous le titre de lettre à un bergsonien, en y supprimant, bien entendu, ce qu’elle
a de trop personnel ; en la joignant à une ou deux autres adressées sur le même sujet, à
des adversaires de tout autre direction, cela pourrait faire un bon scholie. Si je dois la
publier, peut-être jugerez-vous qu’il vaut mieux ne pas l’envoyer à J.W. [Jean Wahl]. Je
m’en remets entièrement à vous.
Nous n’avons eu ici que de la pluie. Pour moi, cela m’est absolument égal ; je ne quitte
pas ma table de travail. Mais je pense que vous prenez, vous, de véritables vacances et
que le plein air vous a été possible. Meilleur souvenir à tous deux, et combien je serais
heureux de pouvoir bientôt passer quelques jours avec vous.
pourriez-vous, si vous l’avez gardée, me rapporter la lettre que je vous écrivis d’Ecosse
et où je vous exposais mes vues quant à un renouvellement de contrat. Je voudrais m’en
inspirer dans mon entretien avec Parain.
Je passerai à la revue Vendredi soir vers 6h.
Amicalement vôtre
J.B.
Je ne vous ai pas dit que j’ai été voir Meyerson, qui m’avait convié à lui faire
visite. Il m’a confondu par sa mégalomanie.
J’avais demandé à Paillart de me renvoyer mes épreuves après correction (c’était le 13 ou
le 14) ; je n’ai rien reçu !.
- Je travaille d’arrache-pied au Discours à la N.E. [Nation Européenne], ou plutôt aux
Discours. D’ici peu, je vous enverrai un plan détaillé.
Cher ami,
merci de votre réponse. – Je vous préviendrai au moins huit jours à l’avance de mon
arrivée ; mais, pour l’instant, je crois bien qu’elle n’aura pas lieu. Mais, enfin, rien
n’est encore arrêté, quant aux projets de mon chauffeur.
Je me rends à vos observations quant à Bainville. Le scholie ci-joint reste, comme vous
verrez, dans les généralités, hors de toute question de personnes – et s’applique aussi à
affirmer dès les premières lignes que je ne viens pas plaider pro domo.
Tout en restant dans le général quant au parti politique que j’étudie, je ne me bats
pourtant pas contre des moulins à vent, car Marsan et André Rousseaux ont, dans le Figaro, nettement incarné et à plusieurs reprises (Marsan très violemment)
l’attitude que j’évoque.
Si le papier vous convient, faites-le composer ; je développerai, en note, la citation de
Halphen, qui est très suggestive. (Aussi celle de Hugues de St Victor.)
La 2e partie me semble faire fonction de « notes » au sujet de
récents articles de revues historiques qui ont fait quelque bruit.
merci de votre bonne lettre. Ai-je besoin de vous dire que, si j’eus un petit mouvement
d’humeur, ce fut seulement contre les nécessités inséparables d’une revue qui ne paraît
que tous les mois, nullement contre vous, dont la bienveillance pour mes papiers m’est si
constamment prouvée.
les notes que je vous avais promises .. Vous voulez dire sans doute : une note sur le
livre d’Andler ; mais n’avions-nous pas décidé que, Thibaudet lui ayant consacré une
chronique, cette note devenait aléatoire ?. Quant au livre de Mme Marguerite … sur
Pindare, ne vous avais-je pas avoué que, dès l’instant que de grands journaux, comme vous
me l’appreniez, avaient chanté sa gloire, mes instincts de justicier rentraient leurs
griffes ? Reste la note sur le livre de Berl. Y tenez-vous encore, après si longtemps ? En
tous cas, je ne pourrais vous le donner que pour octobre, n’ayant pas emporté le livre.
J’espère bien ne pas vous mettre dans l’embarras par des malentendus.
Je vous remercie vivement de me tenir au courant de ce qui s’écrit sur mon Histoire ; sans vous je ne saurais rien et peut-être serait-ce dommage. Au sujet
de Bainville, je compte (pour le moment) faire un petit article dont je vous envoie
ci-joint le plan provisoire. – Article très court ; car, après tout, la mise à nu de l’âme
politique de ces messieurs mérite peu de développements.
_
Comme je suis toujours un phobique, ne me dites rien de mon plan relatif au début de mes
Mémoires. Peut-être me direz-vous qu’un plan n’est rien, et que tout
l’intérêt sera dans l’exécution.
_
J’ai achevé hier mon travail sur les tentatives d’unification de l’Europe depuis la fin
de l’Empire romain. Ce sera un de mes Discours à la nation européenne.
J’en vais commencer un autre, qui a pour titre provisoire : Erreurs et mensonges
pacifistes. – J’en médite ensuite un autre sur le problème de l’entente intellectuelle ;
je placerai là ce que j’ai à dire sur le procès de la clarté française que nous font les
Allemands depuis la Dramaturgie de Hambourg ; je veux aussi, m’adressant
aux Français, leur dire qu’il leur faut supporter l’irrationalisme anglais, par exemple,
cesser de mépriser tout ce qui n’est pas logique, etc.. Je me sens en passe de prendre un
ton apostolique, qui trancherait singulièrement avec tout ce que j’ai écrit.
je compte vous envoyer dans cinq ou six jours un scholie sur Gide, Mauriac et Barrès. Si
celui que je vous adressai il y a 8 jours (Politique et Histoire) vous convenait, nous ne
le publierions donc qu’en novembre ; ce qui serait bon en ce sens que j’aurais donc donné
auparavant une chronique où, même indirectement, je ne parle pas du tout de moi.
Mon ombre vous serait infiniment reconnaissante si vous pouviez obtenir de mes confrères
qu’ils ne me fissent point d’article nécrologique.
J’ai connu de la part d’à peu près tous, uniquement leur hostilité, leur colère,
leur violence malveillance systématique. J’entends rester sur ce traitement de
faveur et ne point subir les ménagements hypocrites, voire les petits
« éloges » que les convenances leur imposeraient nécessairement.
vous avez dû recevoir un article dactylographié d’un certain H. Serouya. – Je vous en
prie. Soyez aussi soucieux de ne point le perdre que de ne le point publier. –
Je pars demain matin pour Lyon. Vous me verrez sans doute Vendredi, probablement avec la
devise pugnandum est, en raison de mon dernier « Discours à la N.E.
[Nation Européenne] »
je reste ici jusqu’au 20. Ceci pour que m’y envoyiez les épreuves de ce que vous feriez
paraître en octobre et qui me concernerait : soit l’article de Le S[avoureux], que vous
voulez que je revoie ; soit mon scholie où j’ai qq changements (très légers) à faire.
Amicalement à tous deux
J.B.
Quand rentrez-vous ? Suis impatient de votre avis quant à mon Délice.
______
Dites-moi tout à votre aise votre sentiment sur la publication de ma déclaration
virtuelle devant le conseil de guerre. Pour moi, j’y tiens très modérément.
______
Je me suis logé dans la tête que le commencement de la note de Lanoë, faisant allusion
au « Discours oiseux » était pour moi .. Je me demande si je ne tourne pas au
mégalomane
je vois que Guéhenno (Europe 15 août) recommence : cette fois, c’est
contre Valéry. Il faudra décidément intervenir. Mais j’ai le temps, car il ne va plus
cesser de m’en donner l’occasion.
Pour l’instant, je suis tout à Ελεύθηρ et aux Mémoires. Excellente
performance. Et vous ?
Bien amicalement à tous deux
J.B.
Je prends bien aisément mon parti de voir retarder l’insertion de ma prose, puisqu’elle
est écrite pour l’éternité .. Je le prends beaucoup moins bien pour l’article de Le
S[avoureux] qui est si proprement d’actualité .. Ne peut-il pas précéder ceux de
Siegfried et de Lévy-Brühl ? Ceci inspiré par ma seule animosité contre Bergson.
Pour le prochain Eleuthère, j’aurai à insérer deux clichés (2 fois trois mesures de
musique.) Sera-t-il encore temps de vous les remettre vers le 6 ? Sinon, je les ferai de
mémoire et vous les enverrai tout de suite.
Le Temps, et quelques autres « qui veulent la lumière » s’indignent à
la pensée qu’on pourrait publier
à la pensée qu’on pourrait publier
le rapport Guillaume, acte « illégal » !.
Les anciens
Le Temps
Cet anci
oublie
Le Temps – qui pourtant fut dreyfusard – oublie que, dans l’affaire Dreyfus, la lumière
n’a commencé de poindre que le jour où le Siècle publia l’acte
d’accusation du Commandant d’Orch d’Ormescheville au dans le procès
de 1894 ; publication parfaitement éminemment illégale.
On a voulu enregistrer les cris des animaux. L’aigle, l’ours, le lion n’ont rien voulu
savoir. En revanche, l’âne s’est tout de suite mis à braire ; on ne pouvait plus
l’arrêter.
Je pense à mes confrères auxquels les journalistes porposent des questions. Les grands
répondent quatre lignes ; les petits envoient six colonnes.
J.B.
[Meeting de réformateurs]
Ces jeunes penseurs ne savent évidemment pas ce qu’ils veulent, mais ils le veulent
fortement et unanimement.
Je pense à ce dialogue de l’Ambigu : ou bien, à ce dialogue de mélodrame ?
On a voulu enregistrer les cris des animaux. L’aigle, l’ours, le lion n’ont rien voulu
savoir. En revanche, l’âne s’est tout de suite mis à braire ; on ne pouvait plus
l’arrêter.
Je pense à mes confrères auxquels les journalistes proposent des questions. Les grands
répondent quatre lignes ; les petits envoient six colonnes.
J.B.
Ces jeunes
[Meeting de réformateurs]
Ces jeunes penseurs ne savent évidemment pas ce qu’ils veulent, mais ils le veulent
fortement et unanimement.
J’envoie le double à Paillart [encadré au crayon rouge en haut de la feuille]
Eleuthériana.
Job pleure à la pensée que, si l’on frappait Mussolini
(J[ean]-R[ichard] Bloch ds un article de l’œuvre intitulé : « Pas un
coup de canon ! »), on frapperait le peuple italien qui est bon, qui traverse une crise de
démence dont il se remettra si on lui laisse le temps.
Ne tuez pas ce chien enragé qui va vous mordre ! Job vous assure que,
dans dix ans, il sera guéri.
x
Basile s’esclaffe du bellicisme des pacifistes .. Les voilà qui, pour
sauver la paix, veulent faire la guerre.
Figurez-vous, Basile, que, pour faire lâcher prise à un apache, cet
homme qui se dit « gardien de la paix » a tiré sur lui un coup de révolver ..
x
- C’est votre Société des Nations d’où vient tout le mal. Sans elle, l’Italie réglerait
ses comptes seule à seule avec l’Erythrée, comme nous le fîmes avec l’Algérie,
l’Angleterre avec l’Inde, et le monde ne serait pas en feu.
[marge de droite , encadré au crayon rouge] L[éon] Daudet
- Mais oui, Nestor. Et au diable foin de nos tribunaux, de
nos juges, nos lois, de notre « moralisme » ! Sans eux, un Stavisky
s’expliquerait en champ clos avec son gibier, et nous n’aurions pas de ces déplorables
« affaires », qui jettent la moitié de la France contre l’autre.
x
« Puisqu’on finit toujours par négocier, explique Pamphile au
condottiere romain, pourquoi ne pas commencer par là, au lieu de partir en guerre ?. »
[marge de gauche, encadré au crayon rouge] W[ladimir] d’Ormesson ds Figaro
Comme si on négociait sur le même ton après Iéna ou après Sedan.
Voilà pourtant ce que fait écrire l’esprit de conciliation.
x
Pamphile écrit encore : « A deux reprises, la S.D.N. [Société des
Nations] a trouvé moyen de ne point appliquer les sanctions, alors que son statut le lui
commandait. Pourquoi ne ferait-elle pas encore de même ? »
Pourquoi ? Mais parce que, ayant manqué deux fois à mon devoir, il peut arriver, Pamphile, que je n’y veuille pas manquer une fois de plus.
Julien Benda.
Voilà. Et modifiez à votre gré [bas de page, encadré, au crayon rouge]
Les Français aussi ont fait des guerres coloniales. Ils ne hurlaient pas leurs victoires,
ils ne pavoisaient pas la capitale, ils étaient plutôt modestes ..
– C’est un luxe qu’on peut s’offrir quand on a derrière soi Rocroy et Austerlitz.
je vous remercie d’avoir rétabli mon premier texte de Sporades, qui
valait en effet, bien mieux.
Je vois, en reprenant mon scholie, que la partie conservée par vous comporte encore les
trois notes que je vous envoie. (La première note toutefois me semble d’un intérêt
discutable.)
__
Thérive a consacré à mon Délice un grand feuilleton, qui me paraît de
nature à améliorer mes affaires avec la maison Gallimard. – Aurai-je un « Arland » pour
septembre ?
__
Je commence, pour le Dictionnaire philosophique de Voltaire, une préface qui va me
passionner à écrire ; elle consiste à prendre les principales idées politiques lancées par
V[oltaire] et à suivre leur fortune – et leur déformation – jusqu’à aujourd’hui.
Bien amicalement à tous deux.
J.B.
A Paris, jusqu’au 6 août.
En vieux militaire que je suis, j’ai un surcroît de respect pour Tatou depuis qu’il a
voulu dévorer Le S[avoureux]. – Et sans aboyer !.
IMEC, fonds PLH, boîte 100, dossier 095052 – août 1935.
[août 1935]
Vendredi
Cher ami,
vous avez tout à fait raison pour Gide ; j’ai écrit ce petit air du mois ab
irato, et n’y tiens plus du tout. – Voulez-vous me faire adresser les épreuves du
« Regards sur le monde passé. » ?
Martin du Gard m’a fait dans les N.L. [Nouvelles Littéraires] un grand article que je
crois de nature à nuire à mon Délice. Décidément l’ironie déroute
complètement les gens. Et il a des choses qu’ils n’admettent pas qu’on blague ; notamment
la famille et le patrimoine. Ne pourrais-je espérer un Arland prochain qui ferait
antidote ?
Votre séjour à Vittel doit tirer à sa fin. J’espère que vous vous en êtes bien trouvés.
Je pars Mercredi. Adresse :
IMEC, fonds PLH, boîte 100, dossier 095052 – août 1935.
[août 1935]
Suis ennuyé de ce que vs me dites de la difficulté de G[ermaine] à totalement se
remettre. – Elle travaille trop. – Et puis vs êtes tous trop jeunes pour aller bien.
Votre écriture est devenue beaucoup plus haute ? Mégalomanie ? Ou plutôt simple nécessité
d’être encore plus clair pour les typos.
__
Ne donnons-nous pas pour titre au scholie : « Regard sur le monde passé » ? (La récente
« publication » dont je fais état dans la 1ere ligne date maintenant
de 2 ans ½ ..) Vous pensez aux notes A,B,C .. n’est-ce pas ?
____________________
Si vs pouviez donner tout le scholie (12 pages ! ce serait mieux.
(J’écris à Paillart qu’ils m’envoient les 12 pages.) Si vs ne le pouvez pas, prévenez m’en
le plus tôt possible, car je ferais de la fin un article pr la Dépêche.
IMEC, fonds PLH, boîte 100, dossier 095052 – août 1935.
[août ?1935]
J’ai dû me faire beaucoup de tort avec mon texte de P.V. [Paul Valéry], et irriter une
fois ceux qui me reprochent de ne pas observer les règles de la confrérie.
C’est d’autant plus sot que le texte n’est décidément pas bien choisi ; la pensée qu’il
exprime n’est pas absolument banale et je pouvais, dans ses pensées son ouvre
trouv et dans les pâmoisons qu’elles suscitent, trouver mieux.
voulez-vs avoir l’obligeance de me dire si vs publiez aussi la fin de
mon scholie (à partir des derniers ***). Car si non, j’en ferai un article pour la Dépêche
et si oui, j’aurais à remanier cette fin. (J’ai, d’ailleurs, toutes les épreuves.)
je reçois hier au soir la mise en pages de mon scholie, sur lequel on n’a
pas fait les corrections que j’avais envoyées il y a huit jours, et que je n’ai
plus sous la mains. J’ai téléphoné ce matin. Ils disent ne les avoir point reçues, et que
j’ai dû vous les envoyer à vous ( ?) Enfin, je les ai refaites de mémoire, et ils auront
tout demain.
J’ai supprimé la phrase qui, en effet, devenait fausse ou du moins demandait beaucoup
d’explications depuis la surrection de La Roque. J’ai aussi modifié, dans les Sporades, la phrase que vous signalez.
Dans le passage qui fait allusion à la position de Péguy et Halévy, j’ai gardé seulement
le nom de H[alévy]. Il n’y a que lui, en effet, et nullement P[éguy], qui prétend avoir
été à la fois dreyfusiste et conformiste.
45 francs de téléphone !. Et puis-je espérer que, malgré le tarif convenu, ce long, très
long scholie, me sera exceptionnellement compté 400 fr ?
[Partie droite de la lettre]
Ramon F[ernandez]. qui devait parler de Délice d’Eleuthère dans
Marianne, ne veut le faire maintenant que moyennant un chantage, qu’il m’a fait proposer,
avant mon départ de Paris, par Roche et Berl (faire un article de Marianne sur les .Violents . qu’il ne m’a d’ailleurs pas envoyé.) Berl m’invite, toutefois,
à faire un article moi-même sur mon livre. Je l’ai fait et envoyé. Il s’appelle « Autopsie
d’Eleuthère », étant un scalpel assez poussé du personnage. Paraîtra-t-il ?. Il est dur
pour les hommes d’action !..
Ma presse est nombreuse et bonne. Mon meilleur article est de Porché dans le Jour !
cet André Rousseaux est stupide. Je n’ai pas raillé la pensée de Valéry, j’ai raillé ceux
qui le saluent de profond penseur en tant qu’il dit des vérités qui, de l’aveu de
R[ousseaux] lui-même, crèvent les yeux.
Ici on goûte beaucoup mes Sporades. Mais je ne vois que très peu de
monde .. Pour vous, j’ai le sentiment qu’on ne vous en parle guère et ou,
sinon, avec malveillance. Enfin, j’ai tout un développement, dans mes Mémoires, sur l’accueil fait à mes œuvres et l’explication de cet accueil. – J’ai
toutefois l’impression que Délice d’Eleuthère est bien parti. Avez-vs lu
l’article de Fernandez ? Je lui ai écrit pour le remercier, mais en lui demandant si Péguy
s’était mis « à côté » ou « en face » de Lavisse, de Rudler, de Blum ? et si Bergson s’est
mis « à côté » ou « en face » de l’associationiste ? Je médite un article qui aurait pour
titre : « La fin d’un genre » (la discussion.)
En attendant, je travaille assidûment à mes Mémoires. Lecture du 1er tome certainement avant la fin de l’année.
Bien amicalement à tous deux et ceux qui vous entourent.
IMEC, fonds PLH, boîte 100, dossier 095052 – septembre 1935.
[septembre 1935]
Air du mois [en haut et à gauche de la feuille de cahier]
Donc, Polémarque …
Donc, Polémarque, vous ne marchandez pas vos hourrah à l’éloquence
d’Hitler et voudriez que la France s’unisse à lui pour faire la guerre au bolchevisme.
Que haïssez-vous dans le bolchevisme ? La destruction suppression destruction
de la liberté ? La ruine de l’art ? de la civilisation ?. Toutes ces choses sont-elles si
brillantes en Allemagne et en Italie,
Parlez donc net. Ce qui vous terrifie dans le bolchevisme, c’est la destruction
suppression des
suppression des classes possédantes, c’est l’anéantissement des privilèges bourgeois,
dont vous savez bien que le fascisme, quoi qu’il dise, les maintient.
N’espérez pas trop. Vous dites à Blum que les ouvriers français ne vont pas se faire
casser la figure pour mettre au pas le fascisme italien, son ennemi personnel. Croyez
qu’ils se la feront casser moins encore pour arrêter le communisme russe, qui ne menace
que vos classes.
je parlerai donc du livre de Blondel dans un scholie. Comme apologie de la confusion
d’esprit, c’est incroyable. Et non moins inouï, l’article que lui a consacré Lavelle.
Avez-vous lu l’article de T[hierry] Maulnier dans sur Eleuthère dans la Revue Universelle ? Quatre lignes d’Air du
Mois en novembre lui seront dédiées, et à sa conception de la culture à la
houssarde [sic]. J’ai besoin pour les faire d’un texte que j’ai à Paris. D’ailleurs, il
vaut mieux attendre et ne point paraître bondir.
Il faudra aussi que je m’explique sur Samuel. Encore qu’à la réflexion
il n’est pas mauvais pour moi qu’on croie à une telle auto critique.
je n’ai pas commencé mon papier sur Blondel. Je le ferai donc probablement sur Blondel et
sur (Fernandez sur Blondel).
___
Alors, si je comprends bien, il va y avoir la moitié des exemplaires de la N.R.F. qui
contiendront Job et l’autre moitié non ?
Quand j’envoie à vous et à Paillart, mon dessein est que vous Paillart compose
mais que vous lui disiez, puisque vous avez la copie, s’il doit mettre en page. Je n’ai
jamais pensé qu’il pût mettre en page sans avoir votre avis.
Job est féroce, selon vous, pour l’Italie. Point pour Job, que personne ne songera à identifier.
voulez-vous me rapporter demain à la revue la feuille du livre de Henriot, que je vous
envoyai hier avec mon papier ? J’en aurais besoin pour corser davantage, comme vous m’y
conviez, ma riposte.
dans mon papier sur : De la famille, du patrimoine, etc. voulez-vous mettre :
Bourget a écrit que la supériorité valeur mentale de Pasteur venait, en
partie, de ce qu’il sortait d’une famille terrienne du Jura (Figaro, 24
décembre 1930 : « Notes sociales. »)
au lieu de ma dernière phrase (sur le reptile), mettons :
Je laisse au lecteur l’appréciation des procédés mœurs littéraires.
Cela ira-t-il ainsi ?
[entouré à droite] la branderaie par Jarnac encore 10 à 15 jours.
Je crois que P.L. me répond par coq à l’âne quand il me dit que la République reconnaît
l’hérédité du patronyme. En tous cas, vous ne nierez – ni personne – que les Maurras,
Halévy, etc.. se plaignent que la Rép. ne reconnaisse pas l’hérédité. Il
faut qu’on me dise de quoi ils se plaignent, sinon de ce que je leur
fais dire. Et Maurras ne se plaint-il pas constamment que le chef de l’Etat soit électif et non héréditaire, comme le roi ? – En quoi la
répil P.L répond-il à cela ?
P.L. devait me répondre : « M.B. [Maurice Barrès] déclare que nous voulons que la
R[épublique] prenne ses chefs d’office dans la bourgeoisie. C’est faux. » (C’est ce que
vous me dites.) Me répondre, comme il fait : « La R. respecte les patronymes », c’est
parfaitement un entretien de coq à l’âne.
La réponse de P.L. ne consiste pas du tout à me dire comme vous semblez le croire :
« Nous Vous avez tort de prétendre que nous reprochons à la R. de ne pas
reconnaître la classe-élite ». Elle consiste à me dire : « La R. le
fait », et vous nous prêtez, pour les besoins de votre cause, un mécontentement que
nous n’avons pas !! » Il me reproche nullement d’avoir dit que, selon le démocrate, la
classe-élite doit être privilégiée ; il me reproche de dire qu’elle ne l’est pas et que le
réactionnaire s’en plaint !...
Pour terminer l’avant-dernier alinéa
Il paraît que l’Action Française ne reproche pas au chef de l’Etat
démocratique d’être électif, alors que la royauté est héréditaire!. Au surplus, si le
reproche grief que les antidémocrates font à la République parce qu’elle ne
reconnaît pas l’hérédité n’est pas celui que je dis, j’attends qu’on me dise ce qu’il est.
Car on ne niera pas qu’il lui en faut un.
___
Voulez-vous m’envoyer les épreuves ?
Je vous les retournerai par courrier, et vous en ferez ce que vous jugerez bon.
A tous deux
J.B
Encore un mot.
Mauriac (le docteur), quand il déclare scandaleux que l’instruction soit gratuite, que
veut-il dire sinon qu’elle doit être le monopole de ceux qui peuvent payer ?
Et qu’est-ce que signifie leur campagne contre l’Ecole Unique ? (voir
le Figaro.)
je vous serais infiniment reconnaissant de publier cette note telle quelle. En lisant
attentivement la note de P.L. (comme je vous remercie de m’y avoir contraint), je
m’aperçois qu’elle est d’une insigne bassesse.
Une dame, très admiratrice de mes Mémoires (ceci se passe chez votre collaborateur
J. Delamain) me dit : « Ne vous étonnez pas de l’exaspération de maint fidèle de la N.R.F.
Votre œuvre est un soufflet continuel aux séides de l’inquiétude. » Elle
ajoute : « C’est-à-dire à toute l’humanité moderne. »
encore une fois, indiquez-moi qq jours à l’avance votre passage par Paris. J’ai des
choses à vs communiquer soumettre quant à vos dernières « fleurs ».
Peut-être ne pourrai-je pas vous lire ma fin. Je vais l’envoyer à Paillart, qui me la
rendra dès que possible, car je veux donner le tout à la fabrication avant mon départ.
je vous verrai donc à Paris le 14 et vous soumettrai mes coupures de mon article de
novembre.
Le mot de Gide m’a inquiété. Vous me l’avez communiqué surtout, je pense, pour me montrer
combien son esprit est curieux. Mais je me suis mis dans la tête qu’il est grave pour moi
qu’il ait envisagé que la NRF se séparait de moi, et que vous croyez bon de m’en avertir,
pour que je ne sois pas pris en traître. J’aimerais que vous me donniez votre franc avis
sur ce point.
Quant à un esprit qui trouve que je manquerais d’autant plus qu’on ne s’apercevrait pas
combien je manquerais, j’avoue peu l’admirer et ne pas sentir la justesse de « d’autant
plus. » Mais ne me donnez pas le mot pour l’ « admirer », sauf au sens latin.
L’« exaspération » de certains amis de la NRF devant ma Jeunesse me
semble toujours inexplicable. – Je dois dire qu je vois aussi des enthousiastes.
j’ai envoyé à Bussières ce qu’il avait déjà composé en placards ; avec mes ajouts et
corrections, cela doit faire 26 à 27 pages. Je vais [mot biffé illisible] vous envoyer à
Paris dans 3 ou 4 jours une suite, qui fera une dizaine de pages encore de la revue. Je
vous prierai de les lui adresser [mot biffé illisible] pour qu’il les compose. Puis nous
verrons où nous ferons la coupure.
Amicalement à tous deux.
A Vaux (Ch. inf.) demain.
[ajout entouré] enverrai notes parues sur l’Espagne