Correspondances écrites et reçues par Jean Paulhan (1925-1936 et 1950-1958), éditées en collaboration avec l’Institut Mémoires de l’édition contemporaine (IMEC, Caen) et la Société des lecteurs de Jean Paulhan (SLJP).

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Ces lettres sont extraites des dossiers de correspondances passives et actives de Jean Paulhan. Elles s’inscrivent dans deux tranches chronologiques :

  • 1925-1936, années pendant lesquelles Jean Paulhan a été nommé rédacteur en chef, puis directeur de La Nouvelle Revue française,
  • 1950-1958, années de redémarrage de La NRF, après l’interruption de la fin de la guerre et de l’après-guerre…

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Ramon Fernandez

1926/1935

Ramon Fernandez à Jean Paulhan

Correspondance (1926–1935)

2016
Université Paris-Sorbonne, LABEX OBVIL, 2016, license cc.
Source : IMEC, fonds PLH, boîte 138, dossier 021367
Ont participé à cette édition électronique : Clarisse Barthélemy (Responsable éditorial), Camille Koskas (Responsable éditorial) et Amaury Nauroy (Transcription).

Ramon Fernandez à Jean Paulhan (14 juin 1926) §

IMEC, fonds PLH, boîte 138, dossier 021367 – 14 juin 1926.
Mon cher ami,

Je ferais beaucoup pour vous contenter. Pourtant le théoricien de la résistance personnelle ne peut céder [ainsi?], au premier choc. Encore faut-il qu’il se reconnaisse convaincu. L’allusion aux théories de la violence ne m’est point venue en rêve. Ce problème me préoccupe, et quelques autres avec moi, depuis longtemps : les élèves et disciples de Vilfredo Pareto, peu nombreux en France il est vrai, comprendront fort bien qu’un essai sur Bourget dénonce la justification. Si je ne puis m’émouvoir sans détonner, alors je vous propose la version suivante : « … vous ont mis en garde contre la justification rationnelle, émotive ou morale. Il nous répugnerait d’être récompensés, ou satisfaits, ou de faire passer l’affirmation d’un instinct pour la conclusion d’un raisonnement. » - Mais vraiment je ne puis supprimer la remarque, ou déclaration. Voyez et faites-moi profiter.

J’espère que la note de du Bos pourra passer dans le numéro de Juillet. Il s’est donné beaucoup de mal pour la terminer à temps.

En somme, Août est une bonne date pour le Bourget : vacances, plus de temps.

très amicalement,

Ramon Fernandez

Ramon Fernandez à Jean Paulhan (1927) §

IMEC, fonds PLH, boîte 138, dossier 021367 – 1927.
Mon cher ami,

Ouf ! Heureusement que mon grand-père et mon père étaient dans la diplomatie ! J’aimerais beaucoup que cette note fût signée par Jean Guérin. A vous la décision.

A bientôt (Jeudi ou Vendredi)

Affectueusement,

R F

[de la main de Jean Paulhan : « Tamatave – ill. par Cholet »]

Ramon Fernandez à Jean Paulhan (24 septembre 1927) §

IMEC, fonds PLH, boîte 138, dossier 021367 – 24 septembre 1927.
Mon cher ami,

Je suis bien content que vous soyez installés, quelques puissent être les troubles et les fatigues que mon expérience prévoie pour vous encore. Je serais allé vous visiter si la vigilance paternelle – d’ailleurs fort douce – ne me retenait ici. A ce propos, le docteur insiste vivement pour que la jeune Irène reste sous le soleil qui l’a vu naître au moins jusqu’au 20 Octobre. Je serai donc forcé de manquer votre première réunion. Je vous prie de m’excuser d’une façon sentie auprès de nos amis.

Les Supervielle aiment Aix où nous avons passé de bonnes heures ensemble à Pâques. La ville est sur votre chemin. Si vous passez, envoyez-moi un mot pour me dire l’heure et je pourrais vous rencontrer à l’hôtel Sextius ou ailleurs. (Les S. ne connaissent pas le chemin du Couffin.)

Je vous envoie à tout hasard l’essai de Brunschwicg, que je trouve toujours fort intéressant. Vous recevrez dans quelques jours un petit essai de moi que j’ai communiqué à Pontigny. M. Desjardins m’écrit à ce sujet : « si j’étais directeur de revue, je ne reculerais devant aucun sacrifice pour publier un pareil morceau. » Je m’excuse pour cette citation, destinée à justifier mon envoi..

Je vous « espère » et vous assure tous les deux de mon affection,

Ramon F

Ramon Fernandez à Jean Paulhan (27 septembre 1927) §

IMEC, fonds PLH, boîte 138, dossier 021367 – 27 septembre 1927.
Mon cher ami,

Voici le morceau en question. Il me semble que s’il vous convient, il pourrait être assez opportun à l’époque du « centenaire ». La note sur Approximations va suivre – je l’envoie à la N. R. F. – puis quelques notules ( !)

Seriez-vous assez gentil pour me rappeler le nom et l’adresse du professeur allemand qui veut de moi à Berlin en Décembre ?

Affectueusement,

Ramon F

Je suis frappé du rapport entre certaines idées de cet essai et Les Fleurs de Tarbes, [ou ?] la façon de détruire les moustiques.

Ramon Fernandez à Jean Paulhan (1er octobre 1927) §

IMEC, fonds PLH, boîte 138, dossier 021367 – 1er octobre 1927.
Mon cher ami,

Je suis dans une telle confusion que j’ose à peine prendre la « plume ». J’ai trouvé votre dépêche au retour d’un petit voyage dont le but avait été de ramener M. Desjardins qui venait nous rendre visite après un séjour à Roquebrune. Je me suis mis aussitôt au travail et je vous envoie cette après-midi la note sur du Bos, qui sera, je le crains, aussi « précipitée » que la sienne sur Messages.

Nous quittons le Couffin le 19 ou le 20, et pensons être à Sèvres Samedi au plus tard. Dès Lundi, je serai à votre disposition. Samedi au lieu de Vendredi, car notre jeune Irène a manifesté des troubles digestifs peu graves mais qui appellent quelques précautions.

Nous avons regretté de vous manquer au retour, mais j’espère que nous ne vous manquerons pas à Pâques. (Votre carte collective était datée de Tournus : avez-vous, au moins, rendu visite à Thibaudet ?)

J’ai la tête farcie de projets que je vous soumettrai. J’aime décidément beaucoup les Hommes de la Route. Le Benda vaut par les principes ou les questions soulevées, mais pêche par les exemples et l’esprit de la dialectique. Il ne marque aucune distinction entre, et donc confond perpétuellement, les idées qui ressemblent à l’intelligence, et les idées produits de l’intelligence, et qui peuvent ne pas lui ressembler. Que diriez-vous d’une chronique lui répondant dans ce sens ?

Affections de nous deux à nous deux,

Ramon F

Je suis bien heureux que l’Esprit classique vous plaise. Je pourrai détailler un peu. Si par hasard vous pouviez le donner dans le n° de Février cela me remplirait d’aise, car il fait partie de l’Essai sur l’Humanisme qui doit paraître au printemps.

[de la main de Jean Paulhan : « écr. Champion »]

Ramon Fernandez à Jean Paulhan (1928) §

IMEC, fonds PLH, boîte 138, dossier 021367 – 1928.
Mon cher ami,

Il m’est vraiment impossible de vous donner des notules pour le prochain numéro. Un article assez difficile sur [G. Moral ?], la rédaction de ma conférence sur les intellectuels et la vie sociale, la composition du 5è cahier de M. P. et enfin ma vie de Molière occupent tout mon temps cette semaine. Si je puis vous apporter mercredi une ou deux notules, je le ferai, mais j’en doute.

Le manuscrit que vous m’avez envoyé ne me paraît pas intéressant : beaucoup de démonstrations, qui sont des annonces, et rien de positif. En gros le langage et de minuscules idées.

Je crois qu’un ou deux passages du livre de la pr. Bib. méritent de paraître dans la revue. Deux ou trois lettres de Pr. admirables, et une très jolie page de critique.

Affectueusement,

Ramon Fernandez

Ramon Fernandez à Jean Paulhan (5 août 1928) §

IMEC, fonds PLH, boîte 138, dossier 021367 – 5 août 1928.
Mon cher ami,

Votre carte vient de me rejoindre à Biarritz, où je suis pour affaires franco-espagnoles. Hélas ! la chaleur surréaliste nous a obligés à retarder notre départ pour Aix, à cause de la jeune Irène. Au moins aurai-je le plaisir de vous voir dans quelques jours. Peut-être voudrez-vous venir tous les deux dîner à Sèvres, avec Benda ou avec Arland ?

Cher ami, je pis, comme tous les auteurs, souhaiter de voir mes écrits paraître, mais les sentiments que je nourris pour la Revue, et pour son directeur de fait, sont beaucoup plus importants qu’une impatience professionnelle. J’espère seulement qu’il sera possible d’assurer aux Essais une périodicité plus courte, mais seulement quand le mécanisme de la Revue le permettra. J’ai d’ailleurs été assez satisfait de la note sur Proust, qui me semble de quelque utilité. Je compte, à l’avenir, accentuer la « note » personnelle de cette chronique.

Notre patron m’a tellement répété qu’il attendait la vie de Molière, que je ne fais plus que jouer aux fiches. Ce qui vous explique mon silence. Je crois cependant pouvoir vous apporter une note-notule sur Transition.

Ici la chaleur de plomb, nuages de fer, sweaters multicolores, hommes nu-tête, Hispanos et Rolls. Coins mystérieux des vies extraordinaires cachés sous l’uniforme et l’uniformité. Passages de frontière le soir, aux sons de guitares voilées. Voitures de la Cour d’Esapgne, sans numéros et tous feux éteints, déposant au coin d’un chemin de mule des femmes raides et amoureuses qui déchirent leurs bas à chaque sortie.

Affectueusement,

Ramon F

Ramon Fernandez à Jean Paulhan (4 novembre 1928) §

IMEC, fonds PLH, boîte 138, dossier 021367 – 4 novembre 1928.
Cher Jean,

Je viens de relire ce premier Carnet du Spectateur. Il me plaît beaucoup. Mon objection n’en était pas une, mais plutôt une approbation avec indication que je m’intéressais surtout à un autre aspect du problème. Tout ce que vous dîtes – aussi dans le Défaut – me paraît d’autant plus vrai que cette distinction du langage et de la pensée ne m’a jamais semblé juste – quoique je n’aurais, avant vous, su dire pourquoi. Je crois que Lévy-Brühl a confondu général – ou abstrait – avec universel, et je voudrais savoir si la pensée « primitive » atteint à l’universel. C’est à vous de nous le dire. Remarque sur « l’illusion de totalité » des gens en retard : il y a aussi, quelquefois, une pleine conscience du retard, laquelle agit sur le patient comme dans tous les vertiges. J’en sais quelque chose.

Je voudrais répondre à Guéhenno. Son article me paraît en somm bien insuffisant.

Oserai-je vous demander le grand service de me marquer – un jour que vous aurez le temps – les passages mauvais – caractéristiques – de Messages. Grand service.

Oserai-je vous demander encore si l’Esprit Classique verra bientôt le jour ? il répond à certains « courants » déjà vieux et je crains ue bientôt il ne date, au moins par les circonstances.

Votre ami,

Ramon Fernandez

Ramon Fernandez à Jean Paulhan (14 mars 1929) §

IMEC, fonds PLH, boîte 138, dossier 021367 – 14 mars 1929.
Mon cher ami,

Voici quelques réflexions sur le roman qui ne me paraissent point dépourvues d’opportunité. Admirable, le Carnet de Mars. Un seul point me gêne : « un des grands poètes qui soient. » Le [verbe ?] L’entendez-vous dans le présent ou dans l’intemporel ?

Affectueusement,

Ramon Fernandez

Ramon Fernandez à Jean Paulhan (1930) §

IMEC, fonds PLH, boîte 138, dossier 021367 – 1930.
Mon cher Jean,

N’ayant pas trouvé chez Madame Lartilleux, Samedi, la Crise de Siegfried, j’ai fait la note sur le livre d’Aron, d’autant que celui-ci m’a manifesté le désir de la voir paraître dans le numéro de juin. J’y ajoute une notule sur la Recherche. Vous en avez deux autres à moi.

Affectueusement,

R. F.

Je songe à vous donner, pour Juillet, une chronique soit sur Métaphysique et Religion, soit sur un auteur, en révision.

Je suis en retard. Peut-être une seule épreuve suffirait-elle ? pourrait-on mettre en page tout de suite ?

Ramon Fernandez à Jean Paulhan (8 décembre 1930) §

IMEC, fonds PLH, boîte 138, dossier 021367 – 8 décembre 1930.
Mon cher ami,

Voici deux notes. Celle sur Sieburg vous paraitra longue. J’ai pensé que sur un sujet de cette importance, la N. R. F. se devait de parler nettement. Si toutefois vous la trouvez trop longue, vous pouvez sans peine retrancher la plus grande partie de la première page.

Comme je dois reprendre et compléter mon essai demain, je n’aurai guère le temps d’écrire la note sur Mauriac ; mais il me semble que ces deux notes, plus l’essai, cela fait assez de Fernandez pour un numéro.

Je viens de recevoir les bonnes feuilles d’Europe. J’irai demain à la N. R. F. recueillir vos corrections. L’article sera prêt mercredi ou jeudi, dernière limite. Est-ce trop tard ?

Affectueusement,

Ramon F.

Ramon Fernandez à Jean Paulhan (1er mars 1931) §

IMEC, fonds PLH, boîte 138, dossier 021367 – 1er mars 1931.
Mon cher Jean,

Vous savez que j’ai d’autres raisons encore que l’amitié pour m’attrister de cette nouvelle que je prévoyais depuis quelques jours. Je vous suis reconnaissant de m’avoir fait connaître votre père, qui m’a laissé une vive impression, et que je regrette maintenant de n’avoir pas importuné davantage.

Je n’ai pas pu tenir tout à fait dans les dimensions que vous m’aviez prescrites, mais je voudrais bien que vous n’écourtiez pas cette notice. Je voudrais aussi, si cela vous agréait, consacrer à votre père la chronique qui suivra celle sur Meredith.

Affectueusement,

Ramon F.

Ramon Fernandez à Jean Paulhan (1er mars 1931) §

IMEC, fonds PLH, boîte 138, dossier 021367 – 1er mars 1931.
Mon cher Jean,

C’est par erreur qu’on ne vous a pas fait parvenir ces épreuves avant-hier. Veuillez m’excuser, je n’y suis pour rien.

J’avais une leçon mardi, à 1h ½. J’ai couru après jusqu’au cimetière, mais tout était déjà fini. J’aurais voulu serrer la main de Madame votre mère, que je n’ose importuner maintenant. Voulez-vous lui dire mon regret.

Nous demandons à Benda de bien vouloir reporter sa séance de la rue Visconti au retour des vacances. Il peut choisir entre ces deux dates : mercredi 15 avril, samedi 18 avril. Qu’il me fasse connaître son choix le plus tôt possible, afin que nous puissions avertir les journaux. Aurez-vous la bonté de faire entre nous le messager ?

Affectueusement,

Ramon F.

Ramon Fernandez à Jean Paulhan (16 juin 1931) §

IMEC, fonds PLH, boîte 138, dossier 021367 – 16 juin 1931.
Mon cher Jean,

Je suis consterné, et je vous prie bien vivement de m’excuser. Mon voyage d’Angleterre a décalé ce commencement de mois. La mise au point des épreuves de mon Gide, l’obligation de rattrapper [sic] au Montcel le temps perdu (plus rapidement et plus légalement que Proust) m’ont empêché de terminer à temps mes « Essais ». Je vais vous envoyer une note-notule sur [Ex-Epouse ?], que vous pouvez prier l’imprimeur de me renvoyer en épreuve directement. J’y joins la notule sur W. d’Ormesson adapté au goût du jour (entrevue des [Chequers ?] .) Je vous enverrai unltérieurement deux chroniques pour Août et Octobre, ou Septembre et Novembre, à votre choix. La première sera sur le livre de Siegfried et celui de P. Viénot (Les Incertitudes de l’Allemagne) mais généralisé en « différences nationales », sujet passionnant. La seconde sera sur la Métaphysique contemporaine : Méditations de Husserl, la Phénoménologie d’un monsieur dont le nom m’échappe, Heidegger, Benda, Hartman, etc. Je crois, d’après les échos que j’en ai, que la forme plus « générale » de mes derniers essais a plu. Je continue donc.

Voici la lettre au Dr. P. Je lui parlerai d’ailleurs vendredi.

Affectueusement,

R. F.

Ramon Fernandez à Jean Paulhan (8 septembre 1932) §

IMEC, fonds PLH, boîte 138, dossier 021367 – 8 septembre 1932.
Mon cher Jean,

Je trouve votre lettre en arrivant. J’espère que ma réponse arrivera à temps. En ce qui concerne les notes, je vous supplie d’attendre jusqu’à la rentrée. Je suis obligé, d’une part de corriger et mettre au point Le Pari en quinze jours, d’autre part de préparer mon premier article pour Marianne. Vous savez qu’un premier essai dans un genre nouveau (oh combien) est toujours pénible, d’autant que Berl a des idées très arrêtées sur ce qui est public. A partir d’octobre vous pouvez compte sur moi comme cette année.

Je trouve vos remarques sur nore désintéressement éventuel fort dignes de considération, et même admissibles. Je ne puis seulement les faire tout à fait miennes, sauf par ordre. En premier lieu, nous n’écrivons pas si profusément que nos noms risquent d’encombrer les pages de notes. En second lieu, le désintéressement des fondateurs de la N.R.F. était très largement compensé par le fait qu’ils étaient les seuls à détenir la revue, que tout le monde le savait, tandis que si nous ne défendons pas nominalement nos idées, notre « ton », nous risquons d’être noyés dans un flot très mélangé, et d’en être réduits bientôt à parler d’œuvres que nous n’aimons pas avec une partialité qui pipera le lecteur. En troisième lieu, vous connaissez les pressions qui s’exercent sur la revue : la meilleure façon d’y résister, à mon avis, est non seulement de porter haut notre jugement, mais de contribuer efficacement, par des livres jugés dans la revue à démentir certains bruits sur le sort de la collection blanche. En quatrième lieu, je n’aperçois aucun rapport entre votre proposition et l’aventure Crémieux. Madame Crémieux n’appartenait à aucun degré à la N.R.F., ses livres n’étaient nullement de ceux dont nous aurions eu l’ombre d’envie de parler si elle n’avait pas été la femme de son mari, et vous avez tout à fait raison de dire qu’il aurait fallu publier les notes de Marcel et de Pourrat. Au vrai, j’ai dit et je maintiens, que la présence de Crémieux parmi nous faussait notre politique. Non que Crémieux ne soit plein de toutes sortes de qualités, mais il est différent. Ce sont les différences, non les infériorités qui faussent, comme en mécanique. Enfin, je ne vois pas pourquoi ce serait au moment de la publication d’un livre de vous, que nous attendons avec beaucoup d’impatience, et sur lequel l’un de nous aura sûrement à dire son mot, que nous déciderions de ne plus parler de nos ouvrages. Il est vrai que la [sic] Pari est aussi sur le point de paraître. A ce propos, j’aime autant qu’on parle de moi aussi dans la N.R.F., puisque après tout c’est la revue qui m’intéresse le plus. Juger dans la N.R.F., être jugé par elle sont à mon avis complémentaires.

Communiquez cette lettre à Arland, si vous le voyez avant moi. Je ne sais si vous êtes encore à la Vigie. Un petit mot me renseignera. Nous arrivons de la montagne (Le Chambon) où nous avons passé un temps délicieux, à l’abri de la chaleur.

Nous vous envoyons, à tous les deux, nos affectueuses pensées,

Ramon Fernandez

Ramon Fernandez à Jean Paulhan (5 août 1933) §

IMEC, fonds PLH, boîte 138, dossier 021367 – 5 août 1933.

Jusqu’au 10, même adresse

Du 10 au 21 : Abbaye de Pontigny, Pontigny, Yonne

Après, le Couffin

Mon cher Jean,

Un voyage de quelques jours vous expliquera le retard de ma réponse. D’abord, je cous félicite de tout cœur pour la bonne nouvelle ! Ouf ! ouf ! ouf ! Enfin, je pense que votre esprit aura perdu une centaine de kilogs [sic]. Nous ferons tout notre possible pour aller à Port-Cros, munis de bouteilles de champagne.

Je vous suis infiniment reconnaissant pour le mal que vous vous êtes donné. La naturalisation d’un écrivain étranger écrivant en français, qui accepte ainsi les obligations correspondant à ses charges, me paraît mal [entendue ?] par les Vestales du ruban rouge. Mais, si j’étais resté à l’étranger, je n’aurais pas pu obtenir le prix Fémina (en quoi, tout de même, les Vestales ont raison), et, outre le prix Fémina… (ne le dîtes pas à la Grande Chancellerie)

J’ai fait le nécessaire pour M. Wegkyng Cwkg. Je crois qu’il pourra se loger entre la 1ère et la 2de décade.

Je vous envoie, à tout hazard [sic] à Port-Cros, une chronique commentant les quelques observations du Pamphlet. Manière commode de parler de cette revue en la rattachant à des questions générales.

Le roman marche assez bien. J’aurai sans doute fini la première partie vers le 15 août.

Affections de nous deux à vous deux,

Ramon F

Heureux que nous soyons d’accord en ce qui concerne le premier chapitre. Dans le nouveau premier chapitre, suivant vos conseils, je fais paraître le petit Paul.

Ramon Fernandez à Jean Paulhan (25 septembre 1935) §

IMEC, fonds PLH, boîte 138, dossier 021367 – 25 septembre 1935.
Mon cher Jean,

J’ai été empêché, par mes va-et-vient, de terminer à temps ma chronique (qui sera sur Blondel, en partie) pour le numéro d’octobre. Vous l’aurez au début du mois prochain. J’y ajouterai des « airs du mois », comme me le demandiez dans une lettre précédente. Je suis très heureux que les Violents vous aient plu. Je craignais un peu que la formule (différente de celle du Pari) ne vous eût causé la même gêne qu’à Arland. Je la crois bonne pour exprimer un certain caffouillage [sic] tragique de notre temps. Le début a été remanié suivant vos indications. (Vous rappelez-vous ?)

Vous trouverez ci-joint un article-modèle d’un critique d’art éventuel que j’ai chassé, et qui me paraît très souhaitable pour la revue. Pour ses connaissances, sa pénétration, sa finesse et sa réserve, il est déjà très N.R.F. l’article lui-même (quoique communiqué à titre d’échantillon) pourrait être publié, à cause de ses vues sur l’illusion des primitifs. Je vous soumettrai sous peu d’autres textes du même auteur, que je ne saurais trop chaudement vous recommander.

A bientôt, et très affectueusement à vous deux,

Ramon Fernandez