Correspondances écrites et reçues par Jean Paulhan (1925-1936 et 1950-1958), éditées en collaboration avec l’Institut Mémoires de l’édition contemporaine (IMEC, Caen) et la Société des lecteurs de Jean Paulhan (SLJP).

Il semble que ce soit votre première visite de notre site (cookie non trouvé). Nous vous invitons à lire la description du projet, afin de comprendre les négociations délicates et fragiles qui ont permis de donner accès à ces documents. Un bouton vous est proposé au bas de cette page pour exprimer votre acceptation des conditions d’utilisation, avant de poursuivre votre navigation.

Le projet « Hyper Paulhan » de l’OBVIL [Observatoire de la Vie Littéraire] propose les reproductions numérisées (mode image) et transcrites (mode texte) de lettres déposées dans le fonds Jean Paulhan et quelques autres fonds à l’Institut Mémoires de l’Édition Contemporaine (IMEC, Abbaye d’Ardenne, 14280 St-Germain la Blanche-Herbe).

Ces lettres sont extraites des dossiers de correspondances passives et actives de Jean Paulhan. Elles s’inscrivent dans deux tranches chronologiques :

  • 1925-1936, années pendant lesquelles Jean Paulhan a été nommé rédacteur en chef, puis directeur de La Nouvelle Revue française,
  • 1950-1958, années de redémarrage de La NRF, après l’interruption de la fin de la guerre et de l’après-guerre…

L’OBVIL, dont l’accès et la consultation en ligne sont libres, constitue cependant une base de données protégée, au sens des articles L341-1 et suivants, du code de la propriété intellectuelle française. Il est donc convenu que :

  • La diffusion sur le site de l’OBVIL des lettres, quoiqu’ayant été autorisée par les ayants-droit des auteurs concernés, demeure soumise aux règlementations en vigueur sur les droits d’auteur.
  • Pour toute citation d’une lettre ou diffusion d’une image, dans le cadre d’une utilisation privée, universitaire ou éducative, il doit être fait mention de la source [« Labex OBVIL »]
  • Pour toute citation ou diffusion dans le cadre d’une utilisation commerciale, il faut obtenir l'autorisation préalable des ayants-droit concernés.

L'utilisateur s'engage à respecter les présentes conditions d'utilisation ainsi que la législation en vigueur.

*

  • Pour obtenir l’autorisation de reproduction d'un document du site HyperPaulhan, contactez la représentante des ayants-droit de Jean Paulhan, soit Claire Paulhan.
  • Pour obtenir des informations biographiques sur Jean Paulhan, ou se renseigner sur les activités de la Société des Lecteurs de Jean Paulhan, consultez le site de la SLJP.
  • Pour consulter les archives-papier originales de Jean Paulhan à l'abbaye d'Ardenne, inscrivez-vous à l’IMEC.

Adrienne Monnier

1926/1936

Adrienne Monnier à Jean Paulhan, correspondance (1926–1936)

2017
Université Paris-Sorbonne, LABEX OBVIL, 2017, license cc.
Source : IMEC, fonds PLH, boîte 171, dossier 095692
Ont participé à cette édition électronique : Camille Koskas (Responsable éditorial), Clarisse Barthélemy (Responsable éditorial), Simon Battistella (Transcription) et Frédéric Glorieux (Informatique éditoriale).

Adrienne Monnier à Jean Paulhan (18 octobre 1926) §

IMEC, fonds PLH, boîte 171, dossier 095692 – 18 octobre 1926.
Cher Ami,

Je suis tout à fait contente que La Servante en colère vous plaise ; je n’ai pas besoin de vous dire, n’est-ce pas, que Sollier serait très flatté de voir son texte imprimé dans la Nouvelle Revue Française, après avoir joué l’esprit fort quelque temps, il s’est décidé à m’avouer ce sentiment.

Pensez-vous pouvoir passer rue de l’Odéon bientôt ? Je voudrais arranger un ou deux rendez-vous entre vous et Bécat pour votre portrait. Je prépare une exposition de tous ses portraits dessinés et gravés pour novembre. Schlumberger est-il à Paris ? Nous voulons aussi ajouter son portrait à la collection.

À bientôt, j’espère

Bien amicalement à vous

Adrienne Monnier

Ou si vous voulez, téléphonez-moi. Je n’ose jamais vous téléphoner à la N.R.F. parce que j’ai peur de ne pas vous trouver ou de vous déranger.

Adrienne Monnier à Jean Paulhan (23 octobre 1926) §

IMEC, fonds PLH, boîte 171, dossier 095692 – 23 octobre 1926.
Cher Ami,

Vous m’écriviez mardi : « On donne encore pour 3 jours La Tour de Nesle ... ». Nous décidons d’y aller jeudi, et voyez plutôt par la feuille ci-jointe l’étendue de votre crime !

Mon beau-frère est toujours libre l’après-midi de mercredi et jeudi … Voulez-vous venir pour mercredi et jeudi prochain (27 et 28) à 2h1/2 ; il aura sûrement terminé votre portrait en deux séances. Sans mot de vous, on vous attend.

Bien amicalement à vous,

Adrienne Monnier

Connaissez-vous une petite revue intitulée « Le Cahier de l’Ami », Je viens de recevoir un n° qui est le 4ème (je n’ai pas vu les précédents), sous mon [fin de la lettre manquante]

[Au verso, de la main de Jean Paulhan]

Mauriac

Adrienne Monnier à Jean Paulhan (07 décembre 1926) §

IMEC, fonds PLH, boîte 171, dossier 095692 – 07 décembre 1926.
Cher Ami,

J'ai reçu le pneu de Germaine Pascal. Je suis enrhumé du cerveau et Sylvia tousse. Je ne sais pas si nous pourrons aller à Robinson le 15 qui est le 1er jour de l’Exposition de Paul-Émile (il y a un vernissage privé le 14). Il vaudra peut-être mieux retarder encore d’une semaine cette journée que nous voulons envoyer comme une vraie fête. En attendant, voulez-vous venir dîner tous les deux le Dimanche ; nous inviterons Joyce et Hemingway.

Ci-joint la note sur Paule-Émile. C'est venu plus sérieux que je ne pensais et c’est mieux comme ça, je crois ; l’anecdote a surtout de l’intérêt appliqué à quelqu’un de très connu, ce qui n’est pas encore le cas de Paul-Émile.

À bientôt, à ce dimanche, nous espérons.

Bonne santé et bien amicalement à vous deux

Adrienne Monnier

Adrienne Monnier à Jean Paulhan (14 février 1927) §

IMEC, fonds PLH, boîte 171, dossier 095692 – 14 février 1927.
Cher Ami,

J'ai peur qu’hier, je ne me sois pas bien clairement exprimé au sujet de la Littérature dans ses rapports avec la Musique et la Peinture. Je n’ai jamais pensé que la Littérature devait sortir de ses moyens propres pour essayer de s’approprier ceux des autres arts, mais que l’état d’humilité et de contemplation lui était bon. De même qu’on n’apprend pas à se connaître en ne regardant que soi, mais en se comparant avec les autres et en les aimant. Voyez, mon Bâilleur, je l’ai fait par amour pour Breughel, et justement à cause de cela, je n’ai pas essayé de peindre, je ne suis pas tombé dans l’erreur de décrire. Imaginez ce que certains auraient fait :

« Il baille. Sa bouche s’ouvre comme une grotte ; le monstre gluant de sa langue se soulève sur son arrière-train et darde sa tête pour défendre les portes basses de sa gorge … etc ... »

Tenez, je vous envoie aussi un dessin qui me préoccupe beaucoup en ce moment et que j’aurais bien du plaisir à mettre en paroles.

Est-ce que vous avez dit à Germaine que Lascelles Abercrombie dansait brillamment le Charleston ?

A

Adrienne Monnier à Jean Paulhan (18 février 1927) §

IMEC, fonds PLH, boîte 171, dossier 095692 – 18 février 1927.
Cher Ami,

Il n’y a qu’un âââ qu’on peut supprimer, c’est à « tout ça ... », au bout de la dissertation politique. Et, en effet, ce serait mieux ainsi. Ailleurs, c’est automatique, chaque fois que l’idée de l’effort se présente. Pour l’histoire un peu plus longue, il me semble qu’elle existe à la fin du morceau, justement, avant de sombrer dans le plus grand bâillement et dans le sommeil.

Ce Bâilleur est, d’ailleurs, aussi fabriqué qu’un sonnet ou qu’un rondeau. À la réflexion, je vois qu’il se rattache au genre dit « monologue comique », je l’imagine très bien dit par feu Coquelin Cadet ou par Polin, mais il faut bien aboutir à la fabrication, c’est là l’effet de cette intelligence qui, ainsi que le dit Bergson, n’a rien en elle qui puisse comprendre la vie.

À propos de comprendre, je ne sais pas si c’est un effet de bêtise ou d’intelligence, mais je n’ai rien compris à votre carte d’hier. Vous avez une sorte de génie pour partir d’une idée simple et pour l’amener jusqu’au point où elle est égarée, perdue ; ça fait tout Pôle Nord. Je crois que je ne discuterai plus jamais avec vous, vous avez toujours déraison, comme d’autres ont raison.

Ne prenez pas ça pour une critique, c’est votre genre de beauté, c’est comme ça qu’on vous aime.

A

Les [aumônes?] sont magnifiques. J'ai envie d’en mettre une pour moi, comme ce serait agréable d’être aimé par quelqu’un à qui je ne pourrais, en aucun cas, montrer le Bâilleur, et qui m’apprécierait comme je suis, « forte » et capable de sentiments délicats.

À la réflexion, on peut peut-être aussi enlever le âââ du Replat.

Adrienne Monnier à Jean Paulhan (16 novembre 1927) §

IMEC, fonds PLH, boîte 171, dossier 095692 – 16 novembre 1927.
Cher Ami,

Je ne pense du tout que vous ayez eu tort dans l’affaire Breton. Vous avez montré un grand courage, un courage qui, je crois, ne sera pas inutile, mais qui vous expose, peut-être, à des représailles. C'est par affection pour vous que je m’inquiète quelque peu, et c’est dans l’esprit d’une mère qui dit à son fils* « ne va pas jouer avec ces sales gamins », que je vous ai dit : « Il est fou, il vaut mieux le laisser tranquille. »

Tout cette histoire Dada-Surréaliste est vraiment bien difficile à expliquer et à juger.

Vous avez raison, il faut démêler leurs œuvres (quand elles sont bonnes, elle sont fort peu conformes à leurs idées) de leur politique. Mais ils ne tolèrent point qu’on fasse de restrictions ni de séparations. Peut-être, alors, est-il préférable de garder le silence à leur sujet. Comme ils font tout pour faire parler d’eux et que l’ambition, quoiqu’ils en disent, est leur passion dominante, rien ne peut autant les amener à la raison, sauf Breton, naturellement, qui n’en a pas et qui, de ce fait, est irréductible, mais s’il était seul son rocher, il n’irait pas loin, si j’ose dire.

De toute façon, vous avez bien fait d’élever la voix. Il est bon de voir ce qu’ils vont faire. Au fond, je ne suis pas tellement inquiète, je ne crois qu’ils puissent vous faire du mal, et vous avez déjà l’avantage, définitivement acquis, d’avoir prouvé publiquement la lâcheté personnelle de Breton.

Adrienne Monnier à Jean Paulhan (1927) §

IMEC, fonds PLH, boîte 171, dossier 095692 – 1927.

Cher Ami, j’espère vous voir ce soir. J'aimerais tant que Germaine et vous prissiez l’habitude de venir à ces mercredis. Il faudrait qu’ils fussent vôtres autant que miens. Je ne sais pas s’ils peuvent donner quelque chose de bon, mais ce ne pourrait être qu’avec votre aide.

Bien amicalement à vous deux

Adrienne

J'ai pris des mesures contre la fumée de tabac, et j’ai arrangé aussi pour qu’on se tienne dans la grande pièce de la Librairie. Il faut amener, si ça ne l’ennuie pas, l’amie de Groethuysen, je ne la connais pas et je voudrais bien la connaître.

Adrienne Monnier à Jean Paulhan (17 août 1928) §

IMEC, fonds PLH, boîte 171, dossier 095692 – 17 août 1928.
Cher Ami,

Nous voici rentrés à Paris, après un joli tour dans le Jura et en Alsace. Nous n’avions jamais vu Colmar ni Strasbourg.

Êtes-vous toujours en vacances ?

J'ai une petite requête à vous adresser : Stuart Gilbert (autour de la note sur Protée et traducteur avec A. Morel) m’écrit pour me demander un numéro sur bon papier de la N.R.F. d’Août. N'y a-t-il pas moyen de lui faire avoir ce numéro comme rétribution du collaborateur ?

Je n’ai pas encore recueilli d’opinions sur Protée, mais je ne suis rentrée que depuis hier et je ne vois pas un chat. Mais Sylvia a eu ce matin la visite d’un libraire : le directeur du Commerce des Idées, que l’enthousiasme avait mis tout en ébullition ; il savait déjà des passages par cœur ; il a acheté un ex. d’Ulysse, et il ne sait pas l’anglais.

À bientôt, j’espère, de vos bonnes nouvelles. Et d’affectueuses pensées pour vous deux.

Adrienne

Adrienne Monnier à Jean Paulhan (21 août 1928) §

IMEC, fonds PLH, boîte 171, dossier 095692 – 21 août 1928.
Cher Ami,

Je ne me doutais guère que vous me feriez visite. Je suis triste de vous avoir manqué.

Vous m’avez fait un immense plaisir en me donnant un hors-commerce de votre Étude. Je venais justement de la lire et j’avais envie de vous écrire. Vos réflexions m’ont enchantée et m’ont parue vraies en tout point. Qu'il y a à dire sur la Pensée critique et ses défauts. Les pages que vous venez de publier sont comme l’apéritif Fernet-Branca ; elles sont très amères et donnent une faim à tout dévorer. Quand aurons-nous « Les Fleurs de Tarbes » en entier ?

D'ailleurs, ce n° de Commerce m’a beaucoup plus : le Fargue est délicieux, le Larbaud est excellent, le Pouchkine est superbe. Quant à Jean Giono, il faut me dire qui c’est. « Colline » est une « révélation ». Que vous [mot illisible]-vous de Sollier après ça ! - Ce pauvre Sollier, inspiré quelque peu par les figures de la Cathédrale de Strasbourg, - a fait une « Vierge sage » que je vous envoie. Ça va vous sembler bien pâle.

Cher ami, je vous avais déjà expliqué pour Joyce. Vraiment ce qu’il écrit, tout ce qu’il a écrit depuis Ulysse est intraduisible. Le livre auquel il travaille : Work in progress (et il ne travaille à rien en dehors de ça, sous quelque prétexte que ce soit. Si vous saviez à quel point la cécité le menace et combien il se dépêche de faire ce qu’il croit avoir à faire.) Donc, ce Work in progress paraît au fur et à mesure dans « Transition ». Je ne sais pas pourquoi Rodker l’avait intitulé « Protée ». C'est sans doute, parce qu’il avait vu ce titre annoncé dans la N.R.F., et qu’il avait cru que c’était là l’ouvrage qui devait suivre Ulysse. La carte que vous m’avez envoyé est assez curieuse ; la N.R.F est une revue française qui n’est pas tenue de publier des inédits en anglais. Si jamais vous trouvez quelqu’un qui, ayant lu les chapitres qui paraissent dans « Transition », les juge traduisibles, il faut lui dire de se mettre à l’oeuvre, Morel a essayé sans aucun résultat. Larbaud ne s’y est jamais risqué.

Nous aimerions bien aller vous rejoindre à Port-Cros, mais c’est tout à fait impossible. Nous espérons vous voir dès votre retour.

Pour Germaine et pour vous, notre vraie amitié.

Adrienne

Adrienne Monnier à Jean Paulhan (27 décembre 1928) §

IMEC, fonds PLH, boîte 171, dossier 095692 – 27 décembre 1928.
Cher Ami,

Je suis désolée de vous savoir malade. J'espère que vous allez être vite guéri. Je sors à peine d’une grippe.

Que j’ai été contente de voir ma vierge si bien imprimée, c’est plus qu’elle ne méritait ! Je vous retourne les épreuves corrigées.

Je n’ai pas encore un jeu complet de secondes épreuves d’Ullysse, mais je pourrais vous envoyer ce que j’ai : tout, sauf le dernier chapitre, c’est à dire le mon. int. de la « hideuse femelle sans accents », comme dit Gide. Voulez-vous que je fasse porter ça à la N.R.F. ?

À bientôt, j’espère. Sylvia et moi envoyons à Germaine et à vous de très grandes amitiés et nos meilleurs vœux de santé, de richesse et, en général, de bonheur.

A

Adrienne Monnier à Jean Paulhan (29 janvier 1929) §

IMEC, fonds PLH, boîte 171, dossier 095692 – 29 janvier 1929.
Cher Ami,

Vous êtes trop gentil pour la vierge sage. Mais pourquoi avoir demandé à Marcelle Auclair de le traduire quand elle a déjà tant de travaux de tous genres. Je suis désolée d’être la cause d’un surcroît de besogne pour elle.

Je suis tout à fait guérie, à ce qu’il me semble. Je suis toujours plongée dans les épreuves. J'ai maintenant un jeu complet pour vous, si vous le voulez.

Sylvia et moi vous envoyons à tous deux de biens affectueuses pensées

A

Dans Sintesis, ce sera bien signé J.M. Sollier, n’est-ce pas ? J'y tiens.

 

[Au verso, de la main de Jean Paulhan]

R.F.

or. Meyerson

A MONNIER [écrit à l’envers, en miroir]

J. Prévost

de Corbusier : 1 maison, 1 palais

x

B. Cr. [Benjmain Crémieux] sur les Piccoli

Adrienne Monnier à Jean Paulhan (14 mars 1929) §

IMEC, fonds PLH, boîte 171, dossier 095692 – 14 mars 1929.
Cher Ami,

Les exemplaires d’Auteur d’Ulysse que j’ai envoyés à Charles du Bos et à Léon Treich me sont revenus, voudriez-vous avoir la gentillesse de me donner leurs adresses. Je vous avais demandé celle de Rosny Aîné vous seriez vraiment tout à fait gentil de me la donner aussi.

Comment avez-vous trouvé l’Étude de Stuart Gilbert ?

Bien affectueusement à vous deux,

A

Adrienne Monnier à Jean Paulhan (02 avril 1929) §

IMEC, fonds PLH, boîte 171, dossier 095692 – 02 avril 1929.

Maintenon

Cher Ami,

Je reçois votre mot ici où je suis depuis mardi. Je n’étais pas très bien fichue. On me purge, on me met au lait, au bouillon de légumes, etc … Je rentrerai sans doute à Paris lundi. Je n’ai pas de chance avec vos visites.

Dès mon retour, je vous téléphonerai et nous arrangerons quelque chose.

Bien affectueusement à vous deux

A

Adrienne Monnier à Jean Paulhan (06 avril 1929) §

IMEC, fonds PLH, boîte 171, dossier 095692 – 06 avril 1929.
Cher Ami,

Je n’ai pas répondu à vos lettres parce que j’attendais votre visite que vous m’aviez dit très prochaine. Tous les Novalis sont descendus. Faut-il vous les faire porter ?

J'ai beaucoup aimé votre lettre sur Ulysse, je crois que mes premières impressions ressemblaient assez aux vôtres. Je n’ai pas compris votre lettre sur Fargue ; Fargue ne m’avait rien dit, ni à moi ni à Rinette?, il est de très bonne humeur, je ne crois pas qu’il soit fâché, de quoi que ce soit.

À bientôt, j’espère.

Bien affectueusement à vous deux.

A

Rinette vient de faire une belle gravure : il y en a un ex. pour vous.

Adrienne Monnier à Jean Paulhan (20 avril 1929) §

IMEC, fonds PLH, boîte 171, dossier 095692 – 20 avril 1929.

 

Cher Ami

Je regrette beaucoup de ne pas vous avoir vu. Je suis encore très enrhumée, mais comme ce ne semble être qu’un sale rhume de cerveau, j’espère être guérie la semaine prochaine. Voulez-vous me fixer un rendez-vous pour un jour et une heure précis, ce sera plus sûr, car en ce moment, je me donne le plus d’air possible.

Merci du chèque Sollier. Comment voulez-vous que je le touche ? - Je vous le renvoie, comme vous êtes en correspondance avec la revue argentine en question, dites-leur de vous établir un nouveau chèque au nom de la Nouvelle Revue française, et donnez les 200 fr à qui vous semblera bon ; naturellement, retournez-leur celui qui était au nom de « Sollier ».

Vous savez que j’ai décidé de garder Ulysse. Donc, inutile que Gaston Gallimard me fasse une offre et inutile que je lui fasse une demande. Joyce est ravi de ma décision, Sylvia plus encore.

Bien affectueusement à Germaine et à vous,

A

Adrienne Monnier à Jean Paulhan (01 avril 1930) §

IMEC, fonds PLH, boîte 171, dossier 095692 – 01 avril 1930.

Adrienne Monnier

Cher Ami,

Sollier est très content de votre lettre, oui, qu’il est content que vous ayez aimé ses Vierges folles ; il n’était pas sans inquiétude.

Il est tout à fait de votre avis au sujet du discours de Jeanne ; il faut nettement enlever la partie du « postal » ; il avait eu lui-même envie de la supprimer et avait demandé l’avis de Sylvia et de Rinette qui s’étaient déclarées pour le maintien, du fait que c’est un des détails les plus directement observés de toute l’histoire. Par ailleurs, il ne déplaisait pas à Sollier que ce long épisode (long par rapport au reste) fit oublier les garçons, et surtout Albert auquel il avait été amené à donner plus d’importance qu’il n’aurait voulu. Dans sa pensée, on devait surtout voir les filles ; Albert est là comme le Tentateur, qu’il n’a pu s’empêcher de justifier, d’expliquer.

Et naturellement, cette idiote de Jeanne n’a la parole qu’en qualité de témoin d’Auguste ; elle en profite, elle s’étale. Elle aura les « Crêpes », et c’est tout !

Au sujet de « ravaudant les éternités », Sollier ne trouve pas ça trop beau, mais peut-être pas encore assez beau pour Auguste. C'est une métaphore comme il en fourmille dans les argots. Le bond de langage n’est pas impossible, une partie de l’expression étant donnée : éternités. L'expression courante aurait été ; « Encore son truc à la manque qui dire des éternités ». Par ailleurs, l’éternité s’associe facilement, dans l’esprit du peuple comme dans celui des poètes, avec l’amour. « On vit quelquefois en un jour, toute une éternité d’amour ». Le plus souvent, c’est l’acte d’amour même qui semble une bienheureuse éternité.

« Ravaudant », qui vous paraît très recherché, s’impose moins par l’idée qu’il représente que par son corps verbal ; il contient en raccourci quelques uns des éléments importants de la phrase qui succède : « Sa bouche édentée qui tire le sein, lant, noyée dans sa Gare ». - Même l’idée me semble possible ; j’entends très bien une femme dire d’un impuissant ou presque : « ce qu’il ravaude ! » - Il faut penser aussi qu’Auguste est saoule et que les mots prennent aisément du champ dans son esprit.

Enfin, si ces raisons ne vous ont pas convaincu, dites-vous que ce n’est pas Auguste qui parle, mais Sollier qui, après tout, ne s’est pas identifié avec ses personnages et a gardé quelques droits.

Avec les vifs sentiments de respect et de gratitude de Sollier, je vous envoie, à Germaine et à vous, mes pensées bien affectueuses.

Adrienne

Je vous enverrai d’ici peu une autre copie corrigée.

Adrienne Monnier à Jean Paulhan (04 avril 1930) §

IMEC, fonds PLH, boîte 171, dossier 095692 – 04 avril 1930.

Mais si, il faut laisser le lecteur penser qu’Albert ravaude les éternités. L'éternité, ou les éternités, sont pour Auguste aussi ravaudables qu’autre chose. Elle ne sait pas exactement ce qu’est l’éternité, nous ne le savons, d’ailleurs, pas mieux qu’elle. Pourquoi n’userait-elle pas de ce mot avec autant de liberté que nous usons de « l’infini » ? Pour elle, l’éternité, c’est tantôt un temps très long, tantôt un moment pas ordinaire, qui semble en dehors de l’écoulement des jours, un moment essentiellement présent, sans passé ni futur, le moment même de l’acte d’amour.

Albert, dans son effort pour trouver la volupté, lui paraît quelqu’un qui met bout à bout, qui raccommode, des parcelles d’éternité – amour, chacune de ces parcelles étant une minuscule et insaisissable éternité-amour, quelque chose comme les atomes, quoi.

L'expression est bien : « ravaudant les éternités ». Le participe présent est nécessaire parce que, dans une région de l’esprit d’Auguste, on pointe qu’Albert est sans dents. Je vous ai, d’ailleurs, déjà exposé les raisons d’anatomie verbale.

C'est par raccourcissement et adaptation étrangère que l’on dirait ravauder, sans plus.

Cher Ami, Sollier espère que vous arriverez, tout de même, à prendre votre parti de cette stalagmite.

Bien affectueusement à vous deux,

Adrienne

Adrienne Monnier à Jean Paulhan (15 octobre 1930) §

IMEC, fonds PLH, boîte 171, dossier 095692 – 15 octobre 1930.
Cher Ami,

Je ne sais que depuis avant-hier, par Decour, que Germaine a été très souffrante et qu’on vient de l’opérer. Votre lettre vient au devant de la mienne. J'allais vous écrire ce matin même, n’ayant pu le faire hier tant j’ai été occupée. À quelle clinique est-elle ? Sylvia et moi aimerions aller la voir, si elle peut recevoir des visites. Nous pensons à vous et nous formons de grands vœux pour son complet rétablissement. Nous espérons vous voir bientôt tous les deux et vous envoyons nos bien affectueuses pensées.

Adrienne

Adrienne Monnier à Jean Paulhan (06 novembre 1930) §

IMEC, fonds PLH, boîte 171, dossier 095692 – 06 novembre 1930.
Cher Ami,

J'ai vu le Dr. Wolfenstein qui est bien gentil. Je l’ai mis en rapport avec Fargue et avec Joyce. Il semblait moins vouloir du Sollier que du Monnier ; je vais tâcher de lui fabriquer « Une petite boutique grise », article d’exportation.

Je vous envoie le dernier Sollier. Où pourrions-nous le fourrer, ce mendiant ? Montrez-le donc à la Princesse de Bassiano, voulez-vous ? Si elle acceptait de le publier dans Commerce, Sollier serait ravi.

J'espère vous voir très bientôt, Germaine et vous. Je me suis mise à faire de la Pâtisserie depuis septembre dernier (je n’en avais jamais fait auparavant) et je puis dire que cet art a singulièrement embelli ma vie. Je sais faire les tartes, savarins, galettes, petits pâtés, gâteaux aux amandes, madeleines, gâteaux au chocolat, biscuits de Savoie, etc … Il n’y a que le glaçage des éclairs qui me résiste. Quand viendrez-vous juger de mes talents ? Est-ce que Germaine, en attendant, aimerait 12 petites madeleines façon Commercy ? - Oui, n’est-ce pas ?

Bien affectueusement à vous deux.

Adrienne

Adrienne Monnier à Jean Paulhan (24 février 1931) §

IMEC, fonds PLH, boîte 171, dossier 095692 – 24 février 1931.
Cher Ami,

Pourquoi être navré ? Si la N.R.F. n’achète pas Ulysse et me le laisse, ce sera pour le mieux, tout au moins en ce qui me concerne. C'est toujours ce qui arrive qui est le mieux. Puisque vous me le demandez, je laisse encore jusqu’à samedi 28 [mot illisible] à Gaston Gallimard pour réfléchir. Sans réponse de lui, à cette date, je conclurai qu’il renonce.

Je suis très excitée à la pensée que vous allez écrire quelque chose sur Ulysse. Mon étude me donne bien du chiendent. Je vous ai dit, n’est-ce pas, que la séance était fixée au 26 mars. Est-ce que Schlumberger vous a répondu ; nous pourrions placer sa séance fin avril ou début de mai

Bien affectueusement à Germaine et à vous

AM

Adrienne Monnier à Jean Paulhan (12 mars 1931) §

IMEC, fonds PLH, boîte 171, dossier 095692 – 12 mars 1931.
Cher Ami,

Que Sollier a été content de voir les épreuves de ses Vierges folles, les voilà déjà corrigées.

Mon Joyce avance, mais ce ne sera pas quelque chose d’extraordinaire, je vous assure. Ce sera, peut-être une assez bonne causerie, mais pas du tout une belle et large étude. Le temps me manque pour édifier un texte à la hauteur du sujet. Je ne crois pas qu’il y aura intérêt à le publier. Les conclusions, peut-être, si elles sont réussies, mais le seront-elles ?

Le texte d’Anna Livia Plurabelle est encore l’objet de quelques légères retouches ; vous l’aurez tout de suite après la Séance, peut-être même avant.

Voici le programme du 26 [(mars 1931)] :

Séance consacrée à James Joyce

Joyce et le Public français

causerie par Adrienne Monnier

Fragment de « Anna Livia Plurabelle »

lu en anglais par James Joyce

(lecture enregistrée)

Présentation par Philippe Soupault de la traduction française inédite d’un fragment de « Anna Livia Plurabelle »

Lecture, par Adrienne Monnier, de ce fragment traduit par : Samuel Beckett, Aldred Perron, Paul L. Léon, Ivan Goll, Eugène Jolas, A. Monnier et Philippe Soupault.

Sept traducteurs, comme vous voyez, soit le 1/10 des Septante.

Bien affectueusement à Germaine et à vous.

A M

Adrienne Monnier à Jean Paulhan (18 mars 1931) §

IMEC, fonds PLH, boîte 171, dossier 095692 – 18 mars 1931.

18 rue de l’Odéon VIe

Cher Ami,

Je viens seulement d’apprendre la mort de votre Père.

Je vous prie de me croire de tout cœur avec vous. J'aime trop mes parents pour ne pas réaliser ce que peut être une telle épreuve, et votre père était un homme de si grande valeur, il semblait si bon aussi.

Sylvia et moi sommes profondément attristés. Nous pensons bien à vous, je vous assure.

Votre

Adrienne

Adrienne Monnier à Jean Paulhan (29 mars 1931) §

IMEC, fonds PLH, boîte 171, dossier 095692 – 29 mars 1931.

Rocfoin

par Maintenon

(Eure et Loire)

Bien cher Ami,

Sylvia m’apporte votre lettre ici, où je suis partie tout de suite après la Séance. Je ne serai pas de retour à Paris avant mardi 6 avril, si vous avez quelque chose à me dire, écrivez-moi.

Je suis bien émue par ce que vous m’annoncez. J'avais eu l’impression que ma conférence vous avait déçu ; et la critique que vous m’aviez adressé, le soir même, n’était que trop juste.

Certes, cette conférence manquait de logique, elle laissait en suspens plusieurs points des plus importants. Tout ce que je peux dire pour me défendre c’est que je n’ai eu que trois semaines de travail ; sur les cinq semaines qui semblaient m’être accordées, deux ont été prises par des malaises très douloureux, d’abord un panaris à l’index de la main droite, puis un coryza de forme particulièrement violente. Ajoutez à cela les préparatifs de la Séance, les choses de la librairie auxquelles il fallait tout de même avoir un peu l’oeil, etc. … Enfin c’est fait ! Peut-être, un jour, essaierai-je de compléter ce travail si sommaire.

Dites-moi à combien de pages vous voulez que je réduise mon texte. Évidemment, il faut le laisser en conférences, il n’y a que la forme conférence qui justifie son allure et son imperfection critique.

Mais vous, cher Paulhan, chez Germaine, que vous avez été bons tous les deux ! Il n’y avait que vous, l’autre soir, dont j’attendais un vrai jugement. Puisqu’en fin de compte, vous voulez bien trouver mon travail un peu digne d’être publié, je suis suffisamment heureuse et consolée ! Si vous saviez combien je vous mes défauts et combien j’en souffre.

Très chers Amis, je vous aime beaucoup. Je vous embrasse.

Votre

AM

Excusez mon écriture, je suis couchée.

Adrienne Monnier à Jean Paulhan (02 avril 1931) §

IMEC, fonds PLH, boîte 171, dossier 095692 – 02 avril 1931.
Bien cher Ami,

Que de mal je vous donne !

Eh bien, j’ai réfléchi, non, il ne faut pas publier un fragment de ma conférence. D'abord, ce ne serait pas juste de le présenter comme un « Hommage à Joyce ». Ni Soupault, ni moi n’avons écrit dans cette intention. Je crois qu’il sera suffisant de détacher de la Présentation de Soupault les détails techniques et quelques considérations.

Je préfère, pour moi, faire une plaquette. Pour combler les « précipices », il suffira de spécifier que j’ai lu Ulysse au moins quatre fois en entier, chaque fois avec un plaisir plus vif. Comme pour les grands narrateurs, Joyce dépayse et même déplaît à première lecture. Il n’est que de s’y habituer.

Pourquoi dites-vous que j’avais promis « d’examiner fidèlement la transformation et le progrès de mes premières opinions ». Je n’avais fait aucune promesse. J'avais dit : »Je vais essayer d’exprimer, etc ... »

Bon, ne pensons plus à tout cela. Repos pour vous et pour moi. Ma grippe va mieux ; vous devez avoir si grand besoin de vacances ?

Bien affectueusement à Germaine et à vous.

AM

M. Sollier attend avec la impatience la N.R.F. d’avril qui contient Les Vierges folles. Cette vilaine Sylvia ne l’a pas encore envoyée.

Adrienne Monnier à Jean Paulhan (08 juin 1931) §

IMEC, fonds PLH, boîte 171, dossier 095692 – 08 juin 1931.
Cher Ami,

Joyce est d’avis qu’il faut supprimer les tirages à part d’Anna Livia Plurabelle. Il m’a renvoyé les 5 ex. que vous lui aviez envoyés ; j’ai donc, avec le mien, 6 ex. Quel rite allons-nous adopter pour la destruction de l’ensemble* ? De toute façon, ça ne pouvait pas aller ; il n’aurait pas fallu mettre sur la couverture ; « Anna Livia Plurabelle », mais Fragments d’Anna …

Merci encore de votre obligeance.

Bien affectueusement à Germaine et à vous

AM

Adrienne Monnier à Jean Paulhan (18 juin 1931) §

IMEC, fonds PLH, boîte 171, dossier 095692 – 18 juin 1931.
Monsieur GASTON GALLIMARD

Directeur de LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

et des EDITIONS de LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

Cher Monsieur,

Étant chargé par M. JOYCE de le représenter en tout ce qui concerne la publication des traductions françaises de ses œuvres, je vous fais savoir, par la présente, qu’il désapprouve le tirage-à-part qui a été fait, sans son consentement, des Fragments de ANNA LIVIE PLURABELLE publiés dans le n° de LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE du 1er Mai 1931. - Il désire que ces tirages-à-part soient tous détruits.

M. JEAN PAULHAN m’a dit qu’il avait été fait dix (10) tirages-à-part. De ces dix exemplaires, je possède actuellement :

- les 5 ex. remis à M. Joyce – 5

- l’ex. remis à M. Jean Paulhan – 1

- l’ex. remis à M. Philippe Soupault – 1

- l’ex. remis à moi – 1

Soit, au total, huit exemplaires.

Vous seriez tout à fait aimable de me remettre, dans le plus bref délai possible, les deux ex. restants. Dès que je serai en possession d’une personne chargée de vous représenter.

Je vous demanderai aussi, en plus de la remise des deux exemplaires restants, de me délivrer une attestation signée par vous qu’il ne substitue aucun exemplaire du tirage-à-part en question.

Veuillez recevoir, Cher Monsieur, l’assurance de mes sentiments bien distingués.

Adrienne Monnier

Adrienne Monnier à Jean Paulhan (23 juin 1931) §

IMEC, fonds PLH, boîte 171, dossier 095692 – 23 juin 1931.
Cher Ami,

J'avais bien pensé que les deux tirages-à-part étaient partis avant l’arrivée de ma lettre à G.G. - De même, j’avais écrit à G.G. avant de recevoir la lettre de Germaine.

[mot illisible], avez-vous du m’envoyez votre carte d’hier avant d’être en possession des dix Anna Plura expédiés à Germaine. Tout ça se tient.

Les bibliophiles ne sont pas si sots ; ils ont raison de vouloir du lait non écrémé.

Il paraît que rien n’est plus facile que de voir le repas des serpents ; Rinette connaît la question à fond. Ne vous inquiétez plus de cela. Vous avez déjà tant à faire. Et moi aussi, d’ailleurs. Tenez, je n’ai même pas le temps de taper le Mendiant dont je n’ai plus de copie ; est-ce que cela vous dérangerait de me rendre la copie que je vous avais envoyée ?

Merci d’avance et bien affectueusement à vous deux

AM

Adrienne Monnier à Jean Paulhan (03 mars 1934) §

IMEC, fonds PLH, boîte 171, dossier 095692 – 03 mars 1934.
Cher Ami,

Merci de votre mot.

Je n’ai pas lu les ms. [manuscrits] de Berthier, mais c’est comme si je les avais lus ! - Le 6, je n’avais pas eu besoin de vous l’envoyer, il s’était bien envoyé tout seul.

L'air du mois me plaît, tout à fait. L'idée était excellente ; le titre est ravissant. Je ne demande pas mieux que de vous donner une page, mais sur quoi ? Je suis tellement absorbée par ma boutique que je ne sais plus écrire que les lettres de réclamations aux [Mess. H.?]. Il faudrait que je m’y remette. Il faudrait surtout qu’on se voie.

Je vais quitter Paris quelques jours (de mercredi à dimanche prochain), mais voudriez-vous nous faire le grand plaisir de venir déjeuner avec nous lundi ou mardi 12 ou 13 ?

Bien affectueusement à vous deux,

AM.

Adrienne Monnier à Jean Paulhan (20 juin 1934) §

IMEC, fonds PLH, boîte 171, dossier 095692 – 20 juin 1934.
Chère Amie,

Voici l’épreuve corrigée. Je crois qu’il faut changer la fin ; elle est plus logique ainsi, n’est-ce pas ? Inutile de me renvoyer une épreuve, mais vous seriez bien gentille de voir vous-même si la correction est bien faite.

Mais oui, il y a un « fond » de la main de Gide. Et combien justifié ! Comment ai-je pu transcrire « jusqu’au bout ». Je devais penser à la guerre, à la dernière, et à la prochaine à laquelle j’essaie de ne pas croire.

Nous retournons ce soir voir Shankar. Nous y sommes déjà retourné Salle Pleyel, c’est vous dire notre enthousiasme !

Nous serions bien contentes de vous voir. Faut-il que je fasse une note pour le numéro d’août, et sur quoi ? La droite et la gauche m’épouvantent. Avez-vous vu Walter Benjamin ?

Bien affectueusement à vous deux

Adrienne

[De la main de Paulhan, à gauche de la lettre]

J'aimerais bien des petites notes s.[sur] la vie littéraire, ses relations, les gens qu’elle voit etc. (enfin ce qu’elle sait le mieux).

Adrienne Monnier à Jean Paulhan (04 juillet 1934) §

IMEC, fonds PLH, boîte 171, dossier 095692 – 04 juillet 1934.
Chère Amie,

Voici ma note. Je n’ai pas fait la Droite et la Gauche, dont je serais difficilement sortie, mais seulement la Swastika. J'ai tâché de prendre un ton plus familier, plus « gazette », est-ce que ça peut aller ?

J'étais bien contente, l’autre jour, de causer avec vous. Nous disions le soir avec Sylvia que vous étiez vraiment une femme tout à fait épatante, tout à fait gentille. On devrait vous voir plus.

Bien affectueusement à vous deux.

Adrienne.

Adrienne Monnier à Jean Paulhan (04 septembre 1934) §

IMEC, fonds PLH, boîte 171, dossier 095692 – 04 septembre 1934.
Cher Ami,

Je rentre de vacances et trouve vos deux lettres. Cette idée de revue me surprend beaucoup. Il me faudrait des précisions. En principe, je ne dis pas non. Quand rentrez-vous à Paris ?

Vous avez été malade. Quel ennui ! Êtes-vous bien rétabli ?

Sylvia et moi avons passé un mois en Savoie, dans nos chers Déserts. Le temps n’étais pas très beau, mais il aurait pu être pire.

Vous me dites que vous avez travaillé, achevé « La Littérature considérée comme un langage chiffré ». Ça, c’est une bonne nouvelle. Je suis bien contente.

Moi, je n’ai rien fait, même pas lu. Je n’avais rien promis pour L'Air du mois ; nous avions parlé très vaguement, Germaine et moi.

Je vous remercie de tout cœur de votre lettre. Bonne santé.

Sylvia et moi vous embrassons tous deux.

AM.

Ah ! Si vous faites une revue, ne donnez pas le 1er n° en décembre 1934, mais plutôt en janvier 1935. - 34 n’est pas bon (vous me croyez aisément, n’est-ce pas?) et 35 est plus favorable.

Adrienne Monnier à Jean Paulhan (03 octobre 1934) §

IMEC, fonds PLH, boîte 171, dossier 095692 – 03 octobre 1934.
Cher Ami,

Je vais tâcher de faire une note sur le poème de Terrace et de vous l’envoyer avant le 10. Je suis bien contente que vous me le demandiez.

Quelle journée agréable nous avons eu chez vous ! C'était remarquablement agréable. Les Church sont si gentils, si fins, ils ont tous deux une personnalité vraiment profonde et attachante. Et nous avons beaucoup aimé, aussi, la femme de Groethuysen. Quant à votre Germaine, c’est un trésor, oui, un trésor.

On vous envoie de grandes amitiés,

AM.

Je n’ai pas encore retrouvé la page de Dorothy Richardson sur la Ponctuation dont nous avons parlé ; Sylvia se souvient qu’elle a prêté le n° de revue où elle figurait ; elle va tâcher de se le faire rendre.

Adrienne Monnier à Jean Paulhan (07 novembre 1934) §

IMEC, fonds PLH, boîte 171, dossier 095692 – 07 novembre 1934.

[En rouge, de la main de Jean Paulhan]

urgent

[Au crayon à papier, de la main de la Jean Paulhan]

Adrienne Monnier

Chère Germaine,

Voici la lettre que Sylvia a reçu du neveu de Gerard Manley Hopkins ; vous serez gentille de nous la rendre après en avoir pris connaissance. Les épreuves des Lettres ne sont pas encore arrivées ; nous vous les enverrons dès que nous les aurons.

Nous n’avons pas encore pu rentrer en possession du n° de The Adelphi qui contient l’essai de Dorothy Richardson sur la Ponctuation. Sylvia a écrit à Londres à ce sujet.

Je ne vous envoie pas ma note sur Alice puisque vous avez suggéré qu’il serait mieux d’attendre la publication dans la N.R.F. des Lettres de Lewis Carroll traduites en français. D'ailleurs, la note sur Le Soldat n’a pas encore paru !

J'ai bien réfléchi à la Gazette. En définitive, non.

Il m’est venu aussi bien des scrupules au sujet de mes fonctions d’administrateur de Lettres. Suis-je vraiment qualifiée ? Il serait encore temps de trouver quelqu’un d’autre.

Affectueusement à vous deux,

Adrienne

Adrienne Monnier à Jean Paulhan (12 septembre 1935) §

IMEC, fonds PLH, boîte 171, dossier 095692 – 12 septembre 1935.
Chère Germaine,

Oui, nous voilà rentrés, avec beaucoup de travail, mais pas trop, heureusement.

Que nous sommes navrées d’apprendre que vous vous êtes blessée au pied ! Immobilisée ! Il faut espérer que vous serez bientôt tout à fait guéri.

Le sommaire du n°IV de Mesures me paraît très intéressant. N'y aura-t-il pas aussi une nouvelle de Church ? J'en ai reçu les épreuves en placard ; je l’ai lue avec beaucoup d’intérêt ; il y a une idée profonde à la base ; je regrette qu’il l’ait développée, ou plutôt non, il ne l’a pas développée, il l’a exposée au cours d’une action dramatique et fantastique ; j’aurais préféré que l’essai philosophique prit mieux le dessus. C'était très bien cette idée du primitif dont le classique n’est qu’un affaiblissement. J'ai beaucoup réfléchi moi-même au primitif. J'ai été vraiment intéressée.

Chère Germaine, je n’ai rien fait pour L'Air du mois. Et je ne ferai rien, naturellement, car maintenant, il est trop tard. Ce sera pour le mois prochain. Vous me direz ce qu’il faut faire, j’aime mieux être dirigée.

Et nous n’avons pas traduit de nouvelle de K.A. Porter. On a bien essayé, mais ça rendait peu en français. À vrai dire, j’ai horreur de faire des traductions.

Par contre, j’ai fait un Sollier auquel je pensais depuis longtemps : Chien. Je vous le montrerai quand vous serez de retour.

Je vais écrire à l’Agence Franklin, mais [fin de la lettre manquante]

Adrienne Monnier à Jean Paulhan (1935) §

IMEC, fonds PLH, boîte 171, dossier 095692 – 1935.

Adrienne Monnier

Lettre à Jean Paulhan

1935

Fonds Jean Paulhan/IMEC

 

La libraire de la Maison des Amis du Livre est la dépositaire et la gérante de Mesures ; se préoccupant ici de la diffusion de la revue à l’étranger, elle remarque : « Mesures ne va pas mal du tout par ce temps de crise. Nous avons actuellement 268 abonnés. […] Je crois, qu’au sommaire du n°IV, il faudrait, en tête, une grande vedette, pour amorcer les réabonnements. »

Adrienne Monnier à Jean Paulhan (1935) §

IMEC, fonds PLH, boîte 171, dossier 095692 – 1935.

je ne crois pas que nous obtenions de ce côté un bon résultat. Ils vous ont demandé la distribution de la Nouvelle Revue Française, à cause de son immense notoriété, mais ils ne semblent guère compétents. Avez-vous compris la lettre qu’ils vous ont envoyée ? Nous avons bien ri, Sylvia et moi. En lisant le prospectus, ils ont pensé que le prix de l’abonnement était de 290fr pour le Japon et 240fr pour la Hollande. Ils ont du trouver ça inouï de faire des prix spéciaux pour ces deux pays, car ils n’ont pas compris qu’il s’agissait de papiers. - Et ils demandent le prix pour les États-Unis. C'est magnifique.

Vous savez que je leur avais envoyé un n°I par poste, en même temps que ma lettre, pour qu’ils puissent se rendre compte de la publication. Et ce n°, ils l’ont reçu, mais personne chez eux ne sait lire le français.

Je vous avais dit, n’est-ce pas, que Sylvia avait écrit à une libraire de New York très à la page. Ils lui ont répondu qu’ils accepteraient « avec plaisir » de vous servir d’agent, à condition d’avoir une remise de 50%. C'est gentil !

Mesures ne va pas mal du tout par ce temps de crise. Nous avons actuellement 268 abonnés. Les recettes de juillet ont été de : 2.800fr et celles d’août : 968fr.

Je crois, qu’au sommaire du n°IV, il faudrait, en tête, une grande vedette, pour amorcer les réabonnements. À moins de leur faire un prospectus avec un programme sensationnel pour 1936. Qu'en pensez-vous ?

On vous embrasse bien tous les deux et on forme de grands vœux pour votre complet rétablissement.

Adrienne

Adrienne Monnier à Jean Paulhan (02 janvier 1936) §

IMEC, fonds PLH, boîte 171, dossier 095692 – 02 janvier 1936.
Chère Germaine,

Pourquoi nous avoir ainsi gâtés ? Ce n’est pas raisonnable.

Nous aussi nous vous envoyons nos vœux les plus affectueux et les plus sincères. Bonne année, bonne santé et toutes les prospérités possibles.

Je crois que je ne pourrai rien vous donner pour L'Air du mois. Cette fois-ci je ne peux pas faire mon Noël-Noël parce qu’on ne tourne plus « Ademaï au Moyen-Âge » ; il faut que j’attende qu’on le passe dans les cinémas de quartier. Je ne peux pas, non plus, faire mon Bach qui demande une longue préparation, surtout au point de vue TSF. D'ailleurs je serai bien contente de n’avoir pas ce travail-là ce mois-ci, j’ai tant, tant d’ouvrage.

Merci, chère Germaine, de toutes vos bontés. Nous aussi, on vous aime bien et on est bien contentes de travailler avec vous.

Sylvia et moi vous embrassons tous deux de tout notre cœur.

Votre

Adrienne

Il y a, ces derniers temps, 26 réabonnements. 6 personnes ont cessé leur abonnement. Les autres n’ont pas encore répondu.

Borel et [Ardant?] ont renouvelé leur abonnement sur hollande. Mon amie inconnue m’a envoyé des sous. Mais n’a pas encore renouvelé son abonnement.

[à gauche de la lettre]

La N.R.F. était fermée hier ; on n’a pu vous remettre cette lettre. J'ai reçu ce matin le renouvellement de l’abt [abonnement] sur japon de Mr. France Bertrand.

Adrienne Monnier à Jean Paulhan (30 janvier 1936) §

IMEC, fonds PLH, boîte 171, dossier 095692 – 30 janvier 1936.
Chère Germaine,

J'espère que votre grippe va vite s’en aller et que vous serez des nôtres samedi.

J'ai été hier à l’A.B.C. Ce n’était pas épatant. Je ne sais pas trop ce que je vais pouvoir raconter.

Nous avons gardé un souvenir ravissant de notre journée de dimanche. C'était si rigolo de ne pas se parler avec Fargue.

Portez-vous bien, chère Germaine. On vous embrasse de tout notre cœur.

Votre

Adrienne

J'écris à M. Church pour lui dire que je n’ai pas de [mot illisible] papier du Journal de Jules Renard. C'est bien de l’édition N.R.F. qu’il s’agit. Je crois qu’on peut encore trouver l’édition Bernonard, en 5 vol., à 200fr.

Adrienne Monnier à Jean Paulhan (21 février 1936) §

IMEC, fonds PLH, boîte 171, dossier 095692 – 21 février 1936.
Chère Germaine,

Merci de votre lettre et de celle de Paulhan. Non, ce n’est pas vous la coupable, c’est Paulhan ; cette idée que j’avais promis une Marie Dubas m’avait beaucoup contrariée. Il y a peu de choses, à mes yeux, aussi graves que de ne pas tenir ses promesses.

Maintenant, pour faire plaisir à Paulhan, je veux bien vous dire mes griefs d’auteur.

- 1°. Mon travail de la N.R.F est un peu trop mis en cave. Vous n’avez même pas mentionné mon nom, dans vos publicités de fin d’année, parmi ceux des chroniqueurs de la revue. Il me semble qu’après un travail aussi régulier et aussi « soigné » que celui que j’avais fourni, je devais au moins être mentionné parmi les acteurs de la troupe. Il est vrai que vous me faites une grande réclame en tant qu’administratrice, mais l’un ne remplace pas l’autre, loin de là !

- 2°. C'est pas assez payé. Les notes sur les spectacles entraînent pas mal de faux frais même avec des billets de faveur. La N.R.F. devrait donner au moins 100fr pour un compte-rendu de spectacle, et quand je dis 100fr, je suis ignoblement modeste.

Chère Germaine, je vous dis tout cela pas pour vous faire de reproches, mais seulement parce que c’est plus sain de dire son sentiment.

Je vous embrasse bien tous les deux,

Adrienne.

Adrienne Monnier à Jean Paulhan (11 mars 1936) §

IMEC, fonds PLH, boîte 171, dossier 095692 – 11 mars 1936.
Chère Germaine,

Pardonnez-moi de ne pas vous avoir écrit plus tôt. J'ai travaillé quatre jours sur mon Ignace ; j’ai cru que je n’en sortirais jamais. Je m’étais embarquée dans un Sébasto que j’ai laissé en plan ; je pensais, d’abord, faire, sous le titre Ignace, un petit Sébasto à ma manière, mais il m’aurait fallu quinze jours.

J'ai été au châtelet. Très bon spectacle. Je vous ferai un Bach pour le mois prochain. À son sujet, il faudra que je pioche un peu la question disques et T.S.F.

Voici aussi un répertoire des abonnés de Mesures pour Barbara Church. Je préfère vous l’envoyer à vous d’abord. Comme vous le voyez, nous avons, actuellement, 197 abonnés, dont 32 nouveaux ; nous avions en octobre dernier 282 abonnés, ce qui indique donc 117 désabonnements. Les affaires sont si mauvaises ! Et les évènements n’arrangent rien.

Dites à Paulhan que je vais lui écrire bientôt.

Bien affectueusement à vous deux

votre

Adrienne

Adrienne Monnier à Jean Paulhan (26 mai 1936) §

IMEC, fonds PLH, boîte 171, dossier 095692 – 26 mai 1936.
Chère Amie,

J'ai téléphoné hier à la N.R.F. et on m’a dit que n’étiez pas là. Je reçois votre mot ce matin.

J'ai eu la vraie grippe et j’en sors seulement. Oui, on pourrait faire une séance de « jeune » le 17 ou le 241. Il ne faut la faire un samedi parce que, maintenant, les gens partent beaucoup pour le week end.

Il faut appeler la séance « Métamorphoses ». J'y tiens beaucoup. Est-ce que Paulhan a pensé à la « présentation ». Il n’a pas besoin de faire long, mais quelques mots sont nécessaires2. Je ne lui poserai pas de question. Les Fleurs de Tarbes répondent très bien, en effet, à toutes les questions possibles, bien que d’une manière un peu trop hermétique. Je crois qu’il aurait intérêt à faire ressortir plus bonnement que son jugement se base sur une certaine exigence de génialité, et il n’y a plus, alors, qu’à définir le génie, ce qui est l’enfance de l’art.

Ni Sollier ni Monnier ne figureront autrement qu’en assistant.

Je crois ça peut faire une séance « étourdissante ».

Paulhan a fait énormément de conquêtes lors de sa lecture. D'une façon générale, on lui a reconnu un sex-appeal n°1 ; on l’a compris.

Bien affectueusement à vous deux,

Adrienne.

Adrienne Monnier à Jean Paulhan (07 juillet 1936) §

IMEC, fonds PLH, boîte 171, dossier 095692 – 07 juillet 1936.
Cher Ami,

Oui, c’était merveilleux mercredi et tout le monde était ravi, mais on s’est plaint que vous n’ayez rien lu. Seul [Pelorson?] a été jugé plutôt sévèrement* et encore s’est-il trouvé une bonne âme (Philippe Fontaine) pour trouver que ce n’était pas si mauvais que ça. - Même Clot a trouvé amateurs + un admirateur enthousiaste en la personne de M. Coche de La Ferté ([mot illisible]) qui a déclaré que c’était ce qu’il y avait de mieux.

Les triomphateurs ont été Calet et Supervielle. Supervielle a été adoré. Il faudrait lui demander une séance à lui seul.

Je suis bien contente que mon [mot illisible] paraisse dans Mesures. Merci.

Quand partez-vous ? Je peux partir le 20, avant si possible.

J'ai envoyé, il y a une semaine, les étiquettes à Paillart.

J'ai lu les deux récits primés. Ils sont tous deux extrêmement jolis. Le premier a des vides charmants, comme les tableaux de Marie Laurencin. Je crois bien que Dominique Rolin est une jeune fille (cette nièce de Judith Cladel qui était venue me faire visite). Comme on m’attribue Mesures, on va voir là le fruit de mon féminisme « ardent ».

Je vous embrasse bien tous les deux.

AM.

Je vous envoie une traduction. L'auteur : Mme de Bellefonds est une amie des Valéry. Peut-être pourrez-vous lui marquer un peu d’égards en lui envoyant un mot. Elle m’a demandé de la recommander à vous.