1686

Mercure galant, Troisième partie du voyage des ambassadeurs de Siam, décembre 1686 (seconde partie) [tome 18].

2017
Source : Mercure galant, Troisième partie du voyage des ambassadeurs de Siam, décembre 1686 (seconde partie) [tome 18].
Ont participé à cette édition électronique : Nathalie Berton-Blivet (Responsable éditorial), Anne Piéjus (Responsable éditorial), Frédéric Glorieux (Informatique éditoriale) et Vincent Jolivet (Informatique éditoriale).

Mercure galant, Troisième partie du voyage des ambassadeurs de Siam, décembre 1686 (seconde partie) [tome 18]. §

[Ce qui s'est passé à Montloüis le jour qu'ils y ont esté regalez par les Jesuites] §

Mercure galant, Troisième partie du voyage des ambassadeurs de Siam, décembre 1686 (seconde partie) [tome 18], p. 59-60

[...] Le lendemain ils [les ambassadeurs] allerent accompagnez des Mandarins à la Maison des Peres Jesuïtes, dite Montloüis, située sur une hauteur au de-là du Faubourg S. Antoine ; & aprés s'y estre promenez pendant quelque temps, on leur servit un dîner si bien entendu & si magnifique, qu'ils dirent que l'on ne pouvoit traiter avec plus de magnificence & de propreté. Le R. Pere de la Chaise, Confesseur du Roy, faisoit les honneurs de la Maison. Il y eur un Concert de Voix & d'Instrumens pendant le repas. [...]

[Ils vont entendre les Orgues à S. Mederic] §

Mercure galant, Troisième partie du voyage des ambassadeurs de Siam, décembre 1686 (seconde partie) [tome 18], p. 62-63

 

Les Ambassadeurs en s'en retournant entrerent dans S. Mederic, pour entendre les Orgues de cette Eglise, qui ont la reputation d'estre aussi bonnes que l'Organiste est habile. Elles leur donnerent beaucoup de plaisirs, mais ils y en auroient encore pris d'avantage, sans la foule extraordinaire de peuple qui s'y rencontra.

[On trouvera une Description Historique de toutes les Places, dont les noms suivent avec un détail des honneurs que les Ambassadeurs y ont receus, & de tout ce qu'ils y ont vû, fait & dit, qu'on n'a pas jugé à propos de repeter à chaque article de Ville] §

Mercure galant, Troisième partie du voyage des ambassadeurs de Siam, décembre 1686 (seconde partie) [tome 18], p. 126, 141-142, 174, 180-181, 191-192, 203-206, 225-226, 252-253, 266-267, 286-288, 290-291, 293

 

[Les Ambassadeurs quittèrent la France pour rejoindre les Flandres. La fin du volume est consacrée à la description de l'accueil qui leur fut reservé dans chacune des villes qu'ils visitèrent.]

 

Amiens

[...] Les Bourgeois, qui comme je viens de vous marquer estoient sous les Armes, conduisirent les Ambassadeurs Tambour battant jusqu'à la porte du lieu qui avoit esté destiné pour leur logement.

 

Arras

[...] [Lors de leur entrée dans la ville] Pendant ce temps le carillon de la Ville se faisoit entendre, & l'on sonna une Cloche appellée Joyeuse, parce qu'on ne la sonne jamais que pour les sujets de réjoüissances. [...]

 

Ils prirent beaucoup de plaisir à entendre les Orgues de cette Cathedrale, qui sont fort bonnes; & sortirent de cette Eglise aprés avoir fait de nouveaux remercîmens au Prevost & aux Chanoines. Apres cela ils allerent au Magasin d'Armes, qu'ils trouverent en trés-bon état. [...]

 

Au sortir de l'Abbaye de Saint Vaast, ils allerent au Concert dont on leur avoit parlé le matin, & dont Madame de Préfontaine, femme du President du Conseil d'Artois, faisoit les honneurs. Elle les reçût accompagnées des principales Dames de la Ville. Les Musiciens estoient dans une fort grande Salle, dans laquelle il se trouva une grande affluence de monde, quelque ordre qu'on eût apporté pour empêcher la foule. Ils furent fort satisfaits de ce Concert, & le témoignerent à Madame de Préfontaine, en luy faisant leurs remerciemens. Ils retournerent ensuite chez eux, où ils trouverent leur Garde sous les Armes; car on avoit mis à la porte de leur Logement une Compagnie Suisse, avec un Capitaine & un Lieutenant. Elle sortoit du Corps de garde pour se mettre en haye quand les Ambassadeurs devoient sortir, & battoit lorsqu'ils sortoient & qu'ils rentroient.[...]

 

Béthune

[...] Ils arresterent le soir Mr de Chanterene [Lieutenant Colonel d'Infanterie] à souper, avec le Capitaine qui commandoit la Garde devant leur logis. Mr de Chanterene fit venir des Violons, qui joüèrent pendant tout le Repas. [...]

 

S. Omer

[...] Le concours des Dames fut grand le soir à leur soupé. La Ville envoya des Violons qui joüerent pendant tout le Repas, & il y eût Bal si tost que l'on fut sorty de table. Mr l'Evêque de S. Omer les vint voir le lendemain accompagné de Mr l'Evêque d'Ipres. Ils furent ravis de l'honneur qu'ils recevoient de la visite d'un homme de ce caractere. Ils eurent aussi quantité de visites des principales personnes de la Ville. On leur proposa d'aller voir l'Eglise Cathedrale. L'Ambassadeur demanda si elle estoit belle. On luy repondit que c'estoit une Eglise ancienne qui n'avoit rien d'extraordinaire. Il s'informa si Mr l'Evêque y seroit. Mr Torf luy repondit qu'il ne manqueroit assurement pas de s'y trouver, s'il estoit assuré qu'il y dût aller. Je veux bien aller, répondit l'Ambassadeur, & si Mr l'Evêque s'y trouve, l'Eglise me paroistra belle. Il y alla, & y fut receu par tout le Clergé en Corps, & par ce Prelat. On fit voir aux Ambassadeurs ce que cette Eglise contenoit de plus digne de leur curiosité. Ils allerent aussi à la fameuse Abbaye de S. Bertin, où le Prieur leur fit compliment. La grandeur de ce Monastere les surprit. C'est un de plus vastes Bâtimens qu'on puisse voir de cette nature. Ils firent le mesme jour le tour de la Place, & virent les Arcenaux; & comme ils trouverent par tout des Ouvriers, & de nouveaux travaux, on peut dire que leur surprise redoubla par tout. Mr Raouffet leur donna un dîner fort magnifique, où il y avoit plusieurs Dames; ils furent tellement satisfaits de luy qu'ils luy firent mille protestations d'amitié. Les Jésuites leur donnerent une collation où la propreté répondit à l'abondance de tout ce qui y fut servy : elle fut accompagnée d'un grand Concert d'Instrumens. [...]

 

Dunkerque

[...] Comme on leur avoit donné les Violons, ce qui continua tant qu'ils séjournerent à Dunkerque, ils avoient mandé les noms de plusieurs Airs, & même la raison des noms qu'on leur avoit dits. La Folie d'Espagne s'estant trouvée de ce nombre, il ne se rencontra personne qui leur pût apprendre pourquoy cét Air eu ce nom : ce qui fut cause que Mr Megron leur ayant demandé l'Ordre, ils dirent la Folie d'Espagne. Mr Tors leur demanda, pourquoy ils donnoient ce mot. Ils répondirent, qu'ils avoient peut-estre plus de raison de le donner, que le Musicien n'en avoit eu de nommer Folie un Air qui paroissoit très beau, puisque c'en estoit une très grande que d'avoir laissé prendre une Ville comme Dunkerque. [...]

 

Lille

[...] Mrs du Magistrat leur donnerent la Comedie dans l'Hôtel de Ville, aprés quoy ils passerent dans une grande Salle, où il y avoit un fort beau Concert de Voix, & d'instrumens qui dura une heure & demie. [...]

 

[Ils] allèrent souper chez Mr de la Rabliere, qui les avoit invités. Ce Repas fut d'une tres-grande magnificence, & accompagné d'une Simphonie, composée d'un fort grand nombre d'Instrumens, on y but les Santés de l'Alliance Royales, & l'on recommença plusieurs fois celle du Roy. Il y eût un grand Bal apres le soupé, où Mlle Despierre se fit admirer. On m'a assuré qu'elle est de la force de tout ce qu'il y a de personnes en France qui dansent le mieux. Les Ambassadeurs ne s'en retournerent qu'aprés minuit. [...]

 

Tournay

[...] Ce n'est pas à moy à raisonner sur ces mots, & je n'en dois rien dire, sinon qu'ils furent fort applaudis. On joüa une Piece Comique; mais afin de faire voir de beaux Habits aux Ambassadeurs, Mr le Comte de Maulevrier ordonna aux Comediens de se vestir à la Romaine; ce qui réüssit fort bien. Aprés la Comedie, ce Comte les fit mener dans les Carosses sur l'Esplanade, où il leur avoit fait preparer quatre mortiers, pour leur faire voir l'effet de deux Bombes, d'un Boulet rouge, & d'une Carcasse. Ils admirerent ces machines, & en raisonnerent fort particulierement, se faisant instruire de tout, & mesme des moindres choses. Ils monterent sur la muraille, & virent jetter les bombes dans la Campagne avec beaucoup d'admiration. Mr le Comte de Maulevrier les conduisit ensuite dans sa maison, dont ils trouverent le devant de la porte & la Cour fort illuminez. Il les fit monter dans l'Appartement de Madame la Comtesse de Medavy & plusieurs Dames. En attendant l'heure du soupé, on leur donna le divertissement d'un Concert de musique, composé de tres-belles voix, d'une viole & de quelques flutes douces. Ce Concert fut trouvé bien executé & de bon goût. [...]

 

Pendant le soupé, on leur donna le divertissement d'un autre Concert composé de voix, de hautbois, & de violons. Mr de Maulevrier but à leurs Santez, & ils luy firent raison chacun en particulier avec toute l'honnesteté imaginable. Il beut ensuite à l'Alliance des deux Couronnes, & lorsque les Ambassadeurs y burrent aussi, on entendit une décharge de quantité de Boëttes. Elle fut suivie presque aussi-tôt d'un grand bruit de Timbales & de Trompettes qui continua jusqu'à ce que les Ambassadeurs bussent à la Santé du Roy de France. Pendant que Mr le Comte de Maulevrier leur en fit raison, une autre décharge de boëttes se fit entendre, & le bruit des Timballes & des Trompettes recommença. On but ensuite à la Santé du puissant Roy de Siam, & pendant ce temps, la mesme quantité de boëttes, de Timballes, & de Trompettes fit encore le même bruit. Il continua lorsque Mr le Comte de Maulevrier but à leur bon Voyage. [...]

 

[Après le repas, le comte de Maulevrier les invita au jardin où l'on donnait un feu d'artifice.] Ils rentèrent dans la Sale où ils trouverent les Dames rangées, & quantité de violons qui joüoient. Comme ils avoient sceu que Mr le Comte de Maulevrier leur vouloit donner le divertissement d'un Bal, ils prirent les places qui leur estoient préparées, & virent dancer pendant deux heures avec une joye qui faisoit connoître qu'ils estoient tres-satisfait de tous ces plaisirs ; après quoy ils prirent congé de Mr le Gouverneur.

[Représentation d’une comédie à Tournai]* §

Mercure galant, Troisième partie du voyage des ambassadeurs de Siam, décembre 1686 (seconde partie) [tome 18], p. 285-287

Comme ils en avoient le plan avec eux, ils se contenterent d'en voir une partie. Ils rentrerent par la Porte de Lille, & vinrent à la Comedie, où Madame la Comtesse de Maulevrier, & Madame la Comtesse de Medavy, les attendoient avec une vingtaine de Dames des mieux faites de la Ville. Ils y donnerent l’ordre à Mr de Jearny Major de la Ville, en ces mots : Je m’appuiray du bâton en combattant de l’épée. Ce Mot ainsi que le precedent, est appliqué à la personne de Mr le Comte de Maulevrier. Ce n’est pas à moy à raisonner sur ces mots, & je n’en dois rien dire, sinon qu’ils furent fort applaudis. On joüa une Piece Comique ; mais afin de faire voir de beaux Habits aux Ambassadeurs, Mr le Comte de Maulevrier ordonna aux Comediens de se vestir à la Romaine ; ce qui réüssit fort bien. Aprés la Comedie, ce Comte les fit mener dans ses Carrosses sur l’Esplanade, où il leur avoit fait preparer quatre Mortiers, pour leur faire voir l’effet de deux Bombes, d’un Boulet rouge, & d’une Carcasse.